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26/02/2024

URI MISGAV
“La menace existentielle pour Israël vient de l’intérieur” : David Ivry, pilier de la défense israélienne depuis des décennies, déballe tout

Uri Misgav, Haaretz, 23/2/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le général de division ER David Elkana Ivry, né en 1934, a été vice-président de Boeing International et président de Boeing Israël de 2003 à 2021. Il a participé à toutes les guerres menées par Israël de 1956 à 1996. Ce vétéran du “sionisme à visage humain” s’est livré dans une série d’entretiens avant et après le 7 octobre. Encore un criminel de guerre qui mourra paisiblement dans son lit.-FG

David Ivry était dans la salle de guerre à presque tous les moments critiques de la défense israélienne. Aujourd’hui, dans sa 90e année, alors que le pays traverse peut-être la pire crise de son histoire, l’ancien commandant de l’armée de l’air, chef d’état-major adjoint de Tsahal et ambassadeur à Washington est prêt à en venir au fait

 

David Ivry : « La première chose qui aurait dû se produire [après le 7 octobre], c’est que le dirigeant déclare : “J’annule la réforme judiciaire - nous sommes tous dans le même bateau”. Ça n’a pas été le cas »

David Ivry est inquiet. « Nous entrons dans une guerre d’usure », déclare-t-il d’une voix calme, avant de soupirer. Nous sommes au début du mois de janvier, lorsque le nombre de victimes israéliennes était bien inférieur à ce qu’il est aujourd’hui. « Je connais cette dynamique depuis le Liban, lorsque j’étais chef d’état-major adjoint des forces de défense israéliennes [1983-85]. Nous sommes dans un endroit que nous avons conquis, les gens s’habituent à la situation et nous passons progressivement du statut de conquérants à celui de cibles. Et cette fois, c’est plus grave qu’au Liban, à cause du
“métro” [labyrinthe de tunnels souterrains] et d’autres infrastructures souterraines [à Gaza]. La question est de savoir combien de temps nous pourrons tenir le coup, et comment y parvenir alors que le gouvernement refuse de parler de solutions politiques ».

Nous allons nous enfoncer dans le bourbier de Gaza ?

« Je vous dis que nous sommes déjà dans le bourbier de Gaza. Nous n’avons pas de solution claire sur ce qui va se passer, alors nous continuons à dire que nous serons là pour très longtemps. Et nous n’avons pas encore dit un mot sur ce qui se passe dans le nord ».[à  la frontière avec le Liban, NdT].

Partagez-vous le sentiment que nous nous trouvons à l’un des moments les plus difficiles de notre histoire ?

 « Oui. Le 7 octobre est une catastrophe épouvantable qui a changé la stratégie de toute la région. L’échec est immense. Il est impardonnable. Pendant Yom Kippour [la guerre de 1973], l’arrière n’a pratiquement pas été attaqué. Ici, des communautés ont été capturées, ce qui ne s’était pas vu depuis la guerre d’indépendance. À l’intérieur même du pays, nous avons aujourd’hui le plus grand nombre de réfugiés israéliens que j’aie jamais vu. Mais je ne pense pas qu’il s’agisse d’une menace existentielle. Pendant la guerre d’indépendance, nous avons été confrontés à une menace existentielle. Jusqu’à la guerre des six jours, nous avons vécu avec le sentiment d’une menace existentielle. Le Hamas et le Hezbollah ne constituent pas une menace existentielle. La menace existentielle est interne ».

Toute sa vie, Ivry a contribué à forger la puissance stratégique de l’État d’Israël. En plus d’avoir été chef d’état-major adjoint de Tsahal, l’ancien pilote est surtout connu pour avoir été commandant de l’armée de l’air israélienne, directeur général du ministère de la défense, fondateur et chef du Conseil de sécurité nationale, président d’Israel Aerospace Industries et ambassadeur d’Israël à Washington. En septembre dernier, il a fêté ses 89 ans. Il ne fête pas les anniversaires : sa mère est décédée alors qu’il était très jeune le jour de l’un de ses anniversaires, et son fils Gil, pilote de F-16, a été tué dans un accident d’entraînement le jour d’un autre anniversaire. La montre fêlée de Gil, retrouvée sur le site de l’accident, est exposée dans une armoire à souvenirs dans sa maison de Ramat Hasharon, à côté des médailles et autres récompenses qu’il a accumulées au cours de sa vie.

