Gideon Levy et Alex Levac (photos), Haaretz, 7/1/2022
Traduit
par Fausto Giudice, Tlaxcala
L'armée israélienne continue d'expulser les habitants de ce village de la vallée du Jourdain pour s'entraîner sur leurs terres
Le crépuscule tomba ; dans un instant, la vallée serait recouverte de ténèbres. L'espace d'un instant, la fumée blanche qui s'échappait du taboun s'est mêlée à la fumée noire dégorgée par le bulldozer. C'était une illusion d'optique : quelques dizaines de mètres séparaient le four du bulldozer blindé. Le pain cuisait dans le taboun, l’engin démolissait des champs de blé. Les scènes se fondaient dans une image surréaliste.
Des fermiers indigents vivant dans des conditions médiévales, sans eau courante et sans électricité, dans le froid de l'hiver de la vallée du Jourdain, regardaient tristement les machines de destruction qui avaient grondé dans leurs champs ce matin-là pour les ratiboiser. Ils avaient labouré et semé dans des conditions incroyables. Toutes les quelques semaines, les Forces de défense israéliennes se précipitaient pour démolir leurs tentes, confisquer leurs tracteurs et leurs voitures, briser les panneaux solaires et les conteneurs d'eau, et les expulser pendant un jour ou deux jusqu'à la fin du dernier exercice d'entraînement dans leurs champs.
Les agriculteurs étaient habitués à cela. Quel choix ont-ils ? Il n'y a pas de résistance ici, ils sont les plus faibles des faibles, leur seul espoir ici est d'extraire du pain de la bonne terre.
Mais ce qui s'est passé le lundi de cette semaine était quelque chose de nouveau pour eux. Des centaines de dounams de terre cultivée ont été écrasés sous les chenilles des tanks des forces de destruction israéliennes, les champs de blé sont devenus des terrains de manœuvres militaires, les sillons ont été aplatis, et le sol fertile est devenu un terrain d'entraînement. Cinq cents dounams (50ha), peut-être plus, de terre argileuse qui avaient été plantés et entretenus, d'où émergeaient déjà des bourgeons qui rendaient la terre verte, ont été réduits à l'état de terrain vague. La terre a été mise en tas pour servir de rampe aux chars.
Des bulldozers militaires rasent des champs de blé appartenant à des résidents d'Ibzik, cette semaine.