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29/07/2023

GIDEON LEVY
Quand Israël fait par inadvertance ce qu’il faut

Gideon Levy, Haaretz, 27/7/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La bonne nouvelle : les responsables militaires craignent que le refus des réservistes de servir (“non-volontariat”) n’affecte l’état de préparation au combat de l’armée israélienne. Encore mieux : Amos Harel a estimé, dans Haaretz mercredi 26 juillet, qu’à la lumière des brutalités policières à l’encontre des manifestants, les plus jeunes d’entre eux « réfléchiront à deux fois avant de s’enrôler pour servir » dans les territoires. Que demander de plus, une patrie ?

Des soldats israéliens pointent leurs armes tandis que d’autres arrêtent un Palestinien lors des affrontements qui ont suivi la démolition d’une maison palestinienne à Hébron, en Cisjordanie, ce mois-ci. Photo: MUSSA ISSA QAWASMA/ REUTERS

Il n’y a pas lieu de prendre à la légère la menace du chef d’état-major concernant les dommages qui résulteraient du refus de servir de milliers de réservistes, en particulier des pilotes. C’est le Premier ministre Benjamin Netanyahou qui a déclaré qu’Israël pourrait survivre avec quelques escadrons en moins. Cette remarque contient une vérité importante, même si nous ne pouvons plus croire un mot qui sort de sa bouche. L’expérience des dernières décennies, depuis la dernière bataille aérienne des pilotes, et la situation sécuritaire soulèvent la question de savoir si les Forces de défense israéliennes en général, et l’Armée de l’air israélienne en particulier, ne sont pas trop grandes, trop puissantes et trop gonflées.

Il ne s’agit pas seulement de la quantité scandaleuse de ressources que l’armée consomme, au détriment des besoins civils. L’excès de puissance des FDI les pousse à une hyperactivité inutile dans certains cas et désastreuse dans d’autres. Une réduction des forces - moins de pilotes et moins de soldats pour maintenir l’occupation et protéger les colons violents - pourrait faire du bien. Peut-être que non seulement les jeunes qui refusent de servir y réfléchiront à deux fois, mais peut-être que les FDI elles-mêmes y réfléchiront à deux fois avant chaque frappe aérienne inutile ou chaque raid d’arrestation encore plus inutile.

L’excès de pouvoir conduit à la surutilisation. Les meilleurs développements en matière de défense nécessitent de l’entraînement, et les soldats en surnombre doivent être occupés afin de les maintenir en alerte et de justifier leur conscription. Si plusieurs escadrons sont cloués au sol en raison du refus de leurs pilotes de servir, peut-être l’armée de l’air réduira-t-elle ses frappes aériennes secrètes et inutiles en Syrie et dans d’autres lieux mystérieux. Personne ne connaît leur but, leur efficacité et le moment où nous en paierons le prix. Personne ne le demande non plus.

À l’exception de ces missions et des préparatifs grandioses pour la mère de toutes les attaques aériennes contre l’Iran, qui ne sera jamais réalisée, il semble que l’armée de l’air n’ait pas grand-chose à faire, si ce n’est bombarder périodiquement la bande de Gaza impuissante ou le camp de réfugiés de Jénine. S’il n’y a pas assez de pilotes pour effectuer ces missions, non seulement la sécurité d’Israël ne sera pas compromise, mais elle pourrait même en bénéficier. Ces bombardements n’ont jamais empêché la résistance violente à l’occupation : ils n’ont fait que l’encourager, tout en commettant des crimes de guerre et en créant des tragédies humaines. Il serait donc préférable que les pilotes se reposent chez eux pendant un certain temps - jusqu’à la prochaine guerre, qui semble pour l’instant lointaine. Lorsqu’elle se rapprochera, on peut compter sur eux et sur les autres réservistes pour être les premiers à s’engager, que ce soit dans une semi-démocratie ou dans une semi-dictature.

Les jugements de Harel sur le refus attendu des soldats de servir dans les territoires sont porteurs d’espoir. L’une des réussites de la protestation est la légitimité qu’elle a conférée au refus de servir, pour la première fois dans l’histoire d’Israël. Il sera désormais plus difficile de qualifier les objecteurs de conscience de traîtres. On ne peut pas non plus ignorer le bénéfice qui pourrait résulter du fait de ne pas appeler les réservistes à servir dans les territoires [occupés depuis 1967]. Les territoires sont déjà saturés de soldats.

Voir des soldats assis jour et nuit à l’entrée des colonies illégales de Homesh et d’Evyatar, comme je l’ai fait cette semaine, suffit à faire exploser de rage. Voir les barrages routiers surgir sans rime ni raison, comme je l’ai vu cette semaine à l’entrée d’Anabta ou d’Emek Dotan, devant lesquels des centaines de voitures palestiniennes sont restées pendant des heures jusqu’à ce qu’ils soient enlevés sans raison, comme ils étaient apparus, c’est comprendre qu’il y a beaucoup trop de soldats qui s’ennuient dans les territoires.

