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Chez lui, il n'y a que le volant de sa Porsche qui est à gauche

Vox populi sur Roland Dumas, qui vient de mourir à 101 ans

12/03/2024

SUSAN ABULHAWA
Gaza : récits de survivantes du génocide

Ci-dessous deux nouveaux articles de Susan Abulhawa, de retour de Gaza, traduits par Fausto Giudice, Tlaxcala. Un premier article a été publié ici

Le génocide vu à ras de terre : du sable, de la merde, de la chair en décomposition et des flip-flop dépareillées

Susan Abulhawa, The Electronic Intifada , 8/3/2024

Privés d'accès au monde et enfermés dans des barbelés et des clôtures électriques, les Palestiniens de Gaza avaient l'habitude de respirer la majesté de la terre de Dieu sur les rives de la Méditerranée.

Préparation d'une fosse commune à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.
Photo : Mohammed Talatene/DPA via ZUMA Press

C'est là que les familles s'amusent, que les amoureux approfondissent leurs liens, que les amis s'assoient dans le sable et se confient les uns aux autres.

C'est là que les gens allaient pour réfléchir et contempler un monde si peu généreux à leur égard.

C'est là qu'ils sont allés danser, fumer la chicha et se créer des souvenirs.

Mais aujourd'hui, ces rivages sont une torture.

En tant que région côtière, le sol de Gaza est sablonneux, même à l'intérieur des terres. Près de 75 % de la population vivant désormais dans des tentes de fortune, le sable s'infiltre partout.

C'est dans la nourriture, le peu qu'il y a, un grain indésirable dans chaque bouchée. Elle s'accumule dans les cheveux de tout le monde, tout le temps.

Il se glisse sous le hijab, que les femmes sont désormais obligées de porter en permanence par manque d'intimité. Le cuir chevelu démange constamment et les gens se rasent de plus en plus la tête, une décision particulièrement douloureuse pour les femmes et les jeunes filles, qui constitue un autre détail de cette dégradation délibérée de toute une société.

Les chanceux qui ont accès à de l'eau propre peuvent bénéficier de quelques heures de répit avant que l'autorité du sable ne s'impose à nouveau.

Partout où il y a du sable, il y a de minuscules crabes de sable, et d'autres insectes suivront au fur et à mesure que le temps se réchauffe.

Une amie m'a envoyé des photos de ce qu'elle pensait être une éruption cutanée sur ses extrémités, en espérant que je puisse consulter des médecins pour elle. J'ai tout de suite compris qu'il s'agissait probablement de piqûres d'insectes et deux médecins ont confirmé mes soupçons.

Elle jure qu'elle a nettoyé méticuleusement son lit tous les jours, mais les médecins expliquent que ces insectes sont trop petits pour être vus. Ces assaillants microscopiques sur sa peau l'ont un peu brisée, même si elle avait déjà enduré l'insoutenable - les bombes et les balles aveugles, le manque de tout, les scènes macabres de mort et de démembrement presque quotidiennes, le bourdonnement constant des drones, la détérioration des membres de la famille qui ont besoin de médicaments indisponibles, et l'impossibilité de rentrer chez soi.

Humiliation

Les détails d'une société ancienne réduite aux ambitions primaires les plus élémentaires sont douloureux à observer. Une amie qui vivait dans un bel appartement “intelligent” doté d'équipements modernes, qui enseignait à l'école primaire et dirigeait des programmes de loisirs pour enfants après l'école, organise désormais ses journées autour de deux horribles visites à des toilettes extérieures partagées par des centaines de personnes.

C'est un trou putride dans le sol, surmonté d'un seau qui entaille la peau. Elle ne sait pas où il mène, mais « il n'y a pas de chasse d'eau, bien sûr », dit-elle.

Certaines personnes font leurs besoins à l'extérieur du trou, sur le sol en terre battue, et elle doit donc parfois marcher dans la merde. Le trou a quatre parois en plastique, mais pas de plafond, ce qui ajoute une couche supplémentaire d'humiliation lorsqu'il pleut.

Le matin très tôt est le meilleur moment pour y aller car la file d'attente est moins longue. Elle fait attention à ce qu'elle mange et à ce qu'elle boit, de peur de devoir y aller au mauvais moment.

Sa fille de 6 ans apprend à se retenir le plus longtemps possible. Son fils aîné peut accompagner son père au travail, là où il y a des toilettes en état de marche, mais il ne ressent que de la culpabilité lorsqu'il se soulage, me dit sa mère.

Je lui ai apporté des articles de toilette de base et elle a failli pleurer au contact de la lotion pour la peau.

« Je me dis toujours que je vais me réveiller un jour et me rendre compte que tout cela n'était qu'un mauvais rêve », dit-elle.

Un sentier épouvantable

C'est un sentiment que j'ai entendu à maintes reprises de la part de différentes personnes dans différentes parties de Gaza. Le dénigrement de leur vie a été si aigu et si rapide que l'esprit a du mal à comprendre la réalité.

« Je n'avais jamais imaginé que je vivrais une telle vie », dit-elle, avant de marquer une pause et d'ajouter : « Mais je ne pense pas avoir le droit de me plaindre, car au moins ma famille est toujours en vie ».

C'est aussi ce que j'ai entendu à plusieurs reprises de la part des habitants de Rafah.

