Antonio Mazzeo, Pagine Esteri,
9/3/2023
Traduit
par
Fausto Giudice, Tlaxcala
L'attente a été longue, mais le résultat de la visite du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou en Italie, la première depuis sa visite il y a huit ans à l'occasion de l'Expo de Milan, semble acquis : Rome et Tel-Aviv renforceront encore plus le partenariat diplomatico-militaire et l'échange de systèmes de guerre.
Benjamin Netanyahou arrive à Rome vingt ans après la signature du mémorandum d'entente Italie-Israël sur la coopération dans le secteur militaire, un accord qui accorde une attention particulière à l'échange de matériel d'armement, à l'organisation des forces armées, à l'éducation et à la formation du personnel, ainsi qu'à la recherche et au développement dans le domaine industrialo-militaire. Le mémorandum prévoit également des « échanges d'expériences entre experts des deux parties » et la « participation d'observateurs à des exercices militaires ». Il a été signé au nom de l’Italie par le ministre de la Défense de l'époque, Antonio Martino (gouvernement Berlusconi II) ; la ratification par le Parlement, à la quasi-unanimité, a eu lieu en mai 2005.
La coopération entre les forces armées israéliennes et italiennes s'est développée ces dernières années, en particulier dans le domaine de la formation et des opérations. « L'armée de l'air israélienne a été déployée à plusieurs reprises en Sardaigne et a effectué des exercices de taille considérable avec l'armée de l'air italienne », rapporte une note du ministère israélien de la Défense datée du 2 novembre 2018. « Les deux forces aériennes ont également procédé à des échanges réguliers d'équipages et leurs personnels respectifs participent à divers cours de formation. ». L'armée de l'air italienne est engagée dans la formation de pilotes israéliens au Centre international de formation (ITC) de Pise pour la qualification sur l'avion C-130J Super Hercules ; en même temps, le personnel italien se rend cycliquement à la base aérienne de Palmachim (près de la ville de Rishon LeZion, sur la côte méditerranéenne) pour mener des cours de qualification dans l'exploitation d'aéronefs télécommandés. A plusieurs reprises, des militaires israéliens ont été les hôtes du Centre de vol expérimental et du Département de médecine aéronautique et spatiale de Pratica di Mare (Rome) : il s'agit de deux organismes chargés des essais en vol d'aéronefs et de systèmes d'armes, ainsi que de la formation et de l'expérimentation dans le domaine de la médecine aéronautique et spatiale.
Fin juillet 2022, quatre chasseurs-bombardiers F-35 de la 32e escadre de l'armée de l'air italienne stationnée à l'aéroport Amendola (Foggia) ont été envoyés dans le désert du Néguev pour participer à un exercice aérien complexe (Lightning Shield) avec les avions “cousins” des forces armées israéliennes (le F-35I Adir du 118e escadron Sud et du 140e Golden Eagle, équipés pour transporter des ogives atomiques). Tous les appareils ont opéré depuis la base aérienne de Nevatim, dans le désert du Néguev, à moins de dix kilomètres de la ville de Be'er Sheva. Comme le note le site spécialisé The Avionist, l'exercice a été planifié en vue de déployer les chasseurs-bombardiers sur “une grande variété de théâtres d'opérations”, le F-35 étant considéré comme “un avion redoutable face à différentes menaces aériennes et terrestres avancées”. Deux mois avant Lightning Shield, les chasseurs-bombardiers israéliens avaient participé à un long exercice d'entraînement au cours duquel des attaques contre l'Iran à l'aide d'armes nucléaires avaient été simulées.
Les forces aériennes de l'Italie et d'Israël organisent également chaque année des “Airmen to Airmen Talks”, des colloques-réunions au cours desquels sont planifiés les activités de formation et d'éventuels programmes d'acquisition conjointe d'aéronefs et de systèmes de guerre.
