22/03/2023

Qui est à l’origine de la refonte judiciaire qui divise Israël ? Deux New-Yorkais

David Segal et Isabel Kershner, The New York Times, 20/3/2023

 Alain Delaquérière, du service de recherche du NYT, a contribué au reportage.

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Kohelet, le think tank autrefois discret qui a conçu et défend aujourd’hui un remodelage du système judiciaire israélien, est une importation usaméricaine.

Des dizaines de milliers d’Israéliens ont protesté contre le projet de refonte judiciaire du gouvernement le 11 mars. Photo : Amir Levy/Getty Images

Dans le cadre d’une récente “journée nationale de résistance”, un groupe de réservistes masqués a convergé vers le bureau de Jérusalem d’un think tank et a bloqué sa porte d’entrée avec des sacs de sable et des bobines de fil de fer barbelé. À l’extérieur, les manifestants ont mené un rassemblement bruyant dans la rue, brandissant des dizaines de pancartes et se partageant un micro pour une série de discours furieux.

« Le Kohelet Policy Forum s’est caché dans l’ombre », a crié un orateur, debout sur une voiture. « Mais nous les avons rattrapés et nous ne les laisserons pas gagner ! »

Pendant des années, Kohelet a discrètement produit des prises de position, essayant d’orienter la politique gouvernementale dans une direction plus libertarienne. Puis, à partir de janvier, il s’est fait connaître comme l’un des principaux architectes de la proposition de refonte judiciaire qui a plongé Israël dans une crise sur l’avenir de sa démocratie.

Si le projet aboutit, ce sera une victoire éclatante non seulement pour le think tank, mais aussi pour les personnes qui en sont à l’origine : deux gars du Queens.

Le premier est Moshe Koppel, un docteur en mathématiques de 66 ans qui a grandi à New York et s’est installé en Israël en 1980. Il a fondé Kohelet en 2012 et a rédigé des lois et produit des documents politiques conservateurs et libertariens avec une liste de chercheurs à temps plein et à temps partiel qui compte aujourd’hui 160 personnes.

« Je ne veux pas paraître arrogant », a-t-il déclaré à Ami, le magazine juif orthodoxe, en 2019, « mais dans un certain sens, nous sommes les cerveaux de la droite israélienne ».

Moshe Koppel, président de Kohelet, lors d’un événement à Jérusalem. Photo : Olivier Fitoussi

Kohelet n’est pas tenu de divulguer les noms des donateurs individuels et, pendant des années, Koppel a habilement éludé les questions relatives au financement.

Arthur Dantchik, un trader qui pèse 7,2 milliards de $

Mais l’une des sources de financement est un autre New-Yorkais : Arthur Dantchik, un multimilliardaire de 65 ans qui a donné des millions à Kohelet, selon des personnes familières avec ses dons philanthropiques. Dantchik n’a pas répondu à une demande de commentaire.

L’argent et les idées des USAméricains, de gauche comme de droite, ont toujours joué un rôle dans la politique israélienne. Aujourd’hui, les consultants usaméricains font régulièrement partie des campagnes électorales et le quotidien gratuit Israel Hayom, soutenu par des USAméricains, est le journal le plus lu du pays.

Jusqu’à récemment, cependant, peu de gens savaient que les propositions judiciaires qui bouleversent le pays étaient en grande partie une production usaméricaine.

 

Ce qu’il faut savoir sur la refonte du système judiciaire israélien

Une proposition qui divise. Un ensemble de propositions législatives visant à réformer en profondeur le système judiciaire israélien a déclenché des protestations massives de la part de ceux qui estiment qu’elles détruiront les fondements démocratiques du pays. Voici ce qu’il faut savoir :

Quels sont les changements proposés ? Le gouvernement israélien de droite souhaite modifier la composition d’un comité chargé de sélectionner les juges afin de donner une majorité aux représentants et aux personnes nommées par le gouvernement. La législation limiterait également la capacité de la Cour suprême à annuler les lois adoptées par le Parlement et affaiblirait l’autorité du procureur général, qui est indépendant du gouvernement.

Que disent les opposants au projet ? Le front des opposants à la législation, qui comprend des Israéliens en grande partie du centre et de la gauche, affirme que la refonte porterait un coup fatal à l’indépendance du pouvoir judiciaire, qu’ils considèrent comme le seul frein au pouvoir du gouvernement. Ils affirment que la législation ferait passer le système israélien d’une démocratie libérale avec des protections pour les minorités à une tyrannie de la règle de la majorité.

Quelle est la position de Benjamin Netanyahou ? Dans le passé, Netanyahou, l’actuel Premier ministre israélien, était un fervent défenseur de l’indépendance des tribunaux. Sa récente nomination de Yariv Levin, l’un des chefs de file de la refonte judiciaire, au poste de ministre de la Justice a marqué un tournant, même si MNetanyahou a publiquement promis que tout changement serait mesuré et géré de manière responsable.

