30/04/2023

JORGE MAJFUD
Lettre ouverte à l'ambassadeur des USA chargé du Venezuela

  Jorge Majfud, 28/4/2023
Traduit par Faustinho Das Mortes

 Monsieur l'Ambassadeur James Story, 

Je suis heureux d'apprendre que la nouvelle politique du gouvernement usaméricain inclut la possibilité de lever les sanctions économiques contre le Venezuela, une vieille pratique de Washington depuis le début du 20ème siècle et qui consistait à ruiner les économies des pays ayant des gouvernements indépendants ou non-alignés. Comme ce fut le cas au Chili, où les sanctions contre le gouvernement démocratique d'Allende n'ont été levées que lorsque Washington et la CIA ont comploté pour détruire cette démocratie le 11 septembre 1973 et la remplacer par la dictature brutale d'Augusto Pinochet. Ce n'est qu'ensuite que les sanctions ont été remplacées par des millions de dollars d'aide pour produire le fameux “miracle chilien”, qui n'a pas empêché plusieurs crises économiques et sociales. Les exemples sont nombreux, mais je n'entrerai pas dans les détails. Ce qui est sûr, c'est que les responsables ne comparaîtront jamais devant un tribunal national ou international pour leurs crimes contre l'humanité. La justice est pour les pauvres et pour les perdants.

Comme vous le savez, en 1989, la population vénézuélienne est descendue dans la rue pour protester contre la politique de son gouvernement, qui tentait de mettre en œuvre ce que l'on a appelé plus tard la doctrine du consensus de Washington. Des centaines de personnes (probablement des milliers) ont été massacrées par les forces de répression, mais le président George H. Bush n'a pas bloqué ou puni le gouvernement vénézuélien par des sanctions ; au contraire, il est venu à la rescousse du président Carlos Andrés Pérez avec une aide de plusieurs millions de dollars et un engagement à radicaliser les mesures mêmes contre lesquelles la population protestait.

PEDRIPOL

Selon des économistes comme Jeffrey Sachs, les sanctions actuelles contre le peuple vénézuélien sont responsables de la mort de dizaines de milliers de Vénézuéliens et, en partie, des millions d'émigrants. Je comprends que la guerre contre la Russie et les derniers accords de paix négociés par la Chine entre deux autres grands producteurs de pétrole, l'Arabie Saoudite et l'Iran, rendent nécessaire et urgent un réexamen du cas vénézuélien.

Mais parlons de démocratie, c'est l'essentiel. Vous avez récemment fait une déclaration officielle appelant les Vénézuéliens à s'inscrire sur les listes électorales pour les prochaines élections. C'est une idée que nous soutenons presque tous. Mais cette déclaration officielle est le reflet d'une histoire vieille de deux siècles, au cours de laquelle l'Amérique latine a souffert de l'ingérence des gouvernements et des entreprises privées des USA.

Dans les années 1940, l'un des pays les plus éloignés de l'influence géopolitique des USA, l'un des plus rebelles et des plus détestés pour cette raison, selon les diplomates de Washington de l'époque, était l'Argentine. Son indépendance et son manque d'obéissance ont suscité des interventions politiques de la part de l'ambassadeur usaméricain de l'époque, Spruille Braden. En s'immisçant dans la campagne électorale de 1945, Braden a inventé l'anti-péronisme avant même que le péronisme ne naisse. On pourrait citer des dizaines de cas similaires et vous le savez. En géopolitique, la troisième loi de Newton se vérifie, mais jamais dans les mêmes proportions. Presque toujours, l'action écrase la réaction avec une dictature coloniale, mais parfois, c'est le contraire qui se produit et cela s'appelle une révolution.

Dans votre communication du 27 avril [voir vidéo ci-dessous], vous avez averti les Vénézuéliens que le gouvernement de M. Maduro essaierait de les convaincre de ne pas voter. Vous avez également qualifié certains représentants de l'Assemblée nationale de “scorpions” qui utilisent divers sigles politiques pour diviser les votes.

Pouvez-vous imaginer que la règle d'or des relations internationales, le principe de réciprocité, soit appliquée et que l'ambassadeur d'un pays d'Amérique latine s'adresse aux USAméricains dans un message officiel pour favoriser les républicains ou les démocrates ? Pouvez-vous imaginer que l'un d'entre eux demande aux USAméricains de démocratiser le système électoral en éliminant le collège électoral, un héritage du système esclavagiste, comme tant d'autres choses ? Ou le système disproportionné qui assure deux sénateurs par État, alors que certains États sont quarante fois plus peuplés que d'autres ? Ou que les citoyens usaméricains de la colonie de Porto Rico se mobilisent pour réclamer le droit de vote ? Ou que les entreprises cessent d'écrire les lois au Congrès et de donner des centaines de millions de dollars aux candidats à chaque élection ? Vous imaginez ?