Le poids des années ne se fait pas sentir chez lui. Ivry est vigoureux, actif et analytique, et il a une mémoire phénoménale. Il est marié à Ofra – « Nous nous connaissons depuis l’âge de zéro an, nous faisions partie du même groupe pendant notre enfance. L’offre formelle de sortir ensemble est venue après que je l’ai invitée à la cérémonie au cours de laquelle nous avons obtenu nos ailes en tant que pilotes ». Au cours de l’année écoulée, nous avons eu une série de longues conversations portant sur la mission de sa vie par rapport à la défense et à la sécurité de l’État. Nos rencontres ont commencé dans l’ombre de la menace d’une refonte judiciaire qui s’est manifestée il y a un an et de la grave fracture qui en a résulté au sein de la nation et qui l’a empêché de dormir.

Avant le 7 octobre, nous étions assis ici et vous avez exprimé votre profonde inquiétude.

« J’étais très inquiet au sujet d’une guerre civile, et je crains qu’elle [cette menace] ne refasse surface. Une guerre civile est une menace existentielle. Lorsque le coup d’État a commencé, je suis devenu vraiment déprimé. Les gens parlent constamment d’unité en temps de guerre et de « ensemble, nous vaincrons », etc. La première chose qui aurait dû se produire [après le 7 octobre] était que le dirigeant déclare : « J’annule maintenant la réforme judiciaire - nous sommes tous dans le même bateau ». ça ne s’est pas produit. [Netanyahou n’a pas dit ça. C’est important. En fin de compte, les Arabes nous ont aidés au moins à arrêter la réforme. Sinon, je ne sais pas où nous en serions aujourd’hui. Mais le prix à payer est très élevé. Trop élevé ».

Des soldats des FDI évacuent un soldat blessé dans la bande de Gaza, le mois dernier. « Le passage du statut de conquérant à celui de cible ». Photo: AFP

La période de service d’Ivry en tant que commandant de l’armée de l’air israélienne, de 1977 à 1982, a été principalement marquée par l’un des plus grands succès de l’histoire de ce corps : la destruction, en 1981, du réacteur nucléaire irakien, situé au sud-est de Bagdad, à quelque 1 600 kilomètres d’Israël.

« Dès le premier jour de ma prise de fonction, une réunion a été organisée avec tous les responsables de la communauté du renseignement afin d’évaluer le réacteur qui était alors en construction », raconte Ivry. « La conclusion était qu’il s’agissait d’un réacteur ayant des missions militaires et qu’il représentait donc un danger. Les recommandations étaient de poursuivre l’activité diplomatique afin d’inciter la France [fournisseur du réacteur d’Osirak] à résilier son contrat avec les Irakiens, de perturber leurs progrès de diverses manières et, entre-temps, de préparer un plan d’attaque. À partir de ce moment-là, j’ai réfléchi à la manière d’augmenter la portée de la FAI [Force aérienne d’Israël] : lorsque les premiers commandants d’escadron de F-16 se sont rendus aux USA pour ramener les avions, je leur ai dit : “Dites-moi quelle est la plus longue portée que vous pouvez obtenir avec lui [un F-16] pour une attaque au sol”. Ils ne comprenaient pas pourquoi j’insistais autant sur ce point ».

Pendant quelques années, vous et la FAI vous êtes préparés à mener l’opération.

« Nous ne sommes pas les premiers à avoir décidé qu’il était permis d’attaquer un réacteur nucléaire. Les Iraniens ont essayé de l’attaquer à deux reprises et ont tout gâché. Le problème, c’est qu’après chaque attaque iranienne, les Irakiens ont renforcé leur défense. Ils ont construit de hauts murs, ils ont envoyé des ballons avec des câbles en fer, de sorte que si vous voliez à basse altitude, vous les heurtiez ; ils ont apporté des SAM [missiles sol-air]. Il a été décidé d’attaquer avant qu’ils atteignent un certain seuil d’uranium enrichi ».

L’opération est planifiée pour le printemps 1981. « Des discussions quotidiennes ont eu lieu au sein de l’état-major des FDI », poursuit Ivry. « Au milieu des préparatifs et des discussions [en mai], le fils de Raful [chef d’état-major de Tsahal de l’époque, Rafael Eitan] a été tué dans un accident d’avion. Il pilotait un Kfir, est parti en vrille et s’est écrasé au sol. Lors des funérailles, “Eizer” [Ezer Weizman], qui n’était plus ministre de la défense, m’a attrapé et m’a dit : “Vous êtes tous fous, vous ne pouvez pas le faire [attaquer le réacteur]”. Je n’ai rien dit. »

ROSA LLORENS
La Ferme des Bertrand : entre émotion et perplexité

Rosa Llorens, 26/2/2024 

La sortie de La ferme des Bertrand, de Gilles Perret, semble arriver au moment le plus opportun : elle constitue un hommage à un groupe d’agriculteurs et à leur travail à l’heure où les paysans sont obligés de défendre leur outil de travail contre Macron, Bruxelles et l’Empire US. Mais, malgré la force d’émotion du film, on peut se demander s’il éclaire vraiment la situation actuelle.

