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05/01/2023

JAVIER SANCHEZ SALCEDO
Tesh Sidi : “On ne peut pas romantiser la pauvreté”

Javier Sánchez Salcedo, Mundo Negro, 29-12-2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Javier Sánchez Salcedo est un reporter, photographe et documentariste espagnol. Au cours des 20 années où il a travaillé pour la maison d'édition Mundo Negro des Missionnaires Comboniens, il a réalisé des documentaires dans différents pays d'Afrique et d'Amérique latine, ainsi que des reportages et des photographies pour d'autres reportages. Il est l'auteur du livre Irreversibles .

« Je suis née dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf (Algérie) en 1994. Je suis venue en Espagne quand j'avais sept ans. Je suis ingénieure informatique et je travaille dans le monde du big data dans le secteur bancaire. J'ai créé et coordonne la plateforme numérique SaharawisToday ».

Tesh Sidi, informaticienne et activiste

J'aimerais que tu me parles de ton  enfance.

Je suis née dans les années 1990, à une époque très difficile pour les réfugiés sahraouis qui venaient de s'installer définitivement dans les camps. Il n'y avait rien, pas de lait pour les enfants et pas d'eau à la maison. Les mères ont échangé leurs enfants pour pouvoir les allaiter. Quand mon frère jumeau et moi sommes nés, nous avons failli mourir. En fait, nous avons tous eu des problèmes de santé. Ma mère, qui était anémiée, n'avait aucune ressource. Nous étions plusieurs frères et sœurs et elle n'avait pas d'autre choix que de me laisser avec ma grand-mère. J'étais avec elle de l'âge de quatre à sept ans en Mauritanie.

Tu te souviens bien de ce que tu as vécu pendant ces années ?

Je dis toujours que nous, les Sahraouis, sommes nés plus vieux. En raison des circonstances, nous sommes amenés à résister et tu ne peux pas te plaindre. La société et le contexte vous obligent à mûrir et à grandir rapidement. Oui, j'ai des souvenirs de cette époque avec ma grand-mère. J'étais une bédouine qui ne savait qu'élever et traire des chèvres et je n'ai jamais été avec des enfants. Ces années-là, j'ai vécu avec des adultes et des animaux. Quand je n'avais que six ans, je savais comment faire les choses d'une femme plus âgée. À sept ans, je suis retourné dans les camps de Tindouf, en Algérie, avec mon frère jumeau, ma mère, mon père et six autres frères et sœurs. Ce fut un choc identitaire, j'ai dû apprendre à les aimer, car ces liens fraternels n'avaient pas été construits auparavant.

Cela n'a pas dû être facile.

En Mauritanie, je vivais en dehors des systèmes d'éducation et de santé. Je ne savais ni lire ni écrire. J'ai eu des pensées et j'ai fait le travail d'une adulte. Quand on m'a envoyée à l'école, j'ai dû me rendre compte que j'étais un enfant, que j'avais une famille et que je vivais en société. Je ne peux pas romancer mon histoire et dire que j'ai eu une enfance heureuse. C'est celle que j'ai eue, l'enfance de tout enfant en conflit. On ne peut pas romantiser la pauvreté. Je n'ai pas mangé de yaourt ni goûté de chocolat avant de venir en Espagne, et je n'avais pas non plus accès à quelque chose d'aussi élémentaire que la viande. Maintenant, je vois que mes neveux et nièces ont cela dans le camp, mais ils vont subir d'autres problèmes : problèmes d'identité, exil, conflits armés... Ils ne seront pas exempts de tout cela. La vie dans les camps ne peut pas être romantisée.

Tesh Sidi le jour de l'entretien. Photo : Javier Sánchez Salcedo

Pourquoi es-tu venue en Espagne ?

Je suis arrivée quand j'avais presque huit ans dans une famille d'accueil à Alicante. Si arriver dans les camps en Mauritanie était un changement de monde, venir ici était un changement de planète, de galaxie et de tout. J'avais peur des bâtiments car je ne comprenais pas qu'ils puissent être si hauts. Dans les camps, les petites maisons en adobe sont à ta ta taille, accessibles à ta taille ou à celle d'un adulte, mais je suis arrivée et j'ai trouvé des immeubles très hauts, des gens qui se pressent, du bruit, des feux de signalisation, tout pour « allez, allez »... et surtout, l'impression que tout le monde me reprochait quelque chose : « Assieds-toi correctement », « Mange comme ça »... Je n'étais pas habituée à tant de demandes sociales, à vivre dans un protocole permanent. Dans les camps, les parents ne vous dirigent pas tellement parce que vous “êtes” un adulte, et quand vous venez ici, vous avez déjà une façon de penser construite. Je suis venue pendant cinq étés et je suis restée dans ma famille d'accueil de l'âge de 12 à 18 ans. Ma mère espagnole avait l'idée de m'éduquer, mais je lui ai dit que j'étais déjà éduquée, et que ce n'était pas un acte de rébellion, mais une maturité précoce forcée par la situation. Ma famille espagnole a fait de son mieux avec moi, mais pas de la meilleure façon. J'ai eu une adolescence très difficile.

Tu as eu l'impression de ne pas t’ intégrer ?

Les personnes qui ont émigré souffrent d'une très grande crise d'identité, car elles ne sont ni d'ici ni de là-bas. Le besoin de s'intégrer dans les deux endroits peut vous jouer de très mauvais tours. J'ai passé dix ans à rejeter le fait d'être sahraouie et les malheurs qui m'étaient arrivés dans ma vie.

Tu l'as caché ?

