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05/11/2022

ANNAMARIA RIVERA
Italie : le racisme d’en haut ne date pas d’hier
La “gauche” a bien préparé le terrain à la camerata* Melino, pardon, Meloni

 Annamaria Rivera, Comune-Info, 1/11/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Dès sa prise de fonction, la nouvelle Première ministre italienne a ouvertement montré à quel point l'inspiration et les actions du gouvernement le plus à droite de l'histoire de la République italienne seront fascistoïdes.

C’est une tautologie de relever que l'une des cibles du nouveau gouvernement seront les personnes immigré·es et réfugié·es, même les plus “respectables” : il suffit de dire que lors des réponses à la Chambre des députés pour le vote de confiance à son gouvernement, Giorgia Meloni a tutoyé le seul député “de couleur” (comme elle dirait), à savoir Aboubakar Soumahoro, de la Gauche italienne et des Verts, en plus de s’être trompée sur son nom [« Souhomoro…Soumahoro, excuse-moi… »].

La gauche, en particulier la gauche “modérée”, porte une responsabilité considérable dans l'impensable victoire de l'extrême droite, pour de nombreuses raisons et non des moindres, celle d'avoir négligé, minimisé, banalisé l'importance décisive de la lutte contre le racisme et pour l'intégration et les droits des personnes immigrées et réfugiées. Et cela même de la part de certain·es chercheurs·se et intellectuel·les de gauche, qui critiquent souvent les politiques d'immigration et d'asile les plus infâmes, mais au nom de la raison utilitaire et selon une vision instrumentale : l'accueil des personnes immigrées et réfugiées servirait à contrecarrer le déclin démographique, et donc le déclin de l'Italie, et à sauver des secteurs fondamentaux de notre économie qui dépendent du travail, souvent servile, de la main-d'œuvre immigrée.


Ces arguments - qui, à première vue, semblent réalistes et convaincants face à ceux qui craignent l’“invasion” - risquent en réalité, même si c’est involontaire, de confirmer le statu quo de l'exploitation extrême et d'évoquer le stéréotype des femmes immigrées et réfugiées comme “incubatrices de la patrie” des autres. C'est également la raison pour laquelle l'émergence d'un mouvement indépendant et autoorganisé de militant·es immigr·ées et réfugié·es doit être encouragée par tous les moyens possibles.

Déjà dans mon essai de 2009 (Regole e roghi. Metamorfosi del razzismo, Dedalo, p. 216 p), j’avais, avec une certaine ironie, défini racisme démocratique ou respectable ce racisme sournois et hypocrite qui surgit des entrailles de la zone autrefois connue comme étant de gauche. Et ce également pour le distinguer du racisme institutionnel et du racisme “spontané”, déclaré et décomplexé.

Il est absolument évident que, surtout avec le gouvernement Conte I, dit “facho-étoilé”, la dialectique perverse entre le racisme institutionnel et le racisme “populaire”, sur laquelle j'écris depuis de nombreuses années, a atteint son apogée. Et ce, non seulement en raison d'une production législative elle-même ouvertement sécuritaire et discriminatoire, qui ne fait que titiller, légitimer et alimenter le sens commun d’intolérance et les sentiments diffus d'hostilité généralisés envers les autres. Mais aussi grâce à l'utilisation d'une stratégie de propagande bien pensée et bien payée, qui est désormais devenue, comme dans les régimes totalitaires, un instrument de gouvernement et, en même temps, de manipulation des masses : les deux dimensions deviennent de plus en plus interchangeables, voire coïncident, allant de pair avec la violation constante du principe démocratique de la séparation des pouvoirs.


 C'est aussi en raison de cette dialectique que les actes de racisme “spontané”, si l'on peut dire, se multiplient selon le mécanisme bien connu par lequel la frustration, le ressentiment et la rancœur (qui sont souvent un effet des conditions sociales vécues) sont dirigés vers le bouc émissaire du moment, généralement le plus méprisé, le plus vulnérable et le plus altérisé. Cela a favorisé le développement du racisme, même dans les régions traditionnellement “rouges”.

Néanmoins, la pente suivie, dangereuse pour la survie de la démocratie elle-même, est aussi le résultat - qui aujourd'hui sera sûrement poussé à l'extrême par le gouvernement Meloni - du travail des gouvernements passés, pas seulement du plus récent et pas seulement de centre-droit. Je rappelle que c'est sous le premier gouvernement Prodi qu'a eu lieu, le 28 mars 1997, le massacre d'une centaine de réfugiés albanais de Katër i Radës, pour la plupart des femmes et des enfants, tou·tes fuyant la guerre civile. Comme on le sait, le petit patrouilleur, débordant de réfugié·es, a été éperonné dans le canal d'Otrante par la corvette Sibilla de la Marine, qui, sur ordre d’en haut, devait les empêcher de débarquer. Le gouvernement, en effet, avec le rôle décisif de Giorgio Napolitano, avait décrété, en accord avec l'Albanie, un blocus naval consistant en une barrière de navires de guerre, sévèrement critiqué par le HCR comme illégal.


