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14/10/2025

Le Prix Nobel de la paix : un hénaurme foutage de gueule

Reinaldo SpitalettaSombrero de Mago, El Espectador, 14/10/2025

Traduit par Tlaxcala

Il existe un dicton tenace parmi les petits empereurs yankees à propos de leurs fameuses croisades, souvent plus sanglantes que celles du christianisme médiéval. Ils proclament, la bouche pleine, que leur présence, parfois avec des marines, des bombardiers, et pourquoi pas, des bombes atomiques, fait partie non seulement de la civilisation, mais aussi de la démocratie et de la liberté. De telles déclarations sont risibles lorsqu’elles sortent, par exemple, de la bouche de personnages comme Kissinger, Bush, Obama ou Trump, qui, après avoir ravagé des territoires, peuvent, pourquoi pas, recevoir le prix Nobel de la paix.


Une paix menaçante, par Waldo Matus 

Peut-être - la mémoire est fragile - que peu de personnes se souviennent de l’opération “Choc et effroi” en 2003. Ils ont dévasté l’Irak, riche en pétrole, puis ont monté un juteux business transnational de reconstruction. Ils ont anéanti des bibliothèques millénaires, tué des civils à la pelle, saturé de terreur et de mort ces terres de littérature fascinante et de tapis volants. Le petit conte yankee des marines en mission de démocratie pourrait encore prêter à rire (même la statue de la Liberté s’en tape les cuisses), s’il ne s’agissait pas de toute la mort et de la barbarie qu’ils sèment dans les territoires qu’ils envahissent.

Mais ils peuvent tout se permettre. Ils sont les maîtres et seigneurs. Et au Moyen-Orient, ils disposent d’avant-postes comme Israël. Il se trouve que plus les actions des bourreaux yankees sont sanglantes et destructrices, plus ils semblent proches d’être récompensés par des prix universels. Une autre manière de se moquer du monde. Une autre façon d’affirmer qu’ils peuvent faire, ici et là, tout ce qu’ils veulent. Personne ne les arrête ni ne les punit. Certains de ces pirates et génocidaires reçoivent même des distinctions.

Ces jours-ci, avec la remise du prix Nobel de la paix à Madame Machado, alors que les favoris semblaient être précisément deux génocidaires (Trump et Netanyahou), des souvenirs d’autres lauréats ont refait surface, des figures qui, par leurs actions, ont discrédité cette distinction. Il suffit de se rappeler un bandit comme Henry Kissinger, auteur, coauteur et complice de massacres, de coups d’État et de conspirations sanglantes en Amérique latine, en Asie et en Afrique. Tout un résumé des formes les plus ignobles de tuer des gens, de renverser des présidents, de créer des enfers où ont brûlé des millions de civils.

En 1973, alors qu’il lui restait encore des années de tueries et d’ingérences dans les affaires intérieures de multiples pays, on lui a décerné le prix Nobel de la paix. On disait alors que c’était plutôt une couronne pour la guerre, pour les attentats permanents contre la démocratie et l’autodétermination des nations. On remettait la distinction à celui qui, des années plus tard, serait qualifié par l’un de ses compatriotes, Gore Vidal, de « plus grand criminel de la planète ».

Depuis longtemps déjà, le prix Nobel de la paix est en déclin. Les naïfs du monde espéraient qu’en 2025, par un sursaut de lucidité, le comité le décernerait à quelque médecin palestinien, par exemple à Hussam Abu Safiya, enlevé par des soldats israéliens, utilisé comme « bouclier humain », torturé et enfermé dans une geôle israélienne. Non, bien sûr que non. Ce serait rêver d’un monde où les puissances dominantes ne se rangeraient pas du côté du génocide, de l’invasion, de l’anéantissement de peuples entiers, et du mépris des principes d’autodétermination et de non-ingérence dans les affaires intérieures des nations.

Décerner le prix à Madame Machado, celle-là même qui a appelé des « forces internationales » à envahir son pays, celle qui a regardé avec des yeux pleins d’admiration les manœuvres de flibustier de Trump (auquel, en vérité, peu importe qu’il y ait ou non de la démocratie au Venezuela, mais bien les richesses de ce pays), relève d’une diabolique mise en scène destinée à camoufler l’horreur d’un génocide : celui que commettent les USA et Israël dans la bande de Gaza.

Cette distinction qu’accorde Oslo s’est dévalorisée. Depuis longtemps, elle décline. Parfois, elle semble n’être qu’une moquerie envers ceux qui ont consacré leur vie et leurs principes à la défense des droits humains, de la liberté et de la coexistence pacifique.