Exactement. J'ai dit aux gens que j'étais d'Alicante et c'est tout. Mais quand j'ai commencé à lire de la littérature avec des références africaines, y compris sahraouies, je me suis rendue compte que j'avais hérité des pensées coloniales, et il est arrivé un moment, à l'âge de 18 ans, où j'ai compris que je n'étais pas à ma place. Dans mon foyer espagnol, j'ai ressenti de nombreuses exigences sociales et culturelles, et j'ai dû être constamment reconnaissante pour ce qui m'était donné, parce que je « venais d'un camp de réfugiés », ce qui m'a beaucoup affecté et a été ressenti comme un rabaissement. D'autre part, j'avais ma famille sahraouie, conservatrice, musulmane, l'une des rares à avoir laissé ses filles étudier en Occident dès leur plus jeune âge. J'étais consciente de la peur de ma mère que je ne sois pas musulmane, ni culturellement sahraouie, cette peur de ce que les gens diraient. J'ai ressenti des pressions ici et là, et j'ai décidé de me détacher, de commencer à travailler et à étudier par moi-même, pour retrouver ma dignité et ma liberté en tant que personne. J'ai rompu les relations avec ma famille biologique et ma famille d'accueil, mais j'étais libre de commencer à me construire une identité.

As-tu traversé ce processus seule ?

Jusqu'à ce que j'entre dans le militantisme, je n'avais aucun point de référence. J'ai commencé à travailler comme serveuse, dans des magasins... J'ai étudié l'ingénierie informatique au moment de la crise, et j'avais des amis qui m'ont aidé à payer l'université. J'ai fini mes études et je suis venue à Madrid. C'était le boom informatique et j'ai trouvé un emploi facilement. J'ai contracté un prêt pour faire un master en big data et intelligence artificielle. Pour moi, il n'y a pas de choses impossibles si vous faites un effort et travaillez dur. Les gens me disent que j'ai bien réussi, mais je mangeais du riz blanc à l'université, comme je mangeais dans le camp, car je n'avais souvent pas les moyens d'acheter de la viande ou du shampoing. 

Tesh Sidi le jour de l'entretien. Photo : Javier Sánchez Salcedo

 Comment es-tu entrée dans le militantisme ?

Lorsque j'ai terminé mon master et que j'ai trouvé un bon emploi, en avril 2020, la guerre au Sahara occidental a explosé. Je ne connaissais rien au conflit ni à ses causes, mais j'ai commencé à aller aux manifestations et un fort besoin est né en moi à la fois d'aider le peuple sahraoui et de retrouver mon identité. Et quand j'ai vu que la cause sahraouie stagnait en termes de communication, j'ai décidé d'aider grâce à mes connaissances en matière de big data et de traitement des données dans les réseaux sociaux. J'ai pris la présidence de l'association sahraouie à Madrid, nous avons fait beaucoup de choses et beaucoup de jeunes Sahraouis de la diaspora ont commencé à s'organiser. J'ai commencé à devenir une personne très exposée, à donner des conférences, des politiciens m'appelaient... Il me semblait que la cause était devenue quelque chose de très humanitaire mais pas très politique, et j'ai commencé à approcher des organisations politiques, les médias, j'ai commencé à emmener des journalistes et des politiciens dans les camps... Tout ce processus s'est matérialisé dans SaharawisToday, une plateforme de communication numérique que j'ai créée avec ma camarade Itziar.

Qu’est-ce qu’on peut trouver dans SaharawisToday ?

Nous avons fait une analyse de ce qui ne va pas avec la cause sahraouie et nous avons vu que nous-mêmes, les Sahraouis, devions être ceux qui communiquent, que ce ne soient pas les journalistes ou les anthropologues qui parlent toujours du peuple sahraoui. Dans SaharawisToday, nous parlons de la migration, de la lutte contre le racisme institutionnel dont nous souffrons, nous femmes sahraouies, qui sommes souvent réduites au silence, de la responsabilité de l'Espagne envers ses anciennes colonies ou de la responsabilité de la population de s'informer sur le passé de son pays. Nous contextualisons pour expliquer la relation du Sahara avec ce qui se passe à Ceuta et Melilla, avec les eaux des îles Canaries ou pourquoi le Maroc bloque et fait chanter l'Espagne... Nous sommes 11 personnes, des Sahraouis de là-bas, d'ici et de France. Nous publions en français, arabe, anglais et espagnol, et offrons un forum d'opinion pour le peuple sahraoui, dans toute sa diversité. Il y a de la place pour tout sauf pour le fascisme et le machisme. Nous avons toujours été un peuple de transmission orale, mais nous devons mettre notre histoire par écrit. On y trouve des articles, des vidéos, des reportages en direct, des résumés de politique internationale, des analyses... Nous rassemblons tous les événements de la cause sahraouie dans le monde et informons sur les moyens de se rendre dans les camps.

Pour conclure, tu crois qu'il y aura un référendum ?

Une forte pression politique est nécessaire. Je pense que le peuple sahraoui doit occuper des postes de pouvoir. De nombreuses personnes qui ont émigré ont tendance à étudier les sciences sociales et à se consacrer au domaine des ONG ou de la coopération internationale en raison de ce besoin de "sauver" que nous avons. Mais il n'y a rien de mal à être dans la banque ou la politique. Il faut être là où les décisions sont prises pour pouvoir changer les choses. Dans la banque où je travaille, ils savent que je suis une Sahraouie et un activiste. Les Sahraouis doivent essayer d'être des présidents de communauté dans leurs immeubles, des membres du parlement, et des référents partout où ils travaillent. Je pense que le référendum sera compliqué dans les années à venir. Tant que nous n'aurons pas un président de gouvernement sahraoui ou migrant, les choses ne changeront pas. Cela prendra du temps, mais nous ne devons pas être frustrés. Nous devons être optimistes.   

