24/06/2025

GUILLERMO MARTINEZ
“Ça peut arriver à n’importe qui” : la peur des immigrés de Torrejón après le meurtre dAbderrahim par un policier

Guillermo Martínez, elDiario.es, 21/6/2025
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

➤ Écouter résumé audio

La communauté africaine immigrée de Torrejón a exprimé sa crainte que ce qui s’est passé mardi dernier, lorsqu’un policier municipal de Madrid a étranglé un homme d’origine maghrébine, puisse se reproduire. Aujourd’hui, ils se sont rassemblés pour condamner ce crime

Rassemblement après la mort d’Abderrahim, étranglé par un policier mardi dernier

Les immigrés de Torrejón de Ardoz ont peur. « S’ils ont fait ça à Abderrahim, ils peuvent le faire à n’importe lequel d’entre nous à tout moment », a critiqué une femme marocaine ce matin lors du rassemblement pour dénoncer le « meurtre », comme l’ont qualifié les organisateurs [et comment auraient-ils du le qualifier ?,NdlT], de cet immigré de 35 ans par un policier mardi dernier. Elle n’était pas la seule à exprimer sa crainte que les forces de l’ordre agissent de cette manière. « S’il avait volé ou fait quoi que ce soit, la loi est là pour ça. Personne ne peut ôter la vie à quelqu’un de cette manière », a déclaré un autre jeune homme.

Il fait référence à l’étranglement qu’un policier municipal de Madrid a infligé à sa victime à l’aide d’un mataleón [étranglement arrière, rear naked choke], une technique d’immobilisation très dangereuse qui a finalement causé sa mort. C’est pourquoi la plateforme Corredor en Lucha [Corridor en lutte], formée par divers collectifs de la région et des centres sociaux de Torrejón, a organisé ce rassemblement auquel ont participé 250 personnes selon les organisateurs et la délégation du gouvernement.

« Aucune personne n’est illégale », « indigène ou étranger, même classe ouvrière » et « assez de racisme policier » sont quelques-uns des slogans qui ont été scandés pendant la manifestation, malgré une chaleur qui n’a pas empêché les proches d’Abderrahim de se rendre sur place. Quelques minutes après midi, ils sont arrivés avec des photos de son visage et se sont montrés très affectés par cette perte. Mimoun Akkouh, le père de la victime, a déclaré à elDiario.es qu’« il est impossible de vivre » après ce qui s’est passé : « Comment tu vas manger ? Comment tu vas dormir ? Ils ont tué mon fils. Ma famille vit à Torrejón depuis 32 ans et nous n’avons jamais eu de problèmes ».

Ils ne demandent que justice

Auparavant, Akkouh avait pris le micro pour partager sa douleur et sa tristesse avec les personnes présentes, mais aussi sa colère et son indignation. « S’il est vrai qu’il a volé le téléphone portable, qu’on l’arrête, qu’il paie une amende ou qu’il aille en prison, mais toujours dans le respect de la loi. C’est tout ce que nous demandons, la justice », a-t-il lancé devant les cris de la foule rassemblée.

Le policier municipal est en liberté sous contrôle judiciaire et fait l’objet d’une enquête pour homicide involontaire, ce que certaines personnes présentes à la manifestation voient d’un mauvais œil. « Si vous passez 15 minutes à étouffer une personne, vous vous rendez compte qu’elle perd peu à peu son souffle. Je ne pense pas qu’il s’agisse d’imprudence », a soutenu Mouhciwe.

 

Le père de la victime pendant le rassemblement


 Originaire du Maroc, il vit depuis quatre ans à Torrejón et considère que ce qui s’est passé est « inadmissible », « d’autant plus venant d’un policier, qui est censé protéger les gens », a-t-il souligné. Il a également qualifié d’« inacceptable » le fait que certaines personnes défendent l’action du policier au motif qu’Abderrahim avait tenté de lui voler son téléphone portable auparavant. « On ne peut pas se faire justice soi-même et tuer comme ça. La peine de mort n’existe même pas dans ce pays », a-t-il ajouté.

Alors que des dizaines de personnes autour de lui scandaient des slogans tels que « vous, les racistes, vous êtes les terroristes », Mouhciwe a déclaré avoir peur. « Nous avons tous vécu des situations de racisme. Si Abderrahim avait été blanc, je suis sûr qu’ils ne l’auraient pas tué », a-t-il déclaré.

La peur face à la montée du racisme

À quelques mètres de lui, deux femmes se réfugiaient à l’ombre. Elles ont préféré ne pas donner leurs noms, mais ont affirmé qu’elles ne s’attendaient pas à ce qu’un événement de cette ampleur se produise à Torrejón. « S’il s’agit d’un délinquant, que la justice fasse son travail, mais pas qu’un policier le tue. On ne tue même pas les chiens de cette manière », a critiqué l’une d’elles.

Ces deux femmes ont affirmé qu’elles ressentaient une certaine crainte face au racisme qui ne cesse de croître, pour reprendre leurs propres termes. « On vous insulte dans la rue et certaines personnes pensent que tout ce qui va mal est la faute des moros [terme péjoratif pour désigner les Maghrébins]. Peu leur importe que vos enfants soient nés ici, rien que parce qu’ils ont la peau plus foncée, ils les agressent et leur disent de retourner dans leur pays. J’ai aussi peur pour eux », a commenté l’autre. Toutes deux vivent à Torrejón depuis deux décennies et connaissent la famille d’Abderrahim. « Si ça arrive avec un policier, cela signifie qu’on ne peut plus faire confiance à personne. Allons-nous les appeler quand nous aurons un problème ? Espérons que justice sera faite », ont-elles souligné.


Famille et connaissances d’Abderrahim à Torrejón

La mobilisation a rassemblé de nombreux jeunes. L’un d’entre eux, qui n’a pas souhaité révéler son nom, a souligné qu’ils étaient « dévastés ». Comme il l’a expliqué, « tout le monde peut se tromper, et cet homme souffrait d’une maladie mentale, car j’ai vu les rapports médicaux que possède la famille ». Il a 26 ans et est arrivé à Torrejón avant d’avoir atteint l’âge d’un an. « Maintenant, nous avons peur que quelque chose comme ça puisse nous arriver, car cela aurait déjà pu nous arriver. Cela peut arriver à n’importe qui. N’importe lequel d’entre nous aurait pu être Abderrahim cette nuit-là », a-t-il souligné.

Contre la violence policière

Le rassemblement a eu lieu sur la place d’Espagne à Torrejón, qui était à midi complètement encerclée par des fourgons de police postés à chacune de ses entrées. Carlos Buendía, porte-parole de Corredor en Lucha, a critiqué devant les personnes présentes, selon ses propres termes, le mépris de certaines personnes envers la classe ouvrière migrante qui ne peut pas se rendre en Espagne en avion. Il a également dénoncé les « brigades racistes » de policiers qui opèrent régulièrement dans la gare RENFE de la ville, la manifestation ayant eu lieu à quelques mètres de la gare. Les militants ont alors crié « Stop à la violence policière ».


