Fausto Giudice, 23/8/2023
Jorge Sosa Meza est un avocat constitutionnaliste équatorien spécialisé dans les litiges internationaux et les droits humains. Nous l’avons interrogé sur les élections du 20 août en Équateur.
Comment se sont déroulées les élections d’un point de vue juridique et constitutionnel ?
Les élections se sont déroulées sur la base de la “mort croisée” émise par le président de la République par le biais du décret 741 du 17 mai 2023 sur la base de l’article 148 de la Constitution de la République de l’Équateur, qui permet au président de la République de dissoudre le Parlement. Malgré le fait que le président était en procès politique, il a choisi d’appliquer cette mesure illégal au motif qu’il régnait un grave état d’agitation sociale et interne en Équateur. (Il convient de noter qu’à l’approche des élections, il y a eu plusieurs problèmes de violence et de menaces à l’encontre des candidats. L’un des candidats a été abattu par des tueurs à gages alors qu’il quittait un rassemblement politique).
Le 20 août 2023, les élections se sont déroulées pacifiquement en Équateur même, mais le vote télématique a échoué dans les trois circonscriptions de l’étranger : Europe, Asie et Océanie ; USA, Canada et Amérique latine, pour les raisons suivantes :
1. il n’y avait pas d’accès au système à 9 heures du matin.
2. le code de vérification n’arrivait pas aux téléphones et aux boîtes de courriel des migrants pour valider le vote dans le système
3. l’accès au système était trop long.
Ainsi, sur 409 000 électeurs inscrits et près de 70 000 votants enregistrés, seules 41 000 personnes ont voté, soit plus de 50 % des migrants n’ont pas pu voter.
Quels étaient les types d’observateurs ?
Les observateurs provenaient du Parlement andin, de l’OEA (Organisation des États Américains), des partis politiques légalement enregistrés avec de leurs candidats.
Quels types d’irrégularités avez-vous détecté ?
Les irrégularités peuvent être classées comme suit : avant, pendant et après les élections.
Avant les élections : manque d’information de la part du CNE (Conseil national électoral) sur le processus d’enregistrement du vote télématique ; manque d’attention de la part des consulats à l’égard des préoccupations des migrants.
Il n’y a pas eu de simulation ou d’audit du système ou de la plateforme de vote télématique ; aucun protocole d’accès n’a été établi pour les personnes handicapées.
Pendant les élections : problèmes d’accès ; les codes de vérification n’ont pas été envoyés ; le système s’est bloqué ; les certificats de vote n’ont pas été envoyés ; manque d’attention ou d’accompagnement des citoyens qui n’ont pas pu voter. Les consulats n’ont pas fonctionné, les centres d’appel n’ont pas fonctionné.
Après les élections : absence de protocoles de traçabilité du vote ; retards dans l’établissement de procès-verbaux de décompte ; absence de réponse aux plaintes et réclamations.
Expliquez-nous les actions légales que vous avez entreprises avant le scrutin et celles que vous envisagez d’entreprendre.
Face à l’adoption d’un règlement pour des élections anticipées, un recours subjectif de contentieux électoral a été déposé contre l’article 18 dudit règlement [qui impose comme unique possibilité de vote depuis l'étranger le vote télématique, sous peine d'amende, NdA] rejeté par le TCE (Tribunal du Contentieux Électoral) pour cause d’inopportunité.
De même, une plainte a été déposée devant le CPCCS (Conseil de participation citoyenne et de contrôle social)) par la candidate Mónica Palacios. Les conseillers de la CNE n’ont pas assisté aux audiences.
Actions à entreprendre
a.-plainte pour sanctionner les conseillers du TCE.
b.-réclamation directe auprès de la CNE pour l’organisation d’un nouveau vote.
c. - Actions constitutionnelles pour violation des droits constitutionnels.
d. - Contestation des résultats.