C'est sous le même gouvernement Prodi qu'a été approuvée la loi dite Turco-Napolitano, n° 40 du 6 mars 1998, qui, entre autres, a institué pour la première fois, avec les Centres de séjour temporaire et d'assistance, la détention administrative [dite “rétention”] en tant qu’instrument ordinaire, non validé par l'autorité judiciaire. Ce type de détention est réservé aux immigrées “irrégulières” soumises à des mesures d'expulsion ou de rapatriement forcé. Dès leur inauguration, les CPTA (généralement appelés CPT et aujourd'hui CIE) ont causé jusqu'à huit décès, ce qui en dit long sur l’assistance dont bénéficiaient les personnes “retenues”.

En effet, la tendance prévaut, dans la conscience collective comme chez de nombreux locuteurs médiatiques (même ceux qui se considèrent comme antiracistes), à évacuer les antécédents, le développement, le caractère cyclique et, en tout cas, la longue durée du néo-racisme à l'italienne.


Ce n'est certainement pas la première fois que le racisme verbal le plus grossièrement biologisant s'exprime dans notre pays. Pour ne pas remonter trop loin dans le temps, on peut citer l'année 2013, qui a vu un retour déconcertant de la “race”, évoquée par des topoï semblables à ceux que l'on pouvait trouver dans les publications populaires au service de la propagande fasciste : en premier lieu, le motif récurrent assimilant les “nègres” à des singes, avec le corollaire typique des bananes.

Au cours de cette année, les moqueries et les insultes se sont intensifiées, visant les footballeurs d'origine subsaharienne ou étrangère, ou “seulement” méridionaux, mais surtout la ministre de l'Intégration de l'époque, Cécile Kyenge, objet d'attaques racistes incessantes. L'une des plus graves, également en raison de la position institutionnelle occupée par l'orateur, a été celle prononcée par Roberto Calderoli qui, en tant que vice-président du Sénat, a osé comparer la ministre à un orang-outan.


Vingt ans après la loi Turco-Napolitano, c'est de même un gouvernement dit de centre-gauche qui a voté les deux lois d'avril 2017, toutes deux unies par une idéologie sécuritaire et répressive : la loi 46, dite Minniti-Orlando (« Dispositions urgentes pour l'accélération des procédures en matière de protection internationale, ainsi que pour la lutte contre l'immigration illégale ») et la loi 48, dite Minniti (« Dispositions urgentes sur la sécurité dans les villes »). Ce sont ces deux mesures législatives qui ont constitué le modèle de la loi n° 132, du 1er décembre 2018, qui, fermement souhaitée par Salvini, chevauche, et ce n'est pas un hasard, les questions de sécurité et d'immigration, exaspérant le caractère répressif-raciste-sécuritaire, au point d'être clairement inconstitutionnelle, de l'avis de pas mal de juristes.

Et c'est sous le même gouvernement Gentiloni que, principalement sur ordre du ministre de l'Intérieur, des accords ont été conclus avec des bandes criminelles libyennes et que “Désert rouge” a été inauguré, une opération militaire au Niger visant à bloquer l'afflux de réfugiés du sud vers les côtes libyennes. Au cours de cette même législature, le processus de délégitimation des ONG s'est intensifié, également de la part du gouvernement : le Code de conduite adopté par Minniti, avec ses contre-mesures et ses sanctions, les a en effet empêchées d'effectuer des opérations de recherche et de sauvetage, transférées formellement aux tristement célèbres garde-côtes libyens.

Quant aux agressions racistes, allant jusqu'au meurtre et au massacre, contre des personnes immigré·es, réfugié·es et/ou altérisé·es, elles ponctuent inexorablement au moins les quarante dernières années de l'histoire italienne. C'est dans la nuit du 21 au 22 mai 1979 à Rome qu'Ahmed Ali Giama, un citoyen somalien de 35 ans - ancien étudiant en droit à l'université de Kiev, puis réfugié politique ayant fui la féroce dictature de Mohammed Siad Barre - a été brûlé vif par quatre jeunes Italiens alors qu'il dormait sous le portique de Via della Pace, près de Piazza Navona. Malgré les témoignages détaillés de sept personnes, qui sont sorties d'un restaurant voisin, les quatre accusés furent acquittés par la Cour de cassation.


Pour citer un autre cas glaçant, le 9 juillet 1985, à Udine, Giacomo Valent, seize ans, a été tué de soixante-trois coups de couteau par deux de ses amis de lycée, âgés de quatorze et seize ans, qui étaient ouvertement néonazis. Fils d'un fonctionnaire d'ambassade et d'une princesse somalienne, Giacomo était constamment traité de “sale nègre” en raison de ses cheveux frisés et de sa couleur de peau ambrée, mais aussi de ses opinions de gauche. Cette affaire et d'autres montrent que la discrimination et le racisme (pouvant aller jusqu'au meurtre) n'épargnent même pas les personnes parfaitement intégrées.

