Gideon Levy, Haaretz, 26/6/2025
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala
Pouvons-nous dire du bien de Benjamin Netanyahou ? Le Premier ministre savait comment et quand mettre fin à la guerre contre l’Iran.
Pouvons-nous
également dire quelque chose de positif à propos de Donald Trump ? Sans l’intervention
précise et puissante du président usaméricain, ce conflit se serait transformé
en une guerre d’usure démoralisante et sans fin qui aurait dévasté Israël
encore plus qu’elle n’aurait dévasté l’Iran, qui a beaucoup plus d’expérience
en matière de guerre prolongée.
Netanyahou
sur les lieux d’une frappe de missile iranien à Rehovot la semaine dernière.
Photo Itai Ron
Il est très douteux que les prédécesseurs de Trump, Barack Obama et Joe Biden, tous deux hésitants, auraient osé ordonner à Netanyahou de mettre fin à la guerre comme l’a fait leur successeur.
Comme il s’agissait
d’une guerre d’une dangerosité sans précédent, il est impératif d’exprimer
notre gratitude à ceux qui y ont mis fin. Il est facile de dire que la crainte
de Netanyahou envers Trump l’a conduit à mettre fin à la guerre, mais on peut
supposer qu’il avait également la possibilité de la poursuivre, ne serait-ce
que pour une brève période, et de s’attirer des ennuis.
Netanyahou a
fait preuve de leadership et de détermination, quelques instants après que son
grotesque ministre de la Défense eut gazouillé : « J’ai donné instruction à l’armée
israélienne de répondre avec force à la violation du cessez-le-feu par l’Iran.
» Sur les questions les plus importantes, Israël a le plus petit gouvernement
de son histoire : un gouvernement composé d’un seul homme.
Israël est
divisé en deux camps. L’un est convaincu que tout ce que fait Netanyahou est un
acte de Dieu ; l’autre, que tout ce qu’il fait est un acte de Satan. Netanyahu
n’est ni l’un ni l’autre.
Le principal
responsable du massacre du 7 octobre, et en particulier de la guerre sanglante
que mène Israël contre Gaza depuis lors, fait parfois des choses qui peuvent et
doivent être saluées. La conclusion rapide de la guerre avec l’Iran en est un
exemple. Netanyahou mérite d’être salué, car s’il ne l’avait pas terminée
rapidement, nous nous serions retrouvés dans une situation terriblement
compliquée.
Il aurait
été facile de céder à la tentation de continuer à envahir le ciel iranien et à
semer davantage de destruction sous les acclamations des médias israéliens, qui
sont fascinés par chaque sortie et s’inclinent devant chaque communiqué de
presse du porte-parole militaire. Netanyahou a mis fin à la fête alors même que
la droite sanguinaire en voulait davantage. Ce fut la sortie de sa vie, même si
elle fut motivée par la pression de Trump. Il est regrettable que Trump et
Netanyahou refusent depuis des mois de faire la même sortie à Gaza.
La nécessité
de cette guerre, dont les résultats sont tout à fait incertains, est très
douteuse. La plupart, sinon la totalité, des résultats auraient pu être obtenus
par la voie diplomatique. Seul le temps dira s’il s’agissait d’une guerre
trompeuse, qui n’a pas réussi à éliminer l’option nucléaire de l’Iran et l’a
peut-être même fait progresser, ou d’une guerre qui a mis fin au rêve nucléaire
de Téhéran pour de nombreuses années au moins. Il faut également des preuves
supplémentaires pour déterminer l’étendue des dommages causés aux mandataires
de l’Iran à Gaza et au Liban. Peut-être un Moyen-Orient meilleur, peut-être
pas.
On peut s’incliner
devant le Mossad et s’émerveiller des capacités démontrées par l’armée de l’air,
mais sans pouvoir citer de résultats significatifs et durables, ça n’a aucune
valeur, si ce n’est pour faire saliver les fans du genre et pour la performance
embarrassante de Yossi Cohen [chef
du Mossad de 2016 à 2021, NdT] sur Channel 12 news, qui cherche à s’attribuer
le mérite de cette opération.
Nos James
Bond tant vantés ont-ils rendu Israël plus sûr ? Seul le temps le dira. Au
moins, cette guerre n’était pas génocidaire : en Israël, l’amputation massive s’appelle
« Opération Bipeurs » et les gens regardent avec des yeux d’enfants chaque
tuerie pyrotechnique et cinématographique sans s’interroger sur sa véritable
valeur.
Netanyahou a
lancé et gagné cette guerre, et tous ceux qui pensent qu’elle était bonne pour
Israël doivent l’admirer pour cela, même s’ils le considèrent comme « le Juif le plus méprisable de l’histoire », comme c’est
souvent le cas dans le camp « tout sauf Bibi ». D’un autre côté, ses partisans
stupides devraient comprendre à présent qu’il est responsable d’horribles
crimes de guerre à Gaza, crimes qui n’ont fait que s’intensifier sous le
couvert de la guerre avec l’Iran.
Rendez à
César ce qui est à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu, dit le Nouveau
Testament. ça s’applique aussi
bien à un César cruel comme Netanyahu qu’à un dieu matamore comme Trump.
Sajith Kumar, Inde
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