Ils se sentent coupables d'avoir survécu jusqu'à présent. Ils se sentent privilégiés parce qu'ils ont de la nourriture, même rance ou insuffisante, alors que leurs amis, leurs voisins et d'autres membres de leur famille meurent lentement de faim dans les régions du nord et du centre.

Ce sont des gens qui ont marché pendant des heures les mains en l'air, victimes des moqueries et des railleries des soldats israéliens, terrifiés à l'idée de baisser les yeux ou de se pencher pour ramasser quelque chose, sous peine de recevoir une balle de sniper, ce qui est arrivé à beaucoup d'entre eux. Presque tout le monde a vu ses biens pillés par les soldats, qui jonchaient la route de tout ce dont ils ne voulaient pas.

« Mes enfants ont également vu des cadavres et des parties de corps humains sur le bord de la route, dans différents états de décomposition. Qu'est-ce que ces images vont faire dans leur tête ? »

Son fils de 8 ans a perdu son shibshib (flip-flop) gauche pendant qu'ils marchaient sur ce terrible sentier, mais il a dû continuer à marcher avec la seule chaussure qui lui restait, car le fait de regarder en bas ou, pire, de se pencher, aurait pu le tuer.

Bien qu'il soit resté stoïque face à une terreur inimaginable, c'est la perte de sa sandale qui l'a décontenancé. Il pleurait sans cesse, refusant le shibshib de sa mère, jusqu'à ce qu'un autre réfugié marchant à côté d'eux, les mains levées dans la même crainte, parvienne à faire glisser un shibshib usagé le long de la route jusqu'à lui.

« Heureusement, c'était un pied gauche et il a donc retrouvé une paire, même si elle n'était pas assortie », raconte sa mère.

 

Une histoire d'amour et de résistance

Susan Abulhawa, The Electronic Intifada 12/3/2024

Layan est allongée sur un lit d'hôpital, ses membres brisés et brûlés ayant été reconstitués à l'aide de tiges métalliques de fixation externe, de greffes de peau et de pansements.

L'amour perdurera malgré toutes les destructions infligées par Israël.
Photo Omar Ashtawy/APA images

Ses blessures sont telles que Layan (nom fictif) est immobilisée en position couchée et ne peut bouger qu'en tournant la tête d'un côté à l'autre, une demi-boucle qui lui permet de voir le mur, le drap du lit et une pièce remplie d'autres femmes - comme elle - dont la vie et le corps ont été à jamais brisés par les bombes et les balles israéliennes.

Une femme dort sur le sol à côté du lit de Layan pour s'occuper d'elle, car l'hôpital manque de personnel et est à bout de souffle. Je l'appellerai Ghada.

J'ai tout de suite compris qu'elles étaient de la même famille, toutes deux âgées d'une vingtaine d'années. « Sœurs », confirment-elles.

Même dans leur pire état, elles sont d'une beauté stupéfiante. Pour leur sécurité, je ne décrirai pas leurs caractéristiques physiques, mais elles possèdent une autre sorte de beauté qui ne peut être que ressentie.

C'est dans la façon dont elles s'occupent tendrement les unes des autres, plaisantent et rient dans un monde qui leur fabrique sans cesse de la misère.

C'est la façon dont elles m'ont accueillie dans leur cercle étroit, dont elles m'ont attendue chaque jour pour leur rendre visite et dont elles ont fini par me confier des informations précieuses, qu'elles m'ont à présent autorisée à raconter.

Rien ne sera publié sans leur accord préalable. Les détails d'identification sont modifiés ou omis, même s'il ne s'agit que d'une histoire d'amour, car même l'amour palestinien est perçu comme une menace.

Il ne s'agit pas d'une histoire d'amour extraordinaire, ni de ce genre d'interdit dramatique qui fait les beaux jours des pièces ou des films de Shakespeare.

En fait, c'est une situation suffisamment courante pour qu'on puisse la qualifier d'ennuyeuse. Sauf que l'amour de la vie de Layan, son mari bien-aimé Laith (nom fictif), est un combattant de la résistance palestinienne, un groupe tellement vilipendé et déshumanisé dans le discours populaire occidental que la plupart des gens ont du mal à imaginer qu'il puisse avoir de la sensibilité ou une capacité d'amour.

Ghada masse le cou et les épaules de Layan tandis que je tiens leur téléphone portable commun devant elle, parcourant les photos sur les instructions de Layan.

Ce sont des photos de sa vie avec Laith dans les bons moments. Des réunions de famille, des sorties sur la plage, des étreintes amoureuses, des poses heureuses, des selfies souriants.

Je me rends compte que les deux femmes ont perdu beaucoup de poids et j'imagine que Laith en a perdu encore plus. Sur les photos, il est beau, avec des yeux bienveillants qui respirent la générosité.

Le regard qu'il porte sur Layan sur certaines photos est d'une tendresse bouleversante.

« Reviens en arrière d'une photo », me dit Layan. « C'est le jour de nos fiançailles » et quelques photos plus loin, « c'était pendant notre lune de miel ».

Elle veut me raconter chaque détail de ces journées et je l'écoute avec plaisir, regardant son visage s'ouvrir au soleil des souvenirs qui habitent et animent son corps au fur et à mesure qu'elle parle.

Ils ressemblent à n'importe quel jeune couple : profondément amoureux, plein d'espoir et de rêves. Ils avaient économisé pour construire une modeste maison sur leur terrain familial, empruntant une somme importante à la banque pour terminer la construction.