Une amie est allée au Sahara occidental, dans les territoires occupés par le Maroc, et m'a ramené du sable de là-bas. C'est choquant, et ça m’enchante de le voir dans toutes les générations de Sahraouis : nous sommes capables de nous battre pour quelque chose que nous n'avons jamais vu et où, probablement, parce que je suis une activiste, je ne pourrai jamais mettre les pieds.

 


27/12/2022

MARTIN JAY
Le Qatar a pu puiser dans la caisse noire du Maroc qui alimentait un réseau d'eurodéputés corrompus

Martin Jay, Strategic Culture, 22/12/2022
Traduit par Tlaxcala

Dans quelle mesure le scandale de la caisse noire destinée à le blanchir affecte-t-il les revendications actuelles du Maroc sur le Sahara Occidental, à la fois à l'ONU et au niveau de l'UE ?

 

Corruptible, par Paolo Calleri

Après que la poussière commence à retomber sur le plus grand scandale de corruption que l'UE ait jamais eu, il semble qu'il n'a pas été créé par le Qatar, mais par le Maroc qui avait un réseau de députés européens corrompus dans ses petits papiers depuis près de 20 ans. Mais qui d'autre a bénéficié du service de blanchiment ?

L'affaire a ébranlé les fondations et les plus hautes sphères de l'élite européenne à Bruxelles. Mais l'affaire de corruption d’Eva Kaili, qui a jusqu'à présent fait emprisonner trois députés européens, n'est pas tout à fait ce qu'elle semble être. Bien qu'il soit souhaitable de rejeter la faute sur les riches Qataris qui se baladent à Bruxelles avec des valises d'argent, de récentes enquêtes des autorités belges ont révélé qu'un ministre qatari est venu à Bruxelles récemment et n'a eu qu'à s'adresser à un “guichet unique” - une cabale d'eurodéputés avides d'argent qui ont été à la solde du Maroc pendant au moins 15 ans pour blanchir le dossier des droits de l'homme du royaume et obtenir le meilleur accord pour le Sahara occidental en termes d'accords commerciaux et de statut.

Ce groupe d'eurodéputés corrompus a reçu de l'argent et des cadeaux pendant au moins 15 ans et était bien connu sur le circuit de Bruxelles pour leurs services “à la carte” au sein du Parlement européen dont la "commission des affaires étrangères" - autrefois considérée comme prestigieuse et certainement importante sur le circuit de l'UE - a maintenant été laissée en lambeaux.

Pendant des décennies, le Maroc a bénéficié d'un traitement de faveur à Bruxelles. La question de la souveraineté de son Sahara occidental annexé n'a jamais été soulevée. Les droits des citoyens de cette région contestée n'ont jamais été mis sous les projecteurs, alors que le territoire lui-même a bénéficié d'un accord commercial de l'UE couvrant le poisson et les minéraux, pour ne citer que quelques exemples. Même le bilan du Maroc en matière de droits de l'homme, en général, dans son propre pays, a été ignoré pendant si longtemps que l'UE l'a considéré comme la coqueluche de la région MENA pour ses réformes sur les droits des femmes, par exemple.

Le blanchiment en général est venu du Parlement européen que les autres institutions de l'UE, dans une certaine mesure, ont dû respecter (bien que les tribunaux de l'UE aient finalement refusé d'accepter que le Sahara occidental puisse ou doive être inclus avec le Maroc en termes de bénéfice d'un accord commercial avec l'UE).

Donc maintenant, trois questions clés émergent, que la presse marocaine, championne de l'autocensure, ne posera certainement pas. Dans quelle mesure le scandale du blanchiment d'argent affecte-t-il les revendications actuelles du Maroc sur le Sahara Occidental, à la fois à l'ONU et au niveau de l'UE ? Deuxièmement, l'UE commence-t-elle maintenant à regarder le Maroc sans les lunettes roses et commence-t-elle à examiner la ribambelle d'arrestations de quiconque remet en cause les décisions prises à un haut niveau - des journalistes emprisonnés sur la base d'accusations forgées de toutes pièces aux anciens ministres qui ont osé critiquer la façon dont le gouvernement et la puissante élite des affaires gèrent le pays - et agit en conséquence ?

Enfin, et c'est peut-être le plus important, il y a le sujet peu édifiant de savoir qui d'autre a bénéficié de ces députés européens véreux et de leurs services ? Quiconque suit les tentatives pathétiques de l'UE d'agir comme un acteur mondial avec une hégémonie en papier mâché qu'elle évoque de manière hilarante pour les pays du Sud en particulier, posera la question évidente d'Israël. La déshumanisation abyssale des droits des Palestiniens que nous voyons chaque jour sur les médias sociaux se faire voler leurs terres, déraciner leurs oliviers ou, dans de nombreux cas, détruire leurs maisons par les Israéliens, qui le font en sachant parfaitement que l'Occident et en particulier l'UE elle-même ne feront pas de vagues. Lorsque, tout récemment, un Palestinien de Cisjordanie a été abattu à bout portant par un agent de sécurité israélien qui se battait avec lui, cela n'a pas fait la une des médias et n'a certainement pas créé d'onde de choc parmi les députés européens. Comment est-ce possible, pourrait-on se demander, de la part d'une institution dont la raison d'être est de protéger les droits de l'homme tant au sein de l'UE qu'avec ceux avec lesquels elle interagit et commerce ?