L’affiche du rassemblement

L’ancien député de l’Assemblée de Madrid et membre de Podemos, Serigne Mbayé, était également présent : « Nous remplirons les rues, nous remplirons les places, et ni la chaleur, ni le froid, ni le vent ne nous empêcheront de dénoncer le racisme institutionnel », a-t-il déclaré. La mobilisation a également bénéficié du soutien de diverses organisations politiques et sociales de gauche.

Environ une heure après le début du rassemblement, Buendía a lu aux personnes présentes un communiqué signé par Corredor en Lucha : « Mardi dernier, un nouveau cas de racisme institutionnel s’est produit à quelques rues d’ici. Deux policiers hors service ont étouffé à mort un jeune homme de 35 ans devant de nombreux témoins qui exigeaient qu’ils cessent d’agresser le jeune homme d’origine maghrébine, Abderrahim », a-t-il déclaré.

Le porte-parole a ensuite énuméré d’autres cas de racisme, tels que « les centaines de personnes qui meurent en Méditerranée, notre camarade Mbaye assassiné en 2018 à Lavapiés, le meurtre de Lucrecia, le massacre du Tarajal, les milliers de morts du génocide palestinien aux mains du sionisme ».

La plateforme a donc exigé « que des responsabilités soient assumées pour le meurtre brutal d’Abderrahim » et a appelé « toute la classe ouvrière du Corredor del Henares* à s’organiser pour mettre fin à l’offensive raciste du régime ». « Parce qu’aucune vie ne vaut moins qu’une autre, parce que l’offensive du capital doit cesser, parce qu’il faut en finir avec la résignation, parce qu’il est temps de se battre », a-t-il conclu alors que la place scandait en chœur : « Vous n’êtes pas seuls, nous sommes avec vous ».

NdlT
Le Corredor del Henares (Corridor du Henares) est un axe résidentiel, industriel et commercial développé dans la plaine du fleuve Henares, autour de l'autoroute Nord-Est et de la ligne ferroviaire Madrid-Barcelone, entre les villes espagnoles de Madrid et Guadalajara.

Il englobe des villes hautement industrialisées telles que Coslada, San Fernando de Henares, Torrejón de Ardoz, Alcalá de Henares, Azuqueca de Henares et Guadalajara, qui forment une agglomération urbaine de plus de 600 000 habitants, et un continuum urbain industriel avec des zones industrielles et commerciales qui se développent autour des principaux axes de communication.

 

23/06/2025

FABER CUERVO
Colombia en el mundo: ¿Por qué hacemos lo del avestruz? ¿Para qué sirve la filosofía?

Faber Cuervo, 23-6-2025

Escucha resumen audio

“Ambientalismo sin lucha social es apenas jardinería”

“Filosofía sin lucha política es apenas mera bacanería”


La sociedad colombiana no ha podido tramitar pacífica y eficazmente sus conflictos por la ausencia de una educación política, filosófica, histórica, ética y estética. Es decir, por carencia de todo aquello que nos hace más humanos. Ha privilegiado la fuerza de la ignorancia, la censura y las balas, por sobre la fuerza de la argumentación, el conocimiento y el pensamiento crítico.

Desde el siglo XX se instauró la creencia de que “en la mesa no se debe hablar de política ni religión para evitar conflictos”. Esa visión del statu quo opresor promovió la postura del avestruz, enterrar la cabeza para no ver todo lo que reviste importancia en la sociedad.

La filosofía es el cuidado del pensar. La política es el cuidado del otro. La ética es el cuidado de sí. Pero ninguna de estas disciplinas las enseña la universidad. La filosofía que transmite la universidad no es para trasformar y emancipar la sociedad sino para consolidar sus cimientos de colonización, esclavitud, deshumanización y pobreza.

La política es quizás la disciplina que más nos humaniza. Somos seres eminentemente políticos. Sin el otro no podemos existir. Por eso, la política es el cuidado del otro. En la medida que defiendo los intereses y derechos del otro, estoy defendiendo los míos propios.

Las imágenes recurrentes de movilizaciones populares tomándose las calles de las ciudades no son divulgadas en los medios de comunicación empresariales, sólo lo hacen los medios alternativos independientes. Ellas revelan una fervorosa lucha entre una clase social trabajadora contra una clase social explotadora opresora. Lo que la antigua filosofía política denominó la lucha de clases determinante de la historia de los pueblos.

Sin embargo, esas imágenes reveladoras no suscitan interés, mucho menos análisis, discusiones, o profundización en la problemática sociológica que entrañan, en amplias franjas de la población, en círculos de estudio, en grupos de formación cultural, en organizaciones sociales importantes. Se asume la postura del avestruz, se mira para un solo lado, se prefiere evitar salir de la zona de confort, o sea, “yo tengo casi todo, no me importa lo que ocurra allá fuera”.

La filosofía es una herramienta para interpretar, pero en especial, para transformar la realidad. Esta filosofía no gusta al statu quo, no se promueve en la academia, no tiene cabida en la prensa ni en la radio, ningún sistema de educación prepara para ella.

Vivimos en un mundo de complejos fenómenos que requieren de la filosofía y la política para entenderlos y tramitarlos. No en vano surgió la filosofía política como una disciplina que analiza las sociedades y propone utopías para transformarlas. John Rawls, filósofo usamericano, propuso un nuevo contrato social para zanjar las odiosas diferencias entre las clases sociales, basado en la justicia distributiva. La obscena desigualdad social es una de las principales causas de las violencias y calamidades en las sociedades.

¿De qué sirve la filosofía política si no se toma partido por las víctimas que padecen exclusión, persecución y genocidio? En un mundo de tanta desigualdad como el que habitamos es un imperativo tener empatía hacia esos seres desdichados. Solo queda una opción coherente con la humanización a la que nos debemos: no seguir siendo tibios, ser amorosamente radicales contra los diseños estructurales que eternizan la inequidad. Es inaceptable que millones de colombianos y no colombianos sufran diariamente la pobreza aplastante de cualquier esperanza y proyecto de vida. La filosofía política tiene el reto de ofrecer alternativas al modelo del capitalismo empobrecedor de los más y enriquecedor de los menos.  

La neutralidad en un mundo donde impera la ley de la selva no es decorosa. Es indigna. No podemos dudar en rechazar categóricamente la violación al Derecho Internacional, el arrasamiento de las soberanías de países que no tienen bombas nucleares para defenderse de los terroristas Estados de Israel y Estados Unidos de América. Si Irán tuviera siquiera una bomba nuclear no lo hubieran atacado. Lo atacan porque quieren cambiar su gobierno, controlar sus reservas de hidrocarburos y el Estrecho de Ormuz, poner allí bases militares para seguir preparando el asedio a China.