L’excès de puissance a toujours été l’un des problèmes d’Israël. L’excès de puissance l’a conduit à l’arrogance, à la vantardise et à des guerres inutiles et l’a empêché de reconnaître les limites de sa puissance et de rechercher des alternatives. Peut-être que, par inadvertance, Israël fera ce qu’il faut et que nous aurons désormais une armée plus petite et plus intelligente, qui sera peut-être même un peu plus morale.

 

 

 

09/07/2023

AMEER MAKHOUL
Les raisons de l’échec de l’offensive israélienne contre Jénine

Ameer Makhoul, Middle East Eye, 7/7/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Les événements sur le terrain ont prouvé que la résistance palestinienne avait anticipé l’invasion israélienne et la manière de l’affronter dans le cadre d’une bataille entre deux parties inégales.

Une bannière portant un slogan de solidarité avec le camp de réfugiés de Jénine et des photos de combattants est suspendue autour d’une fontaine dans le complexe de la mosquée Al Aqsa à Jérusalem pendant la prière du vendredi, le 7 juillet 2023 (AFP)

Le ministre israélien de la défense, Yoav Gallant, s’est vanté que l’offensive contre Jénine avait “pleinement atteint” ses objectifs, affirmant que lorsque les combattants palestiniens reviendraient dans le camp de réfugiés, ils “ne le reconnaîtraient pas en raison de la gravité de l’attaque.

« La plupart d’entre eux ont quitté leur lieu de résidence, et ceux qui sont restés se sont cachés dans des endroits où ils étaient protégés par la population civile, comme les hôpitaux. C’est quelque chose qui indique plus que tout la lâcheté et le manque de courage qu’ils ont essayé de démontrer à l’extérieur », a déclaré Gallant.

La réaction de l’armée israélienne, en revanche, a été plus sérieuse. Elle a exprimé une réelle inquiétude quant à l’extension de la résistance et des tactiques palestiniennes - y compris l’utilisation d’engins explosifs - à diverses zones de la Cisjordanie occupée.

Gallant semble s’adresser au public israélien pour se promouvoir et accroître son influence politique en dissimulant l’échec de son offensive plutôt qu’en présentant une image honnête de ses résultats.

“Triomphe palestinien”

Cherchant à remonter le moral des Israéliens, Gallant s’est vanté que les combattants palestiniens avaient fui pendant l’attaque. Mais on peut aussi dire que l’armée israélienne - considérée comme l’une des plus avancées au monde et équipée de son aviation, de ses satellites, de ses forces d’élite et de sa technologie militaire de pointe - n’a pas réussi à avancer jusqu’au centre du camp de réfugiés de Jénine.

Au lieu de marcher, les soldats rampaient au sol pour éviter d’être pris pour cible. Lors de leur retrait du camp, il s’agissait plutôt d’une retraite en véhicules blindés et en véhicules de transport de troupes.

Les célébrations de la victoire des habitants du camp et des combattants après le retrait de l’armée israélienne ont été plus impressionnantes. Il s’agit de réfugiés dont les familles et les grands-parents ont été expulsés de Haïfa et de ses environs lors de la Nakba en 1948, et qui ont été récemment déplacés de leurs maisons que l’armée a saisies pour les utiliser comme boucliers et casernes militaires après les avoir détruites.

Alors que le déplacement a touché un tiers de la population du camp, cette scène populaire et spontanée de célébration illustre le triomphe palestinien.

Mais pourquoi le ministre israélien de la Guerre a-t-il utilisé le terme de “fuyards” pour désigner les résistants, dont le nombre ne dépasse pas quelques dizaines et qui ne possèdent aucune arme létale, alors que les médias militaires et civils israéliens les présentent comme une armée régulière dotée d’un arsenal militaire et d’un état-major ?

La réponse à cette question réside dans les objectifs de l’attaque contre Jénine, qui, comme l’ont indiqué les médias israéliens avant l’attaque, visait à transformer le camp de Jénine en un “cimetière pour terroristes”. Ron Ben-Yishai, analyste militaire israélien pour Ynet, a soulignéla “déception de l’armée face au faible nombre de morts” parmi les combattants palestiniens.

Steve Bell, The Guardian

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et Gallant considèrent le camp de Jénine comme la “capitale du terrorisme, tandis que l’agence israélienne de sécurité, le Shin Bet, a déclaré que l’objectif était d’éliminer l’“infrastructure terroriste” et les “capacités de combat avancées, y compris le développement de capacités rudimentaires de lancement de roquettes”.

Cependant, le directeur général de l’Institut pour les études de sécurité nationale et ancien chef de la division du renseignement militaire, le général Tamir Hayman, a estimé que la résistance “vit dans le cœur des Palestiniens” et n’a pas de capitale, et qu’elle ne peut donc pas être éliminée en prenant d’assaut le camp de Jénine.

Hayman a ajouté qu’Israël n’avait “que l’option militaire sans aucun horizon politique”.

Une nouvelle Nakba

Si nous considérons qu’il s’agit là de l’objectif central du gouvernement israélien, il n’a finalement pas réussi à l’atteindre. La résistance n’a pas été éliminée, pas plus que ses capacités ou les connaissances accumulées dans l’art du combat et de la confrontation.

