Phrase du jour Quote of the day

Je ne connais pas dans l'histoire de l'humanité, dans l'histoire du droit de la guerre, d'armées qui prennent autant de précautions et qui soient autant surveillées par des juges, bien assis dans leurs fauteuils, qui jugent quelques affaires par an, qui n'ont pas grand-chose à faire, je suis désolée de le dire - je vais peut-être être attaquée par ces juges - et qui doivent arrêter des priorités. Et la priorité, ce n'était vraiment pas d'attaquer M. Netanyahou. Est-ce que vous connaissez, j'aimerais bien le savoir, une armée qui, au monde, d'abord mobilise sa population, des jeunes de 19 ans, de 20 ans, qui sont tués pour défendre leur patrie, qui devraient être soutenus ? Deuxièmement, qui font des appels téléphoniques, qui lancent des tracts, qui demandent aux populations qui les préviennent à l'avance. Est-ce que vous croyez, puisque c'est une condition des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, est-ce que vous croyez vraiment que c'est de manière intentionnelle, c'est-à-dire est-ce qu'il y a vraiment l'intention d'affamer les Gazaouis, et de tuer des civils ? L'intentionnalité est partie intégrante des crimes qu'a jugés la Cour pénale internationale.

Noëlle Lenoir, avocate à la Cour, ancienne ministre française des Affaires européennes, sur Répliques, la causerie au coin du feu de l’académicien Alain Finkielkraut, 29/6/2024

16/03/2024

GIDEON LEVY
Message aux Israéliens de gôche : sortez du choc du 7 octobre et ouvrez les yeux sur Gaza !

Gideon Levy, Haaretz, 13/3/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Chers amis et anciens amis : Il est temps de dessoûler de votre dessoûlement.

C’était infondé au départ, mais aujourd’hui, près de six mois après que vos « yeux se sont ouverts », il est temps de revenir à la réalité. Il est temps de revenir à une vision d’ensemble, de réactiver la conscience et le sens moral qui ont été éteints et archivés le 7 octobre, et de voir ce qui nous est arrivé depuis lors, à nous et, oui, aux Palestiniens.

Le camp de réfugiés de Jabaliya à Gaza. Photo : Mahmoud Essa / AP

Il est temps d’enlever les bandeaux que vous vous êtes mis sur les yeux, ne voulant pas voir et ne voulant pas savoir ce que nous faisons à Gaza, parce que vous avez dit que Gaza le méritait et que ses catastrophes ne vous intéressent plus.

Vous étiez en colère, vous vous êtes sentis humiliés, vous avez été stupéfaits, vous avez été terrifiés, vous avez été choqués et vous avez eu du chagrin le 7 octobre. C’était tout à fait justifié. Ce fut un choc énorme pour tout le monde.

Mais les conclusions que vous avez tirées de ce choc n’étaient pas seulement erronées, elles étaient à l’opposé des conclusions qu’il aurait fallu tirer de la catastrophe.

On ne s’en prend pas aux gens dans leur douleur, et certainement pas aux sionistes de gauche dont la douleur est leur art, mais il est temps de se défaire du choc et de se réveiller. Vous pensiez que ce qui s’est passé le 7 octobre justifiait quoi que ce soit ? Eh bien, ce n’est pas le cas. Vous pensiez qu’il fallait à tout prix détruire le Hamas ? Eh bien, non. Il ne s’agit pas seulement de justice, mais aussi de reconnaître les limites de la force.

Ce n’est pas que vous soyez mauvais et sadiques, ou racistes et messianiques, comme la droite. Vous avez seulement pensé que le 7 octobre a soudainement prouvé ce que la droite a toujours dit : qu’il n’y a pas de partenaire parce que les Palestiniens sont des sauvages.

Cinq mois devraient suffire pour vous permettre de surmonter non seulement votre réaction instinctive, mais aussi vos conclusions. Le 7 octobre n’aurait pas dû changer vos principes moraux ou votre humanité. Mais il les a bouleversés, ce qui constitue un sérieux motif d’inquiétude quant à la solidité de vos principes moraux.

L’attaque vicieuse et barbare du Hamas contre Israël ne change pas la situation fondamentale dans laquelle nous vivons : celle d’un peuple qui harcèle et tyrannise un autre peuple de différentes manières et avec une intensité variable depuis plus d’un siècle maintenant.

Gaza n’a pas changé le 7 octobre. C’était l’un des endroits les plus misérables de la planète avant le 7 octobre et il l’est devenu encore plus après.

La responsabilité d’Israël dans le sort de Gaza et sa culpabilité n’ont pas changé en ce jour terrible. Il n’est pas le seul coupable et ne porte pas l’entière responsabilité, mais il joue un rôle décisif dans le destin de Gaza.

La gauche ne peut se soustraire à cette responsabilité et à cette culpabilité. Après le choc, la colère et le chagrin, il est temps maintenant de dessoûler et de regarder non seulement ce qui nous a été fait, comme les médias israéliens nous ordonnent de le faire jour et nuit, mais aussi ce que nous faisons à Gaza et à la Cisjordanie depuis le 7 octobre.

Non, notre catastrophe ne compense pas cela, rien au monde ne peut compenser cela. La droite célèbre la souffrance palestinienne, s’en délecte et en redemande, tandis que la gauche détourne le regard et garde un silence effroyable. Elle est encore en train de « dessoûler ». Il est temps d’y mettre fin.

Ce que le monde entier voit et comprend devrait également être compris par une partie au moins de ce qui fut le camp de la conscience et de l’humanité. Nous ne reviendrons pas sur le rôle de la gauche sioniste dans l’occupation et l’apartheid, ni sur son hypocrisie.

Mais comment un peuple entier peut-il détourner les yeux des horreurs qu’il commet dans son arrière-cour, sans qu’il reste un camp pour les dénoncer ? Comment une guerre aussi brutale peut-elle se poursuivre sans qu’aucune opposition ne se manifeste au sein de la société israélienne ?

La gauche sioniste, qui veut toujours se sentir bien dans sa peau et se considérer comme éclairée, démocratique et libérale, doit se rappeler qu’un jour elle se posera la question, ou se la fera poser par d’autres : Où étiez-vous lorsque tout cela s’est produit ? Où étiez-vous ? Vous étiez encore en train de dessoûler ? Il est temps que cela cesse, car il se fait déjà tard. Très tard.

 

Les travailleurs palestiniens face au Grand Remplacement

C’est un aspect peu connu, à travers le monde, de la guerre lancée par Israël en octobre dernier : la suppression des possibilités de travailler en Israël pour les Palestiniens de Cisjordanie et Jérusalem-Est et leur remplacement par des travailleurs importés d’Asie, principalement d’Inde. Ci-dessous 3 articles qui jettent la lumière sur la tentative de Grand Remplacement en cours et ses contradictions, traduits par Fausto Giudice, Tlaxcala

 

MAAN informe la délégation de l’UE de ses efforts pour que les travailleurs palestiniens puissent retourner travailler en Israël

wac-maan.org.il, 12/3/2024

Introduction d’Assaf Adiv, directeur exécutif de MAAN, à la réunion d’information organisée dans les locaux de l’UE avec des délégations étrangères le 11 mars à Tel-Aviv.