Poderosos bombarderos B-2 de los USA lanzaron bombas rompe búnkeres a instalaciones nucleares de Irán. La temible bomba GBU-57 pesa 13 toneladas y media; su enorme peso logra impulsarla hasta 60 metros bajo tierra donde detona 2.400 kilogramos de explosivos. ¿Cómo la humanidad calla ante estas acciones que atentan contra toda la vida planetaria? Esas detonaciones en esas profundidades pueden generar alteraciones en el subsuelo. También pueden generar liberación de uranio, lo que pondría en riesgo la salud de todos los seres vivos alrededor.

El colonialismo está más vivo que nunca. Israel prosigue el genocidio contra el pueblo palestino y mantiene total control sobre Gaza, ahora quiere ingresar a argentina cuyas puertas abre el vasallo Milei. Dicen que van por el agua, La Patagonia y otros recursos. Las fuerzas armadas de Israel han atacado a cinco países en menos de un año: Palestina, Líbano, Yemen, Siria, Irán. ¿Cuál será el sexto? El gobierno de Donald Trump criminaliza a los inmigrantes latinoamericanos que han contribuido a la prosperidad de la economía estadounidense; las redadas que ha ordenado han separado niños de sus padres, ha violentado los derechos humanos, ha afectado la producción industrial y agrícola.

La seguridad del planeta, la continuidad de la vida, los valores más caros de las civilizaciones están en riesgo. ¿Dónde están la filosofía, la política, la ética? ¿En cuál rincón dormitan? La ética –cuidado de sí- con los principios que libremente elegimos para conducirnos a favor de la paz, la justicia social y con la naturaleza, deberían enarbolarse con toda la fuerza moral posible. Como el avestruz, no podemos seguir autocensurándonos eludiendo las cuestiones fundamentales. Hay que tomar partido contra la oscuridad, contra todas las expresiones de violencia, contra el genocidio, la discriminación racial-étnica-social-de género, la pobreza, el colonialismo, la explotación del trabajo.


Pacificadores de nuestro tiempo, por Tjeerd Royaards, Países Bajos

22/06/2025

GIDEON LEVY
Est-il légitime de tuer un chef d’État ?

Gideon LevyHaaretz, 22/6/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 

Est-il légitime de discuter de l’assassinat du guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei ? Est-il légitime de tuer un chef d’État, sauf dans de très rares cas ? Si oui, quels chefs d’État sont des cibles légitimes et lesquels ne le sont pas, et qui en décide ? Qui peut affirmer que Khamenei peut être assassiné, mais pas Benjamin Netanyahou ? Que Vladimir Poutine peut être tué, mais pas Donald Trump ? Lequel de ces deux hommes représente le plus grand danger pour le monde ? Tout dépend du point de vue de chacun.

Rick McKee


Quels scientifiques peuvent être tués ? Les scientifiques nucléaires iraniens, oui, les scientifiques nucléaires israéliens, non ? Sur quelle base ? Les deux groupes sont des scientifiques au service de l’industrie la plus monstrueuse qui soit, celle du meurtre. Cela conduit naturellement à la question de savoir si un pays a le droit de posséder des armes nucléaires alors qu’un autre ne l’a pas.

Après tout, le niveau de dangerosité d’un pays peut changer. L’Iran n’a pas toujours été un pays dangereux, et Israël ne sera pas toujours un pays sans danger. Il y a déjà beaucoup de politiciens fous en Israël qui représentent un risque pour toute la région. Serait-il légitime de leur confier le code secret ? Serait-il légitime de les assassiner ?

Ces questions sont extrêmement sensibles ; Israël évite d’en discuter et élude les réponses, invoquant l’argument sacré : « Comment pouvez-vous même comparer ? » Israël ne peut être comparé à aucune autre entité dans le monde. Yigal Amir, qui a assassiné l’ancien Premier ministre Yitzhak Rabin en 1995, estimait que Rabin représentait une menace existentielle pour l’État d’Israël. Peu d’Israéliens pensent que cela donnait à Amir le droit d’assassiner le Premier ministre.

Aujourd’hui, Israël considère que Khamenei représente une menace existentielle et qu’il est donc permis de l’assassiner : « assassiner » est le mot correct ici, le plus précis. Si l’on met de côté l’hypothèse qu’Israël s’est inventée, selon laquelle il est permis de faire ce qui est interdit au reste du monde, il est très difficile de répondre à ces questions. L’argument selon lequel Israël est un cas particulier, parce que tout nous est permis, parce que nous sommes les survivants de l’Holocauste et du massacre du 7 octobre, ne tient pas la route. Le monde commence également à s’en lasser. La réponse à ces questions doit être universelle.

Israël invoque une comparaison entre Khamenei et Hitler pour justifier l’assassinat imminent. Il est clair qu’Hitler devait être éliminé, mais Khamenei n’est pas Hitler. Israël affirme qu’il s’abstient de nuire aux civils. Khamenei est un civil, pas le chef d’état-major ou un général. Nous pouvons également mettre de côté momentanément la question de la légitimité et nous demander s’il est sage de le tuer.

La guerre en Iran est sur le point de se compliquer. Yaniv Kubovich a rapporté que les responsables militaires israéliens affirment soudainement qu’Israël ne peut être soumis à un délai. C’est ainsi que l’on commence à s’enfoncer dans le marécage. Assassiner Khamenei ne ferait qu’empirer les choses.

Pendant ce temps, le ministre de la Défense joue à Dieu. À ce titre, Isrel Katz a annoncé que Khamenei ne pouvait pas être autorisé à « continuer d’exister ». Quels sont les critères de Katz pour être autorisé à « exister » ? Décide-t-il qui doit vivre et qui doit mourir ? Une cour céleste dirigée par un membre ridicule du cabinet israélien ? Le ministre iranien de la Défense est-il autorisé à menacer son homologue israélien de mort ?

Les commentateurs des studios d’information israéliens parlent de la « chasse aux scientifiques » en Iran, faisant peut-être allusion à la chasse aux scientifiques allemands menée par le Mossad en Égypte dans les années 1960. La terminologie a son importance, et elle est aussi ignoble que les propos du ministre de la Défense. On ne « chasse » pas les scientifiques, car ce ne sont pas des animaux (dont la chasse est également horrible), même s’ils sont iraniens.

Les appels à l’assassinat de chefs d’État ne sont légitimes de la part d’aucune partie. Notre Netanyahou est désormais responsable du meurtre de dizaines de milliers de personnes à Gaza. Est-il permis d’appeler à son assassinat afin de sauver ce qui reste de la nation là-bas ? De nombreux Israéliens pensent également qu’il est un tyran, qu’il détruit le pays et ruine la démocratie israélienne, qu’il est le Juif le plus méprisable de l’histoire et lui adressent une foule d’autres insultes – mais personne, espérons-le, n’imagine même discuter de son assassinat.

