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20/07/2023

GIDEON LEVY
Les carottes, ça suffit : il est temps que les USA utilisent le bâton pour changer la politique israélienne

Gideon Levy, Haaretz, 20/7/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Il est difficile de savoir s’il faut pleurer ou rire en lisant les grandes lignes de la conversation d’une heure que Joe Biden a eue avec Thomas Friedman, du New York Times après avoir rencontré le président Isaac Herzog, résumées le mardi 18 juillet.


United States of Israel, par Emanuele Del Rosso

On peut pleurer sur l’impuissance et l’inutilité de la plus grande superpuissance du monde face à son protégé, Israël. On peut aussi rire des rôles inversés de la fourmi et de l’éléphant.

On peut crier que l’USAmérique n’a rien appris et n’a rien oublié de la seule façon de traiter Israël, si l’on veut vraiment l’influencer, et on peut se laisser aller à rire de la façon dont Israël continue à se moquer des USA.

Le résultat est le même : Israël peut continuer à faire tout ce qu’il veut, promulguer des lois antidémocratiques, mener des pogroms contre les Palestiniens et poursuivre l’apartheid - les USA ne bougeront pas le petit doigt.

Même lorsque Washington grogne, s’emporte, fulmine, condamne et retarde même l’invitation du premier ministre - la plus terrible des armes apocalyptiques - Israël n’a pas à le prendre au sérieux. L’USAmérique parle mais ne tire jamais. Si elle veut un jour influencer Israël, ce qui n’est pas encore le cas, elle devra commencer à tirer, comme le dit l’adage usaméricain.

Le terrible Biden, qui n’invite pas notre Netanyahou, malgré toutes les souffrances du peuple juif, “plaide” auprès d’Israël. Plaide. Friedman a pu écrire que Biden a transmis un message clair selon lequel la législation [sur la réforme judiciaire] doit cesser, mais ce message est creux, comme la plupart de ceux qui l’ont précédé.

Au fil des ans, Israël a appris à ignorer ces messages. Rien de grave ne lui est arrivé. Cela ne peut que signifier que le plaideur lui-même ne souhaite pas vraiment voir la partie qu’il implore changer de comportement. Biden ne fait que des beaux discours sur la démocratie israélienne et ne dit pas un mot sur ce que son pays fera si Israël ne tient pas compte de son appel.

20/04/2023

ABDEL BARI ATWAN
La guerre par procuration au Soudan

Abdel Bari Atwan, Rai Al Youm, 18/4/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Une nouvelle calamité montée de toutes pièces par les USA et Israël avec la complicité des régimes arabes

Dagalo, à g., et Al Burhan

Alors que la guerre au Yémen s’achève ou commence à s’achever, une nouvelle guerre est déclenchée au Soudan. Ces deux conflits, qui se déroulent de part et d’autre de la mer Rouge, ont en commun d’être en grande partie des guerres par procuration, dans lesquelles l’intervention extérieure (en particulier celle des pétromonarchies du Golfe) joue un rôle majeur.

C’est vers l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis que le secrétaire d’État usaméricain Anthony Blinken s’est tourné pour les exhorter à redoubler d’efforts afin de rétablir le calme et de mettre un terme à la guerre qui a éclaté samedi entre les deux grands alliés : Le général Abdelfattah Al Burhan et son adjoint le général Mohamed Hamdan Dagalo (alias Hemedti, “Petit Mohamed”). Ce dernier a atteint son grade élevé sans avoir fréquenté aucune académie militaire ou civile, mais grâce à sa direction des Forces de soutien rapide (FSR, milice), fortes de 100 000 hommes - notoirement connues pour leurs meurtres et leur répression (au Darfour) - et à l’acquisition de vastes quantités d’or volé.


Tjeerd Royaards

Plusieurs indices ont mis en évidence les allégeances des parties qui se battent pour le pouvoir au Soudan et l’identité de leurs soutiens extérieurs.

Tout d’abord, l’attaque par les FSR du personnel égyptien stationné à la base militaire de Merowe, dont beaucoup ont été capturés, implique que l’Égypte est accusée de soutenir Burhan et l’armée régulière qu’il commande.