D’un autre côté, c’est au peuple vénézuélien qu’il revient de lutter pour construire la démocratie dans son propre pays, sans intervention étrangère, sans ingérences. Mais, comme on le sait, il existe une ambition féroce de l’empire pour s’emparer des richesses stratégiques du Venezuela, et il faut y parvenir, coûte que coûte, même sous le camouflage de petits prix et de tapes amicales dans le dos de ses laquais.

Tout porte à croire que le prix Nobel de la paix, devenu une bagatelle pour des massacres, une vulgaire manipulation d’intérêts politiciens et un instrument des superpuissances, est désormais sur la corde raide. C’est comme un mauvais spectacle de cirque, avec des clowns sans humour.

La paix, comme le rappelait Kant, n’est pas un état naturel, mais un objectif à construire par la raison et le droit international, deux éléments que, curieusement, la guerre - comme c’est bizarre, comme c’est étrange - a réussi à détruire.

 Le Comité Nobel norvégien, 2025. De gauche à droite : Anne Enger, Kristian Berg Harpviken (secrétaire), Gry Larsen, Kristin Clemet, Asle Toje (vice-président) et Jørgen Watne Frydnes (président)
Six luthériens propres sur eux
 Photo Geir Anders Rybakken Ørslien

Los cachondeos del Nobel de la Paz

Reinaldo SpitalettaSombrero de Mago, El Espectador, 14-10-2025

Hay un dicho pertinaz de los emperadorcitos gringos acerca de sus famosas cruzadas, más sangrientas que las del cristianismo medieval. Proclaman, a boca llena, que su presencia, a veces con marines, con bombarderos, también, por qué no, con bombas atómicas, es parte no solo de la civilización, sino de la democracia y la libertad. Risibles tales apreciaciones cuando las pronuncian, por ejemplo, bellezas como Kissinger, Bush, Obama, Trump, que, por lo demás, tras arrasar territorios, pueden ganarse, por qué no, el Nobel de la Paz.



Paz acechante
, por
Waldo Matus 

Podría ser —la memoria es frágil— que pocos recuerden la operación Conmoción y Pavor, en 2003. Arrasaron Irak, rico en petróleo, y montaron después pingüe negocio transnacional de reconstrucción. Acabaron con bibliotecas milenarias, mataron civiles a granel, congestionaron de terror y muerte esas tierras de literaturas fascinantes y de alfombras voladoras. El cuentico yanqui de ir con sus marines como heraldos de democracia podría seguir siendo hilarante (hasta la estatua de la Libertad se carcajea), si no fuera por toda la muerte y barbarie que siembran en los territorios invadidos.

Pero todo lo pueden. Son amos y señores. Y en Medio Oriente tienen avanzadas como Israel. Sucede que cuando más sangrientas y destructivas son las acciones de los verdugos estadounidenses, más cerca están de ser galardonados con premios universales. Como otra modalidad de burlarse del mundo. Como otra cara de decir que pueden hacer, aquí y allá, lo que les venga en gana. No hay quien los detenga ni castigue. Por ahí hasta les dan a varios de esos piratas y genocidas una distinción.

Por estos días, con la concesión del Nobel de Paz a doña Corina, cuando los que más sonaban eran precisamente dos genocidas (Trump y Netanyahu), se removieron historias de premiados que fueron desprestigiando dicha presea. Era sino tener la memoria de un bandido como Kissinger, autor, coautor, cómplice de matanzas, golpes de Estado, sangrientas conspiraciones en América Latina, Asia y África. Todo un trasunto de las más envilecidas maneras de matar gente, deponer presidentes, crear infiernos en los que ardieron millones de civiles. En 1973 (cuando aún le quedaban años de matazones e intrusiones en los asuntos internos de múltiples países), le concedieron el Nobel de la Paz. Desde luego, se dijo entonces que era más un laurel para la guerra, para los atentados permanentes contra la democracia y la autodeterminación de las naciones. Se le concedía la distinción a quien, años después, sería calificado por uno de sus compatriotas, por Gore Vidal, como “el más grande criminal del planeta”.

Así que, desde hace tiempos, el Nobel de la Paz ha venido en decadencia. Se esperaba, de parte de los ilusos del mundo, que este año podrían dárselo, en una actitud incluso en contravía de la tendencia, a algún médico palestino, por ejemplo, a Hussam Abu Safiya, secuestrado por soldados israelíes, utilizado como “escudo humano”, torturado y puesto en encierro en una mazmorra de Israel. No, qué va. Eso es como pensar con el deseo en un mundo en el que los poderes predominantes están del lado del genocidio, la invasión, el arrasamiento de pueblos y del irrespeto a los principios de autodeterminación de los pueblos y no injerencia en sus asuntos internos.