Le débat sur l’élimination de Khamenei ouvre la voie à la légitimité : désormais, il est permis d’assassiner des chefs d’État. La seule question qui reste à débattre est de savoir qui est une cible légitime et qui ne l’est pas. Les Israéliens ne le sont pas.

Le plan de bataille initial pour une nouvelle guerre contre l’Iran
Ce que des “sources fiables” à Washington ont murmuré à l’oreille de Seymour Hersh

Cet article, publié par  son auteur le 19 juin, a vu ses prévisions confirmées - FG, Tlaxcala

Seymour Hersh, 19/6/2025

Le guide suprême iranien Ali Khamenei assiste à une cérémonie marquant le trente-sixième anniversaire de la mort de Ruhollah Khomeini au mausolée Khomeini à Téhéran, le 4 juin. Photo Bureau de presse du guide iranien

Voici un rapport sur ce qui va très probablement se passer en Iran, dès ce week-end, selon des initiés israéliens et des responsables usaméricains qui ont été des sources fiables depuis des décennies. Cela impliquera de lourds bombardements usaméricains. J’ai vérifié ce rapport auprès d’un fonctionnaire usaméricain de longue date à Washington, qui m’a dit que tout serait « sous contrôle » si le guide suprême iranien Ali Khamenei « disparaissait ». On ne sait pas exactement comment cela pourrait se produire, à moins qu’il ne soit assassiné. On a beaucoup parlé de la puissance de feu usaméricaine et des cibles en Iran, mais, pour autant que je sache, peu de réflexions pratiques ont été menées sur la manière de se débarrasser d’un chef religieux vénéré qui compte d’énormes partisans.

Je couvre à distance la politique nucléaire et étrangère d’Israël depuis des décennies. Mon livre publié en 1991, The Samson Option, raconte l’histoire de la fabrication de la bombe nucléaire israélienne et la volonté des USA de garder ce projet secret. La question la plus importante qui reste sans réponse concernant la situation actuelle est la réaction du monde, y compris celle de Vladimir Poutine, le président russe qui est un allié des dirigeants iraniens.

Les USA restent le plus important allié d’Israël, même si beaucoup de personnes ici aux USA et dans le monde entier abhorrent la guerre meurtrière que mène Israël à Gaza. L’administration Trump soutient pleinement le plan actuel d’Israël visant à éliminer toute trace de programme d’armement nucléaire en Iran, tout en espérant que le gouvernement dirigé par les ayatollahs à Téhéran sera renversé.

On m’a dit que la Maison Blanche avait donné son feu vert à une campagne de bombardements intensifs sur l’Iran, mais les cibles ultimes, les centrifugeuses enfouies à au moins quatre-vingts mètres sous terre à Fordow, ne seront pas frappées avant le week-end, à l’heure où j’écris ces lignes. Ce report est dû à l’insistance de Trump, car le président souhaite que le choc du bombardement soit atténué autant que possible à l’ouverture de la Bourse de Wall Street lundi. (Trump a contesté ce matin sur les réseaux sociaux un article du Wall Street Journal affirmant qu’il avait décidé d’attaquer l’Iran, écrivant qu’il n’avait pas encore pris de décision quant à la marche à suivre).

Fordow abrite la majorité des centrifugeuses les plus avancées d’Iran qui, selon les derniers rapports de l’Agence internationale de l’énergie atomique, dont l’Iran est signataire, ont produit 900 livres [=408 kg.] d’uranium enrichi à 60 %, soit un peu moins que le niveau requis pour la fabrication d’armes nucléaires.

Les dernières frappes aériennes israéliennes sur l’Iran n’ont pas cherché à détruire les centrifugeuses de Fordow, qui sont stockées à au moins 80 mètres sous terre. Il a été convenu, mercredi, que des bombardiers usaméricains équipés de bombes capables de pénétrer à cette profondeur commenceront à attaquer les installations de Fordow ce week-end.

Ce délai permettra aux forces militaires usaméricaines présentes au Moyen-Orient et en Méditerranée orientale (il y a plus d’une vingtaine de bases aériennes et navales usaméricaines dans la région) de se préparer à d’éventuelles représailles iraniennes. On suppose que l’Iran dispose encore de certaines capacités en matière de missiles et d’aviation qui figureront sur les listes de bombardement usaméricaines. « C’est l’occasion de se débarrasser une fois pour toutes de ce régime », m’a déclaré aujourd’hui un responsable bien informé, « alors autant voir les choses en grand ». Il a toutefois précisé qu’il ne s’agirait pas d’un bombardement intensif.

Les bombardements prévus ce week-end auront également de nouvelles cibles : les bases des Gardiens de la révolution, qui ont contré ceux qui faisaient campagne contre les dirigeants révolutionnaires depuis le renversement violent du shah d’Iran au début de 1979.

Les dirigeants israéliens, sous la houlette du Premier ministre Benjamin Netanyaohu, espèrent que les bombardements fourniront « les moyens de créer un soulèvement » contre le régime iranien actuel, qui a montré peu de tolérance envers ceux qui défient les dirigeants religieux et leurs édits. Les commissariats de police iraniens seront frappés. Les bureaux gouvernementaux qui abritent les dossiers des dissidents présumés en Iran seront également attaqués.

Les Israéliens espèrent apparemment aussi, si j’ai bien compris, que Khamenei fuira le pays et ne tiendra pas bon jusqu’au bout. On m’a dit que son avion personnel avait quitté l’aéroport de Téhéran tôt mercredi matin à destination d’Oman, accompagné de deux avions de chasse, mais on ne sait pas s’il était à bord.

Seuls deux tiers des 90 millions d’Iraniens sont persans. Les plus grands groupes minoritaires comprennent les Azéris, dont beaucoup ont depuis longtemps des liens secrets avec la CIA, les Kurdes, les Arabes et les Baloutches. Les Juifs constituent également une petite minorité dans ce pays. (L’Azerbaïdjan abrite une grande base secrète de la CIA pour ses opérations en Iran).

Le retour du fils du shah, qui vit actuellement en exil près de Washington, n’a jamais été envisagé par les stratèges usaméricains et israéliens, m’a-t-on dit. Mais il a été question, au sein du groupe de planification de la Maison Blanche dont fait partie le vice-président J.D. Vance, d’installer un leader religieux modéré à la tête du pays si Khamenei était destitué. Les Israéliens se sont vivement opposés à cette idée. « Ils se fichent complètement de la question religieuse, mais exigent une marionnette politique à contrôler », a déclaré ce fonctionnaire usaméricain de longue date. « Nous sommes en désaccord avec les Izzies [Israéliens en argot washingtonien] sur ce point. Il en résulterait une hostilité permanente et des conflits futurs à perpétuité, Bibi essayant désespérément d’attirer les USA comme allié contre tout ce qui est musulman, en utilisant le sort des citoyens comme appât propagandiste. »

On m’a dit que les services de renseignement usaméricains et israéliens espèrent que des éléments de la communauté azérie se joindront à une révolte populaire contre le régime au pouvoir, si celle-ci venait à se développer pendant les bombardements israéliens. On pense également que certains membres des Gardiens de la révolution se joindraient à ce qui pourrait être, selon mes informations, « un soulèvement démocratique contre les ayatollahs », une aspiration de longue date du gouvernement usaméricain. Le renversement soudain et réussi de Bachar al-Assad en Syrie a été cité comme un modèle potentiel, bien que la chute d’Assad soit survenue après une longue guerre civile.