Ce serait tout de même moins grave si l'on considère qu'il n'y a jamais eu de pays latino-américain qui ait envahi les USA, leur ait pris la moitié de leur territoire, ait renversé plusieurs gouvernements et ait installé des dictatures militaires pour protéger les entreprises privées latino-américaines. Connaissez-vous un seul exemple ? Vous n'en connaissez pas, n'est-ce pas ? Mais si un tel cas hypothétique se produisait, non seulement cet ambassadeur perdrait son poste, mais s'il s'agissait de l'ambassadeur de Bolivie ou du Venezuela, le monde attendrait déjà un “changement de régime” ou un nouveau blocus.

Comme si cela ne suffisait pas, vous avez demandé aux Vénézuéliens de “parler à leurs voisins” parce que “les élections peuvent être gagnées”. Ce n'est pas une nouveauté dans l'histoire tragique de l'Amérique latine, comme vous le savez et comme le savent beaucoup mieux les Latino-Américains, dont la mémoire ancienne et nouvelle est jonchée d'ingérences tragiques, de coups d'État et de “dictatures amies” sanglantes soutenues par Washington et les entreprises qui ont plus de pouvoir que vous et que n'importe quel autre ambassadeur. Ce qui est peut-être nouveau, c'est que cela n'est même plus caché ou nié, comme c'était le cas, par exemple, au temps de Mister Kissinger.

Quand allons-nous comprendre qu'il est dans l'intérêt du peuple usaméricain et latino-américain de cesser de se faire des ennemis avec cette ingérence paternaliste et arrogante, qui va à l'encontre des principes élémentaires des relations internationales ?

Quand allons-nous cesser de représenter des intérêts particuliers et penser sérieusement au bien commun des peuples libres et indépendants ?

Quand allons-nous comprendre qu'il est non seulement plus juste et moins tragique, mais encore plus économique de se faire des amis plutôt que des ennemis, que la “sécurité nationale” dépend de la première et non de la seconde option ?

Quand allons-nous cesser de voir le monde comme un film d'Indiens contre cow-boys, de super-héros contre méchants, de flics contre voleurs où nous nous arrogeons toujours le rôle de cow-boys, de flics et de super-héros, en oubliant l'histoire tragique qui est à l'origine des “méchants” alors que le monde nous laisse de plus en plus seuls ?

Quand allons-nous nous changer pour faire de ce monde un endroit plus juste, avec des règlements plus équitables et moins de guerres suprémacistes ?

Quand allons-nous cesser de contrôler la vie des autres au nom de bonnes vieilles excuses et nous atteler à résoudre nos propres problèmes nationaux, qui s'aggravent de jour en jour ?

Est-ce que nous acceptons seulement que le monde change (et, comme toujours, s'adapte à nos exigences) et que nous ne le fassions pas ?

Combien de temps allons-nous continuer à rater notre coup en prétendant donner des leçons au monde sur la liberté, la démocratie et les droits humains, toujours par la force des sanctions économiques, quand ce n'est pas par des bombardements notoires ? Combien de temps allons-nous donner des leçons sur la façon de vivre alors que nous ne savons même pas comment le faire nous-mêmes ?

Salutations distinguées,

Jorge Majfud
 
James "Jimmy" Story est l'ambassadeur de l'Unité des affaires vénézuéliennes, basée à l'ambassade des USA à Bogota, en Colombie.

JORGE MAJFUD
Open letter to the U.S. ambassador for the Venezuela Affairs Unit

    Jorge Majfud, 28/4/2023

Mr. Ambassador James Story:

I am pleased to learn that the new policy of the United States government includes the possibility of lifting economic sanctions against Venezuela, an old Washington practice since the beginning of the 20th century, which consisted of ruining the economies of countries with independent or non-aligned governments. As was the case in Chile, when the sanctions against the democratic government of Allende were lifted only when the plot of Washington and the CIA succeeded in destroying that democracy in its 9/11 of 1973 to replace it with the brutal dictatorship of Augusto Pinochet. Only then were the sanctions replaced by millions in aid to produce the touted “Chilean Miracle”, which even so did not prevent several economic and social crises. The examples are multiple, but I will not go into more detail. The good thing is that those responsible will never, ever face any national or international court for their crimes against humanity. Justice is for the poor and for the losers.


As you know, in 1989 the Venezuelan population took to the streets to protest against the policies of their government, which was trying to implement what later became known as the Washington Consensus doctrine. Hundreds of people (probably thousands) were massacred by the forces of repression, but President George H. Bush did not block or punish the Venezuelan government with sanctions, but instead came to the rescue of President Carlos Andrés Pérez with multimillion-dollar aid and with the commitment to radicalize the same measures against which the population protested.

PEDRIPOL

According to economists such as Jeffrey Sachs, the current sanctions against the people of Venezuela are responsible for the death of tens of thousands of Venezuelans and, in part, of the millions of emigrants. I understand that the war against Russia and the most recent peace agreements promoted by China between two other large oil producers, Saudi Arabia and Iran, make a reconsideration of the case of Venezuela necessary and urgent.