La dernière rencontre en date a eu lieu en Israël au cours de la première semaine de novembre 2002 : le commandant de la logistique de l'armée de l'air, le général Roberto Comelli, a rencontré son homologue israélien Shlomi Konforty à Tel Aviv pour « consolider la future coopération militaire dans le secteur de la logistique et de l'entretien des infrastructures et des systèmes d'armes dans leurs pays respectifs », comme l'indique une note de l'état-major général de l'armée de l'air italienne. L'intérêt des deux délégations s'est porté sur le développement de nouvelles technologies pour la gestion des processus de maintenance des différents systèmes d'armes dont ils disposent. Les entretiens techniques ont été suivis de visites par les officiers supérieurs italiens de certaines des bases militaires israéliennes les plus importantes, comme le centre de logistique et de maintenance de la base aérienne de Tel-Nof (près de la ville de Rehovot, dans la région centrale) et la base aérienne de Nevatim, siège des escadrons de l'armée de l'air israélienne équipés des nouveaux chasseurs-bombardiers à capacité nucléaire F-35 et des avions sophistiqués de renseignement et de reconnaissance Gulfstream G-550. Le général Comelli et son équipe se sont ensuite rendus dans les installations de l'entreprise leader du complexe militaro-industriel israélien, IAI - Israel Aerospace Industries, où les lignes de recherche et de développement de l'industrie aérospatiale israélienne ont été illustrées. « A l'issue de la réunion, ajoute l'état-major de l'armée de l'air, la visite de la base aérienne de Hatzerim, siège de l'Académie de pilotage de l'IAF, a permis de comprendre les processus liés à la formation des pilotes militaires destinés aux différentes lignes de vol, et d'examiner de plus près les aspects techniques de l'avion Alenia Aermacchi M-346, utilisé pour la formation avancée des pilotes militaires israéliens destinés aux lignes de combat.
En 2012, Israël a acheté 30 chasseurs-entraîneurs M-346 Master produits à Venegono Inferiore dans les usines de Leonardo/Finmeccanica SpA ; les appareils ont été affectés aux Tigres volants du 102e escadron de l'armée de l'air stationné sur la base aérienne de Hatzerim pour préparer les pilotes aux chasseurs-bombardiers de la prochaine génération, mais ils ont également été utilisés pour des attaques au sol avec des bombes et des missiles air-sol ou antinavires. L'année dernière, l'armée de l'air italienne a acheté en Israël deux avions espions CAEW (Conformal Airborne Early Warning & Control System) sophistiqués, basés sur la plateforme du jet Gulfstream G550 développé par la société américaine Gulfstream Aerospace, spécialement modifié et mis à niveau par Elta Systems Ltd, une société du groupe IAI (Israel Aerospace Industries). La valeur de la commande s'élève à 550 millions de dollars, y compris la fourniture de services de soutien au sol et de logistique.
En décembre 2022, la haute direction de la marine italienne a accueilli l'une des figures les plus importantes des forces armées israéliennes, le général Itai Veruv, commandant des instituts de formation militaire, mais surtout chef des Depth Forces, le corps d'élite créé en 2011 pour opérer très rapidement “au plus profond du territoire ennemi”, notamment contre les unités combattantes du Hamas et du Hezbollah. Le général Veruv a visité les installations de la brigade de marine San Marco et la base navale de Brindisi. « Il a pu observer un certain nombre de véhicules terrestres et amphibies utilisés par les fusiliers, notamment le véhicule d'assaut amphibie à chevnilles (AAV-7), capable de naviguer et de se déplacer sur terre », note l'état-major général de la marine. « A la fin de la visite, au château Federiciano de Brindisi, le général Veruv, après avoir apprécié la spécificité et la polyvalence de la Force amphibie, a souligné l'intérêt évident et mutuel pour la connaissance entre les pays et la volonté future de pouvoir planifier des activités conjointes entre les marines des deux pays ».