Le film reprend des images d’un premier documentaire, en noir et blanc, de Marcel Trillat, en 1972, d’un premier documentaire de G. Perret, de 1997, « Trois frères pour une vie », dont La ferme des Bertrand prend la suite. On suit donc, sur 50 ans, une famille d’éleveurs de Quincy, en Haute-Savoie (près de Genève), remarquable en ce qu’elle a réussi à préserver son exploitation à travers trois transmissions : trois frères ont d’abord repris la ferme de leurs parents, puis un de leurs neveux, avec sa femme Hélène, et maintenant un fils et un gendre d’Hélène. Le héros du film, c’est André, seul survivant de la fratrie originelle : au fil des trois films (et sur la belle affiche du film), on le voit vieillir et se recroqueviller (dans le troisième film, il a dû abandonner l’étable et limiter ses activités au poulailler). On suit d’abord les trois frères, puis André seul et ses descendants, dans leur vie quotidienne, dans l’étable, au pré, dans leur cuisine, en train de préparer leur soupe, ou de prendre un café arrosé, versé jusqu’à ras bord, dans des verres duralex (à cette occasion, on voit même le patriarche, leur père, la toute première génération). C’est donc le bilan de toute une vie que fait André, une vie de sacrifices (tous trois sont restés célibataires), et de dur travail, puisque, faute de capitaux, les trois frères ont dû tout faire à la force des bras (on les découvre même au départ dans une activité de casseurs de cailloux). 

 

 Tous les critiques relèvent la force des paroles d’André, leur impact sur le spectateur : la plupart d’entre nous ont encore des souvenirs de grands-parents paysans, souvenirs d’enfance qui imprègnent toute notre vie, aussi chacun peut-il voir en André un grand-père ou un père. Voilà un film qui montre la vraie vie, loin de tous ces films adultérés, idéologisés, dont les héroïnes bovaryennes n’ont d’autre problème que de « s’émanciper » du « patriarcat » et les héros de savoir si leur sexe leur convient ou non. C’est donc avec une profonde empathie qu’on voit le film : la vie des Bertrand, c’est la nôtre, telle qu’elle s’écoule, d’une saison à l’autre, d’une génération à l’autre, et on sort du cinéma la gorge un peu serrée.

Mais André n’a rien d’un nostalgique : il a toujours pris le parti de la modernité, c’est-à-dire de la mécanisation, au point que maintenant ses petits-neveux ne descendent de leur tracteur que pour suivre la gestion des bêtes sur l’ordinateur, et ne pensent plus à fignoler à la main le travail de la machine. Et sa nièce Hélène, qui va prendre sa retraite à plus de 65 ans, va être remplacée par une lourde machine à traire.

Cependant, ce parti-pris de modernité suscite moins d’empathie, pour diverses raisons.

D’abord, une raison qu’on peut taxer de sentimentale : on souffre de voir les bêtes soumises à un protocole imposé par les machines (tels des Palestiniens à un check-point) et défiler une par une sur des espèces de potences où elles sont traites. La mise bas d’une vache est encore plus pénible : l’éleveur tire sur les pattes avant du nouveau-né avec une corde pour accélérer la naissance (j’avais vu pire dans un film danois où le petit veau était attaché avec une chaîne sur laquelle l’éleveuse tirait comme une malade) ; la suite est encore pire : on écarte brutalement les pattes du veau : « Celui-là, c’est un mâle, il ira à la boucherie ». Puis on voit Hélène le nourrir au biberon en disant : « Il tète le lait de sa mère ». Peut-être, mais il ne connaîtra jamais sa mère, ni elle son petit, puisque les veaux sont élevés dans des boxes à part.

Il y a quelque chose de fondamentalement pervers dans l’élevage (et je ne parle même pas des poussins mâles jetés dans la broyeuse – pratique à laquelle on a théoriquement mis fin). Mais la solution n’est certainement pas de nous gaver d’insectes, et il faudrait en tout cas commencer par interdire l’importation de poulets ukrainiens produits dans d’abominables méga-usines [comme celles du groupe MHP, de l’oligarque Yuriy Kosyuk, plus gros producteur de poulets d’Europe, récemment épinglé par Macron].

Notre Ryaba [poule aux œufs d’or) : sans antibiotiques, sans hormones de croissance, existe aussi en version halal

Autre chose laisse perplexe dans ce film : oui, il est d’actualité parce qu’il y est question d’agriculteurs ; mais les Bertrand sont-ils représentatifs de leur profession ? On a parlé à propos du film de « conte de fées », et, effectivement, ils sont contents de leur sort, et la nouvelle génération peut même s’octroyer des vacances. Mais ils sont protégés par l’AOP Reblochon, qui leur garantit des prix convenables. Les agriculteurs qui manifestent aujourd’hui un peu partout en Europe de l’Ouest, ceux qui ont investi le Salon de l’Agriculture où paradait Macron (comme je ne regarde pas la télévision, je l’imagine en habit et culotte à rubans et perruque poudrée), luttent pour leur survie, et l’investissement en machines sophistiquées les endette irrémédiablement ; parmi eux, on compte, selon une statistique, un suicide tous les deux jours, selon une autre, deux suicides par jour.