Un compromis est-il possible ? Les hommes politiques à l’origine du plan se sont dits prêts à discuter et un groupe d’universitaires et de législateurs s’est réuni en coulisses pendant des semaines pour trouver un compromis. Le 15 mars, le gouvernement a rejeté un compromis proposé par Isaac Herzog, le président d’Israël, qui a été rejeté par Netanyahou peu après sa publication.

 Ce plan, qui a incité des centaines de milliers d’Israéliens à manifester chaque semaine, donnerait au gouvernement un contrôle beaucoup plus important sur la sélection des juges et rendrait plus difficile l’annulation par la Cour suprême des lois adoptées par les députés.

Les négociations - qui incluaient Kohelet - pour une version réduite de la refonte judiciaire qui satisferait une plus grande partie de l’opinion publique israélienne semblent être en suspens pour le moment. Le gouvernement est déterminé à faire passer au moins certaines de ses propositions au Parlement d’ici le début du mois d’avril.

Les opposants à la refonte affirment que les tribunaux sont tout ce qui empêche Israël de se transformer en un pays où le pouvoir du gouvernement n’est pas contrôlé et où les minorités ne sont pas protégées. Koppel et ses alliés estiment que la véritable menace pour la démocratie israélienne réside dans les juges activistes qui, selon lui, agissent désormais pratiquement sans contrainte.

Bien que très présent dans les cercles politiques conservateurs israéliens depuis des années, Koppel s’est longtemps efforcé de maintenir un profil aussi bas que possible.

« J’ai découvert que l’on obtient beaucoup plus de résultats », a-t-il déclaré lors d’une rare interview au siège de Kohelet, « si on laisse les autres s’attribuer les mérites que si l’on insiste pour annoncer sa propre contribution ».

Pendant des décennies, M. Dantchik est resté aussi invisible qu’un homme aussi riche peut l’être. (Avec une valeur nette estimée à 7,2 milliards de dollars, il est plus haut placé sur la liste Forbes 400 que des magnats de premier plan comme Mark Cuban et George Soros). Il est cofondateur du Susquehanna International Group, une société financière privée basée sur un campus tentaculaire dans la banlieue de Philadelphie, avec des bureaux dans le monde entier. La société n’a jamais fait appel à des investisseurs extérieurs, se limitant à ce qu’elle est tenue de divulguer publiquement sur les marchés sur lesquels elle opère - options, actions, crypto-monnaies et paris sportifs.

« Ils sont aussi silencieux qu’une souris d’église », a déclaré Paul Rowady d’Alphacution, un groupe de recherche spécialisé dans les sociétés de négoce pour compte propre. « Ces types n’aiment pas parler et ils ne veulent pas que quelqu’un se mêle de leurs affaires ».

Le lien de Dantchik avec Kohelet a été publié pour la première fois dans un article du journal israélien Haaretz, sur la base d’un rapport du Bloc démocratique, une organisation à but non lucratif en Israël qui surveille principalement les groupes de droite.

« Nous avons passé des mois à chercher un indice qui nous permettrait de remonter à l’origine de l’argent », a déclaré Ran Cohen, directeur du Bloc démocratique. « Il s’agissait d’un labyrinthe de sociétés et d’organisations caritatives américaines non transparentes ».

Les recherches du groupe ont révélé que les fonds destinés à Kohelet provenaient d’une organisation 501(c)(3) appelée American Friends of Kohelet Policy Forum, qui était à l’origine basée à Bala Cynwyd, la même banlieue que Susquehanna. Deux des directeurs de l’association sont des frères et sœurs de l’épouse de Koppel. Le troisième, Amir Goldman, travaille à Susquehanna Growth Equity, une branche de Susquehanna International spécialisée dans le capital-investissement.

Après la publication par Haaretz de son article en mars 2021, le Bloc démocratique a constaté que le principal canal de financement de Kohelet avait changé.


"Jeff Yass, prends ton argent sale et dégage !" : Manifestation devant les bureaux de Kohelet à Jérusalem le 9 mars. Photo : Eran Nissan/Mehazkim

Un rapport financier déposé en Israël par le think tank en avril de la même année a montré que plus de 90 % de ses 7,2 millions de dollars de revenus provenaient du Central Fund of Israel, une organisation familiale à but non lucratif qui a donné 55 millions de dollars à plus de 500 causes liées à Israël en 2021, selon son site web.

Jeff Yass, le roi de l’arnaque fiscale

Dans les rapports précédents sur le financement de Kohelet, Dantchik était cité comme l’un des principaux donateurs avec Jeff Yass. Yass est l’un des cofondateurs de Susquehanna et un donateur politique conservateur prolifique aux USA, dont la valeur nette a été estimée par Forbes à 28,5 milliards de dollars.

Mais les personnes qui connaissent les dons des deux hommes affirment que M. Yass n’a jamais été un donateur de Kohelet. Il a refusé de commenter cet article.

Les bureaux de Kohelet à Jérusalem. Photo : Avishag Shaar-Yashuv pour le New York Times

Si la refonte soutenue par Kohelet devait aboutir sous une forme ou une autre, Koppel deviendrait l’improbable parrain d’un système judiciaire israélien remodelé.