But let’s talk about democracy, which is what matters. You recently made an official statement urging Venezuelans to register to vote in the upcoming elections. An idea that almost all of us support. But for you to say it and officially represents an old story of two centuries that Latin America has had to suffer due to the interference of the governments and private corporations of the United States.

In the 1940s, one of the countries furthest from the geopolitical influence of the United States and one of the most rebellious and hated for that very reason, according to Washington diplomats at the time, was Argentina. Its independence and its lack of obedience motivated the political interventions of the American ambassador of the time, Spruille Braden. With his involvement in the 1945 electoral campaign, Braden invented anti-Peronism before Peronism was born. We can mention dozens of similar cases and you know it. In geopolitics Newton’s Third Law is fulfilled, although never in the same proportion. Almost always the action crushes the reaction with some colonial dictatorship, but sometimes the opposite happens and it is called revolution.

In your April 27 statement [see video below], you warned Venezuelans that the government of Mr. Maduro will try to convince them not to vote. You also described some representatives of the National Assembly as “scorpions”, who use different political acronyms and names to divide votes.

Can you imagine if the golden rule of international relations is applied, the principle of reciprocity, and the ambassador of some Latin American country addresses the Americans in an official message to favor Republicans or Democrats? Imagine if one of them asked the Americans to democratize the electoral system by eliminating the Electoral College, a legacy of the slave system, like so many other things? Or the disproportionate system that ensures two senators per state, regardless of the fact that some states have forty times the population of others? Or that the US citizens of the colony of Puerto Rico mobilize to claim the right to vote? Or that corporations stop writing laws in Congresses and donate hundreds of millions of dollars to candidates in every election? Can you imagine?
In spite of everything, it would be less serious, considering that there was never a Latin American country that invaded the United States, that took half of its territory, that overthrew several governments and installed military dictatorships to protect Latin American private companies. Do you know any example? No, right? But if that hypothetical case occurred, not only would that ambassador lose his position, but, if he were the ambassador of Bolivia or Venezuela, the world would already be waiting for “a change of regime” or a new blockade.

As if that were not enough, you asked Venezuelans to “talk to their neighbors” because “the elections can be won.” It is not that this is something new in the tragic history of Latin America that, as you know and it is known much better by Latin Americans, whose old and new memory is littered with tragic interference, coups d’état and bloody “friendly dictatorships” supported by Washington and corporations that have more power than you and any other ambassador. Perhaps what is new is that it is no longer even hidden or denied, as Mr. Kissinger, for example, used to do.

When are we going to understand that it is in the interest of the American and Latin American people to stop making enemies with these paternal, arrogant interferences and against elementary principles of international relations?

When are we going to stop representing special interests and think seriously about the common good of free and independent peoples?
When are we going to understand that it is not only fairer and less tragic, but even cheaper to make friends than enemies, that “national security” involves the former, not the latter?

When are we going to stop seeing the world as a movie about Indians against cowboys, superheroes against villains, cops against robbers where we always assume the role of cowboys, policemen and superheroes forgetting the tragic story that originated “bad guys” while the world is leaving us more and more alone?
When are we going to change to make this world a fairer place, with more equitable agreements and less supremacist wars?
When are we going to stop controlling the lives of others in the name of old and beautiful excuses and dedicate ourselves to fixing our own national problems that are more and more serious every day?
Is it that we only accept that the world changes (and, as always, adapts to our demands) and we don’t?

How long will we continue to fail in style while we try to teach the world lessons in freedom, democracy, and human rights, always with the force of economic sanctions, if not well-known bombings?
How long are we going to give lessons on how to live when we don’t even know how to do it?
 
Sincerely,
Jorge Majfud


 
James “Jimmy” Story is the Ambassador for the Venezuela Affairs Unit, located at the United States Embassy in Bogota, Colombia

JORGE MAJFUD
Carta abierta al embajador de Estados Unidos de América para Venezuela

Jorge Majfud, 28/4/2023


Sr. Embajador James Story:

Me complace saber que la nueva política del gobierno de Estados Unidos incluye la posibilidad de levantar las sanciones económicas a Venezuela, una vieja práctica de Washington desde principios del siglo XX y que consistió en arruinar economías de países con gobiernos independientes o no alineados. Como fue el caso de Chile, cuando las sanciones contra el gobierno democrático de Allende fueron levantadas sólo cuando el complot de Washington y la CIA lograron destruir aquella democracia en su 11S de 1973 para reemplazarla por la brutal dictadura de Augusto Pinochet. Sólo entonces las sanciones fueron reemplazadas por millonarias ayudas para producir el promocionado “Milagro chileno”, que ni así evitó varias crisis económicas y sociales. Los ejemplos son múltiples, pero no voy a entrar en más detalles. Lo bueno es que sus responsables nunca jamás van a enfrentar alguna corte nacional o internacional por sus crímenes de lesa humanidad. La justicia es para los pobres y para los perdedores.

