Sheren Falah Saab, Haaretz, 9/2/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala
Remarque linguistique préliminaire du traducteur : l’auteure, elle-même druze, donc “arabe”(i.e. palestinienne) pratique l’usage dominant israélien consistant à parler de Palestiniens seulement quand il s’agit des habitants des territoires occupés depuis 1967, tandis que les Palestiniens de 1948, en partie citoyens israéliens, sont désignés comme “Arabes”, pour les distinguer des “Juifs”, ce qui relève du délire paranoïaque sioniste, vu qu’une bonne partie des Israéliens juifs sont d’origine arabe, et constitue un déni de réalité : ces “Arabes” sont palestiniens, point barre. Allez, Israéliens, encore un effort pour appeler un chat un chat…
Après avoir couvert la société arabe pendant 34 ans pour Haaretz, le vétéran du journalisme Atallah Mansour est aujourd’hui plus inquiet que jamais.
Tout a commencé dans un petit café du village de Jish, en Haute Galilée. Six ans après la création de l’État d’Israël, Atallah Mansour a 20 ans [1954, NdT]. Jeune homme ambitieux, il dirige la branche locale du mouvement de jeunesse Hanoar Haoved Véhalomed [La jeunesse qui travaille et qui étudie, mouvement socialiste sioniste créé en 1924, NdT]. Mansour discute avec le propriétaire du café, essayant d’ignorer tout ce qui l’entoure - la pauvreté, l’ignorance, le manque d’emplois et le gouvernement militaire - mais ce jour-là, il se sent particulièrement frustré.
Ses frustrations l’ont amené à écrire une lettre à David Ben-Gourion, décrivant ses propres problèmes et la situation des jeunes Arabes. Le Premier ministre, qui rencontrait rarement les Arabes à l’époque, a immédiatement compris la valeur historique de la lettre de Mansour et lui a répondu quelques jours plus tard. « Je suis très heureux du désir d’unité qui palpite à chaque ligne de votre lettre », lui écrit-il, et il l’invite à une réunion chez lui, à Sde Boker, pour discuter de la possibilité de former un mouvement de jeunesse commun aux Juifs et aux Arabes.
Mansour a relaté cette rencontre dans l’hebdomadaire Haolam Hazeh [“Ce monde”, racheté par Uri Avnery et Shalom Cohen en 1950, NdT]. Il a expliqué qu’il souhaitait informer les lecteurs de l’importance d’un partenariat entre Juifs et Arabes par l’intermédiaire d’un mouvement de jeunesse. « Je n’ai jamais pensé à être payé pour un article de journal, je voulais simplement écrire sur la rencontre. C’est ainsi que j’ai commencé à travailler dans les médias hébraïques », dit-il aujourd’hui à propos du moment critique qui l’a ensuite amené à travailler comme journaliste pour Haaretz.
Ce mois-ci, M. Mansour a reçu un doctorat honorifique de l’université de Tel-Aviv en reconnaissance de son travail novateur dans les médias et de sa contribution à l’intégration de la communauté arabe dans la société israélienne, tout en préservant son identité arabe.
M. Mansour, premier journaliste arabe à travailler dans les médias israéliens, a commencé sa carrière à Haaretz en 1958 et a couvert la société arabe pendant les 34 années qui ont suivi. « Je n’étais dans la poche de personne et je n’étais pas non plus le porte-parole d’une communauté particulière. J’ai fait mon travail de journaliste », déclare-t-il.
La plupart de mes amitiés avec des Juifs sont des amitiés avec des personnes issues de cercles de gauche. Ce sont des relations basées sur le respect, mais les Juifs et les Arabes sont comme l’huile et l’eau : ils ne se mélangent pas vraiment.
Dès le début, il a compris les défis que représentait la couverture de la communauté arabe pour les médias israéliens. Il se souvient d’une manifestation de militants communistes arabes en mai 1958 à Nazareth, qu’il a couverte pour Haolam Hazeh.
« La presse en hébreu a décrit les affrontements entre les militants et la police de manière unilatérale, comme si les Arabes étaient des criminels. J’étais très en colère parce que j’étais là et que j’ai vu moi-même que ce n’était pas ce qui s’était réellement passé », explique-t-il. Mansour a écrit une lettre à la rédaction de Haaretz, puis a rencontré le rédacteur en chef Gershom Schocken, qui lui a proposé un poste de journaliste spécialisé dans les affaires arabes.