Deuxièmement, les liens étroits entre Hemedti, qui contrôle le commerce de l’or et les mines du Soudan, et le groupe russe Wagner. Les USA ont fait pression sur Burhan pour qu’il expulse le groupe au motif qu’il est un partenaire dans l’extraction et la vente de cet or et qu’il utilise les recettes pour financer la guerre de la Russie en Ukraine, qu’il est le fer de lance de l’influence russe en Afrique et qu’il prépare le terrain pour l’établissement d’une base militaire russe au Soudan.

Direction les Émirats - Omar Dafalla
 
Troisièmement, les Émirats arabes unis sont devenus le plus gros investisseur extérieur au Soudan. Il y a quelques jours, ils ont acheté pour 1,5 milliard de dollars d’or soudanais, que Hemedti contrôle, ainsi que des millions d’hectares de terres agricoles. Les deux parties sont manifestement très proches. Le FSR de Hemedti a combattu aux côtés des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite dans la guerre au Yémen, en y envoyant des milliers de ses combattants.

Quatrièmement, la position saoudienne reste floue et hésite entre les deux parties. Le fait que les liens de l’Arabie saoudite soient tendus avec l’Égypte et les Émirats arabes unis, qui sont les principaux soutiens des deux camps rivaux, complique la situation. Les Émirats arabes unis ont envoyé un conseiller présidentiel, plutôt que leur ministre des Affaires étrangères, à la récente conférence ministérielle de Djeddah sur la Syrie, convoquée par le prince héritier saoudien Mohamed Ben Salman. Les relations avec l’Égypte ne sont pas non plus au beau fixe. Le président Abdelfattah Al Sissi n’a pas réussi, lors de sa brève visite de Ramadan à Djeddah, à obtenir le paquet rapide d’aide financière qu’il recherchait. Faisant preuve d’une neutralité affichée, l’Arabie saoudite a exhorté Hemedti et Burhan à se rencontrer à Riyad pour négocier la fin de leur guerre.



Hemedti (le serpent) face à Burhan avec son projet de "Damj" (la fusion des FSR dans l'armée officielle) -Omar Dafalla

Sur le papier, l’armée régulière soudanaise se classe au 75e rang mondial, avec 205 000 hommes, 191 avions de guerre (vieillissants) et 170 chars d’assaut. En théorie, cela signifie qu’elle a le dessus et qu’elle a plus de chances de vaincre les forces rebelles de Hemedti. Mais cela est loin d’être acquis, compte tenu de l’intervention extérieure croissante.

Cette guerre ne peut se terminer que si l’une des parties bat et écrase l’autre, et non par une médiation ou des appels éloquents à un arrêt immédiat. Tout indique qu’elle pourrait se prolonger et se transformer en une guerre civile ou interrégionale qui entraînerait une anarchie armée dans le pays.

Si la guerre du Yémen, qui devait être réglée en trois mois, a duré huit ans, et la guerre civile libanaise quinze ans, combien de temps pourrait durer une guerre civile soudanaise si elle était déclenchée ?

Ce serait une perspective terrible. Les combats ont déjà fait 200 morts et des centaines de blessés, dont de nombreux civils. Il faut espérer qu’un cessez-le-feu sera rapidement conclu*. Mais l’inquiétude et le pessimisme sont justifiés par l’ingérence des acteurs extérieurs qui ont contribué à déclencher cette guerre et qui continuent à jeter de l’huile sur le feu, ainsi que par l’aggravation des querelles entre eux.

Le seul point positif parmi les rapports contradictoires sur le déroulement de la guerre est que le bon peuple soudanais ne soutient aucun des deux camps. Ils les tiennent tous deux pour responsables de l’effondrement économique, de l’insécurité, de la faim croissante (un tiers des Soudanais se trouvent sous le seuil de la faim selon le Programme alimentaire mondial) et, surtout, de l’échec de l’accord visant à transférer le pouvoir aux groupes civils qui ont mené à bien la révolution contre le régime militaire et ses coups d’État en série.

Le Soudan est victime d’une grande machination qui peut déboucher sur n’importe quelle issue, y compris la partition ou la guerre civile. L’establishment militaire est sans conteste le principal responsable de cette calamité. Les luttes de pouvoir entre les généraux et les commandants sont motivées par des raisons purement égoïstes, sans tenir compte de l’unité territoriale du pays ni des intérêts et du bien-être de sa population.


La "tatbia" (normalisation des relations avec Israël) - Omar Dafalla

C’est ce qui résulte de la normalisation et de la grande escroquerie usaméricaine qui a promis au peuple soudanais la prospérité et la générosité si Burhan serrait la main de Benjamin Netanyahou et si Hemedti se prosternait devant Tel-Aviv et considérait Israël comme un État ami qui résoudra tous les problèmes du Soudan.