Como usted sabe, en 1989 la población venezolana salió a las calles para protestar las políticas de su gobierno, el que intentaba implementar lo que luego se conoció como la doctrina del Consenso de Washington. Cientos de personas (probablemente miles) fueron masacradas por las fuerzas de represión, pero el presidente George H. Bush no bloqueó ni castigó al gobierno venezolano con sanciones, sino que, por el contrario, salió al rescate del presidente Carlos Andrés Pérez con una ayuda multimillonaria y con el compromiso de radicalizar las mismas medidas contra las cuales protestaba la población.

PEDRIPOL

 Según economistas como Jeffrey Sachs, las actuales sanciones contra el pueblo de Venezuela son responsables por la muerte de decenas de miles de venezolanos y, en parte, de los millones de emigrados. Entiendo que la guerra contra Rusia y los más recientes acuerdos de paz propiciados por China entre otros dos grandes productores de petróleo, Arabia Saudita e Irán, hacen necesario y urgente una reconsideración sobre el caso de Venezuela.

Pero hablemos de democracia, que es lo que importa. Recientemente usted realizó una declaración oficial urgiendo a los venezolanos a registrarse a votar en las próximas elecciones. Una idea que apoyamos casi todos. Pero que lo diga usted y de forma oficial representa una vieja historia de dos siglos que América latina ha debido sufrir por las injerencias de los gobiernos y las corporaciones privadas de Estados Unidos.

En los años cuarenta, unos de los países más alejados de la influencia geopolítica de Estados Unidos y uno de los más rebeldes y detestados por eso mismo, según los diplomáticos de Washington de la época, era Argentina. Su independentismo y su falta de obediencia motivaron las intervenciones políticas del embajador estadounidense de la época, Spruille Braden. Con su injerencia en la campaña electoral de 1945, Braden inventó el antiperonismo antes que naciera el peronismo. Casos similares podemos mencionar por decenas y usted lo sabe. En geopolítica se cumple la Tercera ley de Newton, aunque nunca en la misma proporción. Casi siempre la acción aplasta la reacción con alguna dictadura colonial, pero a veces ocurre lo contrario y se llama revolución.

En su comunicado del 27 de abril [ver video debajo], usted les advirtió a los venezolanos que el gobierno del señor Maduro intentará convencerlos de no votar. Usted también calificó a algunos representantes de la Asamblea Nacional como “alacranes”, quienes usan diferentes siglas políticas para dividir votos.

¿Se imagina usted si se aplicase la regla de oro de las relaciones internacionales, el principio de reciprocidad, y el embajador de algún país latinoamericano se dirigiese a los estadounidenses en un mensaje oficial para favorecer a republicanos o a demócratas? ¿Imagina si alguno de ellos le pidiese a los estadounidenses democratizar el sistema electoral eliminando el Colegio Electoral, herencia del sistema esclavista, como tantas otras cosas? ¿O el desproporcionado sistema que asegura dos senadores por estado, sin importar que unos estados tengan cuarenta veces la población de otros? ¿O que los ciudadanos estadounidenses de la colonia de Puerto Rico se movilicen para reclamar el derecho a voto? ¿O que las corporaciones dejen de escribir las leyes en los congresos y que dejen de donar cientos de millones de dólares a los candidatos en cada elección? ¿Se Imagina?

Pese a todo, sería menos grave, considerando que nunca hubo un país latinoamericano que invadió Estados Unidos, que le quitó la mitad de su territorio, que derribó varios gobiernos e instaló dictaduras militares para proteger las empresas privadas latinoamericanas. ¿Usted conoce algún ejemplo? No, ¿verdad? Pero si se diese ese caso hipotético no sólo ese embajador perdería su puesto, sino que, de ser el embajador de Bolivia o de Venezuela el mundo ya estaría esperando “un cambio de régimen” o un nuevo bloqueo.

Por si fuese poco, usted le pidió a los venezolanos “hablar con sus vecinos” porque “se puede ganar las elecciones”. No es que esto sea algo nuevo en la trágica historia de América Latina que, como usted sabe y mucho mejor saben los latinoamericanos, cuya vieja y nueva memoria está regada de trágicas injerencias, golpes de Estado y sangrientas “dictaduras amigas” apoyadas por Washington y las corporaciones que tienen más poder que usted y que cualquier otro embajador. Tal vez lo nuevo es que ya ni siquiera se disimula o se lo niega, como solía hacerlo, por ejemplo, el Sr. Kissinger.

¿Cuándo vamos a entender que es del interés del pueblo estadounidense y latinoamericano dejar de fabricar enemigos con estas injerencias paternales, arrogantes y contra principios elementales de las relaciones internacionales?