Il est possible que les bombardements massifs israéliens et usaméricains plongent l’Iran dans un état d’échec permanent, comme cela s’est produit après l’intervention occidentale en Libye en 2011. Cette révolte a abouti au meurtre brutal de Mouammar Kadhafi, qui maintenait sous contrôle les tribus disparates du pays. L’avenir de la Syrie, de l’Irak et du Liban, tous victimes d’attaques extérieures répétées, est loin d’être réglé.

Donald Trump souhaite clairement remporter une victoire internationale qu’il pourra exploiter. Pour y parvenir, lui et Netanyahou mènent les USA vers des horizons inédits.

21/06/2025

Hammouchi (DGSN/DGST) contre Mansouri (DGED) : la guerre des barbouzes bat son plein et fait des victimes collatérales

Ignacio Cembrero, El Confidencial, 19/6/2025

Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

Écouter résumé audio

Listen to our podcast The Power Struggle Within Moroccan Intelligence: A Deep Dive into Hammouchi and Mansouri

Des dizaines de personnes proches de Mehdi Hijaouy, ancien « numéro 2 » de l’agence de renseignement extérieur marocaine, dont deux commissaires, ont été arrêtées et emprisonnées. La répression touche les membres des familles, ce qui n’était pas le cas pour les opposants.


Abdellatif Hammouchi, 59 ans, le super-flic du Maroc, fait la une des médias marocains tous les jours. Journaux et télévisions glorifient son succès lors des journées portes ouvertes organisées par la Sûreté Nationale en mai à El Jadida, avec 2,4 millions de visiteurs, ou son intervention à la 13e   rencontre internationale des hauts représentants chargés des questions de sécurité à Moscou, qui consolide « son rôle de figure centrale dans le domaine de la sécurité et du renseignement au niveau planétaire ».

Dans les coulisses, Hammouchi livre cependant une guerre sans merci contre la Direction Générale des Études et de la Documentation (DGED), le service secret extérieur dirigé par Yassine Mansouri. Cela a commencé par l’arrestation de dizaines de collaborateurs, amis et même  membres de la famille de Mehdi Hijaouy, 52 ans, qui fut en son temps le « numéro deux » de la DGED. Maintenant, c’est au tour de Yassine Mansouri, le directeur de la DGED. Le journal Barlamane, porte-parole fidèle de l’appareil de sécurité, a demandé samedi qu’une enquête soit ouverte sur l’acquisition de ses propriétés.


Mansouri avait déjà disparu de la salutation protocolaire au roi Mohammed VI à Tétouan à l’occasion de l’Aïd el-Adha, la plus grande fête de l’islam célébrée le samedi 7. Depuis, des rumeurs circulent sur sa disgrâce. Camarade de classe du roi Mohammed VI, Mansouri est en poste depuis 20 ans et était l’un des hommes les plus puissants du royaume.

Mehdi Hijaouy a fui le Maroc pour l’Espagne l’année dernière suite à de sérieux désaccords avec les autorités marocaines, qui ont demandé son extradition en septembre pour, entre autres motifs, avoir encouragé l’émigration illégale vers l’Espagne. Craignant d’être livré, il s’est rendu clandestinement en novembre dans un autre pays européen où il se cache.

La révélation de son séjour à Madrid a donné lieu à la publication d’une infinité d’articles injurieux dans la presse marocaine. « Mehdi Hijaouy : faux expert, vrai escroc », a titré, par exemple, Hespress, le journal numérique le plus lu, qui avait pourtant publié pendant des années des tribunes de l’ex-espion. Les journaux ont également mis en doute qu’il ait été le « numéro deux » de l’espionnage, le décrivant comme un simple pion. Claude Moniquet, un ancien agent de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure française, a cependant confirmé en mai sur les réseaux sociaux qu’il avait occupé ce poste. Il a loué au passage « son expérience et ses réflexions » consignées dans un livre. Hijaouy a même agi en tant que chef suprême de l’agence lorsque Mansouri, le directeur, était en congé maladie prolongé.

Les attaques de la presse contre Hijaouy n’ont été que la première salve. Ensuite, il y a eu de nombreuses autres offensives menées par la Brigade Nationale de la Police Judiciaire (BNPJ), un corps d’élite sous les ordres de Hammouchi. Celui-ci détient un grand pouvoir car il est non seulement à la tête de la Sûreté Nationale (police) mais aussi de la Direction Générale de la Surveillance du Territoire (DGST), dédiée au contre-espionnage et à la lutte antiterroriste.

La BNPJ, qui mène habituellement de grandes enquêtes criminelles, se consacre désormais à élucider les prétendues irrégularités dans l’exploitation du centre de beauté Musky à Rabat, appartenant à l’épouse de Hijaouy, exilée à Madrid. Dans le cadre de ces enquêtes, la brigade policière a fini par convoquer la belle-sœur de Hijaouy, a fermé le centre, a également arrêté le chef de l’urbanisme et le directeur des services de la mairie de Rabat, qui avait accordé le permis d’ouverture, et a interrogé la mairesse de Rabat, Fatiha el Moudni.

Une vingtaine de victimes collatérales

Ces personnes n’ont pas été emprisonnées, mais dans le cercle d’amis de Hijaouy, plusieurs sont derrière les barreaux, purgeant, après un procès express, des peines de quelques années, mais pour des délits farfelus. Au Maroc, la justice n’est pas indépendante. Le cas le plus frappant est celui d’un commissaire de police, Khalid Bouatlaoui, 62 ans, qui a écopé de trois ans bien qu’il soitr le frère de Fouad Bouatlaoui, chef de la sécurité du prince héritier Moulay Hassan. Ce dernier a toujours montré son appréciation pour le travail du policier dédié à sa protection et a mis son veto à son transfert.

Au total, pour l’instant, une vingtaine de personnes ont été les victimes collatérales au Maroc de la fuite de Hijaouy du pays et de sa présence dans une cachette quelque part en Europe. La presse marocaine et les porte-parole officieux des autorités assurent, cependant, que Hijaouy comptait au moins deux collaborateurs connus à l’étranger. Les familles des deux hommes au Maroc sont également la cible de la redoutable brigade judiciaire. Le premier est Hicham Jerando, un youtubeur marocain basé à Montréal (Canada) d’où il lance des injures contre les autorités de Rabat, parfois émaillées d’informations sur de prétendus scandales de corruption étayées par des documents qu’il montre devant la caméra. L’une de ses sources serait Hijaouy lui-même qui se vengerait de cette manière.