La dernière fois que l'UE a même feint de menacer Israël pour ses atrocités en matière de droits de l'homme, c'était en 2014, lorsqu'une Federica Mogherini quelque peu idéaliste et "arabisante" est entrée en fonction et a suggéré, juste pour quelques semaines, que l'UE applique un système d'étiquetage pour les produits fabriqués en Palestine occupée qui se retrouvent dans les supermarchés européens. L'idée a rapidement fait long feu, en l'espace de quelques semaines, et on n'en a plus jamais entendu parler. Compte tenu de ce que nous savons du réseau marocain de députés européens recevant des bakchichs, sans parler de la date de la proposition de Mogherini, est-il inconcevable que ces mêmes parlementaires aient pris de l'argent liquide pour faire pression sur leurs collègues dans les commissions pour qu'ils donnent un répit à Israël ? Le silence assourdissant et effrayant de l'UE sur le génocide quotidien des Palestiniens par Israël est inquiétant, mais maintenant que nous savons comment le Parlement européen fonctionne lorsqu'il s'agit d'atrocités commises par les pays de la région MENA - et comment elles sont occultées des ordres du jour - il n'est guère surprenant que la brutalité du régime israélien se soit intensifiée. La véritable histoire de la corruption au sein du Parlement européen ne concerne pas les trois députés européens qui ont touché de l'argent, mais la façon dont les 702 autres députés européens vont vouloir empêcher toute véritable enquête interne, tout cela simplement pour sauver leur emploi et préserver leur style de vie confortable.

17/12/2022

FRANCISCO PEREGIL
La justice belge enquête sur Abderrahim Atmoun, le lobbyiste marocain qui a gagné presque toutes les batailles à Bruxelles

Francisco Peregil, El País, 16/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala 

Abderrahim Atmoun, l'ambassadeur de Rabat en Pologne qui fait l'objet d'une enquête de la justice belge pour corruption présumée au Parlement européen, a conservé un accès privilégié aux députés européens pendant des années.

De gauche à droite : Francesco Giorgi, petit ami de l'ancienne vice-présidente du Parlement européen Eva Kaili ; Antonio Panzeri, eurodéputé italien, et l'actuel ambassadeur du Maroc à Varsovie, Abderrahim Atmoun, le 9 mai 2017, sur une image postée par ce dernier sur sa page Facebook.

L'ambassadeur du Maroc en Pologne, Abderrahim Atmoun, apparaît comme un personnage important dans l'enquête lancée par le parquet belge sur la corruption d'eurodéputés par le Qatar et le pays du Maghreb. Pendant des années, la presse marocaine a attribué à Atmoun - soupçonné d'avoir financé l'une des principales parties impliquées dans le scandale, Antonio Panzeri - plusieurs succès diplomatiques devant un Parlement européen qui a salué à plusieurs reprises les progrès du Maroc en matière de droits humains et n'a pas entravé les ambitions de Rabat concernant le Sahara occidental.

Ce qui n'a jamais été révélé, c'est qu'Atmoun est impliqué dans un réseau de pots-de-vin à des parlementaires sur lequel le parquet belge enquête, comme l'a révélé cette semaine le quotidien Le Soir. Selon Le Soir, deux agents du service d'espionnage marocain à l'étranger, la Direction Générale des Études et de la Documentation (DGED), sont également impliqués dans le réseau. Le quotidien italien La Repubblica a ajouté jeudi que les deux noms faisant l'objet d'une enquête de la justice belge sont le chef des services secrets à l'étranger lui-même, Yassine Mansouri, et l'agent Belharace Mohammed.

Ni les représentants du ministère marocain des Affaires étrangères ni le diplomate Abderrahim Atmoun lui-même - tous deux contactés par téléphone par ce journal - n'ont souhaité commenter les accusations de corruption qui atteignent le cœur des institutions européennes.

Atmoun, 66 ans, n'est pas un diplomate de carrière mais un homme politique. Mais il pratique les arts de la diplomatie et du lobbying depuis plus d'une décennie, en grande partie par le biais de la commission parlementaire mixte Maroc-UE, créée en 2010 et dont Atmoun a été coprésident de 2011 à 2019. Dans une période de ce mandat (entre 2016 et 2019), il a convergé avec une coprésidente espagnole de cette commission, Inés Ayala Sender, 65 ans, alors députée européenne du groupe socialiste. Au sein de ce genre de commissions, le Maroc choisit ses fonctionnaires et représentants et l'UE les siens, aucune des parties ne disposant d'un droit de veto sur l'autre. De ce poste, Atmoun a eu un accès total aux plus hauts représentants d'une institution de 705 membres où sont décidées les questions essentielles pour le Maroc.

Ayala, qui est conseillère de l'opposition au conseil municipal de Saragosse depuis 2019, a été contactée par ce journal mercredi. Après avoir été informée de l'objet de l'appel - la prestation d'Abderrahim Atmoun auprès des députés européens - Mme Ayala a indiqué qu'elle ne pouvait pas répondre à ce moment-là, mais qu'elle rappellerait. Elle a ensuite refusé de répondre au téléphone.

La socialiste a été député européenne pendant 15 ans, de 2004 à 2019. En 2018, elle s'est exposée aux critiques d'associations pro-saharaouies en évoquant au parlement le Sahara occidental dans les mêmes termes que ceux utilisés par l'État marocain pour désigner ce territoire contesté : « les provinces du sud ». Ses propos ont été filmés sur les réseaux sociaux : « Ce n'est pas à l'Union européenne de prendre des décisions ou de résoudre le problème du Sahara. D'autre part, il nous appartient de ne pas créer de problèmes plus importants, tant pour les citoyens des provinces du sud que pour le gouvernement ou le royaume marocain lui-même ».

Un an plus tôt, Mme Ayala s'était rendue à Rabat en sa qualité de coprésidente de la commission parlementaire mixte Maroc-UE et avait déclaré que le pays était « fermement engagé à jeter les bases d'un système judiciaire indépendant du pouvoir exécutif », selon l'agence de presse officielle marocaine MAP.