¿Cuándo vamos a dejar de representar intereses especiales y pensar, en serio, en el bien común de los pueblos, libres e independientes?

¿Cuándo vamos a entender que no sólo es más justo y menos trágico, sino hasta más económico hacer amigos que enemigos, que la “seguridad nacional” pasa por lo primero, no por lo segundo?

¿Cuándo vamos a dejar de ver al mundo como una película de indios contra cowboys, de superhéroes contra villanos, de policías contra ladrones donde nos arrogamos siempre el papel de cowboys, policías y superhéroes olvidando la trágica historia que originó “los chicos malos” mientras el mundo nos va dejando cada vez más solos?

¿Cuándo vamos a cambiar nosotros para hacer de este mundo un lugar más justo, con más acuerdos equitativos y menos guerras supremacistas?

¿Cuándo vamos a dejar de controlar la vida de los demás en nombre de viejas y bonitas excusas y dedicarnos a arreglar nuestros propios problemas nacionales que cada día son más y más graves?

¿Es que solo aceptamos que el mundo cambie (y, como siempre, se adapte a nuestras exigencias) y nosotros no?

¿Hasta cuándo seguiremos fracasando con estilo mientras pretendemos darle lecciones al mundo de libertad, de democracia, de derechos humanos, siempre a la fuerza de sanciones económicas cuando no de conocidos bombardeos? ¿Hasta cuándo vamos a dar lecciones de cómo vivir cuando ni nosotros sabemos cómo hacerlo?

Atentamente,

Jorge Majfud

 

James "Jimmy" Story es el Embajador de la Unidad de Asuntos de Venezuela, ubicada en la Embajada de Estados Unidos en Bogotá, Colombia.

GIDEON LEVY
“Je n’ai pas d’autre pays” ?
Une absurde litanie israélienne

Gideon Levy, Haaretz, 30/4/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 

C’est la litanie nationale du jour en Israël : « Je n’ai pas d’autre pays ». Les Français ont un autre pays, tout comme les Suédois, les Allemands, les Congolais et les Indiens. Seuls les pauvres Israéliens, rien qu’eux, n’ont pas d’autre pays, et le cœur se brise pour eux. Quelle misérable nation que celle qui n’a pas d’autre pays et qui a le droit de faire tout ce qu’elle veut parce qu’après tout, “elle n’a pas d’autre pays”, tant elle est infortunée. Les Palestiniens n’ont même pas un pays, mais les Israéliens se plaignent de ne pas avoir de pays de rechange. C’est terrible.

Israéliens faisant la queue pour la vérification de leur passeport à l’aéroport Ben-Gourion. Photo Eyal Toueg

 

La belle chanson - un poème d’Ehud Manor mis en musique par Corinne Allal a - a été choisie la semaine dernière comme la chanson préférée des Israéliens dans un sondage réalisé conjointement par la radio Kan Gimel et le journal Israel Hayom, à l’occasion de la fête de l’Indépendance. Ce chant funèbre est entonné à chaque manifestation et le texte du titre rayonne désormais depuis les sommets des gratte-ciels  de quelques grandes entreprises de construction, leur courageuse contribution à la lutte contre le coup d’État judiciaire.

 

Le charmant, talentueux et inoubliable Manor a innocemment écrit une élégie tardive pour son frère Yehuda, tombé dans la guerre d’usure en 1968, qui a été immédiatement adoptée comme chanson de protestation pendant la première guerre du Liban et est devenue la chanson de protestation de tous les temps. « Je ne me tairai pas parce que mon pays / a changé de visage / Je ne cesserai pas de le lui rappeler / Et de chanter dans ses oreilles / Jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux ... Avec un corps douloureux et un cœur affamé / Ici est ma maison». Son poème est véritablement très émouvant, mais l’utilisation qui en est faite pour servir la propagande israélienne d’auto-victimisation est intolérable.

 

Israël n’a pas d’autre pays, comme toutes les nations du monde, sauf que celles-ci ne s’en plaignent pas. Plus d’une nation n’a même pas de pays. Il est vrai que Nancy Pelosi, l’ancienne présidente de longue date de la Chambre des représentants des USA, a cité le poème de Manor à plusieurs reprises, notamment en réponse au démantèlement par la Cour suprême US du droit constitutionnel à l’avortement, et après que son mari a été battu à coups de marteau dans leur maison, mais même les USAméricains n’ont pas d’autre pays, et en général ils ne s’en plaignent pas. Leur pays leur suffit.

 

Ce n’est pas le cas des Israéliens. Convaincus que leur pays est menacé en permanence d’un anéantissement immédiat - en cela aussi, ils sont sans doute les seuls au monde à penser ainsi, une puissance régionale dotée d’une super-armée qui se sent elle-même en danger permanent de destruction - ils sont persuadés que les paroles de Manor ont une signification particulière pour eux. Après tout, tout est différent lorsqu’il s’agit d’Israël, différent et spécial, pas comme toutes les autres nations, depuis que le peuple d’Israël a été désigné pour être une lumière pour les nations.

