José
Steinsleger, La
Jornada, 25/6/2025
José Steinsleger est écrivain et journaliste, né en Argentine, mais installé au Mexique. Membre fondateur de la Fédération latino-américaine des journalistes (FELAP, 1976), de l’Agence latino-américaine de services spéciaux d’information (ALASEI-UNESCO, 1984) et du mouvement « En défense de l’humanité » (Mexique, 2003). Depuis 1996, il tient une chronique régulière dans le journal mexicain La Jornada. Il est l’auteur et le coauteur de plusieurs ouvrages sur la situation politique en Amérique latine.
Un. Bien avant d’accéder à la présidence, Javier Milei avait annoncé ses « anti » : l’État, la démocratie, les politiciens et la politique, la justice sociale, les droits humains, la solidarité, la diplomatie et, surtout, sa haine des pauvres qui seraient responsables de leur pauvreté.
Deux. En 18 mois de mandat, Milei a gelé les
dépenses publiques et sociales, privatisé les entreprises publiques, vendu aux
enchères des ressources stratégiques, s’en est pris à la santé et à l’éducation
publiques, à la recherche scientifique et universitaire et aux symboles
nationaux, a offensé la mémoire populaire et ses héros, a poursuivi en justice
les mouvements sociaux et le catholicisme rénovateur, a boycotté l’intégration
et la coopération avec les pays voisins, et tout ce qui, à son sens, sentait le
« progressisme » ou, tout simplement, le « communisme »...
Quatre. Le plus ancien, Márquez
(1975), est diplômé de l’ultramontain
William J. Perry Center for Hemispheric Defense Studies (où l’empire endoctrine
les dirigeants en matière de « lutte contre le terrorisme »), collabore avec le
Hispanic American Centre for Economic Research (dont l’objectif est « la
défense de la liberté et du libre marché ») et donne des conférences dans
lesquelles il revendique les coups d’État civico-militaires de 1955 et 1976.
Cinq. Les livres de Márquez (dont certains
ont été tirés à de nombreux exemplaires) portent des titres suggestifs : El
canalla (la véritable histoire du Che) ; El impostor Evo Morales ; El
cuentero de Carondelet (Rafael Correa) ; Perón, el fetiche de las masas
; La máquina de matar (biographie définitive du Che Guevara), etc.
Six. Selon Márquez, la loi sur l’identité de
genre stipule qu’« un homme déguisé en femme est une femme » (sic), l’homophobie
est une « invention idiomatique » (sic) et que l’avortement est un crime.
Cependant, sa deuxième épouse l’a dénoncé en 2013 lorsqu’il l’a forcée à
avorter. Et en 2008, deux pédiatres ont porté plainte pour abus sexuel sur sa
fille de quatre ans.
Sept. De son côté, Agustín Laje (1989) est
également diplômé du William Perry Center et prépare actuellement un doctorat
en philosophie à l’université de Navarre, temple académique de l’Opus Dei. Laje
se présente comme victime d’une génération qui a vécu toute sa vie en
démocratie, affirmant que les élèves du XXIe siècle ont été
endoctrinés par un discours « manichéen et réductionniste » (sic) sur les
droits humains. Il dirige la Fondation Faro, qui collecte des fonds pour les
besoins électoraux du gouvernement.
Huit. Laje prône le respect de la loi et de l’ordre.
Cependant, ses déclarations sont quelque peu contradictoires. Après l’une des
nombreuses répressions contre les retraités qui se mobilisent pour protester,
il a déclaré : « Chers policiers, visez bien. Chaque balle bien placée dans
chaque gauchiste a été pour nous tous un moment de réjouissance ». Une opinion
qui correspond à celle de son grand-oncle, le colonel (à la retraite) Raúl
Fierro, l’un des répresseurs les plus redoutables du régime militaire dans la
province de Córdoba.
Neuf. Laje a traité les mères et les
grands-mères de la Plaza de Mayo de « putains » (sic) « pour avoir appris à
leurs fils à tuer ». Avec 2,2 millions d’abonnés sur sa chaîne YouTube (et plus
d’un million sur Instagram), il est devenu l’intellectuel vedette de la droite
internationale et le croisé de la lutte contre le « marxisme culturel » (?) et
le féminisme radical, tout en soulignant que la pensée politiquement correcte
doit être combattue sur les réseaux sociaux, où réside « le pouvoir de notre
époque ».
Dix. Enfin, « l’épée » qui a le plus d’influence
sur Milei, Santiago Caputo (1984), formé par l’Équatorien Jaime Durán Barba,
qui restera certainement dans l’histoire comme le consultant le plus cynique et
amoral de notre époque.
Onze. Neveu du ministre de l’Économie Luis
Caputo et de Nicolás Caputo (soupçonné d’avoir tenté d’assassiner Cristina
Kirchner), Milei a rendu hommage à Santiago dans son discours d’investiture, le
qualifiant d’« architecte » de sa victoire en 2023. Ce qui lui permet aujourd’hui
de contrôler les services de renseignement, une partie du pouvoir judiciaire,
la perception des impôts, les domaines techniques et juridiques de la
présidence, ainsi que tout ce qui concerne les médias et la communication.
Douze. Entouré de gardes du corps partout où
il va, Santiago Caputo ressemble beaucoup à un voyou de quartier. Sur son bras
droit, il a tatoué la phrase en russe « Rien n’est vrai, tout est permis », qui
apparaît dans le jeu vidéo Assassin’s Creed et est tirée du livre Russian
Criminal Tattoo Encyclopedia.
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