Au contraire, les événements sur le terrain ont prouvé que la résistance avait anticipé l’invasion de l’armée d’occupation, surveillé ses mouvements et déterminé comment, où et quand l’affronter dans le cadre d’une bataille entre deux parties inégales. Les Palestiniens ont tenu bon face à l’arsenal de guerre israélien.

Un autre objectif israélien était de cibler la base populaire palestinienne, c’est-à-dire le peuple palestinien dans son ensemble et les résidents du camp en particulier, en les considérant comme faisant partie de l’“infrastructure terroriste”.

C’est la principale raison pour laquelle les civils ont été pris pour cible, les infrastructures ont été complètement détruites, l’eau, l’électricité et les services de communication ont été coupés, et 5 000 personnes ont été forcées de quitter leur maison, ce qui a rappelé aux Palestiniens la Nakba.

La destruction de biens, en revanche, leur rappelle les attaques menées par des bandes de colons, qui ont notamment incendié des villages et détruit des biens à Huwwara, Turmus Ayya, Um Safa et Masafer Yatta.

Les objectifs de ces diverses opérations sont intégrés et interdépendants. Ils sont alignés sur l’idéologie sioniste religieuse dominante qui donne la priorité à un “projet de résolution” pour les Palestiniens - en d’autres termes, au nettoyage ethnique - et à l’annexion plutôt qu’à l’occupation.

Cette idéologie vise à créer une situation où les Palestiniens ont intérêt à quitter leur patrie. Ce projet a été formulé par le ministre de la Sécurité, Betzalel Smotrich, qui est également le chef du parti Sionisme religieux et le responsable de la gestion des affaires et de la colonisation en Cisjordanie occupée.

L’occupation a cherché à étouffer la conscience des Palestiniens, à terroriser la population par des destructions massives et des expulsions, et à leur faire payer le prix d’avoir été l’incubateur populaire de la résistance.

Prélude à une autre vaste offensive sur la région nord de la Cisjordanie, dont Naplouse, l’objectif politique central de l’offensive contre Jénine est une reconfiguration démographique du nord de la Cisjordanie par l’installation de colons. Cette offensive intervient après l’annulation par le parlement israélien, en mars 2023, de la loi de 2005 sur le désengagement, qui prévoyait le retrait d’Israël de la bande de Gaza et des régions du nord de la Cisjordanie, et après le rétablissement de la colonie illégale de Homesh.

L’objectif est de construire des dizaines d’avant-postes dans la région, de la judaïser et de l’annexer conformément aux accords de coalition.

Politique d’annexion

Pour l’occupation, la réalisation de cet objectif passe par l’élimination de la résistance dans cette zone et la marginalisation du rôle de l’[In]Autorité palestinienne, d’autant plus que la résistance vise l’armée et les colons israéliens. Les colons israéliens ne déménageront pas pour vivre dans cette zone à moins que l’État ne leur assure la sécurité et la tranquillité, ce qui se fera aux dépens des Palestiniens.

Cela signifierait l’échec du projet de judaïsation et de colonisation du nord de la Cisjordanie, et un échec temporaire, au moins, du projet d’annexion, auquel les Palestiniens résisteront.

 Ce projet était initialement marginal dans la politique israélienne, mais il a pris de l’importance après que l’ancien président Donald Trump l’a approuvé, et suite à la montée en puissance du sionisme religieux, qui a une influence significative sur la politique israélienne et une forte conviction idéologique.

Cela pourrait conférer au projet d’annexion un poids politique alors que certains de ses aspects sont mis en œuvre sur le terrain dans les territoires palestiniens, dans le cadre de ce que l’on appelle l’annexion de facto, sans l’annoncer officiellement.

Les résultats de l’attaque contre Jénine ont été décevants pour ceux qui s’accrochaient au projet d’annexion.

 Par une décision politique, l’armée israélienne a cherché à procéder à une expulsion massive des réfugiés palestiniens du camp, ce qui montre que la mentalité du déplacement et de la Nakba est toujours profondément ancrée dans le régime israélien. Il y a des gens qui la soutiennent et plaident pour sa mise en œuvre.

Cependant, les Palestiniens ont réagi en retournant chez eux immédiatement après le retrait des forces d’occupation, tandis qu’une partie importante de la population a refusé de quitter son domicile malgré les menaces des soldats israéliens.

La mentalité de la Nakba et du déplacement n’a pas changé, mais la mentalité des Palestiniens, elle, a changé. Ils ne veulent pas quitter leurs maisons, leurs villes ou leurs terres. Ils insistent pour rester chez eux, quelle que soit la gravité de l’occupation ou de l’agression.

Pour les forces israéliennes, en particulier lors des opérations militaires, les Palestiniens sont des ennemis où qu’ils se trouvent et doivent être pris pour cible en tant que tels.

Sur le plan politique, Netanyahou a réussi sur deux points importants. Sur le plan intérieur, il a obtenu le soutien des chefs de l’opposition parlementaire concernant l’attaque et la décision du gouvernement. Il a également bénéficié du soutien unanime du consensus national sioniste, y compris de l’opposition populaire, qui n’a pas pris position contre l’agression, tandis que les grandes manifestations qui ont balayé le pays “pour la démocratie” ont ignoré l’opération.