Le meurtre de Jerry Masslo, un réfugié politique sud-africain contraint de travailler dans des conditions proches de l'esclavage pour récolter des tomates dans la campagne de Villa Literno afin de survivre, est plus connu. Ce meurtre, perpétré le 20 septembre 1989 par une bande de jeunes braqueurs, racistes de surcroît, a été suivi de la première grève des migrants contre le caporalato [système des caporali, recruteurs mafieux de main d’œuvre faisant office de contremaîtres et garde-chiourme, NdT] et d'une manifestation nationale qui a rassemblé au moins deux cent mille personnes, inaugurant le mouvement antiraciste italien.

Aujourd'hui encore, on continue à parler paresseusement de “guerre entre les pauvres”, alors que la dialectique perverse entre racisme institutionnel et racisme “populaire”, souvent impulsé par des formations néo-fascistes et/ou la Ligue du Nord, semble avoir atteint son paroxysme. 

Sans parler de la tendance à ramener un phénomène complexe comme le racisme à la "haine" ou à la "peur" et de la réitération de slogans impolitiques et moralisateurs comme l'obsessionnel "Restons humains" : aussi anthropocentrique qu'impolitique, comme je l'ai écrit à plusieurs reprises.

Il faut espérer que la gauche comprendra le caractère absolument central de la lutte contre le racisme et pour les droits des personnes migrantes et réfugiées, en pratiquant un antiracisme solidaire et radical, et en s'opposant ainsi de manière décisive au gouvernement le plus à droite de l'histoire de la République.

NdT

*Camerata : terme correspondant à l’allemand Kamerad, équivalent fasciste et nazi du terme français Camarade (ital. Compagno, all. Genosse), utilisé, lui, uniquement dans les milieux de gauche, à l’exception du PPF, le parti fasciste fondé par l’ancien communiste Jacques Doriot en 1936.

Images : affiches de la campagne contre les clichés racistes de la Fondation contre le racisme et l’antisémitisme (GRA) lancée en 2003 en Suisse, qui se voulait « délibérément choquante et déstabilisante » et « entendait faire réagir le public ». Elle suscita des controverses, ce qui était le but recherché.

 

04/11/2022

SERGIO FERRARI
La tumba mediterránea
Miles de migrantes indocumentados mueren cada año

Sergio Ferrari4/11/2022

En solo siete años, desde 2014 hasta fines de 2021, se calcula que 29.000 inmigrantes “ilegales” o indocumentados murieron en su intento de entrar en el acorazado europeo mediante el cruce del Mar Mediterráneo. Cifras que podrían ser mucho más altas, ya que centenares (incluso miles) de todas las edades perecen en embarcaciones improvisadas sin que nadie los contabilice. Y muchos otros tampoco aparecen en los cálculos oficiales debido a que sus muertes se relacionan con deportaciones obligadas, en general forzadas y, muy a menudo violentas.

 La Organización Internacional para las Migraciones, OIM, logró documentar desde principios de 2021 hasta octubre de ese mismo año unas 5.684 muertes en las rutas migratorias hacia Europa y dentro del continente.

Documentar la barbarie con dignidad

Julia Black, una de las autoras de un informe elaborado por el Proyecto Migrantes Desaparecidos de dicha organización, publicado la última semana de octubre, señala que «esta continuidad de muertes constituye otro sombrío recordatorio de que se necesitan, desesperadamente, más vías legales y seguras para la migración».

Según dicho informe, en ese mismo período se registraron 2.836 muertes y desapariciones en la ruta del Mediterráneo Central, un aumento significativo en comparación con los 2.262 casos entre 2019 y 2020. Son particularmente alarmantes las 1.532 muertes en la ruta desde África Occidental hacia las Islas Canarias (España): el número más alto desde 2014, cuando la OIM inició el registro.

Los investigadores que elaboraron el informe señalan que, muy probablemente, los datos sobre estas rutas mediterráneas son incompletos debido a las complicaciones para verificar los denominados «naufragios invisibles», es decir, de embarcaciones que se pierden en el mar sin que nadie se entere y, en consecuencia, sin ninguna búsqueda ni rescate.

El Proyecto Migrantes Desaparecidos documenta casos de personas —incluso refugiados y solicitantes de asilo—, que han fallecido en zonas de frontera o en su trayecto hacia un destino fuera de sus respectivos países de origen. Este proyecto se puso en marcha para dar respuesta a conteos discrepantes sobre el número de fallecidos (o desaparecidos) en las más variadas rutas migratorias de todo el mundo, y particularmente, después del naufragio ocurrido en octubre de 2013, cuando 368 personas perecieron cerca de la isla italiana de Lampedusa.