Il n’est pas juriste et n’a pas fait d’études de droit. Avant de se tourner vers la politique, il était spécialisé dans l’apprentissage automatique. Koppel, un homme maigre à la barbe grisonnante et aux petits restes d’accent new-yorkais, vit dans une colonie relativement huppée du sud de la Cisjordanie, où l’on trouve de nombreux USAméricains transplantés.

Même nombre de ses détracteurs l’apprécient personnellement, et la plupart d’entre eux le reconnaissent : « Il est brillant. » L’un de ses dons est de décrire ses positions politiques et sa propre personne de manière à ce qu’elles paraissent éminemment raisonnables.

« Vous voyez que je porte une kippa sur la tête, mais je ne suis pas en faveur de la coercition religieuse sous quelque forme que ce soit », a-t-il déclaré lors d’une récente interview sur le podcast “Two Nice Jewish Boys” (Deux gentils garçons juifs).

Koppel, au centre, interviewé par Eytan Weinstein, à gauche, et Naor Meningher sur le podcast “Two Nice Jewish Boys”. Photo : Two Nice Jewish Boys Podcast

Il n’a pas voulu dire comment il était entré en contact avec Dantchik, qui a grandi dans le Queens et a obtenu un diplôme de biologie à l’université d’État de New York à Binghamton.

Le colocataire de Dantchik était Yass, un ami du lycée, et les deux hommes se sont liés par une passion commune pour le poker. Après avoir obtenu leur diplôme, ils se sont installés à Las Vegas pour devenir des joueurs professionnels, avec un succès modeste. Plus tard, ils ont transporté des mallettes remplies d’argent provenant d’un “consortium” de joueurs partageant les mêmes idées, afin de faire des milliers de petits paris sur des combinaisons à long terme dans les hippodromes. En 1985, au Sportsman’s Park de Cicero (Illinois), ils ont gagné 764 284 dollars, l’un des plus gros gains de l’histoire des courses aux USA.

Ils ont créé Susquehanna en 1987 avec une poignée d’amis. Le poker, qui met l’accent sur les probabilités et la prise de décision sous pression, est tellement au cœur de la culture de Susquehanna que son programme de formation de plusieurs mois comprend des semaines de Texas hold’em [variante de poker].

D’anciens employés de Susquehanna disent que Dantchik est un personnage très apprécié dans l’entreprise - calme, chaleureux et exceptionnellement généreux.

« Il dirigeait le programme de formation lorsque j’ai commencé », a déclaré Francis Wisniewski, qui a rejoint Susquehanna en 1993 et y est resté pendant dix ans. « Mon grand-père est décédé pendant la formation et il m’a offert son Audi pour que je puisse immédiatement rentrer chez moi en quatre heures. Il m’a dit : “Je vais prendre un taxi. Tu prends ma voiture”. Il était comme ça ».

Si l’argent parle, c’est apparemment la seule façon pour Dantchik de le faire en public. Sa philanthropie publique révèle un homme désireux de soutenir des politiciens républicains modérés : il a donné environ 850 000 dollars à des candidats politiques et à des groupes qui divulguent leurs donateurs, selon les données fournies par OpenSecrets.org.

La majeure partie de ses dons est canalisée par la Claws Foundation, basée à Reston, en Virginie, et dont deux des directeurs sont Dantchiok et Yass. La dernière déclaration fiscale de la Fondation Claws à l’I.R.S., qui figure sur le site de ProPublica, indique que l’organisation a donné 36 millions de dollars à plus de 30 bénéficiaires, dont des théâtres, des hôpitaux, des synagogues, des universités et des groupes de réflexion libertariens, tels que l’Institut Cato et l’Institut Ayn Rand.

Sur le papier, Dantchik et Koppel ont beaucoup en commun, notamment une passion partagée pour Israël et les idées libertariennes. Koppel a commencé à s’intéresser à la politique il y a 20 ans, lorsqu’il a commencé à assister aux auditions de la commission de la Constitution, du droit et de la justice de la Knesset. Lors de l’entretien, Koppel a déclaré qu’il avait rapidement appris que les politiciens, très occupés et à court de personnel, étaient reconnaissants à toute personne désireuse de les aider à rédiger un projet de loi.

« Cette personne a beaucoup de pouvoir, la personne qui tient le stylo », dit Koppel.

Après quelques tentatives infructueuses de rédaction d’une constitution officielle pour Israël, il a créé Kohelet - l’Ecclésiaste en hébreu - il y a plus de dix ans.

 

Le bureau de Jérusalem de Kohelet, que son fondateur a qualifié de “cerveau de la droite israélienne”. Photo : Avishag Shaar-Yashuv

Dès le départ, Kohelet a ciblé les piliers idéologiques érigés par les fondateurs socialistes d’Israël. Le groupe promeut le menu libertarien familier d’un gouvernement restreint, de marchés libres et d’une éducation privatisée. Au cours des dernières décennies, Israël s’est éloigné de la réglementation et a mis l’accent sur son hospitalité envers les entrepreneurs. Mais le libertarianisme de Kohelet est ressenti par de nombreux Israéliens comme une intrusion étrangère.