 

Près d’un million d’Israéliens ont effectivement un autre pays, et leur nombre ne fait qu’augmenter. L’État refuse de fournir des chiffres officiels, mais des centaines de milliers d’Israéliens ont une double, voire une triple nationalité et, ces dernières années, aucune tendance n’a été plus forte que celle de l’obtention d’un passeport supplémentaire. Rien qu’en 2020, on estime que 50 000 Israéliens ont demandé un passeport portugais. Environ 750 000 Israéliens ont émigré depuis la création de l’État, sans jamais revenir. Eux aussi ont un autre pays. En 2017, selon le Bureau central des statistiques, plus de 500 000 Israéliens vivaient à l’étranger. En d’autres termes, pour une grande partie d’entre nous, peut-être plus que pour la plupart des nations, il existe en fait un autre pays.

 

Mais le problème de cette lamentation réside dans l’auto-victimisation pour rien, un genre très apprécié des Israéliens : les Juifs n’ont-ils pas assez souffert, et maintenant ils n’ont pas non plus d’autre pays ? Pour une nation qui a conquis un pays sur une autre nation, l’a dépossédée et expulsée de son pays et l’a laissée en sang, humiliée, sans droits et sans respect pendant 100 ans déjà, c’est un acte de chutzpah de trop que de se plaindre qu’elle n’a pas de pays de rechange, comme elle le mérite. Pour une nation qui n’a pas encore appris à gérer correctement son seul pays, il est particulièrement présomptueux de demander un pays supplémentaire.

Contentons-nous donc du pays unique, battu et gémissant ; luttons pour son caractère moral et n’en demandons pas un autre. Chantons une autre chanson de protestation lors des manifestations. Un autre pays ? C’est la dernière chose dont nous avons besoin.

 

Le poème d’Ehud Manor est très émouvant, mais l’utilisation qui en est faite pour servir la propagande israélienne d’apitoiement est intolérable.

 

Je n’ai pas d’autre pays

même si ma terre est en feu

Un simple mot en hébreu

transperce mes veines et mon âme -

Avec un corps douloureux, avec un cœur affamé,

Ici est ma maison.

 

Je ne me tairai pas

parce que mon pays a changé de visage

 

Je ne renoncerai pas à le lui rappeler

Et à chanter à ses oreilles

jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux

 

Je n’ai pas d’autre pays

Même si mon pays est en flammes

Un simple mot en hébreu

transperce mes veines et mon âme -

Avec un corps douloureux, avec un cœur affamé,

Ici est ma maison.

 

Je ne me tairai pas parce que mon pays

a changé de visage.

Je ne renoncerai pas à lui rappeler

Et chanter à ses oreilles

jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux

 

Je n’ai pas d’autre pays

Jusqu’à ce qu’il renouvelle ses jours de gloire

Jusqu’à ce qu’il ouvre les yeux

 

Je n’ai pas d’autre pays

même si mon pays est en flammes

Un seul mot en hébreu

transperce mes veines et mon âme -

Avec un corps douloureux, avec un cœur affamé,

Ici est ma maison.

 

Avec un corps douloureux, avec un cœur affamé,

Ici ma maison.

 

GIDEON LLEVY
A Jénine, de nouvelles tombes sont prêtes pour la prochaine incursion de l’armée israélienne

Gideon Levy et Alex Levac (photos), Haaretz, 29/4/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le camp de réfugiés de Jénine s’est transformé en une véritable forteresse : des chevaux de frise en acier à chaque coin de rue, des caméras de sécurité, la surveillance de tout étranger qui ose entrer, des centaines d’hommes armés qui se préparent à la prochaine incursion de l’armée. Et le sang va couler.

Le cimetière du camp de réfugiés de Jénine, avec les photos de ceux qui sont tombés récemment, affichées sur les murs

 

Dans le camp de réfugiés de Jénine, trois tombes à ciel ouvert attendent les prochains habitants tués par les forces de défense israéliennes. Ici, les tombes sont creusées à l’avance et, malheureusement, elles ne restent pas vides très longtemps. Près de 50 combattants armés et autres ont été tués ici au cours de l’année écoulée par des soldats israéliens. Le camp, situé dans le nord de la Cisjordanie, traverse sa période la plus difficile et la plus violente depuis la seconde Intifada, il y a une vingtaine d’années.

 

Le cimetière regorge de tombes - c’est déjà la troisième nouvelle section créée depuis l’Intifada et la plupart des tombes sont occupées. À la fin de la semaine dernière, le premier matin de la fête de l’Aïd El Fitr marquant la fin du mois sacré du Ramadan, comme le veut la coutume, l’endroit était animé par des milliers de personnes, des familles endeuillées et des amis des morts, dans le camp le plus militant des territoires occupés.