El Proyecto es, actualmente, autoridad indiscutida en su género ya que cuenta con la única base de datos de libre acceso sobre personas fallecidas a nivel internacional en trayectos migratorios. Además publica reportes, resúmenes e infografías que analizan en cada región geográfica los riesgos en las rutas de migración irregular, cuestiones vinculadas a la identificación de migrantes desaparecidos, información sobre los mecanismos de asistencia para las familias de los migrantes desaparecidos y la metodología para la recopilación de datos. Se propone convertirse en un punto de referencia y consulta en aquellos casos en que se busca a migrantes de los que no se tiene ninguna información actualizada.

Desde 2014, más de 50.000 personas han muerto durante viajes migratorios inseguros. Como señala su sitio web, “los datos recopilados por el Proyecto son testimonio de uno de los fracasos políticos más estrepitosos de los tiempos actuales. La OIM reclama que inmediatamente se provean rutas para la migración seguras, humanas y legales”. Los responsables del Proyecto sostienen que, de contarse con mejores datos, sería posible formular políticas que pongan fin a esta tragedia.


Más allá del Mediterráneo

5 preguntas a Kadda Benkhira, poeta argelino

 Milena Rampoldi y Fausto Giudice, 4/8/2022
Traducido por María Piedad Ossaba y Rafael Tobar

Original : 5 questions à Kadda Benkhira, poète algérien
Italiano:
5 domande a Kadda Benkhira, poeta algerino

Acabamos de publicar Humeurs/Humores, una colección bilingüe (francés/español) de poemas de Kadda Benkhira, un poeta argelino que respondió amablemente a nuestras preguntas.

 

¿Cómo te convertiste en poeta?

Creo que mi gusto por la poesía comenzó en la escuela primaria. El maestro, para familiarizarnos con la lengua francesa, nos daba a menudo un poema para que lo aprendiéramos de memoria y lo recitáramos al día siguiente en clase.

Pero no sólo se trata de recitar. También me había acostumbrado a frecuentar cada fin de semana un gran zoco en el que no sólo había productos para la venta, sino también flautistas  que hacían bailar a las serpientes.... cantantes… A mí, lo que me interesaba de este lugar tan animado era sobre todo aquellas personas que tenía su forma de contar historias sobre diversos temas y hacerlas muy entrañables, también tenían eran maestros en el arte de recitar poemas en un lenguaje popular muy límpido... Más tarde, empecé a escuchar poesía árabe clásica y a leer en francés todos los libros) de poesía que encontraba... Así es como me convertí en poeta.

¿El hecho de escribir en francés –“un botín de guerra” según Kateb Yacine- ¿no disminuye el alcance de tus poemas en Argelia?

Sí, disminuye el alcance de mis poemas en Argelia, pero quisiera señalar que este “botín de guerra, independientemente de su importancia, acabará desapareciendo. Además, no pasa un día sin que la lengua de mis antepasados gane un pedacito de terreno que le ha sido confiscado. Silenciosamente, volverá a ocupar su lugar de la forma más natural posible). ¡Y qué hay más hermoso, más noble, más natural para un pueblo que recuperar su lengua!

En la Constitución argelina, el árabe es, desde la independencia, decretada lengua nacional y oficial. En cuanto al francés, es considerado como una lengua extranjera.

No hay que olvidar que la barbarie colonial francesa ha permanecido en Argelia durante 132 años. No se puede eliminar esta lengua de nuestra patria como se saca un clavo viejo de una tabla, se necesita tiempo y mucha paciencia...

Hoy en día, la mayoría de los jóvenes argelinos y argelinas prefieren el inglés al francés.

Además, el próximo año escolar, el gobierno ha decidido empezar la enseñanza del inglés desde la escuela primaria... “Si el francés, decía el presidente, es un botín de guerra, el inglés es una lengua internacional. está muy claro...

También he notado que los jóvenes comienzan a interesarse seriamente por otros idiomas como el español, el italiano, el turco...

Por mi parte, seguiré utilizando el francés, que es (como todos los demás idiomas) un medio de comunicación. Y estoy seguro de que mis poemas se traducirán al árabe. Así, encontraré a los lectores que el “botín de guerra me hizo perder...

Verás, un escritor (o un poeta), aunque su patria nunca ha sido colonizada, su lengua solo puede hacerlo conocer en su país. Si quiere cruzar sus fronteras, si quiere hacerse famoso, debe absolutamente recurrir a esta honorable dama llamada: TRADUCCIÓN...

03/11/2022

GIDEON LEVY
Après avoir soutenu l'occupation des territoires palestiniens pendant 55 [ou 75] ans, à quoi donc la “gauche” israélienne s’attendait-elle exactement ?

Gideon Levy, Haaretz, 3/11/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

AMIR BARNEA
Le pétrole norvégien, gros mensonge d’État

Amir Barnea, Haaretz, 20/10/2022
Traduit par Jacques Boutard, édité par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Né à Tel Aviv, Amir Barnea est professeur agrégé de finance à HEC Montréal depuis 2011 et chroniqueur indépendant pour le Toronto Star et Haaretz. Il a obtenu son doctorat de l'Université de Colomvie britannique en 2005 avec une thèse sur la responsabilité sociale des entreprises. @abarnea1

L’industrie pétrolière et gazière de la Norvège a généré une richesse inimaginable pour sa population. Est-ce vraiment de l’argent sale ? Et que peut en apprendre Israël ?