Quelque 200 000 Palestiniens sont interdits de travail en Israël depuis le 7 octobre. Sans aucune forme de filet de sécurité, la situation est devenue insupportable dans les villes et les villages de Cisjordanie. Les employeurs en Israël - en particulier dans les secteurs de la construction et de l’agriculture - ont également été laissés dans l’incertitude car ils n’ont pas d’alternative réelle à la main-d’œuvre palestinienne.

Après l’attaque du Hamas et le déclenchement de la guerre, l’état d’urgence a été déclaré en Israël. L’entrée des Palestiniens en Israël a été interdite et 11 points de contrôle reliant la Cisjordanie à Israël ont été fermés. Alors que les travailleurs palestiniens ne trouvent pas d’emploi dans l’économie palestinienne en faillite, les projets de certains ministres israéliens visant à remplacer les Palestiniens par des travailleurs migrants ne sont pas viables et ne servent que des objectifs politiques populistes.

L’association des travailleurs MAAN, un syndicat indépendant en Israël qui défend les travailleurs palestiniens, s’est engagée avec d’autres forces dans une campagne visant à faire pression sur les autorités israéliennes pour qu’elles ouvrent les portes d’Israël au retour des travailleurs palestiniens.

La faim chez les travailleurs de Cisjordanie

Cinq mois de chômage forcé ont laissé les travailleurs dans une situation désastreuse. Les travailleurs palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza qui étaient employés sur le marché du travail israélien jusqu’au 7 octobre ont contribué à plus de 20 % du produit national brut palestinien (environ 4 milliards de dollars US) par an. (voir le récent rapport de l’INSS)

Or, ces travailleurs ne bénéficient pas de l’assurance chômage. Cette situation a été mise en évidence lors de la pandémie de coronavirus, lorsque des dizaines de milliers de personnes ont été mises au chômage en raison des fermetures et des restrictions imposées et se sont retrouvées sans source de revenus pendant des mois. Aujourd’hui, les travailleurs témoignent de l’état des repas sautés et de la faim, tandis que l’incertitude quant à l’avenir aggrave l’inquiétude et le bien-être mental.

Dans un témoignage que nous avons publié sur le site Internet de MAAN (en hébreu), l’un de ces travailleurs a décrit comment il a épuisé toutes ses économies et s’est retrouvé dans l’incapacité d’acheter ne serait-ce que du lait pour ses enfants. Un autre ouvrier s’est plaint de l’Autorité palestinienne à Ramallah qui, comme à l’époque de la pandémie de coronavirus, n’a manifesté aucune sympathie à l’égard des travailleurs. Plusieurs travailleurs se sont moqués des propositions avancées par le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammad Shtayyeh, de « revenir à la culture de la terre et de vivre des légumes et des fruits qu’ils cultivent ». Un travailleur qui nous a parlé s’est moqué de cette idée et a déclaré : « J’ai mon appartement en ville et je n’ai pas un mètre de terre à cultiver. Cet appel n’est que pure fantaisie. Shtayyeh sait que sans les revenus des travailleurs, son AP est finie ».

De nombreux travailleurs témoignent d’une terrible frustration face à la position d’Israël. Après des années de travail en Israël, partant à l’aube pour une dure journée de travail et rentrant chez eux à la nuit tombée, contribuant ainsi à l’économie israélienne, ils ont le sentiment d’être tenus pour responsables d’un massacre qu’ils n’ont pas commis.

Remplacer les Palestiniens par des travailleurs indiens n’est pas réaliste

Dans le contexte de la guerre et des appels à la vengeance contre tous les Palestiniens, qu’ils soient membres du Hamas ou non, des ministres israéliens appellent à mettre fin au travail des Palestiniens en Israël. Le chef de file des partisans du remplacement des Palestiniens par des travailleurs indiens est le ministre de l’économie et de l’industrie, Nir Barkat (Likoud), qui a déclaré à plusieurs reprises son intention de faire venir 160 000 travailleurs de l’Inde et d’un certain nombre de pays africains pour remplacer les travailleurs palestiniens dans tous les secteurs de l’économie. Le ministre Barkat et le ministre des Finances d’extrême droite Bezalel Smotrich, qui appellent à mettre fin à la dépendance d’Israël à l’égard des travailleurs palestiniens, proposent des idées qui ne peuvent pas fonctionner. L’économie israélienne manque aujourd’hui non seulement des 200 000 travailleurs palestiniens, mais aussi des quelque 17 000 travailleurs immigrés qui ont quitté Israël depuis le début de la guerre.

La difficulté de recruter des travailleurs à l’étranger est toujours présente et il n’y a aucune chance de faire venir des dizaines de milliers de personnes en quelques mois, même dans des conditions normales, et encore moins pendant une guerre impitoyable. Le fait que le 7 octobre, plus de 40 travailleurs étrangers aient été assassinés/enlevés rend l’idée de travailler en Israël beaucoup moins attrayante. Malgré les déclarations ambitieuses de Barkat, le nombre de travailleurs arrivant en Israël à la fin du mois de février 2024 (cinq mois après le début de la guerre) était minime. Voir (l’article de Globes qui rapporte l’arrivée des 1000 premiers travailleurs indiens à la fin du mois de février).

Le journal Calcalist qualifie le projet de Barkat d’ « illusoire ». L’article cite un haut fonctionnaire qui affirme que même avant la guerre, le projet de Barkat de faire venir 30 000 travailleurs d’Inde était bloqué depuis des mois. Le directeur général du ministère de l’Économie, Amnon Merhav, explique également dans l’article qu’il n’existe pas de solutions magiques et que le plan est irréaliste.

Les forces de sécurité insistent sur le fait que les Palestiniens doivent retourner au travail

Les services de sécurité israéliens, qui ont annoncé en octobre une fermeture totale et une interdiction d’entrée des travailleurs palestiniens en Israël, sont depuis lors confrontés à un dilemme complexe. D’une part, ils reconnaissent la sympathie écrasante de l’opinion publique palestinienne pour le Hamas et ses actions, et donc la crainte que l’entrée de travailleurs palestiniens en Israël s’accompagne d’activités terroristes. D’autre part, ils craignent les frictions avec les Palestiniens et la pression que cette crainte exerce sur les maires et les décideurs israéliens. D’autre part, l’administration civile et le COGAT [Coordonnateur des activités gouvernementales dans les territoires palestiniens, unité du ministère israélien de la Défense] préviennent que le fait de laisser 200 000 travailleurs chez eux, sans aucune compensation ni source de revenus, entraînera certainement des difficultés économiques extrêmes, voire une explosion de violence.

Une proposition du cabinet a donc été formulée à la fin du mois de novembre pour permettre l’entrée de 28 000 travailleurs dans les secteurs de la construction et de l’agriculture, dans un premier temps. Un mois plus tard, le Conseil de sécurité nationale a présenté un plan visant à employer 80 000 travailleurs. Cependant, une discussion au sein du cabinet le 10 décembre n’a abouti à aucun résultat, étant donné l’opposition de plusieurs ministres de droite à cette mesure. M. Smotrich a affirmé qu‘ « un pays qui accorde de l’importance à la vie n’autorise pas l’entrée de citoyens de l’ennemi pendant une guerre ». Netanyahou a cédé face à cette opposition, a reporté le vote et la situation est restée telle qu’elle était jusqu’à présent (début mars 2024) : les travailleurs palestiniens ne sont pas autorisés à reprendre leur travail en Israël.