Décrivant les politiques de Kohelet comme une importation usaméricaine, Gilad Kariv, membre du parti travailliste et ancien président de la commission de la constitution, du droit et de la justice, a déclaré : « Non seulement ils reçoivent leur contribution financière des USA, mais ils y apportent une philosophie néoconservatrice d’extrême droite ».

L’un des triomphes de Kohelet s’est produit en 2019, lorsque l’administration Trump a annoncé que les USA ne considéraient pas les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée comme une violation du droit international, renversant ainsi quatre décennies de politique usaméricaine. Le secrétaire d’État Mike Pompeo a délivré un message vidéo lors d’une conférence de Kohelet, remerciant le groupe d’avoir soutenu la nouvelle doctrine.

Mais le projet de refonte judiciaire représente l’apogée de l’influence de Kohelet. Lorsque Yariv Levin, le ministre de la Justice, a dévoilé le plan en janvier, il a publiquement remercié le directeur du département juridique de Kohelet pour son aide. Koppel s’est contenté de dire que les propositions judiciaires de Kohelet étaient “similaires” à celles du gouvernement.

« Nous ne pouvons pas leur dire ce qu’ils doivent faire, mais seulement leur donner des conseils », dit Koppel. « Ils ont suivi certains de ces conseils et en ont rejeté d’autres ».

Peu après cette interview, les tensions en Israël sont passées de l’état de frémissement à l’état d’ébullition, et le président a récemment mis en garde contre la possibilité réelle d’une guerre civile.

Lors de la manifestation organisée devant Kohelet ce mois-ci, un orateur a dénoncé les riches USAméricains qui exportent des idées en Israël « en provenance directe des franges délirantes du parti républicain ».

Les badauds ont lancé de faux billets de 100 dollars en l’air.

L’entrée des bureaux du Kohelet Policy Forum qui a été bloquée par des manifestants opposés à la refonte du système judiciaire prévue par le gouvernement israélien, à Jérusalem, le 9 mars 2023.Photo : Flash90

21/03/2023

CRISTINA MARTÍNEZ
Hussein Bachir Amadour, prisonnier politique sahraoui remis par l’Espagne au Maroc, est en grève de la faim depuis un mois
Lettre au ministre Albares

M. le ministre des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération
Plaza de la Provincia

28012 - Madrid

 

 Madrid, le 20 mars 2023

 

Objet : Hussein Bachir Amadour, prisonnier politique sahraoui remis par l’Espagne au Maroc, est en grève de la faim depuis un mois

 

 Monsieur le Ministre,

 

Le groupe d’étudiants sahraouis “Camarades d’El Wali” a fait l’objet de persécutions politiques qui lui ont valu 85 ans d’emprisonnement.

 

Ce groupe d’étudiants faisait campagne dans les universités marocaines d’Agadir et de Marrakech pour l’autodétermination du Sahara occidental, et le gouvernement marocain s’est débarrassé d’eux comme d’habitude, en les accusant d’un crime, en l’occurrence d’un meurtre. Des preuves ? Inutiles.

 

Onze de ces étudiants ont été condamnés à 3 ans de prison en janvier 2016. Quatre autres ont été condamnés à 10 ans et sont toujours en prison. Il s’agit d’Elbar El Kantaoui, El Hafidi Abdelmoula, Aziz El Ouahidi et Mohamed Dada.

 

Hussein Bachir Amadour a ensuite été emprisonné. Il s’était enfui aux îles Canaries où il avait exprimé devant le juge son souhait de demander l’asile politique. Le juge l’a envoyé dans un centre de détention pour étrangers d’où commenceraient les procédures d’asile, mais en chemin, la police l’a détourné vers un avion à destination du Maroc, le 16 janvier 2019. Depuis, il est en prison et purge une peine de 12 ans.



Le gouvernement espagnol n’a pas enquêté sur cette désobéissance au juge, une remise illégale d’un demandeur d’asile, qui a conduit à des conséquences aussi terribles. Aucune responsabilité n’a été établie.

 

Cinq étudiants sont toujours derrière les barreaux. Trois d’entre eux ont entamé une grève de la faim le 20 février 2023 dans la prison d’Ait Melloul 1 au Maroc, la pire avec celle de Tiflet.

 

Mohamed Dada a suspendu sa grève le 1er mars, lorsqu’il a été transféré à la prison de Tan Tan.

 

Abdelmoula El Hafidi a suspendu sa grève le 7 mars, lorsque l’administration pénitentiaire lui a promis un changement de prison. 

 

Hussein Bachir Amadour est toujours en grève. Cela fait exactement un mois qu’il est en grève. Les Sahraouis sont capables de tout pour défendre leurs droits. Il demande à ne plus être classé comme un prisonnier “dangereux”, parmi de nombreux actes arbitraires, et à être rapproché de sa famille dans les territoires occupés. Un mois, c’est long. Il n’a pas de suivi médical et sa vie est en danger.