La ferme des Bertrand est un film réussi (sans doute ce qu’on peut voir de mieux actuellement sur les écrans) et émouvant ; mais on peut s’étonner que le militant Gilles Perret, auteur en 2007 de Ma Mondialisation, produise un film aussi irénique. André conclut : « Notre vie est une réussite économique, mais un échec humain » (dans le domaine affectif) : si, sur le plan humain, il faudrait aussi parler de la satisfaction d’avoir mené à bien leur projet, sur le plan économique, il faudrait nuancer, tant leur prospérité (relative, bien sûr) paraît marginale dans la situation actuelle.

 

25/02/2024

GIDEON LEVY
Israël n’a pas de véritable alternative à Netanyahou


Gideon Levy, Haaretz, 25/2/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Une fois de plus, il a été prouvé qu’il n’y a pas de véritable substitut, pas de véritable alternative et pas de véritable opposition à Benjamin Netanyahou.

 

Ce dessin du Norvégien Roar Hagen représentant Bibi en Moïse du XXIème siècle, publié dans le New York Times le 25 avril 2019, a suscité une telle levée de boucliers sionistes -qualifiant le dessin d’ « antisémite »- que le journal a décidé de ne plus publier de caricatures

Le comportement des partis centristes tout au long de la guerre, y compris les résultats de deux votes importants à la Knesset la semaine dernière, prouvent clairement que sur les questions fondamentales qui définissent le caractère d’Israël - l’occupation, la guerre et, incroyablement, la démocratie - il n’y a pas de différences significatives entre la droite, le centre et la gauche sioniste. Sur ces questions, nous sommes un État avec une seule voix, une seule perspective, une seule opinion : Ensemble, nous gagnerons.

Ces choses sont d’autant plus étonnantes que la lutte politique fait rage entre les deux camps. Tout le monde parle de division, de clivage, de gouffre, alors qu’il n’y a pas de réelles divergences d’opinion.

On pourrait penser qu’Israël en temps de guerre serait un pays différent si Benny Gantz, Gadi Eisenkot ou Yair Lapid le dirigeaient. Il n’en est rien. Leur conduite personnelle serait certainement plus droite et plus humble, mais les résultats seraient remarquablement similaires. En voici la preuve.

Dans un résultat qui ne ferait pas honte à une élection biélorusse - 99-9 - la Knesset a soutenu une résolution du gouvernement s’opposant à la reconnaissance « unilatérale » d’un État palestinien. Les esprits se sont échauffés et les mains se sont levées en signe de soutien massif au rejet israélien.

L’État, dont la politique d’occupation et de colonisation est la mère de l’unilatéralisme, se moque du monde entier et s’unit unanimement contre une mesure unilatérale qui est ostensiblement acceptée par la moitié de ses législateurs. C’est une honte, mais ce n’est pas une surprise.

La quasi-unanimité du vote en faveur de l’éviction du député Ofer Cassif n’était pas moins prévisible. Cela n’a rien à voir avec les Palestiniens et les territoires, mais plutôt avec la démocratie, la question qui a le plus agité le pays au cours de l’année écoulée.

ALON PINKAS
Le plan de Netanyahou pour “le jour d’après” à Gaza n’est pas réalisable et ce n’est pas un plan

Alon Pinkas, Haaretz, 25/2/2024
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Alon Pinkas (1961) est rédacteur principal sur la politique israélienne et usaméricaine pour le quotidien israélien Haaretz. Il a été chef de cabinet de Shlomo Ben-Ami et David Levy, conseiller en politique étrangère d’Ehud Barak et Shimon Peres et consul général d’Israël à New York de 2000 à 2004.

Le plan d’après-guerre pour Gaza rendu furtivement public vendredi par le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou est une liste de déclarations unilatérales qui mérite à peine un examen sérieux.

Netanyahou dans le nord de la bande de Gaza, en décembre. Photo: Avi Ohayon / GPO

Plus de 140 jours après le début de la guerre de Gaza, près de cinq mois après que les USA lui ont demandé - en tant qu’allié - de fournir des idées, une vision ou un cadre pour la Gaza d’après-guerre, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a finalement présenté un non-plan. Une liste de principes apparemment raisonnables, mais non viables, qui n’ont rien à voir avec la réalité. Cette liste a été publiée furtivement vendredi matin, comme si le gouvernement espérait que personne ne la remarquerait.