Layan et Laith ont passé plus d'un an à choisir le carrelage, les meubles de cuisine et les autres finitions. Un jour, Laith est rentré à la maison avec un chat qu'il avait sauvé de la rue.

Une semaine plus tard, il en ramène un blessé. « Je ne pouvais pas le laisser souffrir et mourir », dit-il à Layan lorsqu'elle proteste.

L'homme que décrit Layan est un mari aimant qui lui écrivait des lettres d'amour et qui laissait des notes amusantes dans la maison pour qu'elle les trouve pendant qu'il était au travail, toutes ces notes étant conservées dans une boîte en plastique violette avec de plus longues lettres d'amour entre eux.

Elle décrit un fils et un frère dévoué qui rendait visite à sa mère tous les jours et soutenait ses frères et sœurs dans toutes les épreuves de la vie ; un oncle amusant adoré par ses nièces et ses neveux ; un gardien et un protecteur naturel qui nourrissait et abreuvait les animaux errants dans la rue ; un homme ancré dans les valeurs islamiques de miséricorde et de justice ; un fils du pays qui a pris les armes de manière désintéressée pour libérer son pays des cruels colonisateurs étrangers.

Il s'agit d'une famille résolument engagée en faveur de la libération nationale, prête à se sacrifier pour notre patrie commune, pour la simple dignité de prier dans la mosquée Al-Aqsa et de parcourir les collines de leurs ancêtres.

Une foi profonde

Le couple a essayé sans succès de concevoir un enfant, et Layan s'inquiète de ne pas avoir encore de bébé. Mais elle chasse rapidement sa déception, se soumettant à la volonté de Dieu.

« Alhamdulillah », dit-elle.

Tout le monde revient à cette phrase. Dieu a un plan pour chaque personne et qui sommes-nous pour le remettre en question, dit-elle.

Il s'agit d'une famille profondément croyante dans une société déjà profondément enracinée dans la foi.

« Mais nous sommes fatigués », ajoute-t-on parfois. « C'est beaucoup ».

"Alhamdulillah", encore une fois.

Mais je suis en colère et j'exprime souvent un désir de vengeance de la part de Dieu. Ce n'est pas leur cas.

« Dieu leur demandera des comptes en son temps », affirme Layan.

Ils vivaient dans leur nouvelle maison depuis moins d'un an lorsqu'Israël a commencé à bombarder Gaza. « J'ai à peine eu le temps d'en profiter », explique Layan.

Ils ne savaient pas ce qui allait se passer ce jour-là, mais Laith savait qu'il devait mettre sa famille à l'abri avant de prendre son fusil et de partir au combat. Il fit promettre à Layan de prendre leurs deux chats.

« Ce n'est pas le moment pour ça », a-t-elle dit. Mais il n’était pas d’accord.

« Ce sont des âmes que nous protégeons. Elles ne survivront pas seules », a-t-il dit.

Il l'embrasse sur le front, affirmation d'un amour et d'une dévotion inviolables.

Il a embrassé ses lèvres, ses joues, son cou. Et elle l'a embrassé avec les mêmes forces qui s'agitaient en elle.

Ils se sont embrassés longuement, se promettant de se retrouver, par la volonté de Dieu, si ce n'est dans cette vie, du moins dans l'au-delà. Layan, en larmes, a prié pour sa sécurité, implorant sans cesse Dieu de protéger son bien-aimé.

Elle priait encore quotidiennement pour lui lorsque je l'ai rencontrée, cinq mois après ce douloureux adieu. Elle avait appris qu'il avait été capturé par les Israéliens, mais elle ne savait pas s'il était vivant ou mort.

Je comprenais, comme elle certainement, qu'il avait au moins été torturé et qu'il l'était probablement encore, mais nous n'en parlions pas, de peur que le seul fait d’en parler ne donne vie à cette réalité.

Peu de temps après leur séparation, Israël a réduit leur nouvelle maison en ruines en quelques secondes. Layan y est retournée des semaines plus tard pour voir ce qu'elle pouvait récupérer de leurs vies.

Par miracle, la boîte en plastique violette contenant leurs lettres d'amour avait survécu indemne à l'écrasement de tout ce qu'ils possédaient.

Sauvés des décombres

Les sœurs et leur famille ont déménagé plusieurs fois pour se mettre à l'abri, emmenant à chaque fois les chats, jusqu'à ce que la maison où elles se trouvaient soit la cible d'un missile. C'était en fin de soirée, la plupart des habitants de l'appartement du troisième étage dormaient déjà.

Ghada était assise à côté de sa mère, bavardant comme elles le faisaient souvent avant de se coucher. Elle n'a pas entendu le missile. En fait, presque tout le monde affirme que les personnes se trouvant à l'intérieur d'une maison ciblée n'entendent pas la bombe. On dit que si l'on peut l'entendre, c'est que l'on est assez loin.

Au lieu de cela, Ghada a décrit avoir vu un éclair de lumière rouge avant de sentir un poids sur son dos. Son bras était étrangement tordu autour de son cou et au-dessus de sa tête.

Mais il n'y avait aucun son, jusqu'à ce qu'elle commence à entendre les craquements des débris qui tombaient. Elle a vu ses membres rebondir sous le poids du béton brisé qui frappait et tordait ses jambes devant elle.

La poussière brûle et aveugle ses yeux. Elle essaya de tâter le terrain à la recherche de sa mère, mais elle n'était pas sûre que sa main bougeait vraiment.

Elle appelle « Ummi [maman] », mais ne reçoit aucune réponse.

