Nous traduisons et publions cet article sans être en mesure d’évaluer le degré de véracité de ses affirmations. Les prochaines heures les confirmeront ou les infirmeront. - FG, Tlaxcala
Seymour
Hersh, 19/6/2025
Le guide suprême iranien Ali
Khamenei assiste à une cérémonie marquant le trente-sixième anniversaire de la
mort de Ruhollah Khomeini au mausolée Khomeini à Téhéran, le 4 juin. Photo Bureau
de presse du guide iranien
Voici un rapport sur ce qui va très probablement se passer en Iran, dès ce week-end, selon des initiés israéliens et des responsables usaméricains qui ont été des sources fiables depuis des décennies. Cela impliquera de lourds bombardements usaméricains. J’ai vérifié ce rapport auprès d’un fonctionnaire usaméricain de longue date à Washington, qui m’a dit que tout serait « sous contrôle » si le guide suprême iranien Ali Khamenei « disparaissait ». On ne sait pas exactement comment cela pourrait se produire, à moins qu’il ne soit assassiné. On a beaucoup parlé de la puissance de feu usaméricaine et des cibles en Iran, mais, pour autant que je sache, peu de réflexions pratiques ont été menées sur la manière de se débarrasser d’un chef religieux vénéré qui compte d’énormes partisans.
Je couvre à distance la
politique nucléaire et étrangère d’Israël depuis des décennies. Mon livre
publié en 1991, The Samson Option,
raconte l’histoire de la fabrication de la bombe nucléaire israélienne et la
volonté des USA de garder ce projet secret. La question la plus importante qui
reste sans réponse concernant la situation actuelle est la réaction du monde, y
compris celle de Vladimir Poutine, le président russe qui est un allié des
dirigeants iraniens.
Les USA restent le plus
important allié d’Israël, même si beaucoup de personnes ici aux USA et dans le
monde entier abhorrent la guerre meurtrière que mène Israël à Gaza. L’administration
Trump soutient pleinement le plan actuel d’Israël visant à éliminer toute trace
de programme d’armement nucléaire en Iran, tout en espérant que le gouvernement
dirigé par les ayatollahs à Téhéran sera renversé.
On m’a dit que la Maison
Blanche avait donné son feu vert à une campagne de bombardements intensifs sur
l’Iran, mais les cibles ultimes, les centrifugeuses enfouies à au moins
quatre-vingts mètres sous terre à Fordow, ne seront pas frappées avant le
week-end, à l’heure où j’écris ces lignes. Ce report est dû à l’insistance de
Trump, car le président souhaite que le choc du bombardement soit atténué
autant que possible à l’ouverture de la Bourse de Wall Street lundi. (Trump a
contesté ce matin sur les réseaux sociaux un article du Wall Street Journal
affirmant qu’il avait décidé d’attaquer l’Iran, écrivant qu’il n’avait pas
encore pris de décision quant à la marche à suivre).
Fordow abrite la majorité des
centrifugeuses les plus avancées d’Iran qui, selon les derniers rapports de l’Agence
internationale de l’énergie atomique, dont l’Iran est signataire, ont produit
900 livres [=408 kg.] d’uranium enrichi à 60 %, soit un peu moins que le niveau
requis pour la fabrication d’armes nucléaires.
Les dernières frappes
aériennes israéliennes sur l’Iran n’ont pas cherché à détruire les
centrifugeuses de Fordow, qui sont stockées à au moins 80 mètres sous terre. Il
a été convenu, mercredi, que des bombardiers usaméricains équipés de bombes
capables de pénétrer à cette profondeur commenceront à attaquer les
installations de Fordow ce week-end.
Ce délai permettra aux forces
militaires usaméricaines présentes au Moyen-Orient et en Méditerranée orientale
(il y a plus d’une vingtaine de bases aériennes et navales usaméricaines dans
la région) de se préparer à d’éventuelles représailles iraniennes. On suppose
que l’Iran dispose encore de certaines capacités en matière de missiles et d’aviation
qui figureront sur les listes de bombardement usaméricaines. « C’est l’occasion
de se débarrasser une fois pour toutes de ce régime », m’a déclaré aujourd’hui
un responsable bien informé, « alors autant voir les choses en grand ». Il a
toutefois précisé qu’il ne s’agirait pas d’un bombardement intensif.