Toutefois, ce raisonnement sécuritaire s’est rapidement révélé totalement infondé lorsque les employeurs des zones industrielles des colonies (également connues sous le nom de zone C), les mêmes colons représentés par Smotrich à la Knesset, ont exigé d’être autorisés à renvoyer leurs travailleurs dans les usines. Cette pression des colons a conduit à l’entrée de 10 000 travailleurs palestiniens de Cisjordanie pour travailler dans les colonies.

Depuis plus de quatre mois, ces travailleurs sont employés dans les zones de colonisation sans provoquer de heurts ou de confrontations violentes. Il n’y a aucune raison pour que seuls les employeurs israéliens en Israël se voient refuser la possibilité d’employer des Palestiniens.

Les travailleurs palestiniens sont la bonne alternative économique

Les entrepreneurs et les agriculteurs israéliens qui, pendant des années, ont fait appel à des travailleurs palestiniens, critiquent sévèrement le gouvernement. Le président de l’Association des constructeurs israéliens, Raul Srugo, a expliqué à la commission de la Knesset sur les travailleurs étrangers (25.12) que les entrepreneurs étaient en grande difficulté. « Le secteur de la construction est presque complètement à l’arrêt et n’est productif qu’à 30 %. 50 % des chantiers sont fermés, ce qui aura un impact sur l’économie israélienne et le marché du logement ». Un rapport de situation présenté à la commission de la Knesset par le ministère des Finances a montré que la fermeture du secteur de la construction coûte à l’économie israélienne 3 milliards de NIS [= 750 millions d’€] chaque mois.

Faisant référence au fait que les travailleurs palestiniens n’étaient pas autorisés à entrer en Israël mais à travailler dans les colonies, le président de l’Association des entrepreneurs en rénovation, Eran Siev, a déclaré : « Il s’agit d’une décision ridicule prise par une bande de personnes délirantes au sein du gouvernement israélien, qui nuit directement aux travailleurs manuels et à l’industrie de la rénovation, qui est en train de s’effondrer. La décision actuelle est déconnectée d’Israël sur le terrain et des propriétaires d’entreprises sur le terrain qui sont confrontés à la faillite et à l’effondrement économique ». Siev a ajouté : 3Nous appelons à l’uniformité et à l’évitement de la politique de bas étage - la loi en Judée et Samarie comme en Israël » (Real Estate Center, 21/12/2023, en hébreu).

S’il est mis en œuvre, le plan de Nir Barkat visant à remplacer les Palestiniens par des migrants aura également des effets dévastateurs sur le marché du travail israélien. L’importation massive de travailleurs en provenance de pays avec lesquels Israël n’a pas conclu d’accords bilatéraux entraînera d’horribles phénomènes de trafic de main-d’œuvre, de perception d’énormes frais de courtage auprès des travailleurs pauvres et d’exploitation extrême, en violation des normes et traités internationaux auxquels Israël est lié. En outre, les dommages à long terme causés aux travailleurs israéliens par la création d’une armée de travailleurs bon marché et affaiblis ont fait l’objet de recherches et ont été prouvés de manière irréfutable.

La rédactrice en chef de The Marker, Merav Arlosoroff, a mentionné la signification négative du plan dans son article publié en hébreu le 12/12/23. Elle souligne que « l’arrêt de l’emploi des travailleurs palestiniens n’entraînera pas seulement l’effondrement de l’économie palestinienne et l’augmentation du risque sécuritaire, il nuira également à l’économie israélienne. Ils seront remplacés par des travailleurs étrangers moins qualifiés. En outre, ce type d’importation est entaché d’une corruption qui se chiffre en milliards de shekels par an et constitue en pratique une forme d’esclavage moderne ».

Dans son article, Mme Arlosoroff cite abondamment le rapport détaillé du professeur Zvi Eckstein, rédigé en 2011 pour le compte d’une commission gouvernementale, dans lequel il explique la différence entre l’emploi de Palestiniens qui rentrent chez eux chaque jour et celui de travailleurs migrants : « Les travailleurs palestiniens sont bien plus bénéfiques pour l’économie que les travailleurs étrangers », déclare Eckstein. « Ils travaillent en Israël pendant des années, apprennent la langue et se spécialisent dans le type de travail requis ici - et leur productivité est bien plus élevée ».

Les lieux de travail en Israël sont également d’une importance cruciale pour les travailleurs et l’économie palestinienne. En l’absence d’autres sources d’emploi dans les territoires de l’Autorité palestinienne, travailler sur le marché du travail israélien est devenu la principale source de revenus des résidents de Cisjordanie. Les résidents palestiniens titulaires d’un diplôme universitaire préfèrent également travailler en Israël dans le secteur de la construction ou des services et recevoir un salaire mensuel de 6 000 NIS [=1 500€] (les ouvriers professionnels de la construction gagnent un salaire plus élevé) plutôt que d’accepter un poste d’enseignant pour un salaire mensuel de 3 000 NIS [=750€].

Il y a longtemps que l’Autorité palestinienne n’a plus rien à voir avec la vie et les moyens de subsistance des habitants de la Cisjordanie. Ses dirigeants débitent des slogans nationaux qui définissent ceux qui travaillent en Israël comme étant « moins patriotiques » (voir par exemple le refus d’un haut responsable de l’Autorité palestinienne de reconnaître sa réunion avec les responsables de la sécurité israélienne le 6 février – en arabe). Ces slogans n’affectent cependant pas les travailleurs, qui affirment à juste titre que tant que l’Autorité palestinienne n’est pas en mesure de fournir des emplois alternatifs, ou même une assistance financière aux travailleurs pendant les périodes de chômage forcé, comme lors de la pandémie de COVID ou de la guerre, elle n’a pas le droit d’exiger qu’ils cessent de travailler en Israël.

L’importance économique et politique du retour des travailleurs palestiniens en Israël

Il est donc urgent de permettre aux travailleurs palestiniens de retourner travailler en Israël. Les employeurs en Israël n’ont pas d’alternative réelle à la main-d’œuvre palestinienne. Les travailleurs palestiniens n’ont pas d’alternative à leur travail en Israël. Les dangers liés aux frictions entre les populations peuvent être résolus. La preuve en est l’expérience réussie de l’emploi de milliers de Palestiniens dans les industries des colonies, sans aucune confrontation violente.

Au lendemain de la guerre de Gaza, l’attitude à l’égard des 200 000 travailleurs palestiniens employés en Israël revêt une grande importance, car elle peut avoir un impact sur la perspective de créer un tissu de vie normal, où Israéliens et Palestiniens trouvent des moyens de travailler et de vivre ensemble pour le bien de tous.

Le retour des travailleurs palestiniens sur le marché du travail en Israël est donc une nécessité urgente à laquelle il convient de répondre immédiatement.