C’était une sage décision, car il mérite à peine d’être remarqué ou examiné sérieusement. Il s’agit en fait d’une négation du plan Biden, d’une liste de déclarations qui constituent un contrôle israélien illimité de la bande de Gaza sans aucune lueur d’espoir politique. D’un point de vue critique, il n’est tout simplement pas réalisable.

Le document, qui est essentiellement une liste de déclarations unilatérales plutôt qu’un plan cohérent, est divisé de manière concise en trois périodes : un court paragraphe sur la période immédiate, une description en cinq points de la période intermédiaire en termes de sécurité et une description en quatre points de la réalité civile. Vient ensuite une déclaration « à long terme » de deux paragraphes, qui se veut grandiloquente.

La ville de Jabalya, au nord de la bande de Gaza, jeudi. Photo : Mahmoud Issa / Reuters

Décortiquons-le point par point pour comprendre ce qu’il signifie et ce qu’il ne signifie pas, et pourquoi il n’est pas viable.

Agriculteurs et consommateurs doivent s’allier pour un juste prix et un revenu équitable
Un point de vue italien

Ci-dessous 2 textes exprimant le point de vue de l’Association italienne des Consommateurs Usagers (ACU) sur les questions soulevées par la « révolte des tracteurs ». Le premier est du président national de l’ACU, Gianni Cavinato, expert agricole et technologue alimentaire et le second de Gianfranco Laccone, agronome et membre de la présidence de l’association.-Fausto Giudice, Tlaxcala

Déclaration de Gianni Cavinato, 8/2/2024

La protestation européenne et nationale des agriculteurs soulève le couvercle d'une cocotte-minute, sur la dynamique des prix des denrées alimentaires à la consommation, qui ne sont pas linéaires et cohérents avec l'évolution des revenus de ceux qui travaillent la terre.

Ainsi, de même que le travail agricole est sous-payé et que les denrées alimentaires issues de la terre ne sont pas suffisamment rémunérées par les acteurs de la distribution, de même le surplus de prix induit par les achats des consommateurs finaux ne revient pas aux producteurs agricoles.

Le fossé entre les consommateurs et les agriculteurs se creuse d'année en année.

L'alliance des consommateurs avec les agriculteurs peut inverser la direction de ce décalage. Ce processus social est sous-tendu par la valorisation de la qualité intrinsèque des produits de la terre. Cela permet de “peser” le produit non seulement en fonction de son contenu nutritionnel et de sa sécurité sanitaire, mais aussi en fonction de son intégration des éléments essentiels de l'environnement.

Tout cela est techniquement possible et se traduit par une prime décisive pour les producteurs agricoles, un avantage fondamental pour les consommateurs, en termes de santé, de soins de santé préventifs et de réduction des dépenses de santé publiques et privées.

Le gouvernement italien et les institutions européennes, s'ils le souhaitent, peuvent faciliter et initier cette voie, qui pourra être consolidée lors de la prochaine législature de l'UE, dans le cadre d'une réforme partagée de la PAC.

 Justes prix et revenus équitables

Gianfranco Laccone, ClimateAid.it, 23/2/2024

Depuis l'après-midi du 15 février, journée de lutte qui a vu plusieurs manifestations dans la capitale italienne, les tracteurs semblent devenir un élément du paysage italien, placés aux différents points névralgiques du réseau routier. Les piquets se sont se sont multipliés, les organisations qui les réalisent aussi (montrant une division progressive mais aussi un protagonisme  des réalités locales), toutes demandant une rencontre avec le ministre à la recherche d'une interlocution qui semble toutefois vaine.

Ce que le gouvernement pouvait donner, à mon avis, il l'a donné avec le projet de loi de finances, et les revendications ne seront pas satisfaites (sauf par de petites reconnaissances) si des alliances et des soutiens durables ne sont pas articulés. D'autre part, les dix points du programme de lutte initial ont été remplacés au fil des jours par diverses plates-formes qui, au lieu de clarifier les alternatives, les ont embrouillées en ajoutant des détails. Si ces derniers permettaient d'identifier l'association qui les proposait, ils n'ont pas permis d'approfondir les raisons de la lutte. Le résultat a été que les agriculteurs, sans aucune distinction entre eux, reçoivent une solidarité générique de la part de la population qui voudrait dépenser moins pour l'alimentation et consommer des aliments locaux de meilleure qualité, mais qui, sans avoir d'alternatives concrètes, dépense en fonction de ses moyens. La situation que nous constatons est la recherche d'un meilleur prix pour tous : les agriculteurs cherchent donc à produire pour l'exportation ou pour une consommation de « niche » (produits diététiques, biologiques ou de haute qualité) qui obtiennent de meilleurs prix sur les marchés et les consommateurs achètent ce qu'ils peuvent se permettre, principalement des produits médiocres à bas prix et importés, au grand dam de la propagande sur le « Made in Italy ».