Regarder à distance
Ma rencontre avec Mansour a eu lieu chez lui, à Nazareth, quelques jours après une nouvelle série de manifestations contre la révolution juridique prévue par le gouvernement Netanyahou. Comme beaucoup d’Arabes israéliens, il exprime sa peur et son incertitude face à ce plan. Il déclare que par rapport à tous les autres événements de sa longue carrière, y compris la deuxième guerre du Liban et la deuxième intifada, « la situation cette fois-ci est différente de tout ce que j’ai vu ».
« Les changements que ce gouvernement de droite propose aujourd’hui ne se sont pas produits soudainement, mais ont eu lieu progressivement et sur une longue période de temps », explique-t-il. « En juillet 2018, ils ont présenté la loi sur l’État-nation [Loi fondamentale sur Israël en tant qu’État-nation du peuple juif, qui, selon les critiques, fait des non-Juifs en Israël des citoyens de seconde zone] - c’était le premier point de rupture.
« La Déclaration d’indépendance prend en compte les minorités, dont les Arabes, et reconnaît les principes d’égalité, de dignité humaine et de liberté, même si ce n’est qu’en théorie. Mais la loi de l’État-nation ne concerne pas l’égalité des droits pour les minorités - même les Druzes qui servent dans l’armée ne sont pas mentionnés. La loi sur l’État-nation efface les minorités - nous ne sommes plus considérés comme des égaux. C’est la pire chose qui se soit produite, et pas seulement au niveau de la loi. Nous en avons vu les conséquences et elles sont considérables ».
« La révolution juridique portera atteinte aux droits des Arabes. Si un Arabe sort dans la rue et est attaqué, personne ne le protégera »
Que pensez-vous du nouveau gouvernement ?
Dans le contexte des relations entre Juifs et Arabes, je pense que nous sommes sur une pente glissante et dangereuse.
Êtes-vous inquiet ?
Il est clair que oui. La révolution juridique portera atteinte aux droits des Arabes. Si un Arabe sort dans la rue et est attaqué, personne ne le protégera - il sera comme un insecte dont la vie n’a aucune valeur. Les Israéliens donnent l’image d’être éclairés et d’essayer de protéger les droits des minorités, mais le changement qui se produit va également nuire au caractère de l’État et à tout ce qu’il préconise en ce qui concerne les Arabes.
Acctéditation de‘Haolam Hazeh’, expliquant que Mansour travaille comme journaliste pour l’hebdomadaire. Photo : Gil Eliyahu
Les Arabes israéliens sont presque totalement absents des manifestations [d’Israéliens contre le gouvernement de coalition, NdT].
La gauche israélienne ne veut pas que les Arabes participent à son combat, et certainement pas publiquement. Elle ne considère toujours pas les Arabes comme des partenaires légitimes. Si, en tant qu’Arabe, je veux être un partenaire, exprimer ma solidarité et me joindre à la lutte, et qu’ils me disent non, qu’attendent-ils de moi ? Les manifestants arabes veulent exprimer leur douleur et pas seulement celle des Juifs. Il est impossible de manifester sans mentionner la question palestinienne. Il doit s’agir d’une lutte conjointe des Juifs et des Arabes, car nous devons parvenir à une solution et à un règlement politique avec les Palestiniens.
Si la gauche israélienne ne veut pas coopérer avec les Arabes, quelles sont les options restantes ?
La plupart de mes amitiés avec des Juifs sont des amitiés avec des personnes issues de cercles de gauche. Ce sont des relations basées sur le respect, mais les Juifs et les Arabes sont comme l’huile et l’eau, ils ne se mélangent vraiment pas. Jusqu’en 1967, la gauche s’est préoccupée d’établir des relations mutuelles avec les Arabes et a fait des efforts considérables, mais elle a été affaiblie par la montée en puissance de la droite. Je regarde la gauche qui reste aujourd’hui et je vois qu’elle a fondu comme du savon. Si elle réussit à arrêter la révolution juridique, peut-être que ça lui donnera un nouveau souffle.
Les Arabes n’ont-ils pas une part de responsabilité dans ce phénomène ?
Atallah Mansour. Les questions qui préoccupent la société arabe ont changé, tout comme la nature de la couverture médiatique.