La conseillère socialiste de Saragosse, Inés Ayala Sender, alors membre du Parlement européen, à côté de l'actuel ambassadeur du Maroc en Pologne, Abderrahim Atmoun, dans une image de mars 2017 publiée par Atmoun sur sa page Facebook.

Au-delà de sa participation à la commission mixte avec l'UE, l'homme politique marocain, qui a passé près de 26 ans de sa vie en France, a évoqué son travail de lobbyiste en septembre 2017 dans l'hebdomadaire marocain Tel Quel. Il faisait référence aux accords agricoles et de pêche que Rabat négociait à l'époque avec Bruxelles : « Le Maroc est le partenaire privilégié de l'Union européenne, mais nous avons un rôle de lobbying pour défendre les intérêts du royaume ».

Atmoun était en excellents termes avec le député socialiste italien de l'époque, Antonio Panzeri, qui est désigné dans l'enquête comme le cerveau du réseau de corruption Qatar-Maroc. Panzeri a occupé, entre autres fonctions au Parlement, celle de président de la sous-commission des droits de l'homme (2014-2017), a été membre de cet organe jusqu'en 2019 et président de la délégation pour les relations avec le Maghreb entre 2014 et 2017.

La justice belge a inculpé Panzeri lundi dans le cadre de ce que l'on appelle désormais le Qatargate, après que la police a saisi 600 000 euros en espèces à son domicile. Lundi, aucune information n'avait encore émergé concernant le Maroc. Mais depuis ce jour, Abderrahim Atmoun, qui est toujours ambassadeur en Pologne, a cessé de poster des commentaires sur sa page Facebook, où il est habituellement assez prolifique.

Le député marocain de l'époque avait été interviewé en 2013 par le quotidien makhzénien Le Matin, où il citait trois « victoires diplomatiques » » remportées au Parlement européen. L'un d'entre elles, selon Atmoun, était le rapport d'Antonio Panzeri sur la politique européenne de voisinage (PEV), qui régit les relations de l'UE avec 16 de ses plus proches partenaires du sud et de l'est. En 2017, alors que Panzeri était président de la sous-commission des droits de l'homme, Atmoun a également salué sur en Le Site le rapport sur les droits de l'homme et les réformes auxquelles Panzeri avait contribué dans ce rapport.

En novembre 2016, une série de manifestations sociales dans la région du Rif au Maroc, connues sous le nom de hirak (mouvement) du Rif a éclaté, entraînant l'arrestation de centaines de jeunes. Une demi-centaine de personnes ont été condamnées en 2018 à des peines allant d'un an à deux décennies de prison pour quatre des manifestants les plus en vue. Parmi les condamnés figure le journaliste Hamid el Mahdaoui, condamné à trois ans de prison pour avoir reçu un appel, intercepté par les services secrets, dans lequel un Rifain exilé en Europe lui disait qu'il était prêt à entrer dans le Rif avec des chars. Mahdaoui a purgé ses trois ans de prison ; le leader des mobilisations, Naser Zafzafi, est toujours en prison avec une peine de 20 ans, sans que le Parlement européen n'ait jamais condamné la répression dans le Rif ou les peines qui ont suivi.

Cependant, en octobre 2020, le Parlement européen a montré toute sa dureté à l'égard de l'Algérie dans une résolution sur la « détérioration de la situation des droits de l'homme », suite aux manifestations qui ont débuté en mars 2019 dans ce qui est devenu le hirak algérien, réclamant une véritable démocratie. À cette occasion, le Parlement a adopté la résolution contre le régime algérien par 669 voix pour, 3 contre et 22 abstentions. La résolution demandait la libération urgente de tous les « prisonniers d'opinion », dont plusieurs journalistes.

Atmoun a étudié à l'Institut de statistique de Paris, comme le rappelait l'hebdomadaire marocain Maroc Hebdo en mars dernier, a travaillé en France comme homme d'affaires prospère dans le secteur hôtelier, selon Maroc Diplomatique, et est entré en politique en 1984 avec le parti de l'Union constitutionnelle (un parti se proclamant centriste libéral). En 2008, il rejoint le Parti authenticité et modernité (PAM), également connu sous le nom de « parti du roi », un parti fondé par un conseiller du monarque. Maroc Hebdo, qui le décrit comme un « expert en relations et en lobbying », affirme qu'il a accès à des députés européens de tous les partis politiques, avec « des centaines d'amis dans la droite européenne ». Atmoun a été décoré de la Légion d'honneur française en 2011 par le président de l'époque, le conservateur Nicolas Sarkozy. Il a été le premier homme politique marocain à la recevoir.

 

 

 

01/04/2022

AFASPA
L’Espagne se déshonore une seconde fois


Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique, 26/3/2022

Pour la seconde fois de son Histoire l’Espagne se défausse de ses obligations internationales à l’égard du peuple du Sahara occidental, territoire non autonome qu’elle a colonisé durant quatre-vingt-onze années.

En 1975 c’est l’Espagne du dictateur Franco qui signa en catimini des accords secrets cédant illégalement la place dans sa colonie, au Maroc et à la Mauritanie.


 En 2022 c’est l’Espagne gouvernée par le socialiste Pedro Sanchez qui bafoue le droit international, sans consultation des diverses composantes de la coalition, par une annonce qui cautionne une confiscation au peuple sahraoui de son droit imprescriptible et inaliénable à l’autodétermination.

Ce ralliement à la posture unilatérale que le Maroc adopte depuis plusieurs décennies, qui bloque le Plan de paix signé en 1991, n’est autre qu’une soumission au chantage à l’immigration exercé par le royaume chérifien et clairement revendiqué par lui, pour obtenir des pays européens en particulier, un reniement du droit international pour régler ce conflit de décolonisation inachevé.