 OSLO - Au n°2, Bankplassen (Place de la Banque), dans le centre de la ville, deux portes métalliques de couleur cuivre s'ouvrent sur un hall qui n'a manifestement pas été rénové depuis des décennies. Des pétunias en pot, à la réception un employé courtois   Pas le moindre soupçon de la puissance économique gigantesque que recèle ce vieux bâtiment.

Mais je sais qu'en cet endroit même, peut-être à l’étage au-dessus, se cache une richesse d'une taille inconcevable. Pas moins d’1,4 billion - soit mille quatre cents milliards - de dollars sont gérés à partir d’ici.

Ceci est le siège [de la Banque de Norvège et] du fonds pétrolier norvégien, officiellement connu sous le nom de Government Pension Fund Global, qui est devenu, sur une période relativement courte – environ 25 ans -- le plus grand organisme d'investissement public du monde. La Norvège a une population assez faible de quelque 5,5 millions d'habitants, alors que celle des USA est 60 fois supérieure, mais le fonds norvégien représente trois fois la valeur de CalPERS (California Public Employees' Retirement System), le plus grand fonds de pension des USA.

Une plate-forme gazière offshore appartenant à une entreprise publique norvégienne. « Nous sommes tellement heureux d'avoir ce fonds pétrolier - d'où vient l'argent, personne ne veut en parler », dit la professeure Marianne Takle. Photo : Olaf Nagelhus / Equinor

La puissance du fonds norvégien peut être mieux décrite par le fait stupéfiant que cet organisme, qui investit la majeure partie de son argent dans les actions de quelque 9 000 entreprises publiques de 70 pays différents, détient près de 1,5 % des sociétés cotées dans le monde

Pour comprendre l'origine de ces incroyables richesses, il faut remonter à la veille de Noël 1969. Après trois ans d'exploration, la Norvège découvre Ekofisk, la plus grande réserve maritime de pétrole et de gaz jamais trouvée - et pour la plus grande chance du pays, ce gisement est situé juste à la limite intérieure de ses eaux territoriales, en mer du Nord. S'il se trouvait à quelques dizaines de kilomètres de là, dans quelque direction que ce soit, il appartiendrait à la Grande-Bretagne, au Danemark, à la Hollande ou à l'Allemagne. Un peu de chance n'a jamais fait de mal à personne.

Le gouvernement norvégien en 2021.
Photo : HAAKON MOSVOLD LARSEN / NTB / AF

La production de pétrole a commencé dans les années 1970. Au départ, les bénéfices étaient directement transférés à l'État, mais lorsque d'autres gisements ont été découverts, il a été décidé de créer un organisme chargé de gérer l'argent généré par les revenus de la production de pétrole et de gaz, ainsi que par les royalties et taxes qui y sont associées. Les gestionnaires du fonds ont reçu le mandat d'adopter une vision à long terme en termes d'investissements, afin de percevoir les bénéfices les plus élevés pour un risque raisonnable. Ainsi, la génération actuelle et celles à venir pourront bénéficier des richesses pétrolières de la Norvège. Le fonds souverain d'Israël, appelé “Israeli Citizens' Fund”, qui a commencé à fonctionner en juin, a été créé sur la base de principes similaires.

L'argent a commencé à affluer dans le fonds norvégien en 1996 et a été initialement investi dans de solides obligations d'État. Depuis lors, cependant, dans un processus qui a mis des années à évoluer, une proportion croissante a été canalisée vers des actions de sociétés cotées en bourse, et a généré un rendement confortable. Une structure de gestion légère, des salaires nettement inférieurs à ceux habituellement pratiqués dans ce domaine et une transparence totale ont également contribué à l'énorme succès du fonds.

Les pays scandinaves sont souvent considérés comme un seul bloc, et ils ont en effet beaucoup en commun. Mais lorsqu'il s'agit de richesse, et depuis que l'argent des plateformes pétrolières a commencé à affluer, la Norvège a fait un bond en avant, laissant ses sœurs nordiques derrière elle. Selon les dernières prévisions du Fonds monétaire international, à la fin de 2022, le produit intérieur brut par habitant en Norvège s'élèvera à 99 000 dollars, soit près de 50 % de plus qu'au Danemark et 70 % de plus qu'en Suède. En fait, si l'on ne tient pas compte de petits pays comme le Liechtenstein, Monaco et le Luxembourg, la Norvège est aujourd'hui l'un des trois pays les plus riches du monde, en termes de PIB par habitant (les autres sont la Suisse et l'Irlande, qui a attiré des entreprises internationales grâce à des incitations fiscales, même si une grande partie des richesses qui en résultent ne restent pas dans le pays).