La demande de soutien des agriculteurs ne peut se limiter à l'appel et la contribution des consommateurs ne pourra pas se faire sans une base commune d'action. La première base commune nécessaire est la convergence des prix, entre ce que les consommateurs peuvent payer et le revenu que les agriculteurs demandent en compensation de leur travail. C'est le point clé que les plateformes n'abordent toujours pas et qui a peu de chance d'entrer dans les négociations officielles, car il remet en cause les fondements du soi-disant « libre marché » et les règles que la Politique Agricole Commune (PAC) s'est données depuis la réforme Mac Sharry, en acceptant d'entrer dans le système du marché international. Il faut demander une réforme de la PAC qui rétablisse certains critères abandonnés, à savoir le travail nécessaire à la production et la protection du prix à la production contre les coûts, protégeant ainsi le revenu, et demander un prix de marché à la consommation qui soit équitable pour l'acheteur.

Pour en revenir aux revendications, si l'on compare les différentes plateformes actuelles aux 10 points initiaux du programme, il est clair que la critique de l'environnementalisme a été dévalorisée, dépassée par les vrais problèmes de la crise économique et des coûts de production insoutenables. Le Green Deal tant critiqué n'est resté que sur le papier, et le prochain Parlement européen aura d'autres priorités, à commencer par les guerres à terminer et la reconstruction à entamer en Ukraine et en Palestine, sans parler des mutations industrielles et de la crise climatique qui s'annonce, que l'on préfère traiter comme un problème de sécurité et d'ordre public (lutte contre les migrants, assurance et indemnisation des dégâts causés par les catastrophes, contrôle de la faune et de la flore sauvages, qui semblent être les ennemis à combattre et non les réservoirs de ressources à exploiter).

Mais la protection de l'environnement et l'utilisation de moyens peu polluants ne sont pas des aspects étrangers à la formation des prix à la production et des coûts agricoles. Les agriculteurs qui ont réduit l'utilisation des moyens techniques et pratiqué l'agroécologie n'ont pas connu les crises constantes des autres agriculteurs ; en particulier, ceux qui ont pratiqué l'agriculture biologique, après avoir surmonté la phase initiale de reconversion nécessaire, ont mieux vécu de leurs revenus que ceux qui ont poursuivi l'augmentation de la production et la modernisation constante des structures.

On peut se demander si la théorie du marché qui fait de la protection de l'environnement un objet de profit ne fait pas partie intégrante du système de ruine du monde agricole et si les agriculteurs n'ont pas été poussés à critiquer la dimension environnementale pour éviter de critiquer l'industrie qui domine les campagnes.  La lutte contre les parasites, qui s'est achevée - après tout - par la défaite de la technique qui les a vus revenir toujours sous de nouvelles formes, est un exemple concret de la façon dont les territoires de monocultures (souvent monoclonales) sont la grande table dressée pour le banquet des phytoparasites et pour celui du système industriel qui fournit les moyens de production et distribue les produits destinés à la consommation.

En France, région qui semble aujourd'hui moins impliquée dans la révolte qui secoue le continent, le débat sur la transformation de l'agriculture paysanne en agriculture industrielle a des origines anciennes : Henri Mendras a publié en 1967 un essai au titre significatif, “La fin des paysans”. Dans cet essai, depuis les années 60, on pointe du doigt la modernisation continue du secteur agricole et l'abandon des cycles de production comme base d'une alimentation correcte, c'est-à-dire qu'on en arrive à une agriculture sans paysans, à une société sans histoire et sans passé, qui invite à produire pour consommer toujours plus.

En ce qui concerne le contenu des plateformes, Dario Casati, dans un article intelligent au titre sarcastique « La grande guerre des tracteurs a fini à Sanremo»publié sur le site de l'Accademia dei Georgofili*, saisit les trois aspects fondamentaux sur lesquels elles se fondent : les objectifs commerciaux, les objectifs économiques et la soi-disant « question du juste prix ». Si nous partageons largement les aspects de l'analyse, les raisons de la rébellion des agriculteurs dans le monde méritent une analyse plus approfondie : il n'est pas utile de sauver les conducteurs de la machine agricole chancelante européenne, et italienne en particulier, pour leur sens apparent des responsabilités, sans parler de la fin des représentations réduites à des bureaux de comptabilité et de conseil aux entreprises et du manque d'idées de ceux qui gouvernent l'agriculture.