Hicham Jerando a été condamné par contumace à 15 ans de prison par un tribunal de Rabat. Sept de ses proches ont été condamnés à des peines allant de deux mois à trois ans de prison pour complicité avec le prétendu diffamateur. Parmi eux figurent son neveu, qui passera trois ans en prison, et son beau-frère, condamné à deux ans. La police judiciaire a outrepassé ses droits et a même arrêté pendant quelques heures une nièce de Jerando, âgée de 14 ans, qui souffre d’une maladie rare. Comme elle ne pouvait pas la rendre à ses parents, les ayant arrêtés, elle a fini par l’interner dans un centre pour mineurs.


Mustafa Aziz dans un duo burlesque avec un autre personnage de karakouz, Farhat Mehenni, qui n'est rien moins que le “Président du 
Gouvernement Kabyle en Exil”

Le deuxième ami de Hijaouy à l’étranger est Mustafa Aziz, un homme d’affaires marocain octogénaire basé à Paris qui a travaillé pendant des années en Afrique pour le compte de Yassine Mansouri, le chef du service secret extérieur. Sa tâche consistait à recueillir un soutien à la « marocanité » du Sahara Occidental. Avec Hijaouy, il a récemment fondé « Le Maroc de demain », une association d’immigrés en Europe.

Avant que son fils Hadi ne soit condamné à deux ans, Mustafa Aziz a mis en ligne quelques vidéos dans lesquelles il exprime son incompréhension et son indignation que Rabat ait porté un coup si bas à quelqu’un comme lui qui s’est démené pour défendre discrètement les intérêts de son pays. Aziz est « un fugitif condamné pour fraude », lui a répondu la presse officielle marocaine, rappelant une escroquerie qu’il a commise il y a des années via l’une de ses entreprises.

Cyberattaques et révélations

De nombreux opposants marocains ont été emprisonnés dans des prisons officielles ou clandestines depuis que le pays a accédé à l’indépendance en 1956. Leurs familles souffrent de ces incarcérations pour de multiples raisons comme la difficulté à rendre visite aux détenus, l’isolement auquel ils sont soumis ou le manque de soins médicaux. Le système policier ne s’était cependant jamais acharné sur elles, comme c’est le cas actuellement avec les proches de Mehdi Hijaouy qui se sont retrouvés derrière les barreaux.

L’objectif de Hammouchi est d’abord de forcer Hijaouy à se taire– il détient des informations sur l’utilisation de Pegasus par le Maroc – puis à revenir et à se rendre, selon une source de renseignement européenne. Au milieu de cette série de règlements de comptes, des documents sur les actifs immobiliers de Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, et, surtout, de Yassine Mansouri ont fait surface sur les réseaux.

Les révélations sont le produit d’un piratage par Jabaroot DZ, un prétendu groupe de hackers algériens, de la base de données de l’Agence Nationale de l’Enregistrement Foncier ou peut-être de Tawtik, une plateforme du Conseil National de l’Ordre des Notaires.

Mansouri a acquis au Maroc entre 2022 et 2023 des propriétés d’une valeur de 3,266 millions d’euros, selon ces documents, jamais démentis, qui circulent abondamment sur les réseaux sociaux. Le journaliste marocain Ali Lmrabet, exilé à Barcelone, a consacré une longue analyse sur sa chaîne YouTube pour tenter de démontrer que cet argent ne pouvait provenir de son salaire, équivalent à celui d’un ministre, et que son origine était autre.

De manière surprenante, le  journal Barlamane s’est rallié samedi aux soupçons du journaliste exilé. Il a même demandé l’ouverture d’une enquête sur l’acquisition par des fonctionnaires des propriétés figurant dans les documents piratés. Il ne donne pas de noms, mais il fait référence à Nasser Bourita et Yassine Mansouri. Dirigé par Mohamed Khabbachi, ancien porte-parole du ministère de l’Intérieur, Barlamane est le journal de Hammouchi.

Le piratage du registre notarial a été le deuxième, en moins de deux mois, à révéler des données troublantes. Le précédent, en avril, visait la Trésorerie Nationale de la Sécurité Sociale et a mis au jour des informations sur ses deux millions d’affiliés, parmi lesquels Mounir Majidi, secrétaire particulier du roi. Pour gérer Siger, le holding royal, il perçoit l’équivalent d’environ 120 000 euros par mois.

La dernière cyberattaque réussie a eu lieu le 8 juin et sa cible était le ministère de la Justice, dont des données sur 5 000 juges et 35 000 autres fonctionnaires ont été volées. Ces deux dernières attaques massives ont également été menées par les Algériens de Jabaroot DZ qui sont devenus un défi pour tous les services de sécurité du Maroc. Ils sont si efficaces pour infiltrer les bases de données que certains à Rabat soupçonnent qu’ils sont liés aux services secrets algériens.

 

 

 

20/06/2025

آنچه به من گفته شده است که در ایران چه اتفاقی خواهد افتاد: نخستین طرح و نقشه برای یک جنگ جدید

 

سیمور هرش- ۱۹ ژوئن ۲۰۲۵

ترجمه: ن. نوری زاده

گزارش سیمور هرش،(Seymour Hersh) روزنامه نگار معروف و بسیار با اعتبار امریکایی که در گذشته افشا گری‌های زیادی در مورد وقایع سیاسی مهمی از جمله کشتار"می‌ لای" (My Lai massacre) در ویتنام بدست ازتش آمریکا، و رسوایی که آمریکاییها در "آبو غریب" در عراق

 

علی خامنه‌ای رهبر ایران در مراسم سی و ششمین سالگرد درگذشت روح‌الله خمینی، بنیانگذار انقلاب ایران، در آرامگاه او در چهاردهم خرداد امسال حضور یافت.

به گفته مقامات اسرائیلی و مقامات آمریکایی که من دهه‌هاست که به اطلاعات آنان اتکا دارم، گزارش دادند که در اوایل این هفته احتمالا چه اتفاقی در ایران خواهد افتاد، اتفاقی که مستلزم بمباران شدید ایران از سوی آمریکا می باشد. من این گزارش را جهت بررسی با یک مقام قدیمی آمریکایی در واشنگتن در میان گذاشتم. او به من گفت اگر رهبر ایران علی خامنه‌ای برود (ترور شود) همه چیز «تحت کنترل» (آمریکا) در می آید. اما بعد از ترور او چه اتفاقی خواهد افتاد، مشخص نیست. در مورد قدرت آتش و اهداف آمریکا در داخل ایران صحبت های زیادی شده است، اما تا آنجا که من می توانم بگویم که چگونه می شود و می توان یک رهبر مذهبی محترم با طرفداران بسیار زیاد را برکنار (ترور) کرد، بطور عملی کمتر فکر شده است.