En bref, nous assistons à un nouveau désastre majeur concocté par les USA et Israël avec la complicité, volontaire ou involontaire, des régimes arabes.

 NdT

*Un cessez-le-feu humanitaire de 24 heures du 19 au 20 avril, conclu sous les auspices du Triple Mécanisme (ONU-UA-IGAD) n'a tenu que quelques heures. Antonio Guterres vient d'appeler les parties au conflit à un cessez-le-feu de 3 jours à l'occasion de l'Aïd El Fitr.

26/09/2022

RAMZY BAROUD
D’Exodus à Marvel : brève histoire de la justification des crimes de guerre israéliens par Hollywood

Ramzy Baroud, Middle East Monitor, 24/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

L'introduction d'une agente du Mossad israélien comme personnage du prochain film de Marvel dépasse les bornes, même du point de vue des normes morales médiocres d'Hollywood. Cependant, la super-héroïne israélienne, Sabra, doit être comprise dans le contexte de la progression logique de l'israélisation d'Hollywood, un phénomène étonnamment nouveau.

Sabra est un personnage relativement ancien, datant du comic Marvel The Incredible Hulk en 1980. Le 10 septembre, cependant, il a été annoncé que le personnage israélien serait inclus dans un prochain film de Marvel, Captain America : New World Order.

                                                 La nouvelle Sabra de Marvel...

  ...sera interprétée par l’actrice israélienne Shira Haas (Shtisel, Unorthodox) dans le film prévu pour 2024

Comme on pouvait s’y attendre, de nombreux militants pro-palestiniens aux USA et dans le monde sont furax. C'est une chose d'introduire un personnage israélien ordinaire dans le seul but de normaliser Israël, un État d'apartheid implacable, aux yeux du jeune public impressionnable de Marvel. Mais il est beaucoup plus sinistre de normaliser une agence de renseignement d'État, le Mossad, connue pour ses nombreux assassinats sanglants, sabotages et tortures.

En ajoutant Sabra à son casting de super-héros, Marvel Studios a montré son mépris total pour la campagne massive menée par des millions de fans à travers le monde qui, en 2017, ont protesté contre l'inclusion de l'ancienne soldate israélienne Gal Gadot en tant que Wonder Woman de Marvel. Gadot est une fervente partisane du gouvernement et de l'armée israéliens.

En réponse à cette info, beaucoup de personnes ont souligné à juste titre le parti pris inhérent à Hollywood, à commencer par le film Exodus d'Otto Preminger dans les années 1960, avec Paul Newman comme acteur principal. Le film fournissait une justification pseudo-historique de la colonisation de la Palestine par les sionistes. Depuis, Israël a été élevé, célébré et inclus dans un contexte toujours positif par Hollywood, tandis que les musulmans, les Arabes et les Palestiniens continuent d'être vilipendés.

Bien qu'Israël ait été représenté de manière positive par des cinéastes hollywoodiens, les Israéliens eux-mêmes ont été assez marginaux dans le processus de création de contenu. Jusqu'à récemment, la construction israélienne était principalement fabriquée pour le compte d'Israël, et non par Israël lui-même. « Les choses ont commencé à changer en 1997 », a écrit Brian Schaefer dans Moment Magazine. C'est alors que la division du divertissement de la Fédération de Los Angeles et l'Agence juive ont lancé le projet, la Master Class, qui : « Pendant près de 15 ans... a amené d'innombrables acteurs, réalisateurs, producteurs, agents, gestionnaires et cadres supérieurs des studios et des réseaux en Israël, en introduisant beaucoup d'entre eux dans le pays pour la première fois, et a enseigné aux Israéliens comment présenter leurs projets. »

L'endoctrinement des acteurs et cinéastes usaméricains à travers ces visites et l'introduction de nombreux acteurs et cinéastes israéliens à Hollywood ont donné des dividendes, conduisant à un changement majeur dans le récit sur Israël. Au lieu de simplement communiquer Israël à des publics usaméricains et internationaux en utilisant des références à la victimisation historique, à l'association positive ou même à l'humour, les Israéliens ont commencé à faire valoir leur cause directement à Hollywood. Et, à la différence du caractère bordélique des messages passés – bon Israël, méchants Arabes – les nouveaux messages sont beaucoup plus sophistiqués, adaptés autour d'idées spécifiques et conçus en pleine conscience de la politique de chaque époque.