Sur le plan international, Netanyahou a reçu un soutien sans équivoque de la part de l’administration Biden, ainsi que de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne, qui ont soutenu “le droit d’Israël à protéger ses citoyens” et condamné “le terrorisme palestinien”.

Selon les sondages, la popularité de Netanyahou a augmenté, d’autant plus que la société et les médias israéliens ne se soucient pas du nombre de victimes palestiniennes ni de l’ampleur des destructions. Ils se concentrent principalement et uniquement sur les pertes israéliennes.

La situation palestinienne fait l’objet d’une agression israélienne permanente dont les méthodes peuvent changer, mais dont l’essence persistera toujours.

La classe politique au pouvoir n’a aucune perspective de solution juste ni même de gestion efficace de l’occupation et du conflit. Elle s’appuie principalement sur la force militaire pour faire face aux crises ou les reporter. Mais en réalité, chaque agression provoque l’inverse des buts recherchés.

La résistance sortira de la récente offensive plus déterminée, plus expérimentée et avec un soutien populaire plus large.

Israël cherchera à provoquer des dissensions internes aux Palestiniens, notamment entre les deux principales factions politiques, le Fatah et le Hamas, afin d’atteindre ses objectifs militaires par l’intermédiaire des Palestiniens. C’est actuellement le scénario le plus dangereux.

L’agression d’Israël n’a pas changé les règles du jeu, mais a plutôt renforcé la politique israélienne persistante. L’armée d’occupation s’est peut-être retirée du camp de Jénine, mais sa prochaine offensive n’est qu’une question de temps, et le compte à rebours a déjà commencé.

La protection des Palestiniens est donc une nécessité urgente et doit devenir une priorité absolue.


Saad Hajo

07/06/2023

MICHAEL SFARD
Protestataires israéliens, au lieu de “Démocratie”, scandez “Apartheid” !

Michael Sfard, Haaretz, 7/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Michael Sfard (Jérusalem, 1972) se définit comme « avocat israélien des droits de l’homme, et pourtant, optimiste ». Fils de dissidents polonais chassés de Pologne en 1968, petit-fils du sociologue Zygmunt Bauman, il travaille principalement à la défense des droits humains dans les territoires occupés par Israël depuis 1967. Il contribue aussi à divers journaux, dont Haaretz et le New York Times, qui l’a appelé en 2012 “le principal avocat de la gauche en Israël”. On peut lire de lui en français Le dernier espion (avec Marcus Klingberg, Nouveau monde 2015) et Le mur et la porte — Israël, Palestine, 50 ans de bataille judiciaire pour les droits de l’homme (Zulma 2020).

Cette semaine marque la fin de la 56e année d’occupation. Le fait que tant de temps se soit écoulé signifie que la grande majorité des millions d’êtres humains qui vivent sous l’occupation israélienne ont grandi sous celle-ci.

Willem, 2017

Ils n’ont jamais vécu un seul jour sans répression ni dépossession, et ne connaissent pas une réalité dans laquelle ils seraient des citoyens participant à la prise des décisions qui affectent leur vie.

Certains d’entre eux ont déjà des petits-enfants, qui sont eux aussi nés dans un monde où un Israélien armé décide de tout : s’ils pourront aller à l’étranger, s’ils seront autorisés à accéder au verger familial, s’ils pourront aller prier à Jérusalem, si le fils de Gaza sera autorisé à dire au revoir à sa mère mourante qui vit en Cisjordanie.

Mais le soldat n’est pas le seul problème pour les personnes vivant sous l’occupation. Car à côté de l’Israélien armé en uniforme, il y a aussi un Juif armé d’un fusil, d’un gourdin ou d’une pierre, qui ne porte pas d’uniforme. Et le Juif sans uniforme vole leurs terres, déracine ce qu’ils ont planté, s’en prend à leurs troupeaux, brûle leurs maisons, les blesse et même les tue. Le Juif sans uniforme mène une guerre totale pour anéantir la vie des Palestiniens dans les zones ouvertes de la Cisjordanie.

Voici un aperçu incomplet des événements qui se sont déroulés en l’espace de quatre jours il y a une semaine. Il montre que les Juifs sans uniformes ont une productivité qui ne ferait pas honte aux bandes antisémites de notre histoire.

Lundi, des colons sans foi ni loi ont achevé le nettoyage ethnique de la petite communauté bédouine d’Al-Samia, au nord-est de Ramallah. Ces 27 familles avaient loué la terre et s’y étaient installées il y a 40 ans, après avoir subi une série de déplacements forcés, dont le dernier pour permettre l’établissement de la colonie de Kochav Hashahar.

Je leur ai rendu visite il y a environ un an et demi avec des membres de l’organisation humanitaire Comet-ME, qui a installé un système d’électricité solaire et les a ainsi aidés à vivre avec un minimum de dignité. Au cours de cette visite, ils nous ont raconté que les colons violents de deux avant-postes agricoles érigés au sommet de collines voisines les empêchaient, par des actes de violence graves, de faire paître leurs troupeaux, vandalisaient leurs champs et profanaient leur espace de vie à l’aide de gourdins et de chiens.