من چندین دهه است که در مورد سیاست هسته ای و خارجی اسرائیل گزارش تهیه کرده ام. کتاب من در سال 1991، با عنوان گزینه سامسون،(The Samson Option) داستانی که ساخت بمب هسته‌ای اسرائیل و تمایل آمریکا را برای پنهان نگه داشتن این پروژه را بیان می‌کند. مهمترین سوال بی پاسخ در مورد وضعیت کنونی، پاسخ جهان از جمله ولادیمیر پوتین، رئیس جمهور روسیه که از متحدان رهبران ایران بوده است، خواهد بود.(یعنی پنهان نگه داشتن بمب های هسته ای اسراییل)

اگرچه بسیاری در اینجا و در سراسر جهان از ادامه جنگ مرگبار اسرائیل در غزه متنفر و بی زار می باشند، با این حال آمریکا مهمترین متحد اسرائیل باقی می ماند و در پی آن نه تنها دولت ترامپ از طرح فعلی اسرائیل برای از میان بردن هرگونه برنامه تسلیحات هسته‌ای در ایران حمایت کامل می‌کند بلکه امیدوار است رژیم تحت رهبری آیت‌الله در تهران را سرنگون کند.

به من گفته شده است که کاخ سفید یک کمپین بمباران همه جانبه در ایران را امضا کرده است، اما اهداف نهایی این بمباران یعنی بمباران سانتریفیوژهایی که حداقل هشتاد متر زیر سطح فردو (Fordow) می باشند، تا زمان نوشتن این مقاله، تا آخر هفته مورد حمله قرار نخواهند گرفت. این تاخیر در بمباران فردود به اصرار ترامپ می باشد زیرا رئیس جمهور می خواهد با افتتاح معاملات وال استریت در روز دوشنبه، شوک ناشی از بمباران (فردود) تا حد ممکن کاهش یابد. (ترامپ صبح امروز در رسانه های اجتماعی از جمله گزارش وال استریت ژورنال در مورد حمله به ایران، گفت که هنوز از مسیری که باید طی شود (بمباران) تصمیم نگرفته است.)

در فردو پیشرفته‌ترین سانتریفیوژهای ایران قرار دارد، مکانی که طبق گزارش‌های اخیر آژانس بین‌المللی انرژی اتمی، که ایران یکی از امضاکنندگان آن می باشد، 900 پوند اورانیوم غنی‌شده تا 60 درصد در آنجا تولید شده است درصدی که نزدیک به سطح درجه (غنی سازی) تسلیحات (اتمی ) است.

اسرائیل در بمباران اخیر خود به ایران هیچ تلاشی برای از بین بردن سانتریفیوژهای فردو که حداقل هشتاد متر زیر زمین می باشند، انجام نداده است.  توافق شده است که روز چهارشنبه بمب‌افکن‌های آمریکایی بمب‌های سنگرشکن (bunker) با قابلیت نفوذ به عمق پناهگاه را (به منطقه) منتقل کنند تا در آخر این هفته حمله به تاسیسات فردو آغاز شود.

این تأخیر فرصتی برای آماده شدن ایران جهت انتقام‌جویی احتمالی (در صورت حمله آمریکا) ایجاد می کند.( تا به تاسیسات  نظامی ایالات متحده که بیش از دوجین پایگاه نیروی هوایی و دریایی درسراسر خاورمیانه و شرق مدیترانه دارد) حمله کند. فرض بر این است که ایران هنوز توانایی موشکی و نیروی هوایی دارد که بتواند تاسیسات نظامی ایالات متحده را بمباران کند. یکی از مقامات آگاه امروز به من گفت: «این فرصتی است برای یک بار و همیشه که این رژیم را از بین ببریم. بنابراین ما (آمریکا) ممکن است در این مورد به موفقیت بزرگی دست پیدا کنیم.» او گفت، با این حال، "این بمباران، بمباران اشباع یا بمبارانِ فرشی (carpet bombing) نخواند بود.  (بمباران فرشی به بمباران هواییِ بزرگ و همه‌جانبه‌ای که آسیب‌های زیادی را به بخشِ مشخصی از یک منطقه وارد می کند، گفته می شود)

بمباران برنامه‌ریزی‌شده آخر هفته در ایران اهداف جدیدی را خواهد زد از جمله پایگاه‌های سپاه پاسداران، می باشد  نیرویی نسامی که از زمان سرنگونی  شاه ایران در اوایل سال 1979 به سرکوب خشونت آمیز مخالفین رهبری انقلاب  پرداخته‌ است.

بنیامین نتانیاهو امیدوار است که بمباران ایران «وسیله‌ای برای ایجاد قیام» علیه رژیم کنونی را فراهم کند، رژیمی که تحمل کمی نسبت به افرادی دارد که از رهبری مذهبی و فرامین او سرپیچی می‌کنند. ( در این بمباران ها) پاسگاه های کلانتری، دفاتر دولتی که پرونده های مظنونان مخالفین را نگهداری می کنند نیز مورد حمله قرار خواهند گرفت.

به من گفته شده است که بازگرداندن پسر شاه که اکنون در تبعید در نزدیکی واشنگتن زندگی می کند،  مورد توجه برنامه ریزان آمریکایی و اسرائیلی قرار نگرفته است. اما در میان گروه برنامه ریزی کاخ سفید که شامل معاون رئیس جمهور جی.دی ونس (JD Vance) می باشد، این ایده که رهبران مذهبی معتدل جایگزین خامنه ای شووند مورد توجه قرار گرفته است. این ایده با مخالفت شدید  اسراییلی ها روبرو شد. این مقام باسابقه آمریکایی گفت که: «برای آنها (آمریکاییها) مهم نیست که رهبران مذهبی  باشند آنچه که برای انها مهم است ایجاد یک  مهره دست نشانده سیاسی برای کنترل می باشد». او ادامه داد که: "ما در این مورد با اسراییلیها اختلاف داریم. بی بی (نتانیاهو) ناامیدانه تلاش می کند که ایالات متحده را به عنوان متحد خود علیه هرچیزی که نشان از مسلمانی دارد به دنبال خود بکشاند تا از وضعیت اسفبار شهروندان به عنوان طعمه تبلیغاتی استفاده کند. "

به من گفته شد که در دستگاه اطلاعاتی آمریکا و اسرائیل این امید وجود دارد که در صورت ادامه بمباران اسرائیل، عناصری از جامعه آذری به شورش مردمی علیه رژیم حاکم بپیوندند. همچنین این فکر وجود دارد که برخی از اعضای سپاه پاسداران به آنچه که به من گفته شد ممکن است «قیام دموکراتیک علیه آیت‌الله‌ها» باشد، روی آورند که آرزوی دیرینه دولت ایالات متحده می باشد. همچنین در این میان از سرنگونی ناگهانی و موفقیت آمیز بشار اسد در سوریه به عنوان یک الگوی بالقوه گفتگوشد، اگرچه سقوط اسد پس از یک جنگ داخلی طولانی اتفاق افتاد.