L'une des clauses concernant le Government Pension Fund Global, alias le fonds pétrolier, stipule que 3 % de sa valeur totale sont transférés annuellement au budget de l'État. En 2021, ce montant ne représentait pas moins de 20 % de ce budget. Les effets de la manne pétrolière et gazière sont partout perceptibles dans le pays.

Vous pensez que l'opéra de Sydney est luxueux ? Si vous voulez vraiment voir du luxe, montez sur le toit du grandiose opéra d'Oslo. Non loin de là, un immense musée consacré à la vie et à l'œuvre du peintre Edvard Munch a ouvert il y a un an. L'expression du visage du sujet de l'œuvre emblématique de Munch, Le Cri, traduit le choc que représente le coût de la construction du musée : 314 millions de dollars. Et comme si cela ne suffisait pas, à quelques minutes de là se trouve la nouvelle bibliothèque municipale de la capitale – construite pour un montant d'environ 250 millions de dollars –  qui a ouvert ses portes il y a deux ans. La structure est d'une beauté à couper le souffle ; son rez-de-chaussée est entièrement transparent. Selon l'un des directeurs de la bibliothèque, « en plus des 450 000 livres, vous pouvez y regarder des films avec vos amis, enregistrer des podcasts, apprendre à jouer du piano, coudre une robe et utiliser les imprimantes 3D, ou simplement jouir de la vue sur le fjord d'Oslo et de l'architecture. »

02/11/2022

LUIS E. SABINI FERNÁNDEZ
Uruguay: una política ambiental al servicio del progreso...empresarial

Luis E. Sabini Fernández, 2/11/2022

Nos hemos enterado que más rápido que corriendo el MGAP (Ministerio de Ganadería, Agricultura y Pesca) autorizó la mayor parte de los agrotóxicos que emplea habitualmente UPM en su vivero en Paysandú, cerca de Guichón.

 Como expresaran vecinos de la asociación vecinal de la zona, ellos tardaron diez años en sensibilizar a alguna autoridad pública con el reclamo ante la contaminación de sus suelos producidos por agrotóxicos, que se sospechaba provenían de viveros forestales.

Pero cuando las instancias públicas empiezan a actuar contra los venenos usados por la agroindustria, la Dirección de Servicios Forestales del Ministerio de Agricultura logra “en tiempo récord” la habilitación de dichos tóxicos a pedido del lobby forestal (institucionalmente, la SPF), y consecuentemente amplía el uso de tales agrotóxicos.

Observemos el mecanismo marxista aplicado al episodio. Como se sabe, Groucho Marx hizo célebre aquel aforismo: “Tengo mis principios, pero si no son de su agrado, tengo otros.”

La Sociedad de Productores Forestales (SPF) goza de excelente buena conciencia. Declaran, por ejemplo: “Conservamos el suelo, el agua y la biodiversidad en áreas forestales.” Maravilla biológica puesto que se conserva todo “eso” en un monocultivo. Caso único, suponemos, en el mundo.

Declaran además que: “llevamos una gestión forestal sustentable”. No sabemos bien a qué se refiere; a si cuando se termine con el cultivo forestal y se hayan cosechado los troncos, se liberará al suelo de los tocones y sus raíces para devolverle posibilidades de recuperación biótica, de pasturas, o si cuidan los equilibrios hídricos de las plantaciones.

De todos modos, nadie se vaya a creer que los grandes consorcios transnacionales gozan de impunidad en el país. Por ejemplo, UPM, la del vivero en Guichón fue multada por el Ministerio de Ambiente en un millón de pesos [=24.000€].

Este episodio, que nos tememos haya hecho temblar las finanzas de UPM en el mundo entero, clarifica el comportamiento ambiental de nuestro país.

Mediante el pago de multas, cualquier empresa transnacional no necesita modificar sus procesos de transformación de la materia, sean estos contaminantes o no. Sencillamente, se paga la multa para seguir contaminando libremente (el único límite a semejante estrategia podría provenir de que el monto de la multa fuera mayor que el costo de modificación del proceso industrial o agroindustrial en entredicho).

Pero por ese lado, las empresas pueden estar tranquilas: las multas son mucho menores, muchísimos menores, que dichos costos.

Y así todos contentos. Salvo, apenas, la gente y el suelo del planeta.


 

01/11/2022

GIDEON LEVY
Comment les liens entre Juifs mizrahis* et Arabes ont été détruits, avec l'aide des Israéliens ashkénazes
Note de lecture d'un livre de Hillel Cohen

Gideon Levy, Haaretz, 31/10/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

*Mizrahi (plur.mizrahim, du radical verbal zarach, se lever, briller] signifie Oriental en hébreu israélien moderne et désigne, dans le langage israélien courant, paradoxalement aussi bien les Juifs originaires du Machreq (Levant), que ceux du Maghreb (Couchant, donc Occident). Utilisé par les Ashkenazim (« Allemands », en fait Juifs originaires d’Europe centrale et orientale), il en est venu à désigner tous les Juifs originaires des mondes arabo-berbère et andalou (sépharades), persan, kurde, turcique, indien et chinois, en un mot extra-européens. Nous avons donc conservé le terme en français, sans chercher à le traduire. [NdT]

Le chercheur Hillel Cohen se lance dans un voyage vers les racines du conflit israélo-palestinien, offrant dans son nouveau livre une mise en accusation brutale des élites racistes du pays

Image : Yael Bogen

Il y a une histoire qui a apparemment échappé à la mémoire de l'auteur de cet important nouveau livre, sur les relations entre les Juifs mizrahis et les Arabes depuis l'avènement du sionisme.