Elle a prononcé la shahada, le dernier testament d'un musulman devant Dieu à l'approche de la mort. Mais elle était encore en vie, et bientôt elle entendrait son jeune frère Qusai (ce n'est pas son vrai nom) crier : « Est-ce que quelqu'un est en vie ? »

Layan a vécu ce moment différemment. Elle a entendu le missile.

En règle générale, il émet un bruit sourd lorsqu'il fend l'air, suivi d'un boum lorsqu'il frappe. Layan a entendu le souffle et a attendu le boum, qui n'est jamais venu, ce qui l'a déconcertée.

Au lieu de cela, un bourdonnement d'oreille est venu troubler ses pensées. Sa bouche était remplie de gravier et de terre qu'elle s'efforçait de recracher.

Elle a essayé de bouger mais n'y est pas parvenue et a réalisé à ce moment-là qu'elle était ensevelie sous les décombres. Elle a prononcé la shahada et attendu la mort, puis a entendu la voix de son frère Qusai qui appelait : « Y a-t-il quelqu'un de vivant ? »

Elle s'écrie : « Je suis là ! Je suis vivante ! », mais elle n'entend pas sa propre voix. Terrorisée, elle essaye à nouveau d'appeler, mais ne peut à nouveau s'entendre, incertaine d'être vivante ou morte.

Elle prononce à nouveau la shahada et appelle son frère. Le bourdonnement dans ses oreilles s'estompe pour laisser place à un silence intérieur effrayant.

Elle entendait les sauveteurs se déplacer, mais pas sa propre voix, et pensait qu'elle était devenue muette. Elle imaginait une mort lente sous les décombres, seule dans le froid et l'obscurité, personne ne pouvant entendre ses cris pour la sauver.

« J'ai dû m'évanouir », dit-elle, « car la chose suivante que j'ai vue, c'est que plusieurs sauveteurs étaient en train de dégager mon corps des décombres ».

« Tout notre monde »

Plusieurs membres de leur famille sont tombés en martyrs ce jour-là. Israël a assassiné deux des frères et sœurs de Layan, des cousins, des tantes et des oncles, leurs conjoints et leurs enfants, les deux chats que Layan avait promis de protéger et, plus douloureusement encore, leur mère.

« Elle était tout pour nous », me disent Layan et Ghada. Elles me montrent des photos d'elle, matriarche bien-aimée au centre et à la tête de leur famille très unie.

Ghada l'appelle parfois dans son sommeil, réveillant les autres femmes présentes dans la chambre d'hôpital.

Là encore, la seule chose qui ait survécu à la seconde bombe est la boîte en plastique violet contenant leurs lettres d'amour et leurs notes.

« Dieu a épargné nos lettres parce que notre amour est vrai, pas seulement un bombardement, mais deux », dit-elle, avant d'ajouter : « Je veux juste savoir qu'il va bien ».

Une semaine après le début de mon séjour à Gaza, elles m'ont appelé dans leur coin de la chambre d'hôpital dès que je suis entrée après une longue journée passée ailleurs à Gaza. Elles sont toutes les deux en joie, des sourires s'étirant sur leurs beaux visages.

« Nous t’avons attendue toute la journée pour t’annoncer la bonne nouvelle », disent-elles, et je suis excitée et curieuse de l'entendre.

Elle me fait signe de m'approcher. J'approche mon oreille de son visage et elle murmure : « Laith est vivant. Il est dans la prison de [nom non divulgué] ! »

Je suis aux anges de savoir que cet homme que je n'ai jamais rencontré est en vie, et j'implore Dieu de le protéger et de le ramener à Layan. Je prie pour qu'ils se retrouvent et je me sens honorée d'avoir été autorisée à partager ce rare moment de soulagement et d'espoir à cette heure.

La télévision israélienne a récemment diffusé des vidéos d'une prison inconnue montrant des abus et des tortures systématiques sur des Palestiniens qu'ils ont kidnappés. Je me suis demandé si Laith faisait partie des hommes contraints de prendre des positions dégradantes pendant que les Israéliens parlaient d'eux comme s'ils étaient de la vermine.

Je pense à Laith lorsque je lis les récits de la propagande occidentale sur les viols massifs commis par le Hamas. Je sais qu'ils répètent les mensonges sionistes, non seulement parce qu'ils n'offrent aucune preuve, mais aussi parce que des journalistes honnêtes du monde entier ont fait voler en éclats leurs récits, en particulier l'article honteux du New York Times coécrit par une ancienne responsable militaire israélienne qui a liké des commentaires génocidaires sur les médias sociaux, dont l'un disait qu'Israël devait « transformer la bande de Gaza en un abattoir ».

Je sais au fond de moi que ce sont des mensonges car, comme la plupart des Palestiniens, nous comprenons les valeurs qui animent le Hamas.

On peut critiquer le Hamas sur bien des points, et beaucoup le font. Mais le viol, et encore moins le viol collectif, n'en fait pas partie.

Même les plus grands détracteurs du Hamas, y compris Israël, savent que de tels actes ne seraient jamais tolérés dans ses rangs et que, dans le cas improbable où ils se produiraient, ils seraient sanctionnés par l'expulsion et/ou la mort.

Que Dieu protège Laith et tous les combattants palestiniens qui ont quitté leur famille pour sacrifier leur vie pour notre libération collective.

Je continuerai à imaginer un jour où Layan et lui seront à nouveau réunis, leur maison reconstruite à Gaza et remplie de babillages de leurs enfants et de réunions de famille de ceux qui seront encore en vie.