Otorgárselo a la señora Machado, la misma que ha llamado a “fuerzas internacionales” a invadir su país, mejor dicho, que ha visto con ojitos de “pispura” las maniobras de filibustero de Trump (al que, en rigor, no le interesa si en Venezuela hay o no hay democracia, sino las riquezas de este país), ha sido toda una diabólica puesta en escena para camuflar el horror de un genocidio. Sí, el perpetrado por Estados Unidos e Israel en la Franja de Gaza.

Esa presea que concede Oslo se ha venido a menos. Desde tiempos viejos está en declive. En ocasiones, parece más una burla a los que han invertido su vida y principios en la defensa de los derechos humanos, de la libertad y la coexistencia pacífica. De otro lado, es al pueblo venezolano al que le corresponde luchar por la construcción de la democracia en su país, sin la intervención extranjera. Sin intromisiones. Pero, como se sabe, hay una ambición feroz del imperio sobre las riquezas estratégicas de Venezuela, y hay que ir por ellas, como sea, incluso con el camuflaje de premiecitos y palmaditas en la espalda a sus lacayos.

Todo indica que el Nobel de la Paz, convertido al parecer en una fruslería, en una manipulación vulgar de intereses politiqueros, y también, de otro lado, de manoseos de las superpotencias, está en la cuerda floja. Es como un espectáculo de circo malo, con payasos sin humor. La paz, como lo recordaba Kant, no es un estado natural, sino un objetivo que se construye con la razón y el derecho internacional, dos elementos que, cosa curiosa, la guerra ha destruido.


El Comité Noruego del Nobel, 2025. De izquierda a derecha: Anne Enger, Kristian Berg Harpviken (secretaria), Gry Larsen, Kristin Clemet, Asle Toje (vicepresidente) y Jørgen Watne Frydnes (presidente). 
Seis luteranos como se pide
 Foto Geir Anders Rybakken Ørslien

Cuando los generales se convierten en banqueros
¿ ¿La puerta giratoria entre defensa y finanzas en el complejo militar-industrial británico ha terminado su giro?

Iain Overton, AOAV, 6/10/2025
Traducido por Tlaxcala

El anuncio de que el general Sir Patrick Sanders, exjefe del Ejército británico, dirigirá la división de préstamos de defensa del banco Santander UK, puede parecer, a primera vista, un paso lógico para un hombre profundamente familiarizado con los asuntos de seguridad nacional.

Al fin y al cabo, ¿quién mejor para asesorar a un banco sobre los riesgos y oportunidades de la inversión en defensa que alguien que ha comandado tropas, presidido comités estratégicos y trabajado estrechamente con socios industriales al más alto nivel?

"Uneasy Rider": El general Sir Patrick Sanders, de 59 años, sirvió 38 años en el ejército británico, comandando operaciones en países como Irlanda del Norte, Kosovo, Bosnia, Irak y Afganistán


¿Cuándo la trayectoria profesional de los exgenerales británicos hacia los consejos de administración deja de ser una transferencia de experiencia y se convierte en un conflicto de intereses institucionalizado?
Esto sucede en medio de lo que el banco denomina una “nueva era de inversión en defensa”, mientras los Estados miembros de la OTAN aumentan su gasto militar y las restricciones ESG (ambientales, sociales y de gobernanza) sobre la financiación del armamento se relajan silenciosamente.
Es un momento de auge para el complejo militar-industrial, hasta el punto de que los generales se convierten en banqueros.
Solo falta el primer general inversor en criptomonedas.
Durante su mandato, Sanders supervisó estrategias de adquisición y asociaciones industriales por valor de miles de millones.
Las fronteras entre su servicio público anterior y sus nuevos intereses privados son, como mínimo, borrosas.
¿Su conocimiento interno de las prioridades del Ministerio de Defensa otorgará ahora a Santander una posición privilegiada en el creciente mercado de crédito de defensa?
Nuestras investigaciones muestran que el 86 % de los altos cargos de defensa británicos pasan al sector privado dentro de los dos años siguientes el fin de su cargo.
Algunos se incorporan a fabricantes, otros a consultorías y, cada vez más, a instituciones financieras ansiosas por financiar la industria de la guerra.
Cuando quienes diseñaban la política de defensa ahora se benefician de su expansión, la confianza pública se erosiona inevitablemente. El caso de Sanders sugiere una puerta giratoria tan amplia que se ha convertido en un pasillo, a través del cual la influencia fluye en ambos sentidos: los bancos obtienen prestigio y acceso; los generales, sueldos y posición; y la línea que separa la seguridad nacional del beneficio empresarial se difumina.