Les bombardements prévus ce
week-end auront également de nouvelles cibles : les bases des Gardiens de la
révolution, qui ont contré ceux qui faisaient campagne contre les dirigeants
révolutionnaires depuis le renversement violent du shah d’Iran au début de
1979.
Les dirigeants israéliens,
sous la houlette du Premier ministre Benjamin Netanyaohu, espèrent que les
bombardements fourniront « les moyens de créer un soulèvement » contre le
régime iranien actuel, qui a montré peu de tolérance envers ceux qui défient
les dirigeants religieux et leurs édits. Les commissariats de police iraniens
seront frappés. Les bureaux gouvernementaux qui abritent les dossiers des
dissidents présumés en Iran seront également attaqués.
Les Israéliens espèrent
apparemment aussi, si j’ai bien compris, que Khamenei fuira le pays et ne
tiendra pas bon jusqu’au bout. On m’a dit que son avion personnel avait quitté
l’aéroport de Téhéran tôt mercredi matin à destination d’Oman, accompagné de
deux avions de chasse, mais on ne sait pas s’il était à bord.
Seuls deux tiers des 90
millions d’Iraniens sont persans. Les plus grands groupes minoritaires
comprennent les Azéris, dont beaucoup ont depuis longtemps des liens secrets
avec la CIA, les Kurdes, les Arabes et les Baloutches. Les Juifs constituent
également une petite minorité dans ce pays. (L’Azerbaïdjan abrite une grande
base secrète de la CIA pour ses opérations en Iran).
Le retour du fils du shah,
qui vit actuellement en exil près de Washington, n’a jamais été envisagé par
les stratèges usaméricains et israéliens, m’a-t-on dit. Mais il a été question,
au sein du groupe de planification de la Maison Blanche dont fait partie le
vice-président J.D. Vance, d’installer un leader religieux modéré à la tête du
pays si Khamenei était destitué. Les Israéliens se sont vivement opposés à
cette idée. « Ils se fichent complètement de la question religieuse, mais
exigent une marionnette politique à contrôler », a déclaré ce fonctionnaire usaméricain
de longue date. « Nous sommes en désaccord avec les Izzies [Israéliens
en argot washingtonien] sur ce point. Il en résulterait une hostilité
permanente et des conflits futurs à perpétuité, Bibi essayant désespérément d’attirer
les USA comme allié contre tout ce qui est musulman, en utilisant le sort des
citoyens comme appât propagandiste. »
On m’a dit que les services
de renseignement usaméricains et israéliens espèrent que des éléments de la
communauté azérie se joindront à une révolte populaire contre le régime au
pouvoir, si celle-ci venait à se développer pendant les bombardements
israéliens. On pense également que certains membres des Gardiens de la
révolution se joindraient à ce qui pourrait être, selon mes informations, « un
soulèvement démocratique contre les ayatollahs », une aspiration de longue date
du gouvernement usaméricain. Le renversement soudain et réussi de Bachar
al-Assad en Syrie a été cité comme un modèle potentiel, bien que la chute d’Assad
soit survenue après une longue guerre civile.
Il est possible que les bombardements massifs israéliens et usaméricains plongent l’Iran dans un état d’échec permanent, comme cela s’est produit après l’intervention occidentale en Libye en 2011. Cette révolte a abouti au meurtre brutal de Mouammar Kadhafi, qui maintenait sous contrôle les tribus disparates du pays. L’avenir de la Syrie, de l’Irak et du Liban, tous victimes d’attaques extérieures répétées, est loin d’être réglé.
Donald Trump souhaite clairement remporter une victoire internationale qu’il pourra exploiter. Pour y parvenir, lui et Netanyahou mènent les USA vers des horizons inédits.
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