 
Grave crise de l’emploi à Jérusalem-Est à l’approche du Ramadan

Erez Wagner, wac-maan.org.il, 13/3/2024

À la veille du Ramadan, les résidents palestiniens de Jérusalem-Est sont confrontés à une crise économique et sociale exacerbée par une augmentation de 7,6 % du chômage depuis le début de la guerre. En dépit de cette crise, le gouvernement compromet gravement son propre plan quinquennal pour Jérusalem-Est. L’association des travailleurs MAAN demande au maire et au nouveau conseil municipal d’obtenir des budgets pour réduire les écarts socio-économiques dans la ville.

La population de Jérusalem-Est (JE) souffre d’une grave discrimination structurelle et de négligence. Au cours de la dernière décennie, les indices de pauvreté parmi les Palestiniens de Jérusalem ont atteint 80 %. Le plan quinquennal du gouvernement pour JE, mis en œuvre pour la première fois en 2018, a été une bouffée d’air frais et a apporté un certain soulagement, mais dans le contexte de la guerre et des coupes budgétaires, nous plongeons dans une crise sans précédent.

Le plan quinquennal pour JE était novateur. C’était le premier plan ciblant JE depuis son annexion en 1967 ; c’était la première fois que le gouvernement annonçait son intention de réduire les écarts socio-économiques entre Jérusalem-Est et Jérusalem-Ouest. Le programme vise notamment à promouvoir l’emploi des femmes. Seulement 21% des femmes palestiniennes de Jérusalem participent au marché du travail.  En comparaison, le taux de participation des femmes en général (juives et arabes) est de 76% et le taux de participation des femmes arabes en Israël au marché du travail était de 42% en 2022.

La mise en œuvre du plan quinquennal a permis des améliorations dans des domaines importants : une augmentation significative du nombre d’étudiants palestiniens à l’université hébraïque et dans les collèges de Jérusalem-Ouest, ainsi que la construction d’écoles et de jardins d’enfants, et bien d’autres choses encore. Mais une grande détresse persiste.

Cependant, lorsque le gouvernement de droite de Netanyahou a pris ses fonctions en janvier 2023, le renouvellement du plan quinquennal a été remis en question. Bien qu’un nouveau plan ait finalement été approuvé en août 2023, sa mise en œuvre et le transfert des budgets ont subi des retards répétés.

Aujourd’hui, dans le contexte de la guerre, le gouvernement a décidé de réduire le budget du programme de 14%. De plus, au cours de la première semaine de mars, les budgets gelés et le manque de clarté concernant la mise en œuvre ont conduit à la résiliation des contrats des sept chercheurs et gestionnaires qui dirigent le personnel d’encadrement. Même si la mise en œuvre est renouvelée à un moment donné, la perte du personnel de haut niveau causera probablement des dommages irréparables au programme. Ces dommages s’inscrivent dans le contexte de la guerre et de la grave récession économique que connaît Israël.

À Jérusalem-Est, la situation est pire qu’ailleurs dans le pays. Depuis le début de la guerre, l’antenne de MAAN sur place a traité des demandes de résidents de JE confrontés à une vague de licenciements et de congés sans solde. Ces licenciements sont dus à la fois à la réduction de l’activité commerciale et au phénomène de discrimination raciste ouverte, y compris le refus des employeurs de continuer à employer des Arabes.

En outre, les résidents de JE craignent pour leur sécurité lorsqu’ils se rendent au travail. Ils ont également des difficultés à s’y rendre en raison des restrictions à la liberté de mouvement imposées par la police, ainsi que des fermetures arbitraires des points de passage des quartiers situés au-delà de la barrière de séparation (en particulier le camp de réfugiés de Sho’afat et Kufr Aqab).

Une pondération des données du service de l’emploi sur les personnes qui s’inscrivent pour chercher un emploi, ainsi que l’annuaire de Jérusalem le plus récent, reflètent la situation difficile. En 2022, la population active palestinienne dans la ville s’élevait à 96 200 personnes (dont 73 600 hommes et 22 600 femmes). Depuis le début de la guerre, il y a eu une augmentation cumulée de 7 338 travailleurs qui sont enregistrés de façon permanente au bureau de l’emploi comme étant au chômage (5 896 hommes et 1 442 femmes).  Cela représente 7,6 % de la main-d’œuvre palestinienne à Jérusalem. Il convient de mentionner que l’augmentation du taux de chômage à Jérusalem-Ouest pour la même période a été de 4%.

Un coup aussi dur porté à la main-d’œuvre risque d’exacerber la détresse économique, sociale et sécuritaire à Jérusalem pour les années à venir, surtout si le gouvernement persiste dans sa politique de décimation du plan quinquennal pour JE.

Aujourd’hui, à la veille du Ramadan, la ville ne respire pas la joie. D’ordinaire, le mois sacré favorise l’activité économique à Jérusalem, mais cette année, l’avenir semble plus sombre que jamais.

À Jérusalem-Est, MAAN gère un centre d’exercice des droits depuis juillet 2000. Depuis plus de vingt ans, les militants de MAAN aident des milliers de résidents de JE - en particulier des femmes - à faire face aux difficultés bureaucratiques avec les bureaux de l’emploi et de l’assurance nationale, ainsi qu’à traiter les cas d’abus de la part des employeurs. Le bureau de MAAN participe à des projets de promotion des femmes de JE, en les aidant à apprendre l’hébreu et en leur transmettant des compétences en vue de leur intégration sur le marché du travail.

Avec des organisations telles que Kulna et le Rossing Center, MAAN dirige la salle des opérations de JE depuis le mois d’octobre. En plus d’aider les travailleurs à conserver leur emploi dans la ville, les organisations aident les familles dans le besoin à recevoir des produits de première nécessité et à obtenir des bons d’alimentation du gouvernement.

Pour éviter d’aggraver la crise économique, la municipalité de Jérusalem doit agir de manière responsable : augmenter l’emploi des résidents de JE, prévenir la discrimination à leur encontre, travailler à une solution permanente qui permettra la liberté de mouvement à Jérusalem depuis les quartiers situés au-delà de la barrière de séparation, et transférer tous les fonds promis dans le plan quinquennal pour améliorer la situation socio-économique.


L’association de travailleurs MAAN syndique des hommes et des femmes issus de divers secteurs d’activité, sans discrimination fondée sur la religion, la nationalité ou le sexe. MAAN est la seule organisation de travailleurs en Israël qui syndique les Palestiniens employés dans les colonies de Cisjordanie ainsi que ceux qui travaillent en Israël. @wac_maan
Assaf Adiv est le directeur exécutif de Maan et Erez Wagner est le directeur de MAAN à Jérusalem-Est.


La Coopérative des Apicultrices de Jérusalem regroupe 115 femmes, formées par le Sinsila Center for Urban Sustainability, qui possèdent désormais chacune au moins deux ruches sur les toits de Jérusalem-Est.

 

Les syndicats indiens dénoncent le besoin « immoral et désastreux » d’Israël de recruter davantage de travailleurs indiens dans le contexte de la guerre

  • Des militants et des dirigeants syndicaux s’interrogent sur l’interdiction de travailler imposée par Israël aux travailleurs palestiniens et sur les raisons pour lesquelles des travailleurs indiens sont recrutés dans le cadre d’un conflit.
  • Mais certains travailleurs indiens considèrent que travailler en Israël leur permet d’échapper à la pauvreté et d’améliorer leurs perspectives économiques, malgré les risques.