Mais c'est dans le « juste prix » que se trouve la clé de l'ouverture à la société d'un combat aujourd'hui limité au secteur agricole. Dans son article, Casati identifie le concept de « juste » comme étant éthique et non économique, en situant le moment où le prix devient juste pour l'acheteur et le vendeur dans le prix du marché, résultat de la libre concurrence. À cette vision, il est nécessaire d'ajouter les aspects qui font de l'agriculture non seulement l'instrument de la production alimentaire, mais aussi l'instrument du réaménagement de l'environnement et de la lutte contre le changement climatique, en incluant dans le produit les aspects sociaux et environnementaux qui le rapprochent davantage d'un service que d'un lieu de production. Dans le cas contraire, la formation des prix se réduit à un jeu de parties sans temps ni histoire.  Ce n'est pas un hasard si l'ACU a lancé le slogan « juste prix - juste revenu », où le juste prix est largement déterminé par la capacité de la demande (pas l'agrégat analysé par Keynes, mais celui des consommateurs qui vivent dans une société spécifique, à une époque spécifique, qui ont une mémoire et une histoire) et le juste revenu est largement déterminé par l'offre (qui n'est pas non plus abstraite, mais composée de producteurs avec la culture, l'histoire, la mémoire qui se déversent dans la production). Il n'y a pas de frontières claires entre le prix et le revenu et leur détermination est le résultat du pacte social auquel ils sont liés et du niveau de démocratie qu'il exprime. Aujourd'hui, le pacte social qui a transformé l'agriculteur en rouage d'une société industrielle qui exigeait des aliments pour le marché (en quantité toujours plus grande et de qualité toujours plus faible) tout en offrant un bien-être (souvent limité à quelques-uns) s'est rompu. Il faut reconstruire le pacte en retirant du marché l'agriculture qui est un fait social, un service qui produit de la nourriture mais aussi quelque chose d'autre qui n'est pas quantifiable en valeur monétaire. En tant que service, elle est vouée à la « défaillance du marché », selon la définition économique du résultat obtenu par l'application des politiques de marché aux services.

Mais même si l'on voulait se limiter à la valeur de la production du point de vue du consommateur, il faudrait partir du besoin humain en nutriments (voir Apports nutritionnels et énergétiques de référence, LARN en italien) et de la nécessité de couvrir le besoin quotidien en protéines (biologiquement nécessaires). Pour ce faire, on peut faire diverses combinaisons, choisir la sienne, jusqu'à remplacer totalement les protéines animales. La combinaison classique et scientifiquement documentée de l'apport de céréales et de légumineuses permet d'atteindre l'objectif recherché.

En ce qui concerne le prix payé par les consommateurs, on peut se demander combien coûte une unité de protéine au consommateur ? Quels sont les avantages et les risques (y compris environnementaux) de ce processus de production-consommation ? Etc. En résumé, il s'agira de prouver que la consommation de céréales/légumineuses est bonne pour la santé et l'environnement, d'autant plus que des rotations sont utilisées pour cultiver ces cultures (une technique de culture dont les tractoristes et autres ne veulent pas, mais qui est à la base de la production biologique). Ce jeu de calcul pour une durabilité avancée permettrait de calculer « facilement » le bon prix - le bon revenu.

La conclusion d'un pacte entre consommateurs et producteurs et l'approfondissement de ces bases techniques sont certainement plus importants que la création d'une table technique initiée sur la PAC actuelle qui, en tant que table technique, ne remettra pas en cause les politiques existantes et ne fera, peut-être, que les rendre moins indigestes.

NdT

*L’Académie des Georgophiles [amis de l’agriculteur, du grec georgos, agriculteur] fondée à Florence en 1753 et dédiée à l’étude de l’agriculture. Devise : « Prosperitati Publicae Augendae » [Pour augmenter la prospérité publique]

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RENÁN VEGA CANTOR
Éduquer après le génocide de Gaza

Le titre de ce texte paraphrase Éduquer après AuschwitzPDF, titre d’une conférence radiophonique donnée par le philosophe allemand Theodor Adorno en 1966 et publiée plus tard sous forme imprimée, dont les premières lignes se lisent comme suit : « Exiger qu’Auschwitz ne se reproduise plus jamais est l’exigence première de toute éducation. Elle précède tellement toutes les autres que je ne crois pas devoir ou pouvoir la justifier. Je ne peux pas comprendre qu’on s’en soit si peu soucié jusqu’à aujourd’hui. La justifier serait quelque peu monstrueux face à la monstruosité de ce qui s’est passé.  […] Discuter d’idéaux dans le domaine de l’éducation ne mène à rien face à cette exigence : plus jamais d’Auschwitz. Ce fut le type de barbarie contre laquelle se dresse toute éducation. »  Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une répétition de la barbarie génocidaire de la part d’Israël contre le peuple palestinien. Dans cet essai, l'historien colombien esquisse ce que pourraient et devraient être les orientations des éducateur·trices critiques animé·es par une éthique humaniste.