Le film de Steven Spielberg Munich (2005) est sorti dans le contexte culturel de l'invasion usaméricaine de l'Irak dans le cadre de la soi-disant « guerre contre le terrorisme » de Washington, où les droits humains ont été violés à l'échelle mondiale. Munich était un récit "historique" sélectif des choix soi-disant difficiles qu'Israël, à savoir le Mossad, devait faire pour mener sa propre “guerre contre le terrorisme”. C'était l'époque où Tel-Aviv soulignait inlassablement son affinité avec Washington, maintenant que les deux pays étaient prétendument victimes des « extrémistes islamiques ».

À la différence de Munich, la populaire série télévisée Homeland n'était pas seulement un argumentaire pro-israélien qui justifiait les guerres et la violence israéliennes. La série elle-même, l'une des émissions islamophobes les plus racistes à la télévision, était entièrement calquée sur la série israélienne HaTufim. L'écrivain et réalisateur de la série israélienne, Gideon Raff, a été intégré dans la version usaméricaine, servant de producteur exécutif.

Le changement de propriétaire du récit peut sembler superficiel – car la propagande pro-israélienne d'Hollywood est remplacée par la propagande israélienne organique. Néanmoins, cela n’est pas le cas.

L'agenda pro-israélien du passé – la romantisation qui a suivi la création d'Israël en 1948 – n'a pas duré longtemps. La défaite des armées arabes par Israël en 1967 – grâce au soutien militaire massif des USA à Tel-Aviv – a remplacé l'image d'Israël naissant et vulnérable par celle de l'armée israélienne courageuse, capable de vaincre plusieurs armées ennemies à la fois. C'est alors que les soldats israéliens ont visité les collèges et les écoles usaméricaines, parlant de leur héroïsme sur le champ de bataille. L'invasion israélienne du Liban et les massacres qui ont suivi, comme ceux de Sabra et de Shatila, ont forcé à repenser les choses.

Tout au long des années 1980 et 1990, Israël a largement existé à Hollywood comme un exutoire comique, à partir de spectacles comme Friends, Frasier et, plus récemment, The Big Bang Theory. Les références à Israël sont souvent suivies de rires – un moyen intelligent et efficace de lier Israël à des associations positives et heureuses.

La « guerre contre le terrorisme », à partir de 2001, associée à la création du projet Master Class, a permis à Israël de revenir dans l'univers hollywoodien, non pas comme une référence occasionnelle, mais comme un élément de base, avec des séries israéliennes ou des productions conjointes USA-Israël, définissant un tout nouveau genre : celui des choix difficiles à faire pour lutter contre le terrorisme et finalement sauver le monde.

L'exploitation des femmes israéliennes sur les couvertures de magazines, par exemple, Maxim, était un tout autre business louche, visant un public différent. Les filles à moitié nues de l'armée israélienne ont réussi, dans l'esprit de beaucoup, à justifier la guerre par des images sexuelles. Ce genre est devenu particulièrement populaire après les guerres sanglantes d'Israël contre Gaza, qui ont fait des milliers de morts.

L'influence croissante d'Israël sur les films Marvel est une combinaison de tous ces éléments : la sexualisation de la femme soi-disant forte et autonomisée, la normalisation de ceux qui commettent des crimes israéliens – Gadot, la soldate, Sabra, l'agente du Mossad – et l'injection directe des priorités israéliennes dans la réalité usaméricaine quotidienne.

Il y a un côté positif à cela. Pendant des décennies, Israël s'est caché derrière de fausses notions historiques romantisées, faisant valoir son point de vue auprès des USaméricains et d'autres publics occidentaux, souvent indirectement. Les guerres à Gaza, la croissance exponentielle du mouvement palestinien de boycott et la prolifération des médias sociaux ont cependant forcé Israël à se cacher.

Le nouvel Israël hollywoodien est maintenant un guerrier, souvent contraint de faire des choix moraux difficiles, mais il est, comme son homologue usaméricain, en fin de compte une force pour le bien. La capacité d'Israël à maintenir cette image dépendra de plusieurs facteurs, notamment de la capacité des communautés propalestiniennes à contrer cette supercherie et cette hasbara [propagande, NdT].