Durdana Bhat et Kamran Yousuf, South China Morning Post, 14/2/2024

L’interdiction faite par Israël à des dizaines de milliers de Palestiniens de travailler à l’intérieur de ses frontières a entraîné une crise de l’emploi, après plus de 100 jours de guerre entre Israël et Gaza, et une campagne de recrutement de travailleurs indiens s’est avérée controversée.

Des travailleurs indiens se rassemblent pour chercher un emploi en Israël lors d’une campagne de recrutement à l’Institut de formation industrielle de Lucknow, capitale de l’État indien de l’Uttar Pradesh. Photo : AFP

L’opposition des syndicats indiens a suscité un débat en Inde, avec des arguments opposant les préoccupations humanitaires aux opportunités économiques. La controverse porte sur des considérations éthiques et met en lumière la dynamique complexe du recrutement international de main-d’œuvre.

Des militants et des dirigeants syndicaux ont remis en question l’interdiction de travailler imposée par Israël aux Palestiniens et la décision d’embaucher davantage de travailleurs indiens dans le cadre d’un conflit, et ont souligné la nécessité d’accorder la priorité à la sécurité et au bien-être des travailleurs indiens.

Sucheta De, militante et vice-présidente nationale du All India Central Council of Trade Unions, a souligné la nécessité d’examiner les raisons qui ont motivé l’envoi de travailleurs indiens en Israël pendant le conflit, compte tenu de la menace qui pèse sur leur sécurité et des conditions relativement pacifiques qui règnent en Inde.

Elle a également attiré l’attention sur l’opération Ajay qui a vu quelque 1 200 citoyens indiens rentrer en Inde depuis Israël en octobre de l’année dernière, alors que la guerre s’intensifiait.

Certains travailleurs indiens considèrent toutefois que travailler en Israël leur permet d’échapper à la pauvreté et d’améliorer leurs perspectives économiques, malgré les risques.

En novembre de l’année dernière, Vikas, 37 ans, ouvrier du bâtiment originaire de Panipat, dans l’Haryana, a passé des entretiens pour différents emplois en Inde, notamment dans la police, la Border Security Force et la Central Reserve Police Force.

Mais il n’a reçu aucune offre d’emploi et cherche maintenant des opportunités en Israël. Malgré la guerre, « les circonstances pressantes du chômage et les responsabilités familiales m’ont forcé à prendre le risque de chercher un emploi en Israël », a-t-il déclaré.

Les syndicats se sont unanimement opposés à l’ « exportation » de travailleurs indiens vers Israël pour remplacer les travailleurs palestiniens.

Tapan Kumar Sen, ancien membre du parlement indien et secrétaire général du Centre of Indian Trade Unions, a exprimé son inquiétude quant à l’impact de la mobilité transfrontalière de la main-d’œuvre. Bien que son organisation ne s’oppose pas à ce concept, il souligne la nécessité de veiller à ce qu’il ne porte pas atteinte aux droits et aux possibilités des travailleurs palestiniens.

« Dans certains cas, des travailleurs palestiniens ont été déplacés et des travailleurs indiens ont été chargés de les remplacer, ce qui est en contradiction avec les principes de leur syndicat », dit M. Sen.

Il a déclaré que son organisation avait protesté contre la demande de travailleurs indiens formulée par l’association israélienne des constructeurs. « Nous avons appelé les syndicats à ne pas participer à cette campagne de recrutement, en soulignant qu’Israël est une zone de conflit ».

Lors de la visite du ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen, à New Delhi en mai de l’année dernière, les deux pays avaient convenu qu’Israël embaucherait 42 000 travailleurs indiens - 34 000 ouvriers du bâtiment et 8 000 infirmier·ères.

En octobre, des entreprises de construction israéliennes auraient demandé au gouvernement l’autorisation d’embaucher jusqu’à 100 000 travailleurs indiens pour remplacer les Palestiniens dont les permis de travail ont été suspendus après le début de l’offensive à Gaza.

De nombreux jeunes hommes originaires d’États tels que l’Haryana, l’Uttar Pradesh, le Punjab et le Rajasthan ont afflué pour être recrutés en Israël.

Un groupe créé en décembre de l’année dernière par le gouvernement de l’État pour fournir de la main-d’œuvre contractuelle aux entités gouvernementales a depuis lors publié 10 000 offres d’emploi en Israël - 3 000 charpentiers de coffrage, 3 000 pour le cintrage du fer, 2 000 pour le carrelage en céramique et 2 000 pour le plâtrage.

En novembre, dix grands syndicats indiens ont vivement déconseillé au gouvernement d’envoyer des travailleurs indiens en Israël en raison du conflit.

« Rien ne pourrait être plus immoral et désastreux pour l’Inde que l’ « exportation » de travailleurs vers Israël. Le fait que l’Inde envisage même d’ « exporter » des travailleurs montre à quel point elle a déshumanisé et transformé en marchandises les travailleurs indiens », indique la déclaration commune des syndicats.

Communiqué de presse publié le 9 novembre 2023

La plateforme commune des centrales syndicales et des fédérations/associations indépendantes s’oppose à toute initiative visant à

EXPORTER DES TRAVAILLEURS INDIENS EN ISRAËL POUR REMPLACER LES TRAVAILLEURS PALESTINIENS

Israël intensifie sans vergogne son attaque génocidaire contre les Palestiniens, rejetant les appels au cessez-le-feu lancés par l’ONU ou même par ses maîtres, les USA !

Le manque d’éthique et la duplicité du gouvernement Modi sur cette question sont également exposés : d’abord l’expression rapide de la solidarité avec Israël, puis la marche arrière envisagée par le ministère des Affaires étrangères, l’envoi d’aide humanitaire à la Palestine et enfin l’abstention de soutenir la résolution de l’ONU pour un cessez-le-feu !

En mai 2023, lors de la visite du ministre israélien desaaffaires étrangères, Eli Cohen, à New Delhi, les deux pays ont signé un accord prévoyant l’envoi de 42 000 travailleurs indiens en Israël, dont 34 000 dans le secteur de la construction, pour remplacer les travailleurs palestiniens. Aujourd’hui, le gouvernement indien prévoit d’exporter environ 90 000 travailleurs de la construction vers Israël, sur sa demande. Le gouvernement indien joue un rôle méprisable en soutenant les plans israéliens visant à expulser les travailleurs palestiniens. Les représailles à l’attaque du Hamas ne sont qu’une excuse !

En l’état, l’occupation coloniale de la Palestine a décimé son économie, provoquant des niveaux élevés de pauvreté et de chômage, et a rendu les Palestiniens dépendants d’Israël pour l’emploi. Bien que les chiffres aient fluctué au fil du temps, une moyenne de 130 000 Palestiniens étaient employés en Israël, le secteur de la construction représentant la plus grande part des travailleurs palestiniens, avec des travailleurs palestiniens représentant près de 65-70% de la main-d’œuvre totale.