El general Sir Nick Carter, predecesor de Sanders como jefe del Estado Mayor, ahora asesora a empresas armamentísticas israelíes a través de Exigent Capital, una firma financiera con sede en Jerusalén.


Ben Wallace, exsecretario de Defensa de los gobiernos conservadores de Boris Johnson, Liz Truss y Rishi Shunak, es ahora consultor en el sector de seguridad saudí [se incorporó a la empresa de relaciones públicas CTRD. Antes de dedicarse a la política, fue capitán del regimiento de élite de la Guardia Escocesa, NdT].

Tales transiciones se han vuelto rutinarias, casi inadvertidas.
Pero también puede ocurrir lo contrario: cuando las instituciones financieras se apoyan en exlíderes militares para guiar sus carteras de defensa, corren el riesgo de importar un sesgo; una visión del mundo que considera que la expansión militar es inevitable y beneficiosa.
Eso puede ser rentable para los accionistas, pero es poco saludable para la supervisión democrática.
Pero el historial de ACOBA no inspira confianza: no tiene poderes coercitivos, sus directrices son a menudo ignoradas y sus deliberaciones son opacas.


En la práctica, el sistema británico confía en el honor personal y la apatía pública para controlar los conflictos de interés en los niveles más altos del poder.
Ninguno de los dos ha demostrado ser fiable.
El establecimiento de defensa, la industria armamentística y ahora las instituciones financieras están cada vez más entrelazados en una red de conveniencia mutua.
Como declaró un banquero: Pero, ¿seguridad para quién?
Para muchos civiles en Gaza, Yemen o Ucrania, la industria armamentística financiada por Gran Bretaña ha significado destrucción, no protección.
Pero revela cómo las fronteras entre servicio público y beneficio privado se están diluyendo a plena vista.
Cuando el liderazgo militar se convierte en un trampolín hacia la influencia empresarial, la autoridad moral de las fuerzas armadas, ya en entredicho, corre el riesgo de verse aún más erosionada.
Ampliar los poderes de ACOBA y exigir una transparencia total de quienes obtienen beneficios de sus antiguos cargos públicos.
¿debemos presentarlos como exgenerales… o como lobbistas financieros?

Sin embargo, detrás de este nombramiento se esconde una pregunta que muchos en la clase política británica se resisten a abordar:

Sanders, que fue jefe del Estado Mayor del Ejército entre 2022 y 2024, ayudará ahora a Santander a ampliar sus préstamos a los fabricantes de armas.

El movimiento de Santander forma parte de una tendencia más amplia: instituciones financieras que antes evitaban el sector de la defensa ahora lo están reetiquetando como un “activo esencial de seguridad”.

Pero que un exjefe del Ejército británico desempeñe un papel en este cambio financiero plantea serias preguntas éticas.

Este nombramiento también encaja en un patrón que AOAV ha documentado durante años: la erosión constante de la distancia entre el establecimiento de defensa del Reino Unido y la industria armamentística.

El problema no es solo de percepción. No es un fenómeno nuevo. Y no debería serlo.

Cuando los arquitectos de la política de defensa británica pasan a asesorar o beneficiarse de aquellos que suministran armas a países acusados de violaciones de derechos humanos, la cuestión no es si es legal, sino si es moralmente aceptable.

Los defensores de estos nombramientos sostienen que estas figuras aportan una visión experta sobre la evaluación de riesgos y adquisiciones.


El caso de Sanders será probablemente revisado por el Comité Asesor sobre Nombramientos en los Negocios (ACOBA), el organismo encargado de examinar estas transiciones.

El traslado de Sanders a Santander pone de relieve un fracaso de gobernanza más profundo: “Apoyar este sector es fundamental para la seguridad de la región.”

La puerta giratoria entre generales y banqueros no es, por sí sola, prueba de mala conducta.

Si el Reino Unido desea preservar la integridad de su política de defensa, debe imponer restricciones más estrictas a los cargos posteriores al servicio,

Hasta que eso ocurra, cada nombramiento de este tipo planteará la misma incómoda pregunta: ¿debemos presentarlos como exgenerales… o como lobbistas financieros?