 

En novembre 2019, le Groupe de travail de l’ONU sur les détentions arbitraires avait déjà jugé que les étudiants Moussayih, Burgaa, Errami, Baber, Rguibi, Elbeur, Charki, Ajna, Amenkour, Baalli, El Ouahidi, Dadda, Baihna et El Hafidi (les plaignants) avaient fait l’objet d’une détention arbitraire et que le gouvernement marocain devait prendre les mesures nécessaires pour libérer ceux qui sont encore en prison et les indemniser tous pour leur offrir une réparation. Bien entendu, le Maroc ne s’est pas conformé à l’arrêt.

 

Et le Premier ministre Sánchez parle de ceux qui “écrasent la liberté et la souveraineté”, mais il ne fait pas là référence au Maroc. Ça, non. Le Maroc ne fait pas ça.

 

Si notre gouvernement n’ose pas faire des remontrances au Maroc sur les droits humains ou sur l’occupation du Sahara occidental, il devrait au moins faire un geste de justice à huis clos et mener une enquête sur les motivations obscures qui ont conduit à remettre un demandeur d’asile au Maroc sans avoir respecté le protocole. Le gardien ne s’est pas trompé. L’ordre devait venir d’en haut.

 

L’Espagne le doit à Hussein Bachir Amadour.

Cristina Martínez Benítez de Lugo

CRISTINA MARTÍNEZ
Hussein Bachir Amadour, preso político saharaui entregado por España a Marruecos, lleva un mes en huelga de hambre
Carta al ministro Albares


 
Excmo. Sr. ministro,

El grupo de estudiantes saharauis “Compañeros de El Uali” fue objeto de una persecución política que se saldó con 85 años de prisión.

Este grupo de estudiantes hacía campaña en las Universidades marroquíes de Agadir y Marrakech por la autodeterminación del Sahara Occidental, y el gobierno marroquí se los quitó de en medio como siempre, acusándoles de un crimen, en este caso un asesinato. Las pruebas, innecesarias.

Once de estos estudiantes fueron condenados a 3 años en enero de 2016. Otros cuatro fueron condenados a 10 años y siguen en la cárcel. Se trata de Elbar El Kantaoui, El Hafidi Abdelmoula, Aziz El Ouahidi y Mohamed Dada.

Posteriormente entró en prisión Hussein Bachir Amadour. Había escapado a Canarias donde manifestó ante el juez su deseo de pedir asilo político. El juez le mandó a un Centro de Internamiento de Extranjeros desde donde se iniciarían los trámites para el asilo, pero por el camino la policía lo desvió a un avión rumbo a Marruecos, el 16 de enero de 2019. Desde entonces está en la cárcel cumpliendo una condena de 12 años.


 El gobierno español no ha investigado esta desobediencia al juez, una entrega ilegal de un solicitante de asilo, que ha conllevado tan terribles consecuencias. No se han derivado responsabilidades.

Quedan cinco estudiantes entre rejas. De ellos, tres empezaron una huelga de hambre el 20 de febrero de 2023 en la cárcel de Ait Melloul 1, en Marruecos, la peor junto con la de Tiflet.

Mohamed Dada suspendió su huelga el 1 de marzo, cuando le trasladaron a la cárcel de Tan Tan.

Abdelmoula El Hafidi suspendió su huelga el 7 de marzo, cuando la administración penitenciaria le prometió un cambio de cárcel.  

Hussein Bachir Amadour sigue en huelga. Lleva exactamente un mes. Los saharauis son capaces de todo por defender sus derechos. Pide que le quiten, entre muchas arbitrariedades, la consideración de preso “peligroso”, y que le acerquen a su familia, en los territorios ocupados. Un mes es mucho tiempo. No tiene vigilancia médica y su vida está en peligro.

En noviembre de 2019, el Grupo de trabajo sobre detenciones arbitrarias de Naciones Unidas ya dictaminó que los estudiantes Moussayih, Burgaa, Errami, Baber, Rguibi, Elbeur, Charki, Ajna, Amenkour, Baalli, El Ouahidi, Dadda, Baihna y El Hafidi (los que presentaron la queja) fueron objeto de detenciones arbitrarias y que el Gobierno de Marruecos debía tomar las medidas necesarias para liberar a los que seguían en la cárcel e indemnizar a todos para ofrecerles una reparación. Por supuesto Marruecos no ha acatado el dictamen.

Y el presidente Sánchez habla de quienes “aplastan la libertad y la soberanía” aunque no se refiere a Marruecos. Eso no. Marruecos no hace eso.

Aunque nuestro Gobierno no se atreve a reconvenir a Marruecos en materia de derechos humanos ni en materia de la ocupación del Sahara Occidental, debería al menos tener un gesto haciendo justicia de puertas adentro y llevar a cabo una investigación sobre las oscuras motivaciones que llevaron a entregar a Marruecos a un solicitante de asilo sin haber cumplido el protocolo. El guardia no se equivocó. La orden tuvo que venir de arriba.