Je regrette que les Arabes eux-mêmes ne soient pas unis, et pas seulement en Israël. Regardez les pays du monde arabe, par exemple la Syrie. Les réfugiés syriens ne trouvent pas d’abri dans les pays arabes et les gens considèrent toujours Bachar Assad comme un dirigeant légitime. Cela me fait mal de voir les fissures sociales et politiques ; même à Gaza et en Cisjordanie, les gens sont opposés les uns aux autres. Les dirigeants arabes n’ont pas réussi à unifier le monde arabe et ils sont eux-mêmes corrompus, y compris l’Autorité palestinienne.
Même la Liste commune a éclaté.
Cela s’est produit dans le cadre des changements en cours dans la société arabe. J’ai voté pour la Liste commune - c’est le seul choix qui me restait - mais au fil des ans, nous avons vu le soutien au Hadash [dont les racines sont dans le parti communiste] s’affaiblir. Autrefois, ils étaient aussi forts que le soleil ; aujourd’hui, ils ne sont plus qu’une flamme de bougie. Pendant ce temps, les tendances musulmanes se sont renforcées dans le monde arabe - la Liste arabe unie et Mansour Abbas font partie de ce phénomène.
Pourtant, il est entré dans l’histoire en rejoignant une coalition [de soutien au précédent gouvernement, de Gantz-Lapid, NdT].
Il veut être sous les feux de la rampe, même si le prix à payer est de se limiter aux droits civils, sans parler de la question palestinienne. J’ai des doutes lorsqu’ils se présentent comme la Liste arabe unie, car c’est une liste qui ne contient ni chrétiens ni druzes. Pour moi, un parti qui se dit uni et qui ne compte que des musulmans n’a aucune valeur significative.
Des manifestants participent à une manifestation contre la révolution juridique à Tel Aviv en janvier. Ils ne considèrent toujours pas les Arabes comme des partenaires légitimes" Photo : Tomer Applebaum
Kibboutznik arabe
Mansour, veuf et père de trois enfants, est né en 1934 à Jish (Gush Halav en hébreu) dans une famille grecque catholique. Malgré son âge avancé, il écrit régulièrement et travaille actuellement sur un livre en hébreu. « Je ne regrette rien de ce que j’ai fait - je veux juste terminer le livre le plus tôt possible et boucler la boucle », dit-il en souriant : « J’ai même demandé à être enterré dans le village de Jish ».
Outre son travail pour Haaretz, Mansour a également été l’un des fondateurs du journal arabe Al-Sinara en 1983, dont il a été le rédacteur en chef pendant une décennie. Il a également publié huit livres en hébreu, en arabe et en anglais, dont un roman de 1966 intitulé “In a New Light” (Karni Publishers). Le héros, un jeune homme arabe dont le père a été assassiné, est adopté par un juif et va vivre dans un kibboutz. Le livre a provoqué une tempête dans la presse arabe et israélienne. Newsweek salue Mansour comme un prophète méconnu. En 1992, il publie avec le journaliste Uzi Benziman le livre “Subtenants” [Sous-locataires] (Keter Publishing), qui traite de l’état civil des Arabes israéliens et de la politique du gouvernement à leur égard.
Dans ses écrits, Mansour évoque ses souvenirs d’enfance et décrit le paysage des villages palestiniens qui ont été occupés pendant la guerre d’indépendance et dont il ne reste plus aucune trace aujourd’hui. En mai 1948, alors qu’il a 14 ans, son père l’envoie au Liban dans une école de la Croix-Rouge pour les enfants réfugiés palestiniens. « Les Juifs avaient conquis Safed et mon père m’avait dit qu’ils viendraient aussi dans notre village. Il était inquiet et voulait que je continue à étudier, alors il m’a proposé d’aller au Liban », se souvient-il.
L’année suivante, alors qu’il n’avait pas encore terminé ses études, son père lui a dit de revenir car la frontière allait bientôt fermer. Mansour est rentré chez lui et est resté légalement en Israël jusqu’en 1960, date à laquelle il a demandé et obtenu la citoyenneté israélienne.