 

 

 

TAMER NAFAR
Les gauchards israéliens “désabusés” qui attaquent Yuval Abraham projettent leur propre lâcheté

 

 Tamer Nafar, Haaretz, 12/3/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

De nombreux Israéliens juifs ont déclaré avoir été “désillusionnés” par la gauche après le 7 octobre. Ils ont dessoulé, disent-ils. Mais de nombreux Juifs israéliens ne se sont jamais soûlés, n’ont jamais vécu dans l’illusion ; ils se sont levés tous les matins et se sont battus 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pour l’égalité. Comme Yuval Abraham, par exemple, et le film qu’il a réalisé avec Basel Adra, Rachel Szor et Hamdan Ballal, “No Other Land”.

Basel Adra et Yuval Abraham posent avec le prix du film documentaire de la Berlinale, pour “No Other Land”, après la cérémonie de remise des prix du 74e  Festival international du film de la Berlinale à Berlin, en Allemagne, le mois dernier. Photo : Liesa Johannssen / Reuters

Quand j’entends les “désabusés” dire des choses comme « la partie de gauche en moi n’existe plus », ou « j’ai cru à la paix et j’ai été déçu », ils me rappellent cette vieille blague : un homme s’adresse à Dieu et lui demande « ça fait des années que je prie pour gagner à la loterie, pourquoi ça n’arrive pas ? », ce à quoi Dieu répond « parce que tu n’as jamais joué à la loterie ». Je demande donc à tous ceux qui sont déçus par les idéaux humanistes : avez-vous rempli vos obligations humanistes ? Parce que Yuval Abraham l’a fait.

La plupart des médias se sont concentrés sur le discours de remise de ^prix de Basel et Yuval. Les grands médias l’ont qualifié d’ « antisémite », puis ont retiré l’accusation sans s’excuser. Les gauchistes désabusés ont traité Abraham de lâche. J’ai décidé de ne pas me fier au discours, mais de voir le film lui-même. Ma conclusion : il n’est pas un lâche, au contraire. Ceux qui le qualifient ainsi projettent leur propre lâcheté.

Ce film est bouleversant. J’aurais aimé le regarder il y a quelques mois, j’aurais peut-être alors pu m’accrocher à la lueur d’espoir qu’il offre. En ce moment, j’ai du mal à me concentrer sur la moindre étincelle d’espoir.

Alerte au spoiler : les habitants palestiniens de Masafer Yatta perdent. Mais même une défaite a des héros : les militants palestiniens qui gardent la tête haute face aux bulldozers israéliens, parce qu’ils n’ont pas le choix, et le héros juif Yuval Abraham, qui décide d’abandonner la bulle de sécurité dans laquelle vivent la plupart des Israéliens pour se battre pour la justice humaine.

Les deux protagonistes se tiennent sans crainte avec une caméra, documentant des scènes qu’aucune personne “désabusée” ne pourrait regarder plus d’une seconde sans fermer les yeux ou se détourner. Il y a des scènes difficiles où l’armée décide d’encercler des terres palestiniennes avec des panneaux déclarant qu’il s’agit d’une “zone d’entraînement militaire” - il s’avère que cela a été fait dans le but exprès d’empêcher les villages palestiniens de s’étendre, selon les minutes enregistrées d’auditions gouvernementales des années 70 qui ont été récemment déclassifiées. L’un des intervenants à ces auditions était Ariel Sharon.

Une autre scène montre un groupe de colons masqués attaquant les résidents palestiniens à coups de pierres, tandis que les soldats se tiennent à l’écart et protègent les colons. L’un des soldats est filmé en train de participer aux jets de pierres. Un autre soldat s’en prend à Yuval et lui crie : « Allez, connard, va écrire ton article ». Et Yuval continue à documenter, sans peur.

La caméra filme la fusillade insensée qui a laissé Haroun Abou Aran paralysé, ainsi que sa mère qui supplie qu’on lui construise une chambre confortable et saine pour qu’il ne reste pas paralysé dans une grotte. À la fin du film, une légende informe les spectateurs que Harun, 26 ans, est mort des suites de ses blessures par balle.

Et si cela ne suffit pas, il y a la scène où un camion de ciment déverse du béton sur des terres agricoles devant l’agriculteur lui-même ; et si cela ne suffit pas, il y a un tracteur sur le côté qui arrache tout le système d’irrigation de l’agriculteur ; et si cela ne suffit pas, ils apportent une tronçonneuse pour finir le boulot.

La scène la plus difficile pour moi est celle qui implique des enfants de l’âge de mes fils. Les enfants sont dans une salle de classe quand soudain des dizaines de soldats armés ferment la porte sur eux. Les enfants commencent à s’enfuir, terrifiés, sautent par une fenêtre, puis se tiennent à l’écart, regardant en pleurant un bulldozer démolir la salle de classe. Les colons regardent eux aussi, comme s’il ne leur manquait qu’un peu de pop-corn.

Le film montre un Palestinien qui tente d’empêcher la démolition de sa maison, tandis qu’une policière à labelle allure lui dit : « Monsieur, vous nous empêchez de faire notre travail ». Je me demande si cette policière elle aussi a dessoulé. Peut-être pense-t-elle aujourd’hui avoir été trop “humaine”.