Au cours des deux dernières années, les attaques étaient devenues plus sauvages et incessantes. Ce lundi-là, ils en ont eu assez. Une nouvelle attaque nocturne sur leurs maisons et la crainte pour la sécurité de leurs enfants les ont amenés à décider de démonter eux-mêmes leurs maigres cabanes et tentes et de partir, le diable seul sait où. Alors qu’ils étaient encore en train de charger leurs affaires dans un camion, un colon avait déjà commencé à faire paître son troupeau dans leur champ de blé.

Le mercredi de la même semaine, des colons ont perpétré un mini-pogrom dans le village de Burqa, sur les terres duquel se trouve l’avant-poste de Homesh. Ils ont incendié une caravane et quelques maisons en représailles au fait que les habitants du village avaient accueilli une délégation de l’Union européenne.

Jeudi, des colons ont commencé à aplanir illégalement les terres de Burqa, dans le cadre de leur plan de reconstruction de Homesh et pour empêcher les propriétaires palestiniens de ces terres d’y retourner. Le gouverneur de facto de la Cisjordanie, le ministre des Finances Bezalel Smotrich, a ordonné aux autorités de ne pas appliquer la loi et de ne pas arrêter les travaux.

Le lendemain, les colons ont incendié des voitures et des terres agricoles dans deux villages au nord-est de Ramallah. Ils ont également tiré sur un Palestinien, le blessant grièvement.

Et c’est ainsi que l’un en uniforme et l’autre sans uniforme dépouillent les Palestiniens, couche par couche, de tout ce qui rend la vie humaine : la capacité de maintenir une vie de famille, de gagner sa vie, de jouir de la sécurité et de faire les choix qui constituent le parcours de chaque personne vers la réalisation de ses talents et l’atteinte de son bonheur. Que quiconque est prêt à vivre ainsi lève la main.

Un autre événement s’est produit cette semaine-là. Les éditeurs de l’édition hébraïque de wikipédia ont rejeté une proposition visant à rétablir l’entrée sur la “violence des colons”. Cette entrée a été supprimée en 2019 (elle existe toujours dans la version anglaise, sous le nom de "Israeli settler violence" [et arabe, sous le nom de عنف المستوطنين”, mais dans aucune autre langue, NdT]), au motif qu’elle reflète “une segmentation arbitraire de la population et un parti pris politique”, et parce que la violence en question “n’est pas caractéristique des seuls colons”.

Réjouissez-vous, chantez et dansez, il n’est pas nécessaire d’éradiquer le phénomène qui salit l’image d’Israël chez les Gentils ! Il suffit de l’effacer de wikipédia.

Mais contrairement aux films de science-fiction, dans la vie réelle, l’effacement de cette entrée ne ramènera pas les habitants d’Aïn Samia dans leur village, n’enlèvera pas la balle du corps du blessé, ne replantera pas les dizaines de milliers d’oliviers que les colons ont déracinés au fil des ans et ne remettra pas les voitures, les maisons et les magasins de Huwara dans l’état où ils se trouvaient avant cette orgie nocturne de violence raciste et fasciste, en février dernier.

C’est peut-être un cliché, mais on ne peut résister à la tentation de dire que les éditeurs de wikipédia en hébreu sont comme ce bébé qui se cache les yeux et qui est certain que le monde n’existe plus. Sauf que le bébé est innocent, et qu’eux ne le sont pas. Il ne fait que se voiler les yeux, alors que les éditeurs de wikipédia essaient de voiler les yeux de tout le monde.

En fin de compte, ce ne sont que d’autres juifs israéliens, cette fois avec des claviers, qui participent à l’effacement de la vie des Palestiniens. Non pas avec des gourdins ou des bidons d’essence, mais avec un acte politique offensif d’effacement - et donc de négation - du statut de victime de ceux-ci.

Néanmoins, il y a une part de vérité qui se cache derrière la suppression de l’entrée sur la “violence des colons”, même si ce n’est pas pour les raisons invoquées par ces rédacteurs nationalistes. Car ce n’est pas seulement la suppression, mais aussi l’accent excessif mis sur les colons en tant que source de la violence à l’égard de la nation occupée qui déforme une caractérisation correcte du mal de l’occupation.

La violence israélienne à l’égard des peuples vivant sous notre domination est une violence d’État. Il s’agit d’un projet national - une entreprise commune à toutes les composantes de la nation, chacune selon ses capacités et ses talents.

Les centaines de colons qui ont incendié Huwara l’ont fait avec l’aide des milliers de policiers qui n’étaient pas là et des bataillons de soldats qui étaient là mais n’ont rien fait. Le vol des champs d’Aïn Samia s’est produit grâce à une armée et à une police qui n’ont ni empêché le vol, ni arrêté les coupables par la suite, et qui, par principe, ne jugent pas les voleurs juifs.