Au moment où je lisais « Son’im : Sifur ‘Ahabah » [“Haïsseurs : une histoire d’amour”] du professeur Hillel Cohen, on présentait à la télévision le beau et triste documentaire « Savoy » du cinéaste israélien Zohar Wagner, sur l'acte de terreur qui a eu lieu à l'hôtel de Tel Aviv portant ce nom en 1975.

L'héroïne du film est Kochava Levi, une femme mizrahie  qui faisait partie des otages pris par des membres de l'Organisation de libération de la Palestine ; l'incident s'est terminé par la mort de 11 Israéliens et de sept des huit ravisseurs. Levi a courageusement mené les négociations avec eux, et les a même brièvement félicités après qu’ils avaient été tués par les forces d'élite israéliennes, citant leur traitement relativement bon de leurs victimes.

Lorsque les Ashkénazes se lancent dans des actes meurtriers de vengeance et de représailles contre les Arabes, personne ne les classe selon leur origine ethnique.

L'histoire de Levi est un raccourci de l'histoire de ce livre de Cohen – un spécialiste des études islamiques et du Moyen-Orient. De la façon dont une femme d'origine mizrahie (c'est-à-dire d'origine moyen-orientale ou nord-africaine) a su parler avec les ravisseurs dans leur propre langue grâce à son éducation et a fait appel à leurs cœurs en s'inspirant de ses propres antécédents familiaux dans un pays arabe, mais dont le caractère a été intentionnellement calomnié et noirci, la rendant pratiquement oubliée et invisible.

Si elle avait été un combattant ashkénaze masculin, elle aurait probablement acquis une renommée mondiale. Mais Lévi était une femme d'origine kurdo-yéménite, et il a donc été décrété que son destin serait celui de l'outrage – certains l'ont même qualifiée de prostituée – et d'être effacée de la mémoire collective.

Le professeur Hillel Cohen, auteur de "Haters : A Love Story". Tout remonte aux tout débuts du sionisme, écrit-il. Le racisme, la condescendance et le nationalisme extrême. Photo : Emil Salman

Elle a essayé d'être un pont entre les Juifs et les Arabes, tout comme il y avait ceux avant elle qui avaient rêvé de telles choses pendant les premières années du mouvement sioniste, mais les Juifs en avaient par la suite eu marre de ce pont et ne l'avaient pas poursuivi. La voix de Levi a été étouffée parce qu'elle avait quelque chose de bien à dire sur ses ravisseurs palestiniens. Sa voix était une voix mizrahie, le genre qui a été exploité, déformé et étouffé, exactement comme d'autres voix mizrahies dans le même contexte, ce qui est discuté dans le nouveau livre du professeur Cohen.

L'alliance fugitive entre Levi et ses ravisseurs était dans une certaine mesure une alliance des opprimés ; l'auteur s'engage dans cette idée importante, mais c'est une idée qui est malheureusement clouée dans le bourgeon.

Les atrocités commises par les “Marokaim” (Israéliens d’origine marocaine) étaient considérées comme une fonction de leur caractère et de leur culture.

L'histoire de Cohen est celle de l'amour et de la haine entre les juifs mizrahis, qui devraient bien sûr être appelés juifs arabes (comme les juifs allemands ou les juifs américains), et les Arabes palestiniens – le tout étant orchestré par des juifs ashkénazes (c'est-à-dire d'origine d'Europe centrale et orientale). Tout son livre est éclairé par l'immense corpus de connaissances de l'auteur, des connaissances qui sont étonnamment documentées dans 682 notes de bas de page et une bibliographie longue et impressionnante.

Mais on ne peut pas toujours voir la forêt derrière les arbres. Le livre de Cohen n'a pas de véritable ligne de fond, et il ne mène pas non plus à des conclusions sans équivoque. Les juifs mizrahis haïssent-ils vraiment les Arabes, comme on a coutume de le croire ici, et si oui, pourquoi ?

Pour sa part, l'auteur termine son livre par ces mots : « L'écriture de ce livre est achevée. Même s'il n'est pas en mesure d'offrir une perspective réconfortante, il peut peut-être fournir une vue délibérée et à plusieurs voix, et la connaissance que nous avons en nous plus d'une possibilité de comprendre le monde et d'y agir, dans chacun des côtés du triangle Mizrahi-Arabe-Ashkénaze, ainsi que dans le triangle lui-même.»