Les liens étroits qui se sont noués depuis plus de 130 ans entre les peuples d’Espagne et du Sahara occidental doivent permettre de contraindre le gouvernement espagnol à assumer ses obligations de puissance administrante du dernier territoire non autonome d’Afrique et mettre fin à une situation de guerre dans le Maghreb qui dure depuis près de cinquante ans.

Le droit des peuples ne peut s’appliquer à géométrie variable à l’heure où le règlement des conflits au Proche orient, en Europe et en Afrique, nécessite le respect des résolutions de l’ONU, de l’Union africaine et dans le cas du Sahara occidental, de l’avis de la Cour Internationale de justice de la Haye. A ce propos, l’Union européenne et sa Commission, doivent respecter les décisions de la Cour européenne de justice en cessant de conclure des accords économiques délictueux avec le Maroc.

22/03/2022

AHMED ETTANJI
La reddition kamikaze de Sánchez et la résistance sahraouie

Ahmed Ettanji, El Independiente, 21/3/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Ahmed Ettanji est un journaliste et défenseur sahraoui des droits humains, président de l’agence sahraouie Equipe Media.

Un communiqué du gouvernement de Pedro Sánchez, vendredi 18 mars, a scellé sa réconciliation avec Rabat et son alignement sur les positions marocaines concernant l'avenir du Sahara occidental. Le ministre des Affaires étrangères, José Manuel Albares, a indiqué que le plan « d'autonomie » dessiné par Rabat était « la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution du différend ». Il renonce de fait à défendre le droit à l'autodétermination et une solution négociée avec les Sahraouis. (Lire Voici le contenu du message de Pedro Sanchez a Mohamed VI). Cet exercice de realpolitik qui rapproche Madrid des positions françaises crée la stupeur en Espagne. Il répond aux pressions des USA qui avaient déjà convaincu en janvier le gouvernement allemand de prendre ses distances par rapport aux revendications du front Polisario. Il a povoqué une vague d'indignation en Espagne, où les manifestations se succèdent, de Séville à Saragosse : elles culmineront le samedi 26 mars à Madrid avec un rassemblement à midi devant le ministère des Affaires étrangères. (NDT)

Je n'ai jamais eu le moindre doute sur la position officielle honteuse de l'Espagne concernant son ancienne colonie. Elle cherche à priver notre peuple de son droit inaliénable à l'autodétermination et à se soustraire ainsi à sa responsabilité historique, juridique et morale.


 La mémoire sahraouie est pleine de douleur, de chagrin et de tragédie, résultat de l'abandon par Madrid de deux exigences des Nations Unies. D'une part, celle de décoloniser le Sahara occidental, et d'autre part, celle de se prononcer à travers une consultation populaire libre et transparente. L'opinion publique espagnole et ses forces vives ne parviennent toujours pas à influencer ceux qui prennent les décisions et perpétuent cette souffrance sans tenir compte de ses effets dangereux et de ses répercussions sur la sécurité et la stabilité futures d'une région qui est en guerre depuis le 13 novembre 2021. 

Beaucoup de Sahraouis ont été heureux que l'Espagne ait reçu le président de la République sahraouie, Brahim Ghali, à Logroño pour recevoir un traitement pour Covid-19. Certains ont pensé que cela pourrait signaler un changement dans la politique de Madrid vis-à-vis de la question sahraouie, en particulier avec les déclarations successives de responsables de divers organismes officiels, y compris le ministère de la Défense, qui ont relu la question du point de vue de la légitimité internationale et de la responsabilité de l'Espagne en tant que puissance administrante du Sahara occidental.

Dans leurs analyses, ils sont allés plus loin. Ils ont déclaré que l'Espagne en avait assez du harcèlement politique du Maroc et qu'elle ne céderait jamais à ses menaces en matière de migration, de coopération sécuritaire et de trafic de drogue.

Malheureusement, ces lectures surréalistes qui n'ont jamais pris en compte les intérêts et les droits du peuple sahraoui n'étaient pas et ne seront jamais à l'ordre du jour des gouvernements espagnols. Au cours des quarante-sept dernières années, ils ont défendu l'occupation marocaine et ses projets expansionnistes, envoyé des aides humanitaires aux réfugiés sahraouis, les dépeignant comme un peuple mendiant afin de faire taire les voix critiques en Espagne et de freiner leurs revendications politiques gênantes.

La conspiration est allée jusqu'à accepter tous les outrages dont ont été victimes de nombreux représentants de la société espagnole lors de leurs visites dans les territoires occupés en tant qu'observateurs indépendants, journalistes et militants politiques, dont les positions semblaient aller à l'encontre des intérêts de l'Espagne défendus par une oligarchie corrompue qui met en danger les intérêts du peuple espagnol.

Les déclarations du Premier ministre espagnol rebattent les cartes et jettent de l'huile sur le feu, sur le chaos qui règne dans la région. Elles ne feront pas taire un régime qui considère la capitulation devant le chantage comme une victoire, et renforceront l'insistance du peuple sahraoui à rompre sa dépendance à l'égard de tout autre pari que la légitimité de sa résistance. L'histoire a montré que nous sommes un peuple qui a gagné en s'opposant fermement aux deux puissances occupantes : Maroc et Mauritanie.

Nous sommes au milieu d'une guerre. Il y a des tensions dans la région et l'ONU doit surmonter de nombreux obstacles pour réactiver le processus politique. L'Espagne fait partie du problème. La déclaration de Pedro Sánchez fait que l'État espagnol prend parti, se positionne en faveur de l'une des parties et ne peut être un agent objectif dans la recherche d'une solution.

Nous, les Sahraouis, continuerons à nous battre pour notre liberté et personne n'a le droit de décider en notre nom. Nous n'avons pas abandonné depuis des décennies la poursuite de notre objectif légitime d'avoir un État indépendant et souverain.