España se lo debe a Hussein Bachir Amadour.

Cristina Martínez Benítez de Lugo


 

 

MATTHEW DESMOND
Le coût élevé de la pauvreté aux USA

Matthew Desmond, The New York Review of Books, 21/3/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Matthew Desmond est professeur de sociologie à la chaire Maurice P. During de l’Université de Princeton et le chercheur principal de The Eviction Lab, un laboratoire de suivi, de collecte de données et de cartographie sur les expulsions de logements aux USA (plus de 3 millions en moyenne par an). Son nouveau livre s’intitule Poverty, by America (Crown, Penguin Random House, mars 2023).

Auteur de On the Fireline : Living and Dying with WIldland Firefighters (2007), Race in America (avec Mustafa Emirbayer, 2015), The Racial Order (avec Mustafa Emirbayer, 2015), et Evicted : Poverty and Profit in the American City (2016). CV. @just_shelter


 Cet essai figure, sous une forme quelque peu différente, dans l’ouvrage de Matthew Desmond intitulé
Poverty, by America, publié ce printemps par Crown, une collection de Penguin Random House LLC. Photos Magnum

Le gouvernement usaméricain aide le plus ceux qui en ont le moins besoin. Telle est la véritable nature de notre État-providence.

 Il y a trois ans, la pandémie de Covid-19 frappait les USA et l’économie s’effondrait. Les protocoles de distanciation sociale ont entraîné la fermeture d’entreprises et des millions d’USAméricains ont perdu leur emploi. Entre février et avril 2020, le taux de chômage a doublé, puis encore doublé. Au cours de la pire semaine de la Grande Récession de la fin des années 80, 661 000 USAméricains avaient demandé à bénéficier de l’assurance chômage. Au cours de la semaine du 16 mars 2020, ce sont plus de 3,3 millions d’USAméricains qui l’ont fait.

Le gouvernement fédéral a réagi à cette chute libre en apportant une aide audacieuse et immédiate. Il a élargi la période pendant laquelle les travailleurs licenciés pouvaient percevoir des allocations de chômage et, dans une rare reconnaissance de l’inadéquation de l’allocation, a ajouté des paiements supplémentaires. Pendant quatre mois, les chômeurs usaméricains ont reçu 600 dollars [=550€] par semaine en plus de leur allocation normale, ce qui a presque triplé le montant moyen de l’allocation. (En août 2020, le gouvernement a ramené les primes à 300 dollars par semaine).

Distribution d’eau à Denmark, en Caroline du Sud, où plus de 20 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Les habitants disent que l’eau du robinet les a rendus malades. Photographie de Matt Black, 2019.

Grâce aux généreuses allocations de chômage, aux chèques de relance, à l’aide au logement, à l’élargissement du crédit d’impôt pour les enfants et à d’autres formes d’aide, la pauvreté n’a pas augmenté pendant la pire récession économique depuis près d’un siècle. Elle a diminué, et ce dans des proportions considérables. L’économie usaméricaine a perdu des millions d’emplois pendant la pandémie, mais il y avait environ 16 millions d’USAméricains de moins dans la pauvreté en 2021 qu’en 2018. La pauvreté a reculé dans tous les groupes raciaux et ethniques. Elle a reculé pour les citadins et les ruraux. Elle a diminué pour les jeunes et les personnes âgées. C’est chez les enfants qu’elle a le plus diminué. L’action rapide du gouvernement n’a pas seulement permis d’éviter un désastre économique : elle a aussi contribué à réduire de plus de moitié la pauvreté des enfants.

Après des années d’inaction, les USA ont enfin réussi à réduire considérablement le taux de pauvreté. Cependant, un groupe d’USAméricains semblait troublé par le fait que le gouvernement en fasse autant pour les aider. Ils reprochent notamment aux chèques de chômage majorés d’être à l’origine de la lenteur de la reprise économique du pays. David Rouzer, membre républicain du Congrès de Caroline du Nord, a tweeté une photo d’un Hardee’s [chaîne de malbouffe] fermé avec la légende suivante : « Voilà ce qui arrive quand on prolonge trop longtemps les allocations de chômage et qu’on y ajoute un paiement de 1 400 dollars pour la relance ». Kevin McCarthy, alors chef de la minorité à la Chambre des représentants, a écrit que les démocrates « ont diabolisé le travail pour que les Américains deviennent dépendants d’un Grand gouvernement ». Les journalistes ont parcouru le pays et interrogé des propriétaires de petites entreprises qui ont attribué leurs problèmes d’embauche à l’aide fédérale. « Nous avons eu des employés qui ont choisi de toucher le chômage et de ne pas rester, ce qui m’a semblé incroyable », a déclaré Colin Davis, propriétaire du Chico Hot Springs Resort, dans le Montana. « Depuis quand tout le monde est-il devenu si paresseux ? » Cela semblait évident : l’Amérique ne se remettait pas au travail parce que nous payions les gens pour qu’ils restent chez eux.