Mais fermer les yeux n’est que le petit péché des autorités. La quantité de terres volées aux Palestiniens et transférées aux colons par le biais des mécanismes officiels d’expropriation et d’attribution est mille fois supérieure à la quantité volée par le biais de la violence “privatisée”. Les ressources pillées dans le territoire occupé par les entreprises israéliennes sont mille fois plus importantes que celles pillées par les avant-postes agricoles violents. Les avocats et les juges, tant militaires que civils, ont davantage contribué à l’élimination des droits fondamentaux de millions de personnes que tous les abus des “jeunes des collines” réunis.

Les Juifs israéliens armés de fusils, de gourdins, de claviers, de stylos et de portefeuilles sont les occupants ultimes. Et même si nombre d’entre eux se retrouvent parmi les manifestants qui protestent contre le bouleversement juridique prévu par le gouvernement dans la rue Kaplan à Tel-Aviv, là-bas, dans le royaume de l’occupation, ils ne sont pas vraiment en faveur de la “démocratie”, comme ils le scandent à Tel-Aviv. Là-bas, ils pérennisent, renforcent et appliquent l’apartheid.

Bienvenue dans la 57e année.

14/01/2023

MORAN SHARIR
Le journaliste Israel Frey : « Si j’étais palestinien, j’aurais été arrêté et on m’aurait fait disparaître »

Moran Sharir, Haaretz, 13/1 /2023
Traduit par 
Fausto Giudice, Tlaxcala

Il a été arrêté pour ne pas s’être présenté à un interrogatoire de police à la suite d’un tweet qu’il avait posté. La droite israélienne l’a catalogué comme un ennemi de l’État, pour d’autres, il est le héros du jour. Qui est le journaliste ultra-orthodoxe juif Israel Frey ? Qu’est-ce qui le motive et pourquoi ne regrette-t-il pas ses actes malgré le prix élevé qu’il paie ?

 

Israel Frey. « Comment ces franges ésotériques sont-elles devenues celles qui gèrent tous nos systèmes de vie ? Par une seule chose : la haine des Arabes, le racisme, le fascisme - dont les fondations sont posées dans les territoires ». Photo Ilya Melnikov

Israel Frey attend devant une shul [synagogue] au nord de Tel Aviv. La rue tranquille exhale un parfum de laïcité israélienne : vieilles maisons dans le quartier de Ramat Hahayal, villas dans le quartier huppé de Tzahala, bureaux de haute technologie et de communication dans le complexe de Kiryat Atidim ; tours d’habitation dans le quartier autrefois pauvre, aujourd’hui embourgeoisé, de Neve Sharett.

Au milieu de tout cela se niche une petite île ultra-orthodoxe, ou haredi. Des maisons basses d’une teinte rosée, des synagogues, des affiches mettant en garde contre les dangers d’Internet. Dans les rues voisines, les gens promènent leurs chiens ; ici, ils marchent avec des sacs à phylactères en velours. La tradition a préservé le caractère de ce micro-quartier comme dans du formol.

Israel Frey a grandi ici avec trois frères et sœurs dans une famille affiliée à la secte hassidique Gur. Non loin de la shul, il y a une petite allée qui porte le nom de son grand-père, le rabbin Yehuda Meir Abramovicz, qui a été maire adjoint de Tel Aviv et membre de la Knesset pour le parti Agudat Israel. Frey vit aujourd’hui à la frontière entre Ramat Gan et Bnei Brak, une ville majoritairement haredi, mais il vient prier dans cette shul qu’il connaît depuis son enfance.

En ce jour particulier de mi-décembre, il était toujours recherché pour un interrogatoire de police à la suite d’un tweet qu’il avait posté deux mois plus tôt. Frey avait fait l’éloge de Mohammed Minawi, originaire de Naplouse, qui avait éveillé les soupçons de la police et avait été arrêté par celle-ci à Jaffa alors qu’il allait commettre un attentat à Tel Aviv. Selon les rapports de l’époque, Minawi - porteur d’un engin explosif et d’une arme improvisée - avait pour objectif de tuer des soldats israéliens mais pas de blesser des civils.Haut du formulaire

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« Regardez quel héros il est », a gazouillé Frey dans son désormais célèbre message. « Il a fait tout le chemin de Naplouse à Tel Aviv, et même si tous les Israéliens qui l’entourent participent d’une manière ou d’une autre à l’oppression, à l’écrasement et au meurtre de son peuple - il a quand même cherché des cibles légitimes et a évité de blesser des innocents. Dans un monde juste, il aurait reçu une médaille ».

Ce tweet a finalement conduit Frey à être licencié de son poste de journaliste sur la chaîne internet DemocraTV (le prétexte exact de son licenciement est contesté ; nous y reviendrons plus tard). En outre, il a fait de lui une personne recherchée par la police, et à la fois la cible d’une aversion généralisée dans le pays et un symbole de courage et de liberté d’expression aux yeux des autres.