Démolition d’une structure à Masafer Yatta, en Cisjordanie, en 2022. Photo : Mussa Issa Qawasma / Reuters

Le discours de Yuval et Basel, sur lequel vous avez tous décidé de vous focaliser, ne dit pas tout. Il ne dit que peu de choses sur un système raciste et arrogant qui continue à suivre une voie vouée à l’échec. Mais leur discours est, je pense, un signe vers une voie alternative, peut-être non pavée ; un signe qui déclare : il n’y a pas de société partagée sans une lutte palestinienne partagée. Le discours était aussi courageux que le lieu l’exigeait, en particulier en Allemagne, qui arme toujours l’occupation et se trouve une fois de plus du mauvais côté de l’histoire.

Mon partenaire et frère, le réalisateur Udi Aloni, est monté sur la même scène en 2016 lorsque nous avons remporté le prix du public pour le long métrage Junction 48, et a appelé à l’égalité. Il a également été pris pour cible par les médias israéliens grand public, avec le titre embarrassant « Notre photographe a réussi à documenter le discours d’Aloni avec une caméra cachée » - alors qu’Aloni s’était exprimé devant des milliers de personnes équipées de téléphones et d’appareils photo.

Il n’y a « pas d’autre terre », pas d’autre combat. Il n’est pas trop tard pour que les soi-disant sobres dessoulent pour de bon. Tout ce dont ils ont besoin, c’est du courage de Yuval Abraham.


 


Tamer Nafar (
تامر النفار/ תאמר נפאר)  né en 1979 à Al-Ludd/Lod/Lydda, est un rappeur, acteur, scénariste et activiste social palestinien, Israélien de papier. Il est le leader et l’un des membres fondateurs de DAM, le premier groupe de hip-hop palestinien. DAM est un acronyme pour “Da Arab MCs” et signifie également “durable” ou “éternel” en arabe ou “sang” en arabe et en hébreu. @TamerNafarOfficial

Nous ne sommes pas d’accord avec l’exposition israélienne au Musée national des arts visuels de Montevideo

Montevideo, 13 mars 2024

A l’ensemble de la communauté,

Avec notre plus grande considération,

Nous soussigné·es appartenons à divers domaines de la culture ; nous concevons l’art comme un puissant outil de discours qui a la possibilité d’aborder et d’élargir les perspectives sur des questions difficiles et de conduire à des réflexions profondes dans l’échange qui a lieu avec celles et ceux avec qui il est partagé. Nous connaissons les tâches et les mécanismes impliqués dans la réalisation d’une exposition d’art, son commissariat et sa conception, ses temps de création et de montage, afin que le message que l’art établit soit bien présenté à ceux qui l’approchent. Nous considérons le musée comme un espace précieux pour légitimer l’art et les discours qui en découlent. Le musée est l’espace qui accomplit réellement la tâche finale de médiation avec le public, qui donne un visage à un discours.

L’une des œuvres exposées au MNAV : l’impression numérique d’Or Yogev représente Shiri Bibas et ses fils Ariel et Kfir, capturés dans le kibboutz militarisé de Nir Oz, tués, selon les Palestiniens, par un bombardement israélien à la fin du mois de novembre. L’armée israélienne a démenti ces informations, les qualifiant de "terrorisme psychologique". [Note de Tlaxcala]

C’est pour cette raison que nous souhaitons exprimer notre inquiétude concernant la récente exposition La herida más profunda [La blessure la plus profonde ; titre anglais : Le plus grand trou, NdT], organisée au Museo Nacional de Artes Visuales, l’un des espaces de médiation les plus importants de notre territoire, où sont organisées des expositions d’artistes de référence dans le domaine, placée là où se tenait précédemment le Premio Nacional de ilustración 2023. Comme l’explique le texte de l’exposition, il s’agit d’une « exposition itinérante de dix-sept artistes israéliens en hommage aux victimes de violences sexuelles et de genre lors de l’attaque perpétrée par le Hamas le 7 octobre 2023 ».


« Le plus grand trou » : affiche de l’exposition

Nous considérons qu’avec cette exposition, dont le titre suggère qu’une partie est plus touchée que l’autre, l’État légitime l’un des principaux arguments utilisés par le gouvernement israélien pour justifier le massacre et le siège du peuple palestinien depuis le 7 octobre. Il s’agit d’une exposition qui nous invite à regarder à travers le prisme d’une des parties au conflit, la plus puissante, celle qui dispose de plus de ressources économiques, d’un soutien international et qui a décidé de ne pas cesser le feu malgré les demandes de l’ONU, de diverses organisations sociales et d’une communauté internationale massive.

Dans ce contexte, nous considérons que le sujet ne peut être abordé que si l’on adopte une perspective complète sur l’ensemble du conflit, et nous nous demandons donc si le Musée national des arts visuels lui-même serait également disposé à organiser une exposition sur les abus commis par Israël à l’encontre de la Palestine. Par ailleurs, nous ne sommes pas d’accord avec l’utilisation des ressources, des espaces et des outils culturels de l’État pour soutenir directement une position dans un conflit complexe et sensible, qui a des angles, des victimes et des dommages multiples.

Enfin, nous voudrions souligner que l’intégration de cette exposition dans le Mois de la Femme ignore l’un des aspects qui unit les nouvelles vagues du féminisme, qui est de dénoncer et de ne pas perpétuer les abus contre les personnes les plus faibles, qui souffrent et ont souffert tout au long de l’histoire. Cette exposition n’appelle pas à la paix, au contraire, avec son discours de dénonciation, elle justifie d’autres abus qui se poursuivent encore aujourd’hui.