 

Pour ceux qui cherchent une autre similitude entre nous et eux : comme lors du Jour du Souvenir en Israël, lors de cette importante fête musulmane, des familles ne se sont pas rendues sur la dernière demeure de leurs proches en raison de la présence de politiciens - dans ce cas, de l’Autorité palestinienne - qui n’osent normalement pas entrer dans le camp. Pour protester contre la présence des politiciens, les familles se sont rendues au cimetière de Jénine la veille de la fête ou ont attendu qu’elle soit terminée.

 

Le dernier jour de l’Aïd El Fitr, lundi dernier, une mère endeuillée a arrosé les fleurs sur la tombe fraîchement creusée de son fils à l’aide d’un arrosoir en plastique. Les parents à qui nous avons parlé ont évoqué leurs fils avec un mélange de douleur et de fierté. Comme en Israël.

 

 

Une mère endeuillée au cimetière de Jénine

 

D’un point de vue visuel, le cimetière est à couper le souffle. D’immenses photographies aux couleurs vives des derniers chouhada (martyrs) du camp sont accrochées tout le long de la clôture extérieure, tandis que d’autres portraits s’affichent sur les nouvelles tombes. Les tombes des combattants, issus de toutes sortes de groupes militants, se ressemblent et sont mieux entretenues que les autres. De petits parterres de fleurs entourent chaque tombe, comme dans nos cimetières militaires. Les trois tombes ouvertes rendent la scène encore plus obsédante.

 

Au coin de la rue, à l’extérieur, des photographies grand format marquent le mémorial improvisé où la journaliste d’Al Jazeera, Shireen Abu Akleh, a été le 11 mai dernier - probablement par les forces de défense israéliennes, selon les enquêtes menées par les principaux médias internationaux et les groupes de défense des droits humains. Une fumée blanche s’élève des tas d’ordures en feu autour de l’endroit où elle est tombée.

 

Ce cimetière, situé à la périphérie du camp, raconte l’histoire des morts. Une visite au cœur du camp révèle l’étonnante histoire des vivants.

 

Nos hôtes ont d’abord eu peur de nous emmener au cimetière, puis ont transigé en nous permettant de l’apercevoir depuis la fenêtre de la voiture. Finalement, ils nous ont permis de sortir pour prendre une photo, mais nous ont demandé de revenir rapidement et de disparaître derrière les vitres sombres de leur SUV Toyota dernier modèle, une voiture volée dont les plaques d’immatriculation ont été arrachées, qui s’est élancée dans les allées du camp. Notre chauffeur portait un fusil M16 en bandoulière et des chargeurs de munitions étaient coincés dans la pochette de la banquette arrière. Bienvenue dans le camp de réfugiés de Jénine.

 

Chevaux de frise à Jénine cette semaine

 

Lors de nos précédentes visites, nous ne nous étions jamais sentis aussi menacés ; nos hôtes n’avaient jamais craint autant pour notre sécurité. Mais cette fois-ci, quelques instants seulement après que notre voiture immatriculée en Israël a franchi l’entrée du camp, les groupes WhatsApp et Facebook locaux bruissaient déjà de la nouvelle de la présence d’Israéliens dans le camp.

 

Il y a plus de photos de chouhada dans les allées aujourd’hui que lors de la grande invasion des forces israéliennes, pendant l’Intifada. Presque tous les garçons tiennent un fusil jouet, et nous avons vu une fille avec un fusil. Mais la véritable innovation de ces derniers mois, ce sont les chevaux de frise qui ont été érigés dans le but de ralentir toute incursion de l’armée israélienne. À chaque intersection et à chaque entrée du camp, à l’exception d’un seul, ces chevaux de frise en acier se trouvent sur le bord de la route pendant la journée et, chaque nuit, vers 23 heures, ils sont mis en travers pour bloquer la circulation.

 

Ces chevaux de frise, que les FDI enlèvent parfois à l’aide d’énormes bulldozers ou en les faisant exploser, retardent l’entrée des forces et donnent aux militants du camp le temps de s’organiser. Les caméras de sécurité, installées à chaque coin de rue, sont une autre nouveauté dans le paysage de ce camp devenu forteresse. En cas de raid imminent de l’armée, les observateurs placés aux portes d’entrée sonnent l’alarme dans tout le camp. Parfois, les soldats qui s’approchent tirent sur les transformateurs électriques, coupant l’électricité et laissant le camp dans l’obscurité totale.

 

Il n’y a pas une seule nuit de calme ici.

 

Les maisons du camp de Jénine sont plantées sur le flanc d’une colline, qui est surmontée d’un certain nombre d’habitations relativement nouvelles et plus spacieuses. L’acteur israélo-palestinien assassiné Juliano Mer-Khamis et sa famille ont vécu là-haut, tout comme l’activiste local Zakaria Zubeidi avec sa femme, ses enfants et sa famille élargie.