Viñetas de Robert Murray, Private Eye

Quand des généraux deviennent banquiers
La porte tournante entre défense et finance dans le complexe militaro-industriel britannique a-t-elle fini son tour ?

Iain Overton, AOAV, 6/10/2025

Traduit par Tlaxcala

L’annonce selon laquelle le général Sir Patrick Sanders, ancien chef de l’armée britannique, va diriger la division de prêts à la défense de la banque Santander, pourrait, à première vue, sembler une évolution logique pour un homme rompu aux questions de sécurité nationale.
Après tout, qui mieux qu’un ancien chef d’état-major pour conseiller une banque sur les risques et opportunités des investissements dans la défense ?
Il a commandé des troupes, présidé des comités stratégiques et travaillé avec les partenaires industriels les plus influents.


"Uneasy Rider": Le général Sir Patrick Sanders,  59 ans, a servi 38 ans dans l'armée britannique, où il a commandé des opérations dans des pays comme l'Irlande du Nord, le Kosovo, la Bosnie, l'Irak et l'Afghanistan.

Pourtant, derrière cette nomination se cache une question que la classe politique britannique évite soigneusement :
à partir de quel moment la reconversion des anciens généraux dans les conseils d’administration cesse-t-elle d’être une mise à profit d’expertise et devient-elle un conflit d’intérêts institutionnalisé ?

Sanders, chef d’état-major de l’armée britannique de 2022 à 2024, va désormais aider Santander à accroître ses prêts aux fabricants d’armes.
Le tout dans un contexte de boom de l’investissement militaire, alors que les États membres de l’OTAN augmentent leurs budgets et que les restrictions ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) sur le financement de l’armement sont discrètement assouplies.

Cette initiative s’inscrit dans une tendance plus large : les institutions financières qui évitaient autrefois le secteur de la défense le requalifient désormais en « actif essentiel de sécurité ».
Le complexe militaro-industriel britannique connaît une telle effervescence que les généraux deviennent banquiers. On attend maintenant le premier général investisseur en cryptomonnaie.

Mais voir un ancien chef de l’armée jouer un rôle dans ce virage financier soulève de sérieuses questions éthiques.
Pendant son mandat, Sanders supervisait des stratégies d’approvisionnement et des partenariats industriels valant des milliards de livres.
Les frontières entre son service public passé et ses intérêts privés présents sont, pour le moins, floues.
Son accès privilégié à la compréhension des priorités du ministère de la Défense ne donnera-t-il pas à Santander un avantage démesuré dans ce marché en expansion rapide ?

Cette nomination illustre un phénomène qu’ AOAV dénonce depuis des années :
la disparition progressive de la distance entre l’establishment militaire, l’industrie de l’armement et le monde financier.
Selon nos recherches, 86 % des hauts responsables de la défense britannique rejoignent le secteur privé dans les deux ans suivant leur départ.
Certains travaillent pour des fabricants, d’autres pour des cabinets de conseil, et de plus en plus pour des institutions financières qui cherchent à financer la guerre.

Le problème n’est pas qu’une question d’image.
Quand ceux qui définissaient hier la politique de défense profitent aujourd’hui de son expansion, la confiance du public s’effrite.
La nomination de Sanders évoque une porte tournante devenue couloir, où l’influence circule librement dans les deux sens :
les banques gagnent du prestige et de l’accès, les généraux gagnent salaire et position, et la frontière entre sécurité nationale et intérêts privés devient invisible.

Ce phénomène n’est pas nouveau.


Le général Sir Nick Carter, prédécesseur de Sanders comme chef d’état-major, conseille désormais des entreprises d’armement israéliennes via la société Exigent Capital à Jérusalem.


Ben Wallace, ancien secrétaire d’État à la Défense dans les gouvernements conservateurs de Boris Johnson, Liz Truss et Rishi Shunak, occupe des fonctions de conseil dans le secteur sécuritaire saoudien [il est entré dans la société de “relations publiques” CTRD. Avant d’entrer en politique, il avait été capitaine dans le régiment d’élite des Gardes écossais, NdT].
Ces transitions sont devenues routinières, presque banales. Alors qu’elles ne devraient pas l’être.

Quand les architectes de la politique de défense britannique deviennent conseillers ou bénéficiaires de ceux qui fournissent des armes à des régimes accusés de violations des droits humains, la question n’est plus de savoir si c’est légal, mais si c’est moralement défendable.