Avec une profonde inquiétude et sans plus attendre, nous vous prions d’agréer l’expression de nos salutations distinguées,

Signez la lettre

Premières signatures


1.             Denisse Torena Dessinatrice

2.             Laura Scaron Graphiste, illustratrice.

3.             Daniela Beracochea Illustratrice, artiste graphique.

4.             María Noel Silvera (Noe Cor) Artiste visuelle

5.             Andrés Alberto Farías Caricaturiste

6.             Felipe Fuentes Cardoso Musicien, producteur et peintre

7.             Catalina Martinez Photographe

8.             Paula Genta Artiste visuelle

9.             Cecilia Vidal Photographe, enseignante

10.          Paula Rojas Photographe

11.          Gabriel Ameijenda Rodriguezi Peintre, illustrateur, graphiste et musicien

12.          Manuela Gutierrez Productrice musicale et audiovisuelle

13.          Noel Langone Arts visuels et performance

14.          Fabricio Ceppi Rojas Artiste visuel

15.          Matias Bervejillo Artiste visuel

16.          Carlos Musso Artiste visuel et enseignant UDELAR Gr 5

17.          Martina Solari Artiste visuel

18.          Uli Piel Badin Edye Écrivain et artiste visuel

19.          Magdalena Gualco Artiste visuel et enseignant

20.          Diego Bervejillo Designer, illustrateur.

21.          Facundo Muñoz Artiste visuel

22.          Alicia Fornaro Photographe

23.          María José Pita Architecte, illustratrice

24.          Martin Ábalos Dessinateur industriel

25.          Inés Trabal Luisi Médecin, poète

26.          Andrés Stagnaro Auteur-compositeur-interprète

27.          Gustavo Fernández Cabrera Artiste visuel et communicateur

28.          Liliana Silva Barbato Enseignante, plasticienne, psychologue

29.          Ismael Smith Maciel Poète

30.          Sergio Altesor Licandro Écrivain

31.          Carmela Pérez Lobato Actrice

32.          Valentina Ibarlucea Graphiste, graveur

33.          Verónica Gayoso de Araújo Scénographe

34.          Federico Arnaud Armstrong Artiste visuel, enseignant

35.          Martina Berruti Tresso         

36.          Ana Laura López de la Torre Artiste, enseignante

37.          Susana Dallona    

38.          Candela Bado Artiste visuel

39.          Maria Noel González Professeur de danse, avocate

40.          Ángela López Ruiz Artiste, commissaire d’exposition et enseignante.