 

Des hommes armés au cimetière de Jénine cette semaine

 

L’histoire de la famille Zubeidi en quelques mots : sur six frères, deux ont été tués et trois sont emprisonnés en Israël, tous après avoir purgé de longues peines derrière les barreaux. Aujourd’hui, un seul d’entre eux, Abed, est libre ; il a également été incarcéré dans le passé, pendant six ans. La mère des Zubeidi, Samira, a été tuée lors de l’invasion des FDI en 2002 ; leur père, Mohammed, est mort d’un cancer en 1993, à l’âge de 45 ans, après avoir été empêché, à un moment donné, de se rendre au centre médical Hadassah de Jérusalem pour y recevoir un traitement médical. Après la mort de Mohammed, deux de ses fils, Zakaria et Obed, alors détenus dans une prison israélienne, n’ont pas été autorisés à assister aux funérailles.

 

Jamal Zubeidi, l’oncle des frères, qui les a élevés comme un père par la suite, a perdu son propre fils, Na’im, l’année dernière, ainsi que son gendre Daoud, qui était marié à la fille de Jamal et était un autre des frères de Zakaria et Obed. Les photos des morts, que nous connaissions depuis des années, depuis l’enfance, sont accrochées dans le salon de la maison de Jamal. C’est un homme noble, impressionnant et raffiné - un Job local.

 

En roulant à toute allure dans les ruelles du camp, nous voyons des choses plus sinistres que par le passé. Quelque chose de lourd et de menaçant plane sur ce camp densément peuplé ; il y règne un sentiment inquiétant que l’on ne retrouve pas dans les autres camps de réfugiés de Cisjordanie. Des hommes armés passent comme des ombres dans les rues, un pick-up conduit par des membres de la katiba (bataillon) se fraye un chemin, couvert avec un filet de camouflage militaire. Sous la partie ouverte à l’arrière, il peut y avoir des armes, des combattants ou des barrières métalliques à déposer à différents endroits du camp, selon les besoins. La katiba est une union de toutes les forces combattantes présentes ici. Les combattants du Fatah, du Hamas, du Jihad islamique, des bataillons des martyrs d’Al Aqsa, d’Ezzedine Al Qassem et des bataillons d’Al Quds sont tous réunis dans le cadre de la katiba et travaillent de concert. Lors des funérailles et des événements commémoratifs, des centaines de ces militants se présentent, faisant étalage de leur puissance et de l’armement en leur possession.

 

Le mémorial improvisé à l’endroit où la journaliste d’Al Jazeera Shireen Abu Akleh a été tuée le 11 mai dernier, à Jénine

 

La dernière incursion à Jénine a eu lieu une semaine avant notre visite ; la dernière personne tuée dans cette ville est tombée il y a environ 40 jours. Lors de notre visite vendredi dernier, une cérémonie commémorative était organisée pour ce jeune homme - Nidal Hazem, un cousin de Raad Hazem, qui a perpétré l’attaque terroriste dans la rue Dizengoff qui a tué trois Israéliens en avril 2022, pendant le Ramadan. Nidal a été tué dans la rue Abou Bakher à Jénine avec un ami et un garçon de 14 ans, lors d’un raid de l’armée. D’où la méfiance qui règne dans le camp. Les chefs des milices ne font pas confiance aux journalistes israéliens, qui les ont presque tous déçus en adoptant ce qu’ils considèrent comme le récit israélien tordu de ce qui se passe réellement à Jénine. Ils ne font pas non plus confiance aux médias internationaux.

 

Les militants locaux et les autres personnes figurant sur la liste des personnes recherchées par Israël se cachent beaucoup moins qu’auparavant. « Quoi qu’il arrive, ça arrivera », nous ont dit certains avec insistance. Cela explique aussi pourquoi ils sont plus prompts que jamais à appuyer sur la gâchette. Ils n’hésitent pas à ouvrir le feu partout où se trouvent des soldats. Si la vie a toujours été bon marché ici, la mort est désormais proposée à un prix défiant toute concurrence. Le soutien de l’opinion publique aux militants atteint également un nouveau sommet. S’il y avait autrefois des gens qui avaient des réserves sur les actions des militants, aujourd’hui le camp est derrière eux, comme un seul homme. Il n’y a plus rien à perdre.

 

En face de l’hôpital gouvernemental de Jénine, à l’entrée du camp, se trouve toujours la sculpture d’un cheval créée par l’artiste allemand Thomas Kilpper à partir de la ferraille de divers véhicules, dont des ambulances, que l’armée israélienne a détruits lors de l’opération “Bouclier défensif” en mai-juin 2002. Aujourd’hui, 20 ans plus tard, la sculpture est ornée de photos de ceux qui sont tombés au cours de l’année écoulée.

 

Si le temps semble parfois s’arrêter dans le camp de réfugiés de Jénine, il semble aussi ne jamais s’arrêter, ne serait-ce qu’un instant.