21/07/2022

GIDEON LEVY
À Jérusalem, Biden a signé l’acte de décès des Palestiniens

 Gideon Levy, Haaretz, 16/7/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

C’est à l'hôpital Augusta Victoria de Jérusalem-Est, de tous les endroits, que le président usaméricain Joe Biden a signé un certificat de décès. La solution à deux États est morte depuis longtemps, tout comme le choix stratégique des Palestiniens de s'appuyer sur l'Occident dans leur lutte pour leurs droits nationaux. Cet espoir a rendu son dernier souffle à Augusta Victoria. Dans son discours, Biden a longuement glosé sur son séjour et celui de sa famille à l’hôpital ; il se souvenait du service de soins intensifs. Une ligne plate sur le moniteur signifiait la mort, a-t-il appris là-bas. Environ une heure plus tard, à Bethléem, le moniteur s'est immobilisé. La voie empruntée par les Palestiniens il y a 50 ans est arrivée à son terme. Ils sont arrivés dans un cul-de-sac.

 

Des Palestiniens ont manifesté contre la visite du président Biden, près de l'hôpital Augusta Victoria à Jérusalem-Est. Photo Menahem Kahana/AFP — Getty Images

 Au début des années 70, une nouvelle star apparaît dans le ciel politique : le cardiologue Issam Sartaoui*, réfugié d'Acre, étudiant en Irak, exilé à Paris et artisan des détournements d'avions. Il a subi un changement complet. Il est devenu le promoteur des Palestiniens dans le cœur de l'Occident ; jusque-là, ils s'étaient appuyés sur les pays non alignés. Sartaoui a conduit les Palestiniens à Bonn, Vienne, Paris et Stockholm au lieu de Moscou, Jakarta, Delhi et Kuala Lumpur.

Cela a été présenté comme un excellent choix. Le protégé et même le chouchou des stars sociales-démocrates de l'Europe occidentale de l'époque - Willy Brandt, Bruno Kreisky, Olof Palme et François Mitterrand - a poursuivi sa route dans le cœur des Israéliens. Sartaoui a commencé par rencontrer des représentants de la gauche israélienne. Yasser Arafat s'engage avec enthousiasme sur la voie tracée par son conseiller. Cela semblait beaucoup plus prometteur que de gagner le soutien de Karachi.

Cinquante ans plus tard, cette voie est arrivée à son terme, avec les Palestiniens qui saignent sur place. Un président usaméricain ne leur accorde que quelques heures, lors d'une visite qui donne un nouveau sens aux termes « service minimum » et « paroles en l’air ». Il est donc temps de sortir du rêve que l'Europe et l'USAmérique feront un jour quoi que ce soit pour les Palestiniens qui n’ait pas l’agrément de leur inattaquable chouchou, Israël.

C'est un président qui ne prend pas la peine de prononcer correctement le nom de Shireen Abu Akleh, la journaliste tuée presque certainement par Israël, devenue un symbole national et international. Celui de Jamal Khashoggi, ça oui, il sait le prononcer. Les Palestiniens n'ont plus rien à chercher dans cette arène. Lorsque Biden cite un poème qui dit que « espoir et histoire riment » et leur lance 100 millions de dollars pour Augusta Victoria, il est clair que pour eux, avec les USA, c’est foutu.

Avec un président usaméricain qui leur promet une solution à deux États, mais « pas à court terme », vous arrivez à la fin de l'histoire. Vous avez envie de demander à Biden : « Que se passera-t-il "pas à long terme" pour parvenir à cette solution ? Les Israéliens décideront-ils d'eux-mêmes ? Les colons rentreront-ils d'eux-mêmes ? Quand ils seront un million au lieu de 700.000, cela les satisfera-t-il ? »

L'USAmérique pensera-t-elle un jour différemment ? Pourquoi cela devrait-il arriver ? Avec les lois contre BDS et les nouvelles définitions tordues de l'antisémitisme, les USA et l'Europe sont perdus pour les Palestiniens. La bataille a été décidée, Israël les a pratiquement battus, et leur sort pourrait être le même que celui des peuples indigènes aux USA.

Il suffit de regarder la photo de la réunion de Bethléem : douze Palestiniens sinistres en cravate autour des deux leaders dans une photo de groupe de désespoir. Il suffit de se rappeler les mots de Biden en 1986 au secrétaire d'État de l'époque, George Shultz : « Je déteste entendre une administration ... refuser d'agir sur un point moralement important. ... J'ai honte que ce pays mette en place une politique comme celle-ci, qui ne dit rien, rien ».