Les défenseurs de ces nominations affirment que ces profils apportent une expertise précieuse. Mais l’inverse peut aussi être vrai : en s’appuyant sur d’anciens militaires pour définir leur stratégie de prêts, les institutions financières risquent d’importer un biais structurel, une vision du monde où l’expansion militaire est inévitable et bénéfique.
C’est peut-être rentable pour les actionnaires, mais certainement néfaste pour la transparence démocratique.

Le cas de Sanders sera probablement examiné par le Comité consultatif sur les nominations professionnelles (ACOBA), l’organe chargé de contrôler ces reconversions. Mais la réputation d’ACOBA est peu rassurante : aucun pouvoir contraignant, des recommandations souvent ignorées, un manque total de transparence.
En pratique, le Royaume-Uni compte sur l’honneur personnel et l’indifférence publique pour réguler les conflits d’intérêts au sommet.
Deux leviers pour le moins peu fiables.


La nomination de Sanders révèle ainsi une défaillance de gouvernance : les sphères militaire, industrielle et désormais financière s’entrelacent dans une toile d’intérêts communs.

Comme l’a déclaré un banquier londonien : « Soutenir ce secteur est essentiel pour la sécurité de la région. » Mais de quelle sécurité parle-t-on ? Pour de nombreux civils à Gaza, au Yémen ou en Ukraine, l’industrie de l’armement financée par la Grande-Bretagne signifie destruction, pas protection.

Cette porte tournante entre généraux et banquiers ne prouve pas nécessairement des malversations,
mais elle illustre la dissolution progressive des frontières entre service public et profit privé.
Quand le leadership militaire devient un tremplin vers l’influence financière,
l’autorité morale des forces armées, déjà fragile, en sort encore affaiblie.

Si le Royaume-Uni veut préserver l’intégrité de sa politique de défense, il doit instaurer des restrictions plus strictes aux postes post-service, renforcer les pouvoirs d’ACOBA et exiger une transparence totale sur les bénéfices tirés des fonctions publiques antérieures.

Tant que cela n’est pas fait, chaque nomination de ce type soulèvera la même question :
faut-il les présenter comme des anciens généraux… ou comme des lobbyistes financiers ?

 Dessins de Robert Murray, Private Eye

13/10/2025

Madagascar : et une révolution, une !

Fausto Giudice, 13/10/2025

Pour ceux qui comme moi ont l’âge de se souvenir des années 1960 et 1970 qu’ils ont vécu, le mouvement de révolte de la jeunesse malgache de ces dernières semaines ne pouvait qu’évoquer une autre révolte, celle de mai 1972, qui vit la chute du président hémiplégique Philibert Tsiranana, un pur produit de la Françafrique foccartienne : il avait commencé sa carrière politique, tout comme l’Ivoirien Houphouët-Boigny, sous la houlette du Parti communiste français avant de glisser, Mitterrand et Deferre puis Foccart aidant, vers une variante indocéanienne de la « social-démocratie » coloniale [très peu sociale et pas du tout démocratique]. 






Tsiranana avait hérité d’une grande île où tous les éléments nuisibles pour la Françafrique avaient été éradiqués par les massacres de 1947. Il allait tenir au pouvoir 12 ans, avant de se faire balayer par le soulèvement d'avril-mai 1972. Celui-ci était une insurrection contre la « coopération », terme élégant pour qualifier l’incroyable joug colonial français maintenu après l’indépendance dans tous les domaines, à commencer par l’enseignement à tous les niveaux, de la maternelle à l’Université. C’était en premier lieu ce contre quoi les lycéens et étudiants se révoltaient. Tout était décidé depuis Paris, jusqu’aux menus des restaurants universitaires. Formés en France ou par des Français, les fonctionnaires, militaires, gendarmes et policiers n’étaient que des photocopies des originaux de Madame la France. Ici, les CRS s’appelaient les FRS.

En apprenant que le président Rajoelina -un putschiste ensuite sanctifié par des élections -venait d’être exfiltré du pays par un avion militaire français -vers La Réunion, Dubaï, ou autre site de ses comptes bancaires -, je me suis demandé ce qui avait vraiment changé en 50 ans, si les prépondérants n’avaient pas tout simplement maintenu leur mainmise sur l’Île Rouge.

La jeunesse malgache de 2025, ce sont les petits-enfants de la jeunesse de 1972-1975. Les grands-parents étaient étudiants, lycéens, fonctionnaires, infirmières et précaires/chômeurs. Dans Antananarivo, 30 000 des 250 000 habitants étaient des « chômeurs » et ce fut leur aile marchante organisée, les ZOAM, qui assura la protection des manifestants et les ripostes musclées à la répression.