Il s’est avéré que cette hypothèse était erronée. En juin et juillet 2021, vingt-cinq États ont interrompu tout ou partie des prestations d’urgence mises en place pendant la pandémie, y compris l’extension de l’assurance chômage. Il était donc possible de voir si ces États avaient bénéficié d’une hausse significative de leur taux d’emploi. Mais lorsque le département du travail a publié les données du mois d’août, nous avons appris que les cinq États ayant connu la plus forte croissance de l’emploi (Alaska, Hawaï, Caroline du Nord, Rhode Island et Vermont) avaient conservé tout ou partie des allocations. Les États qui ont réduit les allocations de chômage n’ont pas connu de croissance significative de l’emploi.

Pourquoi avons-nous adhéré si facilement à une histoire qui attribuait le taux de chômage élevé à l’aide gouvernementale, alors que nous disposions de tant d’autres explications ? Pourquoi n’avons-nous pas pensé que les gens ne retournaient pas au travail parce qu’ils ne voulaient pas tomber malades et mourir ? Ou parce que leur emploi n’était pas bon au départ ? Ou parce que les écoles de leurs enfants avaient fermé et qu’ils ne disposaient pas de services de garde fiables ? Lorsqu’on leur a demandé pourquoi de nombreux USAméricains ne retournaient pas au travail aussi vite que certains l’auraient souhaité, pourquoi avons-nous répondu Parce qu’ils touchent 300 dollars de plus par semaine ?

C’est peut-être parce que, depuis les premiers jours du capitalisme, nous avons été formés à considérer les pauvres comme des personnes oisives et démotivées. Les premiers capitalistes du monde ont été confrontés à un problème auquel les titans de l’industrie sont toujours confrontés : comment amener les masses à se rendre dans leurs usines et leurs abattoirs pour travailler pour un salaire aussi bas que le permettent la loi et le marché. Dans son traité de 1786, A Dissertation on the Poor Laws : By a Well-Wisher to Mankind [Dissertation sur les lois d’assistance publique, par un ami de l’humanité] , le médecin et ecclésiastique anglais Joseph Townsend propose une réponse. « Les pauvres ne connaissent guère les motifs qui poussent les plus hauts placés à agir - la fierté, l’honneur et l’ambition », écrit-il. « En général, seule la faim les incite à travailler. »

Mais une fois que les pauvres sont entrés dans les usines, il faut des lois pour protéger la propriété, des hommes de loi pour arrêter les intrus, des tribunaux pour les poursuivre et des prisons pour les détenir. Pour avoir beaucoup d’argent, il faut un grand gouvernement. Mais un grand gouvernement peut aussi distribuer du pain. Les premiers convertis au capitalisme considéraient l’aide aux pauvres non seulement comme une mauvaise politique, mais aussi comme une menace existentielle, susceptible de rompre la dépendance des travailleurs à l’égard des propriétaires. Conscients de cette réalité, les premiers capitalistes ont dénoncé les effets corrosifs de l’aide publique. En 1704, l’écrivain anglais Daniel Defoe a publié un pamphlet affirmant que les pauvres ne travailleraient pas pour un salaire si on leur donnait des aumônes. Cet argument a été répété à maintes reprises par d’éminents penseurs, dont Thomas Malthus dans son célèbre traité de 1798, An Essay on the Principle of Population (Essai sur le principe de population).

De nos jours, on entend toujours les mêmes arguments névrotiques. Lorsque le président Franklin Roosevelt, à l’origine du filet de sécurité usaméricain, qualifiait en 1935 l’aide sociale de drogue et de “destructeur subtil de l’esprit humain”, ou lorsque le sénateur de l’Arizona Barry Goldwater se plaignait en 1961 des “escrocs professionnels qui marchent dans les rues, qui ne travaillent pas et n’ont pas l’intention de travailler” ; ou lorsque Ronald Reagan, en campagne pour l’investiture présidentielle à la fin des années 1970, n’a cessé de parler d’un complexe de logements sociaux à New York où “vous pouvez obtenir un appartement avec des plafonds de 3 mètres et demi et un balcon de 6 mètres“ ; ou lorsque, en 1980, l’American Psychiatric Association a fait du “trouble de la personnalité dépendante” une catégorie diagnostique officielle ; ou lorsque l’écrivain conservateur Charles Murray a écrit dans son livre influent de 1984, Losing Ground [Perte de terrain], que « nous avons essayé de fournir plus aux pauvres et avons produit plus de pauvres à la place » ; ou lorsque le président Bill Clinton a annoncé en 1996 son plan pour “mettre fin à l’aide sociale telle que nous la connaissons” parce que le programme a créé un « cycle de dépendance qui a existé pour des millions et des millions de nos concitoyens, les exilant du monde du travail » ; ou lorsque le Conseil des conseillers économiques du président Donald Trump a publié un rapport approuvant les exigences de travail pour les plus grands programmes d’aide sociale du pays et affirmant que les politiques d’aide sociale de l’USAmérique ont entraîné un “déclin de l’autosuffisance”, ils ne faisaient que ressasser une vieille histoire - appelez-la la propagande du capitalisme - qui a été transmise d’une génération à l’autre : notre médicament (l’aide aux pauvres) est un poison.