Rien ne pourrait être plus immoral et désastreux pour l’Inde que cette « exportation » de travailleurs vers Israël. Le fait que l’Inde envisage même d’ « exporter » des travailleurs montre la manière dont elle a déshumanisé  les travailleurs indiens et fait d’eux des marchandises. Une telle démarche équivaudra à une complicité de la part de l’Inde avec la guerre génocidaire qu’Israël mène actuellement contre les Palestiniens et aura naturellement des conséquences négatives pour les travailleurs indiens dans l’ensemble de la région.

Le mouvement syndical indien doit se solidariser avec les travailleurs palestiniens et rejeter cette idée désastreuse. Décidons que nous ne travaillerons pas pour remplacer les travailleurs palestiniens en Israël ! L’Inde et les travailleurs indiens doivent boycotter les produits israéliens ! Les travailleurs indiens, comme leurs homologues dans certains pays occidentaux, devraient refuser de décharger les cargaisons israéliennes !

Nous exigeons que l’accord conclu avec Israël pour l’exportation de travailleurs indiens soit immédiatement annulé ; nous exigeons l’arrêt immédiat de l’agression israélienne contre la Palestine, la fin de l’occupation ; nous exigeons que le droit des Palestiniens à une patrie souveraine soit respecté - c’est la seule voie possible vers la paix.

 

Fédérations/associations sectorielles indépendantes             

Chandan Kumar, 32 ans, ouvrier du bâtiment, a vu dans l’opportunité de travailler en Israël un moyen d’échapper à la pauvreté et aux perspectives d’emploi limitées en Inde.

« À une époque où les opportunités de travail sont rares et les situations désespérées, nous sommes dans une situation désespérée. Même si le pire nous arrivait là-bas, nos familles auraient au moins un soutien financier pour leurs dépenses quotidiennes. Tenter sa chance en Israël offre la promesse d’un salaire substantiel et d’un avenir plus radieux », dit-il.

Durdana Bhat est une journaliste multimédia indépendante basée en Inde qui réalise des reportages sur des questions telles que les droits humains, l’environnement, les conflits et le genre.

Kamran Yousuf est un journaliste multimédia basé en Inde qui couvre les droits humains, la politique et la technologie en Asie du Sud. Son travail a été publié dans un grand nombre de médias internationaux et locaux.

14/03/2024

SUSAN ABULHAWA
Gaza: relatos de sobrevivientes del genocidio

A continuación se presentan dos nuevos artículos de Susan Abulhawa, recién llegada de Gaza, traducidos por Fausto Giudice, Tlaxcala. Un primer artículo se publicó aquí

El genocidio visto a ras de suelo: arena, mierda, carne putrefacta y chanclas desparejadas

Susan Abulhawa, The Electronic Intifada, 8-3-2024

Privados de acceso al mundo y cercados por alambre de espino y vallas eléctricas, los palestinos de Gaza solían respirar la majestuosidad de la tierra de Dios a orillas del Mediterráneo.

 

Preparación de una fosa común en Rafah, en el sur de la Franja de Gaza. Foto: Mohammed Talatene/DPA vía ZUMA Press

Aquí es donde las familias se divierten, donde los amantes estrechan sus lazos, donde los amigos se sientan en la arena y se hacen confidencias.

Es donde la gente va a reflexionar y contemplar un mundo tan poco amable con ellos.

Es donde iban a bailar, fumar shisha y crear recuerdos.

Pero hoy, estas costas son una tortura.

Como región costera, el suelo de Gaza es arenoso, incluso tierra adentro. Con casi el 75% de la población viviendo ahora en tiendas improvisadas, la arena se filtra por todas partes.

Está en la comida, la poca que hay, un grano no deseado en cada bocado. Se acumula en el pelo de todos, todo el tiempo.

Se cuela bajo el hiyab, que ahora las mujeres se ven obligadas a llevar todo el tiempo por falta de intimidad. El cuero cabelludo pica constantemente y la gente se afeita cada vez más la cabeza, una decisión especialmente dolorosa para las mujeres y las jóvenes, que es un detalle más de esta degradación deliberada de toda una sociedad.

Los afortunados que tienen acceso al agua potable pueden disfrutar de unas horas de respiro antes de que la autoridad de la arena se imponga de nuevo.

Donde hay arena, hay pequeños cangrejos de arena, y otros insectos les seguirán a medida que el clima se caliente.

Una amiga me envió fotos de lo que creía que era una erupción en las extremidades, con la esperanza de que pudiera consultar a los médicos por ella. Enseguida me di cuenta de que probablemente se trataba de picaduras de insectos, y dos médicos confirmaron mis sospechas.

Ella jura que limpiaba meticulosamente su cama todos los días, pero los médicos explican que estos insectos son demasiado pequeños para verse. Estos asaltantes microscópicos en su piel la han roto un poco, aunque ya había soportado lo insoportable: las bombas y balas indiscriminadas, la falta de todo, las escenas macabras casi diarias de muerte y desmembramiento, el zumbido constante de los drones, el deterioro de los miembros de la familia que necesitan medicinas no disponibles y la imposibilidad de volver a casa.

Humillación

Los detalles de una sociedad antigua reducida a las ambiciones primarias más básicas son dolorosos de observar. Una amiga que antes vivía en un bonito piso “inteligente” con instalaciones modernas, daba clases en la escuela primaria y dirigía programas de ocio extraescolar para niños, ahora organiza sus días en torno a dos horribles visitas a un retrete compartido por cientos de personas.

Es un agujero pútrido en el suelo, rematado por un cubo que corta la piel. No sabe adónde conduce, pero “no hay enuague, por supuesto”, dice.

Algunas personas hacen sus necesidades fuera del agujero, en el suelo de tierra, así que a veces tiene que pisar la mierda. El agujero tiene cuatro paredes de plástico, pero no techo, lo que añade una capa extra de humillación cuando llueve.

Las mañanas temprano son el mejor momento para ir, ya que la cola es más corta. Tiene cuidado con lo que come y bebe, por miedo a tener que ir en el momento equivocado.

Su hija de 6 años está aprendiendo a aguantar todo lo posible. Su hijo mayor puede acompañar a su padre al trabajo, donde hay aseos que funcionan, pero sólo se siente culpable cuando hace sus necesidades, me dice su madre.

Le traje algunos artículos básicos de aseo y casi lloró cuando tocó la loción para la piel.

“Siempre me digo que un día me despertaré y me daré cuenta de que todo ha sido un mal sueño”, dice.

Un camino espantoso

Es un sentimiento que he escuchado una y otra vez de diferentes personas en distintas partes de Gaza. La denigración de sus vidas ha sido tan aguda y tan rápida que la mente lucha por comprender la realidad.

“Nunca imaginé que viviría una vida así”, dice, antes de hacer una pausa para añadir: “Pero no creo que tenga derecho a quejarme, porque al menos mi familia sigue viva”.

Esto es también lo que he oído en varias ocasiones de los habitantes de Rafah.

Se sienten culpables por haber sobrevivido hasta ahora. Se sienten privilegiados porque tienen comida, aunque sea rancia o inadecuada, mientras sus amigos, vecinos y otros familiares mueren lentamente de hambre en las regiones del norte y el centro.