 

09/01/2022

Le Front Polisario exprime son rejet du rapport de la Commission européenne sur le Sahara Occidental

Front Polisario, 8/1/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Communiqué de presse du Front Polisario à propos du rapport sur les « avantages » : la Commission européenne montre son mépris pour les décisions judiciaires et fait l'apologie de l'occupation illégale du Sahara Occidental

Alors que, par ses arrêts du 29 septembre 2021, la Cour de Justice de l'Union européenne a annulé les nouveaux accords d'élargissement UE-Maroc, la Commission européenne a jugé bon de publier, le 22 décembre 2021, un nouveau rapport pour vanter les mérites du pillage des ressources naturelles du Sahara occidental par l'occupant marocain.

En tant que représentant unique et légitime du peuple sahraoui, le Front Polisario rejette ce rapport, car les prétendus "avantages" ne sont rien d'autre que le fruit des crimes commis par l'occupant marocain, dont la Commission fait l’apologie.

Rappelant que le territoire sahraoui est « un territoire distinct qui ne fait pas partie du Maroc », la Commission européenne se réfère aux désignations juridiques marocaines pour désigner ce qui constitue, en droit international, le territoire du Sahara Occidental.

06/01/2022

ANTONIO MAZZEO
Le Maroc achète des drones et des missiles en Israël

 Antonio Mazzeo, Africa ExPress, 5/1/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Le Maroc va acheter à Israël des batteries de missiles sol-air de moyenne portée et des drones armés pour renforcer son arsenal militaire déployé contre l'Algérie voisine et le Front Polisario dans l'ancien Sahara espagnol.

Selon le site spécialisé Israel Defense, les autorités de Rabat ont entamé des négociations avec IAI - Israel Aerospace Industries, la principale holding militaro-industrielle d'Israël, pour l'acquisition du système de missiles Barak 8 (éclair en hébreu). Les négociations ont été menées par Sharon Bitton, directrice du marketing d'IAI pour les pays du Golfe, ancienne colonelle des forces armées et ancienne cheffe de la Coordination des activités gouvernementales dans les territoires occupés (COGAT).

Une batterie de missiles sol-air israéliens Barak 8

Le système de missiles Barak 8 a été développé par les forces armées et les industries de défense d'Israël et de l'Inde et est utilisé sur terre et en mer. Outre IAI-Israel Aerospace Industries, Rafael Advanced Defense Systems Ltd. de Haïfa et le groupe industriel Tata de Mumbai ont également participé à sa conception et à sa construction.

Avec une vitesse maximale de Mach 2 (580 mètres par seconde) et une capacité de charge allant jusqu'à 60 kg, le système de missiles sol-air a une portée opérationnelle d'environ 70 km. « Le Barak 8 est capable de neutraliser les menaces aériennes telles que les chasseurs, les missiles, les hélicoptères et les drones ennemis et peut frapper plusieurs cibles simultanément, même dans des conditions météorologiques défavorables », rapportent les responsables d'IAI.

Ces derniers mois, les forces armées marocaines ont inauguré la première base entièrement dédiée à la « défense aérienne » à longue portée, près de la ville de Sidi Yahia el Gharb, dans la région nord de Rabat-Sale-Kenitra. Quatre batteries de missiles du système FD-2000B, achetées à la Chine en 2017, ont été installées sur la base. Il est donc concevable que le nouveau dispositif de guerre fabriqué en Israël soit destiné précisément à cette installation.

En plus du Barak 8, le Maroc a également l'intention d'acheter à IAI un lot de drones kamikazes (avions sans pilote armés de bombes et d'explosifs qui explosent à l'impact avec la cible) de type Harop, pour un coût de 22 millions de dollars. Le Harop est un petit avion sans pilote (2,5 mètres de long), mais il peut transporter une charge explosive de 20 kg et voler pendant sept heures consécutives jusqu'à 1 000 kilomètres. Le drone a été utilisé par les forces armées israéliennes lors de raids à Gaza, au Liban et en Syrie, et par l'Azerbaïdjan lors du récent conflit du Haut-Karabakh.

Le drone israélien Heron acheté par le Maroc

25/12/2021

ALFONSO LAFARGA
Livré au Maroc par l'Espagne, un blogueur sahraoui condamné à deux ans de prison à Casablanca

 Contramutis, 25/12/2021
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Faisal El Bahloul, condamné à deux ans et une amende de 1000 dirhams, avait été arrêté par la police nationale espagnole pour des activités présumées sur les réseaux sociaux avec des messages jugés « incendiaires » à l'encontre d'individus et d'institutions marocains.
Hussein Bachir Brahim, un autre Sahraoui livré par l'Espagne en janvier 2019 alors qu'il avait demandé l'asile politique, avait été condamné à 12 ans de prison.


Le blogueur sahraoui Faisal El Bahloul, livré au Maroc par l'Espagne le 16 novembre, a été condamné à 2 ans de prison par un tribunal correctionnel de Casablanca.

El Bahloul, également condamné à une amende de 1000 dirhams, a été jugé et condamné le 24 décembre par le tribunal de Casablanca.
Faisal El Bahloul, 44 ans, était connu pour ses positions hostiles à l'occupation marocaine et pour avoir défendu le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination, surtout depuis la reprise de la lutte armée par le Front Polisario, le 13 novembre 2020, après  la rupture du cessez-le-feu par Maroc.

Il a été arrêté par la Police nationale espagnole le 30 mars à Basauri (Biscaye) pour des activités présumées sur les réseaux sociaux avec des messages considérés comme « incendiaires » contre des personnes et des institutions marocaines et mis à la disposition de l’Audiencia Ncional ; il a été détenu d'abord à Madrid puis à Murcie.