20/03/2023

JEFFREY D. SACHS
La crise bancaire globale et l'économie mondiale

Jeffrey D. Sachs (bio) , 19/3/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La crise bancaire qui a frappé la Silicon Valley Bank (SVB) la semaine dernière s'est propagée. Nous nous souvenons avec effroi de deux contagions financières récentes : la crise financière asiatique de 1997, qui a entraîné une profonde récession en Asie, et la grande récession de 2008, qui a provoqué un ralentissement mondial. La nouvelle crise bancaire frappe une économie mondiale déjà perturbée par les pandémies, la guerre, les sanctions, les tensions géopolitiques et les chocs climatiques.


Emad Hajjaj

La crise bancaire actuelle trouve son origine dans le resserrement des conditions monétaires par la Fed (Réserve Fédérale US) et la Banque centrale européenne (BCE) après des années de politique monétaire expansionniste. Ces dernières années, la Fed et la BCE ont maintenu des taux d'intérêt proches de zéro et ont inondé l'économie de liquidités, notamment en réponse à la pandémie. L'argent facile a entraîné une inflation en 2022, et les deux banques centrales resserrent à présent leur politique monétaire et augmentent les taux d'intérêt pour lutter contre l'inflation.

Les banques comme la SVB reçoivent des dépôts à court terme et les utilisent pour réaliser des investissements à long terme.

Les banques paient des intérêts sur les dépôts et visent des rendements plus élevés sur les investissements à long terme. Lorsque les banques centrales augmentent les taux d'intérêt à court terme, les taux payés sur les dépôts peuvent dépasser les revenus des investissements à long terme. Dans ce cas, les bénéfices et le capital des banques diminuent. Les banques peuvent avoir besoin de lever davantage de capitaux pour rester sûres et opérationnelles. Dans des cas extrêmes, certaines banques peuvent faire faillite.

Même une banque solvable peut faire faillite si les déposants paniquent et tentent soudainement de retirer leurs dépôts, un événement connu sous le nom de panique bancaire (“bank run”). Chaque déposant se précipite pour retirer ses dépôts avant les autres déposants. Comme les actifs de la banque sont immobilisés dans des investissements à long terme, la banque n'a pas les liquidités nécessaires pour fournir de l'argent liquide aux déposants paniqués. Le SVP a succombé à un tel bank run et a été rapidement reprise par le gouvernement usaméricain. 

Les retraits massifs de capitaux sont un risque courant, mais ils peuvent être évités de trois manières. Premièrement, les banques doivent conserver suffisamment de capital pour absorber les pertes. Deuxièmement, en cas de bank run, les banques centrales devraient fournir aux banques des liquidités d'urgence, mettant ainsi fin à la panique. Troisièmement, l'assurance des dépôts par l'État devrait calmer les déposants. 

19/03/2023

Je suis la femme juive agressée sexuellement par un Arabe : ne vous servez pas de moi pour alimenter votre racisme

Anonyme, Haaretz, 19/3/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 Le nom de l'auteure est connu de Haaretz.

Il y a quelques semaines, les médias ont rapporté qu'une jeune femme juive avait été agressée sexuellement par un Arabe dans des toilettes publiques à Jérusalem. Plus tard, l'acte d'accusation contre lui a été publié et, mercredi 8 mars, la chaîne de télévision Channel 13 a diffusé un reportage sur le sujet dans son principal journal télévisé.

Je suis la Juive qui a été agressée. J'ai porté plainte auprès de la police non pas parce que je crois à la guerre ou à la vengeance, mais parce que je ne connaissais pas cet homme et que je n'avais donc aucun autre moyen de m'assurer qu'il ne ferait pas de mal à d'autres femmes, et que je n'avais pas non plus accès à d'autres solutions telles que la justice réparatrice.

Je ne sais pas pourquoi il était pertinent de noter qu'il était arabe, comme si son nom ne l'indiquait pas assez clairement. Les réactions en ligne étaient, comme on pouvait s'y attendre, pleines de violence, de haine et d'appels au meurtre d'Arabes.

L'agression s'est produite il y a plusieurs semaines, mais à la lumière du récent pogrom dans la ville palestinienne de Huwara et de la violence qui touche les deux camps, elle est particulièrement choquante. Parlons donc un peu de la “femme juive pure” et de “l'attaque terroriste”.

La première fois que j'ai été agressée sexuellement, j'avais 15 ans. L'agresseur était un “pur juif” issu d'un foyer si juif que sa mère lui interdisait, pour des raisons religieuses, de toucher le sexe opposé. Ayant observé les relations entre les membres de sa famille, je ne doute pas qu'elles aient influencé sa tendance à l'agression.