Son personas que han caminado durante horas con las manos en alto, burladas y escarnecidas por los soldados israelíes, aterrorizadas ante la idea de mirar hacia abajo o agacharse para recoger algo o arriesgarse a que les disparara un francotirador, que es lo que les ocurrió a muchos de ellos. Casi todos sufrieron el saqueo de sus pertenencias por parte de los soldados, que ensuciaron la carretera con todo lo que no querían.

“Mis hijos también vieron cadáveres y partes de cuerpos humanos al borde de la carretera, en diversos estados de descomposición. ¿Qué van a hacer esas imágenes en sus cabezas?”

Su hijo de 8 años perdió su shibshib (chancla) izquierda mientras caminaban por el terrible sendero, pero tuvo que seguir andando con el único zapato que le quedaba, ya que mirar hacia abajo o, peor aún, agacharse, podría haberle matado.

Aunque se mantuvo estoico ante un terror inimaginable, fue la pérdida de su chancla lo que le desquició. Lloraba sin cesar, rechazando el shibshib de su madre, hasta que otro refugiado que caminaba junto a ellos, con las manos levantadas por el mismo miedo, consiguió arrastrar hasta él un shibshib usado por el camino.

“Afortunadamente, era un pie izquierdo, así que encontró un par, aunque no fueran iguales”, dice su madre.

 

Una historia de amor y resistencia

Susan Abulhawa, The Electronic Intifada 12/3/2024

Layan yace en una cama de hospital, sus miembros rotos y quemados han sido reconstruidos utilizando varillas de metal para su fijación externa, injertos de piel y vendajes.

 

El amor perdurará a pesar de toda la destrucción infligida por Israel. Foto Omar Ashtawy/APA images

Sus heridas son tales que Layan (nombre ficticio) está inmovilizada en decúbito prono y sólo puede moverse girando la cabeza de un lado a otro, un medio giro que le permite ver la pared, la sábana de la cama y una habitación llena de otras mujeres -como ella- cuyas vidas y cuerpos han quedado destrozados para siempre por las bombas y las balas israelíes.

Una mujer duerme en el suelo junto a la cama de Layan para cuidarla, porque el hospital no tiene personal y se queda sin aliento. La llamaré Jada.

Enseguida me doy cuenta de que son de la misma familia, ambas veinteañeras. “Hermanas”, me confirman.

Incluso en su peor momento, son increíblemente bellas. Por su propia seguridad, no describiré sus características físicas, pero poseen otro tipo de belleza que sólo se puede sentir.

Está en la forma en que se cuidan con ternura, bromeando y riendo en un mundo que les fabrica constantemente la miseria.

Es la forma en que me acogieron en su círculo íntimo, la forma en que esperaban a que les visitara cada día y la forma en que acabaron confiándome una información preciosa, que ahora me han permitido contar.

Nada se publicará sin su consentimiento previo. Los detalles identificativos se cambian o se omiten, aunque sólo sea una historia de amor, porque incluso el amor palestino se percibe como una amenaza.

No se trata de una historia de amor extraordinaria, ni del tipo de drama prohibido propio de las obras y películas de Shakespeare.

De hecho, es una situación lo suficientemente común como para calificarla de aburrida. Salvo que el amor de la vida de Layan, su amado esposo Laith (nombre ficticio), es un luchador de la resistencia palestina, un grupo tan vilipendiado y deshumanizado en el discurso popular occidental que a la mayoría de la gente le cuesta imaginar que tenga sensibilidad o capacidad para amar.

Jada masajea el cuello y los hombros de Layan mientras yo sostengo frente a ella el teléfono móvil que comparten, navegando por las fotos que Layan me indica.

Son fotos de su vida con Laith en los buenos tiempos. Reuniones familiares, salidas a la playa, abrazos cariñosos, poses felices, selfies sonrientes.

Me doy cuenta de que ambas mujeres han adelgazado mucho, e imagino que Laith aún más. En las fotos, es guapo, con ojos amables que destilan generosidad.

La forma en que mira a Layan en algunas de las fotos es abrumadoramente tierna.

“Retrocede una foto", me dice Layan. “Es el día que nos prometimos” y unas fotos más adelante, “fue durante nuestra luna de miel”.

Quiere contarme cada detalle de aquellos días y escucho con placer, viendo cómo su rostro se abre al sol de los recuerdos que habitan y animan su cuerpo mientras habla.

Se parecen a cualquier otra pareja joven: profundamente enamorados, llenos de sueños y esperanzas. Habían ahorrado para construir una modesta casa en su parcela familiar, pidiendo prestada al banco una suma considerable para completar la obra.

Layan y Laith pasaron más de un año eligiendo los azulejos, los muebles de cocina y otros acabados. Un día, Laith llegó a casa con un gato que había rescatado de la calle.

Una semana después, trajo a casa un gato herido. “No podía dejarlo sufrir y morir”, le dijo a Layan cuando ella protestó.

El hombre que Layan describe es un marido cariñoso que le escribía cartas de amor y dejaba notas divertidas por la casa para que ella las encontrara mientras él estaba en el trabajo, todas ellas guardadas en una caja de plástico morada con cartas de amor más largas entre ellas.

Describe a un hijo y hermano devoto que visitaba a su madre todos los días y apoyaba a sus hermanos en todas las pruebas de la vida; a un tío divertido y adorado por sus sobrinos; a un cuidador y protector natural que alimentaba y daba de beber a los animales callejeros; a un hombre arraigado en los valores islámicos de misericordia y justicia; a un hijo de la patria que tomó las armas desinteresadamente para liberar a su país de los crueles colonizadores extranjeros.

Esta es una familia resueltamente comprometida con la liberación nacional, dispuesta a sacrificarse por nuestra patria común, por la simple dignidad de rezar en la mezquita de Al-Aqsa y caminar por las colinas de sus antepasados.

Una fe profunda

La pareja ha intentado sin éxito concebir un hijo, y a Layan le preocupa no tenerlo todavía. Pero enseguida se sacude la decepción, sometiéndose a la voluntad de Dios.

“Alhamdulillah”, dice.

Todo el mundo vuelve a esta frase. Dios tiene un plan para todos y quiénes somos nosotros para cuestionarlo, dice.

Esta es una familia profundamente religiosa en una sociedad ya profundamente arraigada en la fe.

“Pero estamos hartos”, añaden a veces. “Es mucho”.

“Alhamdulillah”, otra vez.

Pero yo estoy enfadada y a menudo expreso el deseo de venganza de Dios. Ellas lo hacen.

“Dios les pedirá cuentas a su debido tiempo”, dice Layan.

Llevaban menos de un año viviendo en su nueva casa cuando Israel empezó a bombardear Gaza. “Apenas tuve tiempo de disfrutarla”, explica Layan.

No sabían lo que iba a ocurrir aquel día, pero Laith sabía que tenía que poner a salvo a su familia antes de coger su arma y lanzarse a la batalla. Le hizo prometer a Layan que se llevaría a sus dos gatos.

“No es el momento para esto”, dijo ella. Pero él no estuvo de acuerdo.

“Son almas que estamos protegiendo. No sobrevivirán solos”, dijo.