41.          Gastón Pepe Musicien

42.          Laura Sandoval Enseignante, designer

43.          Alicia Rebollo Artiste visuelle

44.          Eduardo Nogareda Poète

45.          María Gravina Telechea Poète

46.          Andrés Seoane Peintre

47.          Marina Pose Photographe

48.          Agustina Rodríguez Tabacco               

49.          Florencia Martinez Artiste

50.          Mateo Etchegoyhen Un peu de tout

51.          Itzel Ibargoyen Responsable culturel

52.          Isabel Acosta adami Employée de maison

53.          Eloísa Larrosa       

54.          Margarita Ferro    

55.          Ana María Pereda Aguirregaray          

56.          Eva Aguilar            

57.          Ana María Araújo Felice      

58.          Cecilia Gianlupi Poète

59.          Jerónimo Lams Concepteur éditorial et musicien

60.          Florencia Apud Márquez Céramiste

61.          Laura Waterston Enseignante

62.          Adriana Fraga Enseignante à la retraite

63.          Maria María Noel González de Negri Libraire

64.          Alicia Torres Enseignante

65.          Sebastián Santana Artiste visuel

66.          Fabiana Orpin Céramiste

67.          Andrés Granja Bianchi Restaurateur

68.          Maria Delia Barboza Céramiste

69.          Iojana Schmidt Artisan du bois

70.          Anna Pignataro Otman Responsable culturel

71.          Pepi Gonçalves Producteur

72.          Rosana Carrete Responsable culturelle, directrice du musée

73.          Araí Moleri Photographe

74.          Fernando Sicco Artiste, gestionnaire culturel, psychologue. Ancien directeur de l’EAC.

75.          Juan Angel Urruzola Photographe

76.          Alicia Pérez Responsable culturelle, enseignante

77.          Patricia Gainza Sociologue et artiste visuelle.

78.          María Noel González Talice Avocate, professeur de danse

79.          Nicolás Spinosa Artiviste, performeur, gestionnaire culturel

80.          Oscar Alvarez       

81.          Joel Gonnet          

82.          Fernando Stevenazzi            

83.          Daniel Daners Architecte, gestionnaire d’installations sportives.

84.          Diego Focaccio Artiste. Enseignant.

85.          Javier Landa Artiste. Enseignant.

86.          Camila Lacroze Artiste visuel. Enseignant

87.          Andrés Boero        

88.          Tunda Prada Artiste

89.          Mariana Méndez Artiste plasticienne

90.          María del Pilar Pérez Piñeyro Responsable culturelle. Enseignante

91.          Leopoldo G. Martí Artiste et professeur d’art à l’université

92.          Carlos Vicente Musicien

93.          Mariana Marchesano Artiste

94.          Andrea Bustelo Artiste textile

95.          Ann-Marie Almada Chanteuse, écrivain

96.          Damián Musacchio Calvo Écrivain, animateur d’atelier

97.          Francesca Cassariego Art visuel

98.          Adriana Belbussi Figueroa Artiste

99.          Enrique Machado

100.        Ernesto Vila           

101.        Ana Corti              

102.        Sylvia Cuitiño Artiste

103.        Eden Hernandez Enseignante

104.        Diana Veneziano Actrice, réalisatrice et enseignante

105.        Liliana Molero Photographe et enseignante

106.        Adriana Costa      

107.        Luciano Alvarez Danseur Acteur

108.        Gonzalo Cousillas

109.        Alicia Dogliotti Actrice

110.        Walter Tournier Cinéaste

111.        Valeria Lepra Enseignante, chercheuse, artiste

112.        Rosana Greciet     

113.        Laura Severi Artiste plasticienne

114.        Ignacio Seimanas Artiste visuel, photographe, enseignant.

115.        Clara Barone        

116.        Martín Palacio Gamboa Écrivain, musicien, enseignant, chercheur, artiste visuel.

117.        Oriana Irisity Actrice, danseuse.

118.        Liv Maria Barreiro

119.        Alejandro Veneziano Architecte

120.        Irene Porzio Musicienne et enseignante

121.        Celina Etcheverría Artiste

122.        Luis Alonso            

123.        Sergio Schvarz Poète

124.        Ana García Lanza 

125.        Yvonne D’Acosta Artiste

126.        Daniel Benoit Gestionnaire culturel et enseignant

127.        Alberto Lastreto Prieto          

128.        Karl Uruski             

129.        Federico Gutierrez Photographe

130.        Iván Franco Photographe

131.        Fernando Foglino Artiste

132.        Valentina Cardellino Artiste

133.        Paola Ferreira Photographe

134.        Marísa Adano Photographe

135.        Mauricio de los Santos        

136.        Marcos Ibarra Artiste visuel

137.        Lilián Castro Soto Photographe et enseignante

138.        Mariana Casares Écrivain, danseuse, enseignante

139.        Nairí Aharonián Paraskevaídis            

140.        Santiago Grimon Artiste visuel

141.        Mauricio Ubal Musicien

142.        Juan Manuel Rodriguez Artiste

143.        Jorge Eduardo Díaz Coitinho Recherche artiste multimédia

144.        Susana Zurbrigg Artiste visuel

145.        Rubén Olivera Musicien

146.        Julio Pellegrini       

147.        Alfredo Alzugarat  

148.        Francisco Bustamante Professeur de littérature

149.        Pablo Daniel Reyes Rodríguez Musicien

150.        Julián Croatto Musicien

151.        Marina Cultelli      

152.        Sol Suárez Artiste

153.        Sebastián Nabón Hernández Musicien

154.        Manuela Aldabe Toribio journaliste, artiste visuelle, enseignante

155.        Lía Cosse              

156.        Soledad Guido Enseignante

157.        Jorge Nández Enseignant, écrivain

158.        Alma Bolón Enseignante

159.        Alma Pedretti Enseignante à la retraite

160.        Cristina Martinez Peintre

161.        Santiago Badt Artiste visuel et gestionnaire culturel

162.        Pablo Musetti Acteur

163.        Valentín Benoit Historien et conseiller artistique

164.        Martín de los Santos Concepteur de communication visuelle

165.        Hugo Bervejillo Retraité

166.        Gabriel García Photographe

167.        Tatiana Oroño     

168.        Adriana Cabrera Esteve Photographe et écrivain

169.        Fernando Caytano Musicien, producteur de musique

170.        Silvia Martínez del Rio Journaliste

171.        Glauco Mirandetti Sculpteur

172.        Maria Quintero citoyenne

173.        Andrea Curcio Artiste

174.        Alexandra Nóvoa Chercheuse

175.        Lucía Aguirregaray               

176.        Florencia Caja céramiste, artiste plastique

177.        Daniel Viña acteur et metteur en scène

178.        Álvaro Molina       

179.        Juan Daniel Hernández García Auteur-compositeur-interprète et conteur

180.        Corina Devitta retraitée

181.        Dumas Teixeira Responsable culturel

182.        Ricardo Viscardi Udelar

183.        Adrián Smith Musicien et enseignant

184.        Vito Mata retraité

185.        Mercedes Xavier Photographe

186.        Elena López Enseignante

187.        Natalia de León artiste - enseignante

188.        Valentina Sande Illuminatrice

189.        Pablo Auliso Costumier, artiste textile

190.        Marianoel Flain Musicien - enseignant

191.        Susana Anselmi Actrice

192.        Víctor Guichón Poète

193.        Nicolás Del Giorgio Musicien

194.        Mya Ferrando Illustratrice

195.        Fabiana Melegatti Actrice

196.        Mariana dos Santos Velázquez Artiste visuelle et enseignante

197.        Ana Fernández      

198.        Mariana Fossatti Sociologue et artiste visuelle

199.        Sofía Ott

200.        Alejandro Díaz Conservateur et chercheur en art.

201.        Carolina Silva Rode Poète

202.        Cecilia Duffau       

203.        Carlos Casares Mora           

204.        Gonzalo Firpo Illustrateur, graphiste

205.        Beatriz Moreira Artisane de la laine et du macramé

206.        Luis E. Sabini Fernández Journaliste et enseignant

207.        Maria del Carmen Artigas Artiste et enseignante

208.        Fredy Cabrera

209.        Fausto Giudice Auteur, traducteur, éditeur