Biden faisait référence à la politique usaméricaine à l'égard de l'ancien pays de l'apartheid, l'Afrique du Sud. Des remarques étonnamment similaires peuvent être lancées aujourd'hui à l'encontre de Biden en raison de son approche du deuxième pays d'apartheid. Mais il n'y a pas de Biden pour les lancer.

 NdT

* Issam Sartaoui a été assassiné le 10 avril 1983 au Portugal alors qu'il participait comme représentant de l'OLP au XVIème congrès de l'Internationale socialiste. Le groupe Abou Nidal (Fatah-Conseil révolutionnaire) a revendiqué l'assassinat.

07/07/2022

GIDEON LEVY
L'affaire Abu Akleh prouve que les USA sont prêts à tout pour défendre Israël

 Gideon Levy, Haaretz, 7/7/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Imaginez l'inimaginable : Ilana Dayan* (ou Yonit Levi**) sort de sa zone de confort pour faire un reportage sur l'occupation. Elle est prise dans un échange de tirs et une balle l'atteint au cou, dans la zone située entre son casque et son gilet pare-balles. Elle meurt. Que se passe-t-il ensuite ? Israël capture très rapidement la "cellule" palestinienne. Peu importe qui a tiré, c'est totalement insignifiant, tous ses membres sont tués ou condamnés à la prison à vie. Israël pleure la perte de sa journaliste chevronnée.

Personne n’envisage même les tests médico-légaux : il n'y en a pas besoin. Tout le monde sait qui a tué la journaliste. Les USA ne pensent pas à interférer dans l'enquête, seulement à censurer les Palestiniens et à participer au deuil de la nation juive, et peut-être aussi à imposer des sanctions à l'Autorité palestinienne pour le meurtre de la journaliste. Il est évident pour tous que la journaliste israélienne a été tuée parce qu'elle était juive et parce qu'elle était journaliste. Ses assassins - c'est ainsi qu'on les appellera, bien sûr - avaient l'intention de la tuer. Chaque enfant israélien le comprendra.


Emad Hajjaj

Mais Shireen Abu Akleh était une correspondante de guerre palestinienne, infiniment plus courageuse et déterminée que Dayan et Levi réunies, et elle a été tuée à Jénine. Israël s'est lavé les mains de toute responsabilité, comme d'habitude. Il s'est lavé les mains et a fait le blackout. Toutes les enquêtes qui ont été publiées jusqu'à présent sur les circonstances de son meurtre ont abouti à une seule conclusion : les forces de défense israéliennes l'ont abattue. Mais Israël a continué à enfumer.

Et puis il y a eu l'analyse médico-légale, effectuée en présence d'un officier militaire USaméricain. Et voici le résultat : Le Département d'État US, qui se préoccupe de la sécurité des civils et est particulièrement choqué par les préjudices causés aux journalistes, comme l'a prouvé l'affaire Jamal Khashoggi, a annoncé que s'il est impossible de déterminer avec certitude qui a tué Abu Akleh, les tirs provenaient probablement de positions des FDI. Et la chute : « Le [coordinateur de la sécurité des USA] n'a trouvé aucune raison de croire que [les tirs] étaient intentionnels mais plutôt le résultat de circonstances tragiques ». La balle endommagée qui a été retirée de la tête d'Abu Akleh a murmuré aux USA que le tireur ne voulait pas la tuer. C'était le test balistique le plus élaboré de l'histoire : un test qui examine les pensées les plus intimes, qui discerne les intentions.

20/05/2021

Bichonné par l’Oncle Sam (Joe), Israël exerce la violence parce qu'il le peut

Gideon Levy, Haaretz, 20/5/2021

Traduit par Fausto Giudice

Cela a été prouvé une fois de plus : Israël est trop fort. Son armée est trop forte. L'USAmérique l'a engraissé pendant des années avec de grandes quantités d'armes sophistiquées au-delà de ses besoins, et avec un soutien international généralisé, automatique et aveugle. Israël a suralimenté son armée avec des budgets énormes et illimités, au détriment de besoins bien plus importants bien sûr, et le résultat est maintenant devant vous : Comme une oie malheureuse qui a été constamment gavée, Israël n'est plus capable de se restreindre. Le foie gras est devenu malade.