Le besó la frente, una afirmación de amor y devoción inviolables.

Besó sus labios, sus mejillas, su cuello. Y ella le besó con las mismas fuerzas que se agitaban en su interior.

Se besaron durante mucho tiempo, prometiendo volver a verse, por voluntad de Dios, si no en esta vida, al menos en el más allá. Layan, entre lágrimas, rezaba por su seguridad, implorando constantemente a Dios que protegiera a su amado.

Seguía rezando a diario por él cuando la conocí, cinco meses después de aquella dolorosa despedida. Había oído que los israelíes lo habían capturado, pero no sabía si estaba vivo o muerto.

Yo comprendía, como estoy segura de que ella también, que al menos lo habían torturado y que probablemente lo seguían torturando, pero no hablábamos de ello, por miedo a que el mero hecho de hablar de eso lo hiciera revivir.

Poco después de separarse, Israel redujo su nueva casa a escombros en cuestión de segundos. Layan volvió semanas después para ver qué podía rescatar de sus vidas.

Milagrosamente, la caja de plástico morado que contenía sus cartas de amor había sobrevivido al aplastamiento de todo lo que poseían.

Rescatadas de los escombros

Las hermanas y su familia se pusieron a salvo varias veces, cada vez llevándose a los gatos, hasta que la casa en la que vivían fue alcanzada por un misil. Era de noche y la mayoría de los habitantes del tercer piso ya dormían.

Jada estaba sentada junto a su madre, charlando como solían hacer antes de acostarse. No oyó el misil. De hecho, casi todo el mundo dice que la gente que está dentro de una casa atacada no oye la bomba. Dicen que, si puedes oírla, es que estás lo suficientemente lejos.

En cambio, Jada describió haber visto un destello de luz roja antes de sentir un peso en la espalda. Su brazo se retorció de forma extraña alrededor de su cuello y por encima de su cabeza.

Pero no se oía nada, hasta que empezó a oír el crujido de los escombros al caer. Vio cómo sus extremidades rebotaban bajo el peso del hormigón roto al golpear y retorcer sus piernas delante de ella.

El polvo le quemaba y le cegaba los ojos. Intentó tantear el terreno en busca de su madre, pero no estaba segura de que su mano se moviera realmente.

Gritó “Ummi [mamá]”, pero no obtuvo respuesta.

Había pronunciado la shahada, el último testamento de un musulmán ante Dios al acercarse la muerte. Pero seguía viva, y pronto oiría a su hermano menor Qusai (nombre ficticio) gritar: “¿Hay alguien vivo?”

Layan vivió este momento de forma diferente. Ella oyó el misil.

Por regla general, hace un ruido sordo cuando parte el aire, seguido de un estampido cuando impacta. Layan oyó la explosión y esperó el estampido, que nunca llegó, desconcertándola.

En su lugar, un zumbido en los oídos perturbó sus pensamientos. Tenía la boca llena de grava y tierra que se esforzaba por escupir.

Intentó moverse, pero no pudo, y en ese momento se dio cuenta de que estaba enterrada bajo los escombros. Pronunció la shahada y esperó la muerte, entonces oyó la voz de su hermano Qusai que gritaba: “¿Hay alguien vivo?”

Ella gritó: “¡Estoy aquí! Estoy viva”, pero no oía su propia voz. Aterrorizada, intentó llamar de nuevo, pero no pudo oírse a sí misma, insegura de si estaba viva o muerta.

Rezó de nuevo la shahada y llamó a su hermano. El zumbido de sus oídos se desvaneció, dando paso a un aterrador silencio interior.

Podía oír el movimiento de los rescatadores, pero no su propia voz, y pensó que se había quedado muda. Imaginó una muerte lenta bajo los escombros, sola en el frío y la oscuridad, sin que nadie pudiera oír sus gritos para salvarla.

“Debí desmayarme”, dice, “porque lo siguiente que supe fue que varios rescatadores estaban sacando mi cuerpo de entre los escombros”.

“Todo nuestro mundo”

Varios miembros de su familia cayeron mártires aquel día. Israel asesinó a dos hermanos y hermanas de Layan, a primos, tíos y tías, a sus cónyuges e hijos, a los dos gatos que Layan había prometido proteger y, lo más doloroso de todo, a su madre.

“Lo era todo para nosotros"” me dicen Layan y Ghada. Me enseñan fotos de ella, la querida matriarca en el centro y cabeza de su unida familia.

Ghada a veces la llama en sueños, despertando a las demás mujeres en la habitación del hospital.

Una vez más, lo único que sobrevivió a la segunda bomba fue la caja de plástico morado que contenía sus cartas y notas de amor.

“Dios perdonó nuestras cartas porque nuestro amor es real, no sólo una bomba, sino dos”, dice, antes de añadir: “Sólo quiero saber que él está bien”.

A la semana de mi estancia en Gaza, me llamaron a su rincón de la habitación del hospital en cuanto entré después de un largo día en otro lugar de Gaza. Ambas estaban encantadas, con una sonrisa en sus hermosos rostros.

“Llevamos todo el día esperando para darte la buena noticia”, me dicen, y yo estoy emocionada y curiosa por oírla.

Ella me hace señas para que me acerque. Acerco la oreja a su cara y me susurra: “Laith está vivo. Está en la prisión de [nombre oculto]”.

Me llena de alegría saber que este hombre al que nunca he conocido está vivo, e imploro a Dios que lo proteja y lo traiga de vuelta a Layan. Rezo para que se reúnan y me siento honrada de que se me haya permitido compartir este raro momento de alivio y esperanza en estos momentos.

La televisión israelí emitió recientemente vídeos de una prisión desconocida en los que se mostraban abusos y torturas sistemáticas a palestinos que habían secuestrado. Me pregunté si Laith era uno de los hombres obligados a adoptar posturas degradantes mientras los israelíes hablaban de ellos como si fueran alimañas.

Pienso en Laith cuando leo los relatos de la propaganda occidental sobre las violaciones masivas cometidas por Hamás. Sé que están repitiendo mentiras sionistas, no sólo porque no ofrecen pruebas, sino también porque periodistas honestos de todo el mundo han desmontado sus historias, especialmente el vergonzoso artículo del New York Times del que fue coautora una ex oficial militar israelí a la que le gustaban los comentarios genocidas en las redes sociales, uno de los cuales decía que Israel debería “convertir Gaza en un matadero”.

En el fondo sé que son mentiras porque, como la mayoría de los palestinos, comprendemos los valores que mueven a Hamás.

Podemos criticar a Hamás en muchos aspectos, y muchos lo hacen. Pero la violación, y mucho menos la violación en grupo, no es uno de sus costumbres.

Incluso los mayores críticos de Hamás, incluido Israel, saben que tales actos nunca se tolerarían en sus filas y que, en el improbable caso de que ocurrieran, serían castigados con la expulsión y/o la muerte.

Que Dios proteja a Laith y a todos los combatientes palestinos que han dejado a sus familias para sacrificar sus vidas por nuestra liberación colectiva.

Seguiré imaginando un día en que él y Layan vuelvan a reunirse, su casa reconstruida en Gaza y llena del balbuceo de sus hijos y de las reuniones familiares de los que aún viven.