15/02/2025

GIDEON LEVY
Comment Israël réagirait-il si Trump appelait à la création de camps de la mort à Gaza ?

Gideon Levy,  Haaretz , 12/2/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Et si le président usaméricain Donald Trump suggérait la création de camps de la mort pour les habitants de la bande de Gaza ? Que se passerait-il alors ? Israël réagirait exactement comme il l’a fait à ses idées de transfert, avec extase à droite et indifférence dans le camp centriste.

Emad Hajjaj

Yair Lapid annoncerait qu’il se rendrait à Washington pour présenter un « plan complémentaire », comme il l’avait proposé pour le plan de transfert. Benny Gantz dirait que le plan fait preuve de « créativité, d’originalité et d’intérêt ». Bezalel Smotrich, dans son état d’esprit messianique, dirait : « Dieu a fait des merveilles pour nous et nous nous en réjouissons ». Benjamin Netanyahou remonterait dans les sondages d’opinion.

La question n’est plus hypothétique. Trump ne suggérera pas explicitement des camps de la mort, mais il a déjà consenti à ce qu’Israël poursuive une guerre qui n’en est pas une, mais plutôt une agression barbare sur une étendue de terre désolée. De là, le chemin vers l’anéantissement est court, et Israël ne bronchera pas. Trump l’a approuvé. Après tout, personne En Israël ne s’est levé pour dire au président des USA : « Merci pour vos idées, mais Israël ne soutiendra jamais l’expulsion des Palestiniens de la bande de Gaza ».

Pourquoi donc être sûr que si Trump suggérait d’anéantir quiconque refuserait d’évacuer Gaza, Israël ne coopérerait pas avec lui ? Tout comme Trump a révélé le sentiment de transfert qui bat au cœur de presque tous les Israéliens, visant à résoudre le problème « une fois pour toutes », il pourrait encore révéler un élément plus sombre, le sentiment du « c’est nous ou eux ».

Ce n’est pas un hasard si un personnage sinistre comme Trump est devenu un guide pour Israël. Il est exactement ce que nous voulions et ce dont nous rêvions : un blanchisseur de crimes. Il pourrait bien s’avérer être le président usaméricain qui a causé le plus de dommages jamais infligés à Israël. Il y a eu des présidents avares en matière d’aide, d’autres acerbes envers Israël, voire menaçants. Mais jamais un président n’a entrepris de détruire les derniers vestiges de la moralité d’Israël. Désormais, tout ce que Trump approuvera deviendra la référence absolue pour Israël.

Trump pousse maintenant Israël à reprendre ses attaques contre la bande de Gaza, en imposant des conditions impossibles au Hamas : tous les otages doivent être libérés avant samedi midi, pas une minute plus tard, comme le fait la mafia. Et si seulement trois otages sont libérés, comme convenu ? Les portes de l’enfer s’ouvriront.

Elles ne s’ouvriront pas seulement à Gaza, qui a déjà été transformée en enfer. Elles s’ouvriront aussi en Israël. Israël perdra ses dernières limites. Trump a donné son autorisation. Mais Trump disparaîtra un jour. Il peut perdre tout intérêt avant cela, et Israël se retrouvera avec les dégâts qu’il a causés, des dégâts infligés par un État criminel et lépreux.

Aucune diplomatie publique ni aucun ami ne pourra le sauver s’il suit la voie de son nouvel oracle éthique. Aucune accusation d’antisémitisme ne réussira à faire taire le choc du monde si Israël se lance dans une nouvelle série de combats dans l’enclave.

On ne saurait exagérer l’intensité des dégâts. Le renouvellement des attaques contre Gaza, avec la permission et sous l’autorité de l’administration usaméricaine, doit être bloqué en Israël. Parallèlement à la campagne désespérée pour le retour des otages, une nouvelle campagne doit être lancée contre Trump et ses idées farfelues.

Cependant, non seulement il n’y a personne qui puisse mener une telle campagne, mais il n’y a personne qui puisse l’initier. Les seules batailles qui sont menées ici maintenant, pour les otages et pour le renvoi de Netanyahou, sont importantes, mais elles ne peuvent pas rester les seules.

La reprise de la « guerre » est le plus grand désastre auquel nous sommes maintenant confrontés, annonçant un génocide, sans plus de discussion sur les définitions. Après tout, à quoi ressemblerait une « guerre » aujourd’hui, si ce n’est à une attaque contre des dizaines de milliers de réfugiés qui n’ont plus rien ? Que signifiera l’arrêt de l’aide humanitaire, du carburant, des médicaments et de l’eau, si ce n’est un génocide ? Nous découvrirons peut-être que les seize premiers mois de la guerre n’étaient qu’un début, les cinquante mille premiers morts seulement un prélude.

Demandez à n’importe quel Israélien et il vous dira que Trump est un ami d’Israël, mais Trump est en réalité l’ennemi le plus dangereux d’Israël aujourd’hui. Le Hamas et le Hezbollah ne le détruiront jamais comme lui le fera.

 

 

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