Le 16 novembre, il a été emmené par la police espagnole à Casablanca et à l'aéroport, il a été laissé entre les mains de la police marocaine. La remise du blogueur sahraoui, qui selon sa famille avait une résidence légale en Espagne jusqu'en 2024 et était en attente d'une réponse à sa demande d'asile en France, a provoqué le rejet et l'indignation contre le gouvernement sur les réseaux sociaux et a suscité plusieurs questions parlementaires du sénateur de Compromis Carles Mulet Garcia.

24/12/2021

MARY LAWLOR
La défenseuse sahraouie des droits humains Sultana Khaya rapporte des attaques violentes durant son assignation à résidence

Mary Lawlor, Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des défenseur·ses des droits humains, srdefenders.org, 23/12/2021
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La défenseuse des droits humains sahraouie Sultana Khaya m'a dit qu'elle était assignée à résidence de force depuis plus d'un an, sans pouvoir sortir, ni recevoir la visite de membres de sa famille ou de qui ce soit - y compris des médecins - même lorsqu'elle est malade.


Elle m'a raconté comment, après son arrestation en novembre 2020, elle a été retenue dans la maison de sa famille, avec des dizaines d'agents de sécurité gardant les portes, jour et nuit, que sa sœur et sa mère âgée sont avec elle, et que seule sa mère est autorisée à sortir pour aller chercher de la nourriture.

Sultana a déclaré qu'elle n'avait été accusée d'aucun crime et qu'elle serait heureuse d'avoir la possibilité de répondre aux allégations qui pèsent sur elle. En juin 2021, je me suis jointe à d'autres experts indépendants des Nations unies pour évoquer son traitement avec les autorités marocaines, en rappelant que Sultana est une femme éminente qui défend les droits humains depuis de nombreuses années.

En 2007, elle a perdu un œil à la suite d'une agression et a été victime de diverses attaques en raison de son action en faveur des droits humains.  Aujourd'hui, elle est détenue pour une durée indéterminée dans des conditions difficiles. Sa maison a été vidée de presque tous ses meubles et appareils, et elle, sa mère et sa sœur dorment toutes dans la même petite pièce.

Elle m'a raconté qu'au cours des derniers mois, des agents de sécurité masqués ont fait des incursions répétées dans sa maison pendant la nuit, lui attachant les mains, lui bandant les yeux et la bâillonnant. Elle a dit que lors de ces raids, elle et sa sœur ont été attaquées et qu'elle a été violée. Elle a nommé les personnes qui, selon elle, sont les auteurs de ces agressions, et elle craint constamment de nouvelles attaques.

Elle a également décrit comment, au cours de deux de ces raids, les agresseurs lui ont injecté des substances inconnues, et qu'ils ont également jeté des liquides toxiques dans la maison, décapant les murs et affectant sa santé. Elle dit que le poison a fait tomber ses cheveux et rendu ses dents cassantes.

Sultana semble être en grand danger, sa santé déclinant et étant vulnérable à de nouvelles attaques. Elle est détenue dans ces conditions depuis 400 jours.

 

11/11/2021

Mohamed VI, le roi du vent au Sahara occidental

Francisco Peregil et Trinidad Deiros Bronte, El País, 11/11/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Six des neuf parcs éoliens construits ou prévus dans l'ancienne colonie espagnole seront gérés par Nareva, une filiale du consortium contrôlé par le monarque.

Une grande partie de l’énergie produite dans le territoire occupé est destinée aux industriels. Ces éoliennes approvisionnent la cimenterie de HeidelbergCement, qui est l’une des entreprises importantes pour la colonisation du territoire par le Maroc. Photos WSRW

Le Maroc a un plan ambitieux pour les projets d'énergie solaire et éolienne, où le Sahara occidental est la clé. Ce territoire contesté, que Rabat considère comme ses "provinces du sud", est classé par les Nations unies comme la dernière colonie d'Afrique. La figure du roi, Mohammed VI, est également un élément clé de ces plans. Non seulement en tant que chef d'État, mais aussi en tant qu'investisseur. La principale entreprise d'énergie renouvelable au Sahara Occidental s'appelle Nareva. La société appartient au méga-groupe d'affaires Al Mada, dont les actionnaires majoritaires sont Mohammed VI et sa famille.

Nareva, la société du monarque, a développé deux des trois projets de production d'énergie éolienne déjà en exploitation au Sahara occidental : Foum el Oued, avec 50 mégawatts (MW) de capacité installée, et Aftissat, avec 200 MW. Seule une petite centrale, de 5 MW selon l'Agence marocaine pour le développement durable (Masen), qui approvisionne le cimentier Cimar, reste en dehors de son portefeuille. Quatre des six autres centrales éoliennes prévues au Sahara Occidental seront également gérées par Nareva, selon le rapport Éco-blanchimentde l'occupation, publié en octobre par l'organisation qui surveille l'exploitation des ressources naturelles du territoire, Western Sahara Resource Watch (WSRW).

Au total, sur les neuf parcs éoliens que comptera le Sahara dans quelques années, six seront exploités par la société de Mohamed VI ou par des consortiums auxquels sa société participe, selon le site web de Nareva. Outre les deux parcs en exploitation (Foum el Oued et Aftissat), il est prévu de construire les parcs éoliens de Tiskrad, Boujdour et Aftissat II, ainsi qu'une usine de dessalement à énergie éolienne à Dakhla. Pour le journaliste marocain Omar Brouksy - l'une des rares voix critiques du pays sur les affaires royales - cette présence importante des entreprises de Mohammed VI dans le secteur des énergies renouvelables constitue un "quasi-monopole", nous a-t-il expliqué par téléphone depuis le Maroc.