On n’a pas besoin d'un critique ou d'une autre personne pour résumer un livre lorsque l'auteur fait lui-même le travail.

La couverture du livre de Hillel Cohen. Crédit : Ivrit Press

30/10/2022

GIDEON LEVY
Nous nous déguisons tous en démocrates
Tout vote pour un parti sioniste est un vote pour la poursuite d'une tyrannie

Gideon Levy, Haaretz, 30/10/2022Fausto Giudice, Tlaxcala

« Riez, riez de tous mes rêves », a écrit le poète Saül Tchernikhovsky. Les élections de mardi en Israël ne sont pas des élections générales, et ne sont donc pas démocratiques. L'Afrique du Sud de l'apartheid avait exactement la même supercherie : le régime était défini comme une démocratie parlementaire, puis comme une démocratie présidentielle. Des élections étaient organisées dans le respect de la loi, le Parti national et le Parti afrikaner formant une coalition. Une seule chose séparait l'Afrique du Sud de la démocratie : les élections étaient destinées uniquement aux Blancs.

« Riez, riez de tous mes rêves. » En Israël aussi, seuls les Blancs - ou l'équivalent israélien - participeront aux élections. Israël règne actuellement sur 15 millions de personnes, mais 5 millions d'entre elles sont empêchées de participer au processus démocratique qui choisit le gouvernement qui dirige leur vie. La mascarade dans laquelle Israël joue à la démocratie devrait enfin prendre fin par un démasquage. Ce n'est pas une démocratie.

Un régime dans lequel les élections ne sont organisées que pour les Blancs, à savoir les Juifs, ou pour ceux qui ont une citoyenneté qui n'est pas accordée à tous les sujets, y compris les autochtones vivant sous le régime permanent qui s'applique à leur terre, n'est pas une démocratie.

Lorsqu'une occupation cesse d'être temporaire, elle définit le régime de l'ensemble du pays. La démocratie partielle, ça n »existe pas. Même s'il y a une démocratie de Dan à Eilat, le fait qu'entre Jénine et Rafah il y ait une tyrannie militaire entache le régime de tout le pays. C'est incroyable de voir comment, pendant des décennies, les Israéliens se sont sciemment menti à eux-mêmes, tout comme les Blancs dans les partis des Afrikaners.

Qaddum et Kedumim, deux villages adjacents, existent côte à côte. Qaddum existe depuis le deuxième siècle de l'ère chrétienne et compte actuellement une population de 3 000 habitants. Kedumim existe depuis moins de 50 ans et compte aujourd'hui 4 500 habitants. Quelques centaines de mètres seulement séparent les deux communautés. Le village juif a été construit sur les terres du village palestinien, étouffant le village lorsque la route de sortie de Qaddum a été bloquée par Kedumim.

Mardi, seuls les habitants de Kedumim iront voter. Les habitants de Qaddum resteront chez eux. Comme si cela ne suffisait pas, ils seront soumis à un ordre de confinement, afin d'assurer la sécurité de la démocratie. Le sort des résidents de Qaddum sera affecté par les résultats de l'élection bien plus que celui de leurs voisins de Kedumim. Aucun gouvernement n'osera nuire à Kedumim. Tout gouvernement continuera à nuire à Qaddum et à tourmenter ses résidents. Mais Qaddum n'a pas de voix, pas de droit de vote, pas de liberté de choisir ou de droit d'exercer une influence.

Une élection dans laquelle une seule communauté peut voter, alors que sa voisine plus ancienne et indigène est interdite de participation, est antidémocratique. Comment les Israéliens peuvent-ils se tromper eux-mêmes si effrontément ? Comment peut-on dire que ce n'est pas à cela que ressemble l'apartheid ? Au nom de quelle valeur les résidents de Kedumim ont-ils le droit de vote, alors que ce droit est refusé aux résidents de Qaddum ? Les Juifs de Kedumim sont-ils supérieurs aux Palestiniens de Qaddum ? Après tout, ils partagent la même terre et vivent sous le même gouvernement. Mais la propagande sioniste a toujours une réponse appropriée à tout mal perpétré en son nom.

Participer à une élection dans un régime d'apartheid est problématique, presque impossible. Néanmoins, nous allons tous nous déguiser en démocrates mardi et aller voter. Aucune personne de conscience ne peut voter pour quiconque soutient la poursuite du régime actuel, dans lequel une partie de la population de ce pays vit sous une tyrannie militaire. Aucun vrai démocrate ne peut voter pour un parti qui a gravé sur sa bannière la continuation de la suprématie juive, ce qu'implique le sionisme. Tous les partis juifs, du Otzma Yehudit au Meretz, soutiennent la continuation d'un État juif, qui ose s'appeler démocratie, dans une réalité binationale. C'est pourquoi ils ne peuvent être pris en considération par quiconque prend une décision en toute conscience.

Il n'est pas facile de le dire, il est difficile de l'écrire, mais tout vote pour un parti sioniste est un vote pour la poursuite d'une tyrannie se faisant passer pour une démocratie.