Des citoyens palestiniens d’Israël manifestent à Lod, en 2021.Photo : Heidi Levine/AP
Après son retour du Liban, Mansour doit s’acclimater à la nouvelle réalité des Arabes en Israël. En 1950, il a commencé à étudier dans un lycée du kibboutz Shaar Ha’amakim, dans le cadre d’un programme visant à former de jeunes Arabes pour qu’ils deviennent des militants du MAPAM, le parti socialiste ouvrier. « Je n’ai jamais pensé que les Juifs étaient mes ennemis. Quand j’ai vu qu’ils étaient déjà là, j’ai compris que je devais trouver un moyen de vivre avec cette nouvelle réalité », explique-t-il. « Je n’étais pas opposé au MAPAM, mais je n’en faisais pas non plus partie. Je me trouvais parmi des gens qui ne pensaient pas comme moi, mais je n’avais pas beaucoup d’options - c’était soit fuir, soit s’intégrer et s’acclimater ».
Son séjour dans le kibboutz n’a fait qu’accentuer son sentiment d’aliénation. « Nous étions 18 jeunes Arabes. Ils nous appelaient ‘le garin* arabe’. Nous étions censés participer au travail du kibboutz. Pendant mon temps libre, je m’asseyais dans la salle de lecture du kibboutz et je lisais les journaux en hébreu. Il était important pour moi d’apprendre l’hébreu et de comprendre comment les Juifs vivaient dans le kibboutz. Je ne voulais pas y rester, ce n’était pas une option. J’ai appris que les Juifs étaient avertis de ne pas s’approcher de nous, les Arabes. Je ne me sentais pas à ma place dans cet endroit et nous étions séparés en deux groupes ».
Après avoir terminé ses études, il a dirigé la branche du mouvement de jeunesse Hanoar Haoved à Jish. Peu à peu, il se rend compte que les Arabes sont « à la limite de la marginalité ». Son sentiment d’aliénation s’est accru lorsque Ben-Gourion a organisé une grande conférence en 1954, au cours de laquelle il a appelé les jeunes à rejoindre Hanoar Haoved et à coloniser le Néguev, mais n’a pas pris la peine d’inviter les Arabes. C’est à ce moment-là qu’il décide d’écrire sa lettre au Premier ministre.
Le fait qu’il ait répondu est un peu surprenant, car de nombreux Palestiniens lui ont envoyé des lettres après la guerre d’indépendance et n’ont pas reçu de réponse. Ben-Gourion a même évité de recevoir des délégations arabes ou de visiter leurs villages.
« J’ai écrit en hébreu et j’ai également utilisé la terminologie politique qu’il utilisait lui-même à l’époque - la langue du MAPAI, qu’il dirigeait », explique M. Mansour. « Mais ce n’était pas qu’une question de mots. Je voulais envoyer un message en tant que jeune Arabe impliqué dans ce qui se passait dans le pays et qui n’acceptait pas de rester en marge ».
Ce jeune Mansour est devenu le journaliste Mansour, qui refuse de transiger sur l’objectif d’intégrer les Arabes israéliens dans tous les domaines de la vie, y compris la politique. Dans un article paru dans Haaretz en 2019, il parle du ton méprisant des politiciens israéliens à l’égard des Arabes. « [Le style et les manières du Premier ministre Menachem] Begin m’ont choqué et m’ont fait changer d’avis sur lui. Je me souviens de son style cultivé chaque fois que j’entends le premier ministre et son principal rival et je suis étourdi par la profondeur de l’abîme dans lequel le gouvernement de l’État d’Israël est tombé. Benjamin Netanyahou et Benny Gantz ne sont pas prêts à adresser une seule phrase cultivée aux représentants arabes à la Knesset ». Quant à Netanyahou, Mansour déclare : « Il ment aux Arabes et n’a pas vraiment l’intention de s’occuper correctement de la société arabe et de ses besoins ».
Chers Juifs
Les premiers articles publiés par Mansour dans Haaretz ont suscité de nombreuses réactions de la part des lecteurs. « Ils pensaient que j’étais un juif irakien. Il leur a fallu du temps pour comprendre que j’étais palkestinien. De mon point de vue, l’écriture était un moyen de rapprocher les deux peuples », explique-t-il. Dans ses reportages, il parle des changements survenus dans la société arabe après la fin du régime militaire. L’un de ses articles portait sur l’ouverture d’une nouvelle route dans le village d’Ein Mahil et un autre sur la vente de porc à Nazareth et la controverse qui s’en est suivie. Il dit : « Aujourd’hui, je regarde les mêmes articles que j’ai publiés et je suis étonné de les avoir écrits ».