Traduit par  Fausto Giudice, Tlaxcala

 

23/02/2024

De Gaza a Malmö: la batalla del Horror Show de Eurovisión

Fausto Giudice, Tlaxcala, 22/2/2024

Se llama Eden Golan -¡menudo nombre!- y corre el riesgo de pasar a la historia como Gaza Hell. Tiene 20 años y dos pasaportes: ruso e israelí. Nacida en Kfar Saba, ciudad israelí construida sobre las ruinas del pueblo palestino del mismo nombre, de padre letón y madre ucraniana, pasó 13 años de su corta vida en Rusia, donde comenzó una carrera como cantante de variedades. Acaba de ser seleccionada para representar a Israel en Eurovisión 2024, que se celebrará el próximo mes de mayo en Malmö (Suecia). Pero es muy probable que nunca ponga un pie allá. Explicación.

 

Fueron los islandeses quienes dieron el pistoletazo de salida: el pasado diciembre, la Sociedad de Autores y Compositores (FTT), que representa a 440 artistas islandeses (Islandia tiene 375.000 habitantes), hizo un llamamiento a RÚV, la cadena nacional, para que no participara en Eurovisión mientras Israel estuviera involucrado. Los finlandeses siguieron su ejemplo: 1.400 artistas pidieron a su cadena pública que hiciera lo mismo. Músicos y artistas de Noruega (350), Suecia (1.005) y Dinamarca (300) lanzaron llamamientos similares en enero, seguidos por los irlandeses, 15.000 de los cuales firmaron el llamamiento.

Israel se considera parte de Europa en muchos ámbitos: fútbol y otros deportes, música y otras artes. Lo único que falta es la esfera política: la UE nunca tuvo en cuenta la petición formulada hace unos cuarenta años por el carismático líder radical italiano Marco Pannella de acoger a Israel.

Israel participa en el Festival de la Canción de Eurovisión desde 1973; fue anfitrión en 1979, 1999 y 2019 y quedó primero en cuatro ocasiones, en 1978, 1979, 1998 y 2018.

La Unión Europea de Radiodifusión (UER/EBU), que organiza el concurso, ha dado la misma respuesta a todas las peticiones de exclusión de Israel: “Eurovisión no es un concurso entre gobiernos, sino entre artistas. No se trata de política”. Basándose en este argumento, excluyó a Rusia en 2022, pocos días después del inicio de la invasión (u operación militar especial, según los gustos) de Ucrania. Al comentar esta decisión, Martin Österdahl, supervisor ejecutivo de Eurovisión, declaró: “Cuando decimos que no somos políticos, lo que debemos defender siempre son los valores fundamentales y supremos de la democracia”.

Eden Golan fue seleccionada en un acto organizado por la Radiotelevisión Pública de Israel (KAN), en el que cantó “I Don't Want To Miss A Thing”, de Aerosmith, en un escenario lleno de sillas vacías que representaban a los israelíes cautivos en Gaza, los famosos rehenes en el centro la dramaturgia montada por Israel. KAN anunció entonces que la canción que interpretaría en Malmö se titulaba “October Rain” [Lluvia de Octubre]. La dirección de la UER anunció inmediatamente que examinaría el texto de la canción para ver si tenía algún contenido político, en cuyo caso sería rechazada. El ministro de Cultura israelí, Miki Zohar, calificó inmediatamente el anuncio de “escandaloso” y la KAN anunció que, si la canción era rechazada, no propondría otro texto. Además, Eden Golan no participará en la ceremonia de inauguración en Malmö, por “razones de seguridad” y porque coincidirá con Yom Hachoa, el Día de la Shoah.

Por lo tanto, es muy probable que Israel se vea excluido de este gran espectáculo comercial, que es un verdadero horror show [espectáculo de terror].

Preguntas: si Eden Golan fuera seleccionado y actuara en el escenario del Malmö Arena, llevando el lazo amarillo de la campaña israelí “Bring Them Home” [Tráiganlos a casa], ¿qué pensarían los organizadores de este concurso “apolítico”? ¿Y qué piensan esos mismos organizadores del hecho de que la cantante haya actuado en varios eventos importantes en Rusia, incluido uno en Crimea tras su anexión (o liberación, según los gustos) por Rusia? ¿No debería ser objeto de la exclusión de Rusia de Eurovisión?

Mientras tanto, la guerra de imágenes y discursos en todos los medios online está en pleno apogeo. Y los valientes escandinavos continúan su lucha. A continuación, fotos de dos acciones ante la sede de NRK, la radiotelevisión pública noruega, en Marienlyst (Oslo) en enero. L@s activistas anunciaron que realizarían sentadas todos los días para exigir que la NRK no retransmitiera el concurso si participaba Israel.

 


27 de enero de 2024


                                                31 de enero de 2024 : “Sí a una fiesta popular

 

No al genocidio