این احتمال وجود دارد که نتیجه بمباران گسترده اسرائیل و آمریکا در ایران این کشور را در وضعیت شکست دائمی قرار دهد، همانطور که پس از مداخله غرب در لیبی در سال 2011 اتفاق افتاد. آینده سوریه، عراق و لبنان که همگی قربانی حملات مکرر خارجی هستند، هنوز حل نشده است.

دونالد ترامپ به وضوح خواهان یک پیروزی در سطح بین المللی است که بتواند آن را به بازار تجارت  جهانی عرضه کند. او و نتانیاهو برای رسیدن به این هدف، آمریکا را به جایی می برند که هرگز نرفته است.

19/06/2025

GIDEON LEVY
Guerre avec l’Iran, poursuite des massacres à Gaza : Israël est un lion malade, pas un lion debout

Gideon LevyHaaretz, 18/6/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 
Versión española

Le sort de la guerre dépend désormais des caprices d’un président yankee jacassier et imprévisible. S’il bombarde l’Iran, il pourrait remporter la victoire. S’il ne bombarde pas, Israël se sera lancé dans une autre guerre futile, plus superflue et dangereuse que toutes les précédentes.


Chappatte, Le Temps, Genève

La participation des USA aurait dû être garantie à l’avance. Cela aurait dû être une condition préalable à l’entrée en guerre. En attendant, Donald Trump se livre à ses jeux infantiles consistant à humilier l’Iran et à exiger sa reddition totale, détruisant par ses paroles toute chance restante d’accord, la seule chance d’un happy end.

Si les bombardiers lourds restent dans les hangars – la question restait en suspens mercredi –, alors la guerre d’usure se poursuivra, son issue et sa durée étant impossibles à prévoir. Israël ne pourra pas la supporter longtemps, socialement, économiquement et peut-être même militairement. Si, en revanche, les bombardiers décollent, cela pourrait mettre fin à la guerre et conduire à une guerre beaucoup plus importante.

Dans le brouillard de la bataille, Israël s’unit derrière la guerre et son leader, célébrant, se vantant et s’émerveillant, sans aucun débat public. Toute discussion qui s’est brièvement enflammée parmi les commentateurs dans les studios de télévision a tourné autour de la question du mérite. Le mérite de quoi ? Des performances inspirantes des pilotes, qui tournent au-dessus de Téhéran comme ils le font au-dessus de Gaza ou de la base aérienne de Hatzerim ? Amit Segal dit que le mérite revient au Premier ministre ; Nir Dvori, à l’establishment de la défense : un dialogue philosophique profond sur la peau de l’ours entre deux géants intellectuels, bien avant qu’on l’ai tué.

À Gaza, le massacre non seulement n’a pas cessé, mais il prend des proportions génocidaires. La file d’attente pour la nourriture est devenue une file d’attente pour la mort. « Qui est le prochain dans la file et qui est dans la file suivante. / Bonsoir désespoir et bonne nuit espoir » (Yehuda Poliker et Yaakov Gilad). Le compteur mesure le sang palestinien qui coule comme un débitmètre sur une pompe à essence mesure le carburant qui coule dans une voiture.

Jusqu’à présent, 400 personnes ont été tuées en attendant un sac de farine et une bouteille d’huile de cuisson. Quel péché ont-elles commis ? Qui a la capacité mentale pour cela maintenant, entre les courses vers l’abri anti-bombes - notre nouvelle normalité. La destruction dans les rues est également devenue normale. Il y a des rues en Israël qui ressemblent à Kharkiv après la dernière attaque russe, et cela nous convient. Un lion malade, pas un lion debout.

C’est comme si tout était tombé du ciel, une catastrophe naturelle, un décret divin. Les réalisations sont toutes les nôtres, seul le coût est un cas de force majeure. Comme s’il n’y avait pas d’autre choix que cette réalité folle, nous avons choisi pour nous-mêmes.

Il y a environ une semaine, Israël a choisi d’entrer en guerre avec l’Iran, après 20 mois d’attaques sauvages contre Gaza qui n’ont encore donné aucun résultat durable. Le coût de la guerre dans la bande de Gaza dépassera les résultats qu’elle pourrait encore obtenir. Demandez au monde ce qu’il pense d’Israël, parlez aux Israéliens du monde – une corruption morale incurable. Et alors que Gaza saigne et qu’Israël est corrompu, nous entrons à nouveau en guerre, avec nos forces et nos otages toujours dans la bande de Gaza.

Et Israël se réjouit : effrayé, épuisé, mais se réjouissant. « Téhéran brûle », titrait cette semaine le journal Yedioth Ahronoth, alors que quelques centaines de mètres à l’ouest de chez moi, des bâtiments brûlaient. Un lion malade.

Où allons-nous ? Ou plus précisément, où sommes-nous conduits ? Comme un agneau à l’abattoir, ou un troupeau vers une fausse victoire.

L’Iran ne se rendra pas, certainement pas après la campagne d’arrogance usaméricano-israélienne. Le meilleur résultat possible sera un nouvel accord nucléaire, et même cela ne sera pas une fin heureuse.

Qu’y aura-t-il de joyeux dans un pays qui a été marqué pendant 20 mois à Gaza, et qui sait combien de temps dans les abris anti-bombes ? Qu’y aura-t-il de bon, même si l’Iran renonce pour l’instant à ses ambitions nucléaires ? Une société et une économie en ruines, avec des milliers de criminels de guerre de Gaza qui se promènent parmi nous, un camp qui n’est pas uni mais qui est effroyablement uniforme, et un leader qui accorde des interviews à ses partisans dans une déformation grotesque du véritable journalisme. Ce qui compte, c’est que nous avons assassiné deux chefs d’état-major iraniens en une semaine.

Un lion malade.    

17/06/2025

La capacité de défense, le contrôle des armements et la compréhension mutuelle, conditions du maintien de la paix en Europe
Un manifeste de responsables sociaux-démocrates allemands

 Alors que le congrès fédéral du SPD doit se tenir du 27 au 29 juin à Berlin, plus d'une centaine de dirigeants et responsables sociaux-démocrates, rejoints par 12 000 citoyens, viennent de publier un Manifeste appelant à la désescalade et à une reprise du dialogue avec la Russie, remettant ainsi en cause la politique menée par leurs dirigeants suprêmes, coalisés au sein du gouvernement fédéral avec la CDU de Friedrich Merz. Ci-dessous une traduction de ce manifeste