Mais ce sont surtout les responsables du groupe Leonardo qui espèrent un résultat fructueux de la visite de Netanyahou en Italie. Après avoir vendu aux forces armées israéliennes des hélicoptères multirôles AgustaWestland AW119, des avions de combat M-346 Master, des technologies de télécommunication, etc., les relations de l'entreprise avec les forces armées israéliennes se sont intensifiées ces deux dernières années, Les relations de la holding italienne avec les entreprises militaires israéliennes sont devenues si étroites que le 21 juin 2022, la filiale usaméricaine Leonardo DRS, dont le siège se trouve à Arlington, en Virginie, a signé un accord de fusion avec RADA Electronic Industries Ltd, une entreprise basée à Netanaya (à environ 30 km de Tel Aviv) et spécialisée dans la production de radars militaires tactiques et de logiciels avancés. Concrètement, DRS a acquis 100 % du capital social de RADA en échange de la cession de 19,5 % de ses actions aux propriétaires de la société israélienne. Fondée en 1970, RADA Electronic Industries Ltd. emploie plus de 250 personnes et possède également un centre de recherche dans le High-Tech Park de Beer'Sheva (Negev) et une usine dans la ville de Beit She'an, dans le nord du pays.
Avec la fusion, la nouvelle structure d'entreprise Leonardo-Rada vise à obtenir d'importantes commandes du Pentagone pour l'arsenal des forces terrestres usaméricaines. En outre, une attention particulière est accordée à la demande internationale croissante de drones kamikazes, ces aéronefs pilotés à distance qui se font exploser après avoir atteint leur cible : les dirigeants de Leonardo DRS ont annoncé que l'unité commerciale des systèmes terrestres de St. Louis, dans le Missouri, a signé un accord le 6 octobre 2022 avec une autre société israélienne, SpearUAV Ltd. (basée à Tel Aviv) pour développer une version à l'échelle nanométrique des munitions aériennes Viper.
Il y a un mois, le service de presse de Leonardo SpA a finalement annoncé qu'il avait conclu deux accords importants en Israël : le premier a été signé avec l'Autorité israélienne pour l'innovation (IIA), une agence publique indépendante qui soutient techniquement et finance des projets innovants promus par des start-ups, des entreprises, des multinationales et des universités israéliennes et internationales ; le second a été signé avec Ramot - Société de transfert de technologie pour la « valorisation des activités de recherche et de la propriété intellectuelle de l'Université de Tel-Aviv », une université qui compte plus de 16 000 chercheurs. « Le partenariat, promu par Leonardo, soutenu et coordonné par l'ambassade d'Italie en Israël, avec la contribution de l'ambassade d'Israël en Italie et de la mission économique d'Israël à Milan, vise à renforcer la coopération dans le domaine de la recherche et du développement de start-ups, en tirant parti de l'expérience et des résultats enregistrés par Start-up Nation, qui compte plus de 7. 000 start-ups, environ 430 fonds de capital-risque opérant dans l'écosystème de l'innovation, 100 accélérateurs et 37 incubateurs actifs », explique la holding militaro-industrielle-financière italienne. « L'écosystème dynamique et compétitif des start-ups israéliennes développe des solutions de haute technologie dans de multiples secteurs, y compris ceux d'intérêt stratégique pour les activités de Leonardo, tels que la défense, la cybersécurité, l'aéronautique, le renseignement et l'espace ».
Les activités de développement et de recherche des start-upS israéliennes fonctionneront dans le cadre de l'accélérateur Business Innovation Factory (BIF), le programme de trois ans lancé le 24 janvier 2023 par Leonardo SpA en collaboration avec LVenture Group SpA, une société holding basée à Rome qui est une filiale à 13,6 % de l'Université LUISS Guido Carli. La Business Innovation Factory vise à soutenir une douzaine de start-ups par an « capables d'élargir l'offre de Leonardo en matière de services numériques et de solutions innovantes dans les secteurs de la cybersécurité ».
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