Les ZOAM, c’est tout un roman. Tsiranana s’était mis définitivement la jeunesse à dos en les traitant dans un discours de fumeurs de marie-jeanne.

Au départ, ils s’appelaient les ZWAM et on les reconnaissait à leur chapeau de cow-boy. ZWAM = Zatovo Western Andevo Malagasy, Amicale malgache des amateurs de western. Aficionados de westerns spaghetti, leur idole était Clint Eastwood dans les films de Sergio Leone. Jeunes précaires-chômeurs des bidonvilles et des quartiers pouilleux de la capitale, ils apportèrent tout leur savoir-faire de guerriers urbains se revendiquant comme descendants d’esclaves aux jeunes des classes moyennes ayant initié la révolte, peu rompus à la castagne. En mai 1972, ils changeront de nom pour devenir les ZOAM + Zatovo Orin'Asa Malagasy, Jeunes chômeurs malgaches.

Leurs descendants ne sont plus nourris par les westerns et les BD, mais par les anime japonais et tout ce qui circule sur les médias en ligne. Leur situation est tout aussi précaire, ils ont le choix entre être livreur de pizza, employé·e de call center, esclave dans une usine textile chinoise ou esclave numérique pour Google & Co.. Et leur génération est absolument majoritaire : plus de 50% des 32 millions de Malgaches ont moins de 20 ans. Un véritable dépôt de barils de poudre.

Je vous propose ci-dessous une note synthétique rédigée par nos services d'analyse, comparant le mouvement de 1972 et celui de 2025.

Madagascar — Révoltes de 1972 et 2025 : fiche comparative

Résumé 

·    Dans les deux cas, une mobilisation de jeunesse urbaine déclenche une crise de régime. Rôle déterminant de l'armée.

·    1972 bascule rapidement vers une transition militaire (Ramanantsoa). En 2025, la crise est plus longue et segmentée, désormais marquée par l'exfiltration du président Rajoelina par un avion militaire français.

·    Probable trajectoire à 6 mois : transition civile supervisée par des garants (UA/SADC), avec garanties sécuritaires et calendrier électoral court.

Chronologie éclair 2025

·    25–29 sept. : marches étudiantes/jeunesse sur fond d'eau/électricité & vie chère ; heurts et victimes ; dissolution du gouvernement.

·    Début oct. : segments militaires (dont CAPSAT) se désolidarisent ; l'exécutif parle de « tentative de coup ».

·    12–13 oct. : exfiltration de Rajoelina hors du territoire par avion militaire français ; vacance de facto et recomposition des loyautés.

Comparatif 1972 / 2025 (synthèse)

Axe

1972 (rotaka)

2025 (au 13 oct.)

Déclencheur

Universités, anti-colonialisme, contenu éducatif

Eau/électricité, coût de la vie, gouvernance

Protagonistes sociaux

Étudiants/lycéens d'Antananarivo

Jeunesse/étudiants (« Gen Z »), quartiers urbains

Pouvoir en place

Prés. Philibert Tsiranana (PSD)

Prés. Andry Rajoelina (réélu 2023)

Rôle de l'armée

Arbitre : transition sous gén. Ramanantsoa

Factions : CAPSAT & gendarmerie se désolidarisent

Moment-clé

13 mai : répression, bascule politique

12–13 oct. : exfiltration du président hors du pays

Issue/état

Transition militaire actée

Crise ouverte ; vacance de facto, issue en débat

Scénarios possibles (4ème trimestre 2025 1er trimestre 2026)

Scénario

Mécanique

Probabilité (estimation)

Transition civile supervisée

Intérim institutionnel + garanties UA/SADC + calendrier court

En hausse

Transition militaire « arbitre »

Officiers/CAPSAT imposent l'intérim élections

Moyenne–haute

Présidence en exil

Rajoelina dirige de l'étranger ; dualité de légitimités

Moyenne

Durcissement répressif

État d'urgence renforcé par loyalistes restants

Moyenne-faible

Fragmentation locale

Pouvoirs concurrents, économie de crise

Faible-moyenne

Signaux précoces à surveiller

·    Annonce d'un intérim crédible (Sénat/Conseil constitutionnel ou figure consensuelle).

·    Position officielle des segments militaires (CAPSAT, gendarmerie, état-major).

·    Médiations UA (Union Africaine)/CDAA (Communauté de développement d'Afrique australe)/FFKM (Conseil chrétien des Églises à Madagascar) et modalités d'un calendrier électoral.