Le fait que Frey ait été convoqué pour être interrogé au sujet d’un tweet politique moins d’un mois après les élections du 1er  novembre a conduit à la conclusion logique qu’il s’agissait simplement de l’ouverture de la persécution des journalistes et de la réduction au silence des opinions de gauche. Il est vrai que le tweet de Frey était très inhabituel, puisqu’il apportait essentiellement un soutien implicite au meurtre de soldats en plein cœur de Tel Aviv. Fin décembre, il a été placé en garde à vue par la police pour avoir refusé de se présenter à un interrogatoire, après avoir été accusé d’incitation présumée au terrorisme et à la violence.

L’histoire de Frey est inquiétante et suscite de réelles craintes quant à la politique de répression du nouveau gouvernement de droite dure. Immédiatement après l’arrestation de Frey, Rogel Alpher, chroniqueur au Haaretz et critique de télévision, a établi un parallèle entre cette arrestation et celle des opposants au régime en Russie ; Anat Kamm a averti dans sa chronique que « demain, cela pourrait être chacun d’entre nous ».

Frey, qui aura 36 ans le mois prochain, a attiré beaucoup d’attention. Il est impossible de l’ignorer, mais il est facile de le considérer comme une sorte d’anomalie. Avec ses opinions de gauche que le courant dominant en Israël ne peut tolérer, Frey, barbu et portant la kippa, est perçu par beaucoup comme "farfelu", "hors norme", "bizarre", "extraterrestre" et autres termes péjoratifs. Certains affirment, à tort, qu’il appartient à la secte hassidique antisioniste Satmar ou au groupe Neturei Karta, qui ne reconnaît pas l’État d’Israël. D’autres le considèrent comme faisant partie d’un nouveau courant de jeunes haredim de gauche. La vérité est que Frey est un homme-orchestre, totalement individualiste au sein d’une communauté hassidique homogène qui ne sait pas quoi faire de lui.

Ses papillotes sont repliées derrière ses oreilles et il porte des lunettes à monture moderne. C’est une personne calme et affable qui ne semble pas s’énerver ; il est poli et parle avec raison. Il aime s’exprimer, mais il est manifestement stressé par l’exposition qu’il reçoit dans ce journal et ailleurs.

Le tweet qui a fait que Frey a été convoqué pour un interrogatoire : « Regardez quel héros il est. Il a fait tout le chemin de Naplouse à Tel Aviv, et même si tous les Israéliens qui l’entourent participent d’une manière ou d’une autre à l’oppression, à l’écrasement et au meurtre de son peuple - il a quand même cherché des cibles légitimes et a évité de blesser des innocents. Dans un monde juste, il aurait reçu une médaille ».

« Je suis très vigilant à propos de ma vie privée », dit Frey, tout en conduisant et en fumant une cigarette électronique, une jambe rebondissant nerveusement.

« Pour tous ceux qui me voient de l’extérieur, il semble que j’aime vraiment être l’histoire », note-t-il. « Je me distingue parce que je suis un Haredi et que je me retrouve de temps en temps dans des tempêtes comme celle-ci. J’essaie vraiment de ne pas être l’histoire. Je veux faire passer mes idées. C’est terriblement intéressant de faire de moi une curiosité. Pas dans le sens négatif, mais pour être le journaliste courageux, courageux, courageux, courageux, courageux et toute cette merde ».

Frey se gare au cœur du quartier aisé de Tzahala, qui était autrefois principalement habité par d’anciens officiers des Forces de défense israéliennes et qui est aujourd’hui caractérisé par des hôtels particuliers. Le café est bondé à l’heure du midi. Le menu n’est pas casher, la clientèle est très clairement laïque. Frey hésite, il n’est pas sûr de se sentir à l’aise ici. Il propose de s’asseoir pour l’instant et commande un grand cappuccino. Quand il arrive, il n’oublie pas de réciter la bénédiction appropriée.

Pourquoi refuses-tu de te présenter pour un interrogatoire ?

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« Parce qu’ils n’ont aucune raison de me convoquer. J’ai écrit un tweet, j’ai exprimé une idée très simple, très légitime, très importante. Dans le nouveau climat, qui devient de plus en plus fasciste, les gens pensent qu’il est normal de convoquer [d’autres personnes] pour les interroger parce qu’elles ont exprimé une opinion qui, en fin de compte, est une simple perception de la réalité ici. Quiconque n’accepte pas qu’il y ait une différence entre attaquer des innocents et attaquer des soldats ne veut pas parler du fait qu’il y a un conflit ici. Sans parler de la base des faits : que nous vivons dans un endroit où un côté est plus haut et un autre côté est plus bas. Que veulent-ils de ma vie ? C’est vous tous qui êtes le problème - je ne suis pas le problème ».

Est-ce qu’ils continuent à te convoquer ?

« Hier matin, le policier m’a encore appelé et m’a dit... » - au milieu de la phrase, le smartphone de Frey sonne. C’est un numéro non identifié. Frey : « C’est peut-être eux. Bonjour. Oui. Salutations ».

Il y a une lutte de personnes sous oppression active contre un oppresseur. Cela doit faire partie de notre définition, c’est ce que je veux exprimer. Il y a une différence entre blesser des innocents et blesser des soldats en uniforme.