Pourquoi ?
Parce qu’avec le recul, je reconnais qu’il y avait autrefois un fossé complet entre les Juifs et les Arabes. Nous avons parcouru un long chemin ensemble depuis lors. Aujourd’hui, nous vivons dans une réalité où les Arabes font partie intégrante de l’espace israélien et sont en contact avec les Juifs. Des équipes médicales dans les hôpitaux, davantage d’Arabes dans l’enseignement supérieur - les questions qui préoccupent la société arabe ont changé, tout comme la nature de la couverture médiatique.
Comment ça se fait ?
Il est impossible de comparer la situation d’alors à celle d’aujourd’hui. Lorsque je travaillais, les Juifs ne connaissaient pas d’Arabes et ne savaient rien de leur vie. Le seul Arabe à qui ils parlaient était peut-être le petit épicier du coin. Aujourd’hui, il y a des journalistes arabes dans les médias israéliens, ce qui, à mes yeux, marque un changement important.
Avez-vous vous-même été confronté à des réactions racistes ?
À la fin des années 1970, des membres du MAPAI m’ont invité à dîner dans le Haut Nazareth. Je suis arrivé avec dix minutes de retard. Juste avant d’entrer dans la pièce, j’ai entendu comment ils parlaient des Arabes et de leur crainte de voir les Arabes s’emparer du Haut Nazareth. L’un des présents a déclaré qu’il fallait adopter une loi qui empêcherait les Arabes d’acheter des maisons dans les communautés juives. Je leur ai dit que la meilleure solution serait peut-être d’organiser une délégation en Afrique du Sud, pour apprendre comment les Blancs traitent les Noirs, et comment ils pourraient ensuite nous traiter. Ils se sont excusés, mais j’ai été très blessé.
Malgré les bouleversements dans les relations entre Juifs et Arabes, Mansour reste optimiste : « De 1948 à 1990, l’attitude de l’État à l’égard des Arabes a évolué positivement dans tous les domaines. Israël a progressivement assoupli les restrictions qu’il imposait aux Arabes et nous, les Arabes, avons également établi des relations de partenariat plus étroites avec les Juifs.
Nombreux sont ceux qui pensent que les émeutes de mai 2021 dans les villes mixtes judéo-arabes ont porté un coup fatal à l’illusion de la coexistence.
Lorsque vous vous promenez à Haïfa et dans d’autres villes mixtes, vous voyez des affiches disant “Les Arabes et les Juifs refusent d’être ennemis”. Personne ne les a vandalisées et, pour moi, cela signifie tout. Il y a des gens ici qui refusent d’être les ennemis les uns des autres. Il est important de regarder ces relations à travers l’histoire. Les Arabes sont de plus en plus présents dans l’espace israélien et il n’y a pas d’autre choix que de continuer à vivre ensemble et de trouver un moyen de partenariat. Les Juifs n’élimineront pas les Arabes, et vice versa : les Arabes n’élimineront pas les Juifs.
Croyez-vous toujours à la solution des deux États ? Pensez-vous qu’il s’agit d’un scénario réaliste ?
Il n’y a pas d’autre solution que deux États. Mais s’il n’y a vraiment aucune volonté d’indemniser les familles qui ont été expulsées d’ici, cela n’arrivera jamais. La paix a un prix et Israël doit faire un effort. L’annexion, si elle a lieu, finira par nuire à l’État d’Israël, qui ne sera plus le même pays. Combien de temps les Palestiniens pourront-ils rester sans égalité ? Lorsque l’État a été créé, les Arabes étaient environ 160 000. Aujourd’hui, nous sommes 2 millions et nous continuons à nous battre pour une égalité totale des droits.
NdT
* En hébreu, garin signifie "noyau" ou "semence". Outre son utilisation littérale, ce mot est également utilisé en Israël pour désigner un groupe de personnes qui se sont installées ensemble en Israël. Le mot hébreu tzabar, traduit en français par sabra, est en revanche utilisé pour désigner un juif israélien né dans le pays, “dur à l'extérieur, mais délicat et doux à l'intérieur”, à l’image de la figue de Barbarie, dont c’est le nom en hébreu. Ah qu’en jolis termes…
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