·    Mesures d'urgence sur eau/électricité (plan de délestage, financement d'appoint).

·    Posture de la France et des partenaires (reconnaissance, facilitation, neutralité).

 

From one to another Nobel
Open Letter from Adolfo Pérez Esquivel to María Corina Machado

Adolfo Pérez Esquivel, Página12, 13/10 /2025
Translated by Tlaxcala

 


I send you the greeting of Peace and Good, so greatly needed by humanity and by peoples living amid poverty, conflict, war, and hunger.
This open letter is meant to express and share a few reflections.

I was surprised by your designation as Nobel Peace Prize laureate, awarded by the Nobel Committee. It brought back memories of the struggles against dictatorships across our continent and in my own country — the military dictatorships we endured from 1976 to 1983. We resisted prisons, torture, and exile, with thousands of disappeared persons, abducted children, and the death flights, of which I am a survivor.

In 1980, the Nobel Committee awarded me the Nobel Peace Prize. Forty-five years have passed, and we continue working in service of the poorest, alongside the peoples of Latin America. In their name, I accepted that high distinction — not for the prize itself, but for the commitment shared with the peoples who struggle and hope to build a new dawn.
Peace is built day by day, and we must be consistent between what we say and what we do.

At 94, I remain a student of life, and your social and political stances concern me. Therefore, I send you these reflections.

The Venezuelan government is a democracy with its lights and shadows. Hugo Chávez charted the path of freedom and sovereignty for his people and fought for continental unity — a reawakening of the Great Homeland. The United States attacked him constantly: it cannot allow any country in the Americas to escape its orbit and colonial dependence. It still views Latin America as its “backyard.”
The U.S. blockade against Cuba, lasting over 60 years, is an attack on freedom and the rights of peoples. The Cuban people’s resistance stands as a lesson in dignity and strength.

I am astonished by how tightly you cling to the United States: you must know that it has no allies or friends — only interests.
The dictatorships imposed in Latin America were orchestrated to serve its aims of domination, destroying the social, cultural, and political life of peoples striving for freedom and self-determination.
We, the peoples, resist and fight for our right to be free and sovereign, and not colonies of the United States.

The government of Nicolás Maduro lives under the constant threat of the United States and its blockade — one need only recall the U.S. naval forces stationed in the Caribbean and the danger of invasion.
You have not uttered a word, nor condemned this interference by a great power against Venezuela. Yet the Venezuelan people are ready to face the threat.

Corina, I ask you: why did you call on the United States to invade Venezuela?
Upon learning of your Nobel Peace Prize, you dedicated it to Trump — the aggressor of your own country, the man who lies and accuses Venezuela of being a narco-state, a falsehood akin to George Bush’s claim that Saddam Hussein possessed “weapons of mass destruction.”
That was the pretext to invade Iraq, plunder it, and cause thousands of deaths among women and children.
I was in Baghdad at the end of the war, in a children’s hospital, and saw with my own eyes the destruction and death caused by those who proclaim themselves defenders of freedom.
The worst form of violence is the lie.

Do not forget, Corina, that Panama was invaded by the United States, causing death and destruction to capture a former ally, General Noriega.
The invasion left 1,200 dead in Los Chorrillos.
Today, the U.S. once again seeks to reclaim control of the Panama Canal.
It is a long list of U.S. interventions and suffering inflicted upon Latin America and the world.
The veins of Latin America remain open, as Eduardo Galeano once wrote.

I am troubled that you dedicated your Nobel not to your people, but to the aggressor of Venezuela.
I believe, Corina, you must reflect and understand where you stand — whether you are merely another piece in the U.S. colonial system, submissive to its interests of domination, which can never serve the good of your people.
As an opponent of the Maduro government, your stances and choices create much uncertainty, especially when you call for a foreign invasion of your homeland.

Remember that building peace requires great strength and courage for the good of your people — a people I know and deeply love.
Where once there were shantytowns clinging to the hills, surviving in poverty and destitution, there are now decent homes, healthcare, education, and culture.
The dignity of a people cannot be bought or sold.

Corina, as the poet* says:

“Traveler, there is no path; the path is made by walking.”

You now have the chance to work for your people and build peace, not provoke greater violence.
One evil cannot be cured by a greater evil: we would have two evils and never a solution.

Open your mind and your heart to dialogue, to meeting your people.
Empty the jug of violence and build peace and unity among your people, so that the light of freedom and equality may finally enter.

*Another Machado, named Antonio (no relation to Mrs. María Corina) [Transl. n.]