Israel Frey

La voix à l’autre bout de la ligne : « Je t’ ai convoqué pour un interrogatoire le 19 à 9 heures à la station Lev de Tel Aviv ».

« Ok ».

04/09/2022

GIDEON LEVY
Quand le Shin Bet est plus gentil que la Cour suprême d'Israël

 Gideon Levy, Haaretz, 4/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice

La bataille sur le caractère, le statut et la composition de la Cour suprême d’Israël est réservée aux experts, et est beaucoup moins importante qu'on ne le pense généralement. C'est comme la bataille sur le caractère du tribunal militaire de la prison d'Ofer, ou la composition de l'orchestre de l’armée. On peut en débattre, écrire des articles d'opinion percutants, faire des discours enflammés et même descendre dans la rue, mais le tribunal militaire d'Ofer restera le tribunal militaire d'Ofer, et l'orchestre des FDI jouera les mêmes marches. Même si Lahav Shani, le directeur musical de l'Orchestre philharmonique d'Israël, dirigeait l'Orchestre des FDI et que le célèbre avocat des droits civils et humains Avigdor Feldman était président du tribunal militaire, cela n'en ferait pas un véritable orchestre ou un véritable tribunal.

La même chose est vraie, croyez-le ou non, de la Cour suprême, appelée Haute Cour de justice lorsqu'elle siège en tant que cour constitutionnelle. Elle est pieds et poings liés au récit national qui, à ses yeux, croyez-le ou non, l'emporte sur tout autre principe. La cour d'Ofer et la cour de Jérusalem sont subordonnées aux mêmes principes et au même establishment de défense presque dans la même mesure ; toutes deux en sont des sous-traitantes. Des luttes passionnées sont menées sur la composition de la Cour suprême, sur le nombre de juges libéraux par rapport aux juges conservateurs - sur les questions essentielles, le résultat est le même. Une seule et même voix, même au sein de la Cour.

À cet égard, la Cour est un étonnant reflet de la société israélienne : à la Cour suprême, comme en politique, les différences entre les individus sont beaucoup, beaucoup plus faibles qu'on ne le dit généralement. Lorsqu'il s'agit de valeurs fondamentales, il n'y a pas de différences. Maintenir la suprématie juive au-dessus de toute autre valeur ; placer les considérations sécuritaires au-dessus de toutes les autres ; ignorer complètement le droit international, comme s'il n'existait pas ; et obéir aveuglément, automatiquement et inconditionnellement aux jeux de pouvoir et de contrôle de l'establishment de la défense - et la Cour suprême capitule sans aucune honte.

Lorsqu'il y a une bataille sur la composition de la Cour suprême des USA, il est clair pour tous que c'est une bataille qui va façonner le visage de la société pour les années à venir, de l'avortement aux lois sur les armes à feu. Aux USA, vous savez qu'un juge libéral sera libéral et qu'un juge conservateur sera conservateur. En Israël, ils suivront tous la même ligne, se blottiront tous dans le giron chaleureux du consensus militaire, et aucun des juges, pas même le dernier des libéraux, n'osera adopter une position différente.


Khalil Awawdeh

La semaine dernière, la Cour a démontré, de façon si typique, son attitude de carpette envers l'establishment de la défense, mais cette fois-ci, sa conduite a pris des proportions grotesques. Il est difficile de trouver quelque chose de plus ridicule que la façon dont la plus haute cour du pays ferme les yeux, endurcit son cœur et prononce un “oui” soumis aux caprices du service de sécurité du Shin Bet, et la façon dont le Shin Bet se moque d'elle. Le Shin Bet a manqué de respect à la cour, l'a ridiculisée et humiliée, et la cour l'a encore une fois cru lorsque l'agence lui a craché au visage en disant qu'il pleuvait. Il n'y a aucune entité dans le pays, à part l'establishment de la défense et les colons - allez à Homesh et voyez comment les colons se moquent des sentences de la cour, avec le soutien de l'armée - qui puisse faire de la Cour la risée de tous.

La Haute Cour a rejeté la demande de libération du détenu administratif Khalil Awawdeh, qui a fait une grève de la faim de six mois, au motif que son état n'a pas changé et que sa détention sans charges est justifiée. Le lendemain, le Shin Bet a annoncé sa libération, crachant au visage des juges. Soudain, il s'avère que le cruel Shin Bet est plus humain que la Haute Cour. C'est la façon dont l'agence punit la Cour et les juges “libéraux” qui ont également rejeté la requête, les juges Anat Baron et Khaled Kabub. Soudain, il est devenu évident qu'il n'y a aucune différence entre eux et le juge Alex Stein, et entre eux tous et le juge Noam Sohlberg, un colon.

La guerre sur le caractère de la Cour suprême a été réglée il y a longtemps. La prochaine commission des nominations judiciaires pourra choisir les juges en jouant à pile ou face. Peu importe qui formera le prochain gouvernement. Tant que perdurera la situation dans laquelle le gouvernement soutient la perpétuation de l'apartheid, une chose est sûre : quelle que soit la composition de la Cour suprême, elle le soutiendra et cautionnera tous ses crimes. L'apartheid a des collaborateurs à Jérusalem.