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03/06/2023

GIANFRANCO LACCONE
Italie : une unanimité parlementaire déconcertante en faveur des aliments transgéniques
Il faut les arrêter !

  Gianfranco Laccone, Climateaid.it, 1/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les Commissions VIII et IX (Agriculture et Environnement) du Sénat italien ont approuvé à l'unanimité, dans une manœuvre sournoise classique, un amendement au décret “sécheresse” (Projet de loi 660) qui introduit la possibilité d'essais expérimentaux dans le domaine agricole, visant à expérimenter des plantes obtenues avec des techniques génomiques de nouvelle génération [NGT en anglais]. Celles-ci, de manière moins évidente et traumatisante que les OGM jusqu'à présent, introduisent dans la plante des éléments d'ADN provenant de plantes de la même espèce ou d'autres espèces, capables de modifier son comportement. Le financement correspondant de 60 millions d'euros sur la période triennale 2023-25, inclus dans la même loi et destiné à l'élimination du matériel végétal produit, démontre l'intention d'avancer rapidement dans cette direction ainsi que le caractère pas trop “inoffensif” pour l'environnement de cette expérimentation, combinée au désir d'inciter les maires à accorder des autorisations, en leur garantissant un remboursement généreux des frais d'élimination.

 

 

Pour éviter que l'on dise que ce financement n'a rien à voir avec la sécheresse, à l'article 9 bis, paragraphe 1, le mot est introduit dans le texte avec une référence générique aux finalités, suivie des définitions :  « Afin de permettre la réalisation urgente d'activités de recherche, de vérification et de surveillance, sur des sites expérimentaux autorisés, à l'appui de productions végétales capables de répondre de manière adéquate à la pénurie d'eau et en présence de stress environnementaux et biotiques d'une intensité particulière, la dissémination volontaire dans l'environnement, à des fins scientifiques et expérimentales, d'organismes produits au moyen de techniques d'évolution assistée telles que la cisgénèse et la mutagénèse dirigée est autorisée, conformément aux dispositions du présent article et dans le respect du principe de précaution et de la législation de l'Union européenne applicable en la matière. La cisgénèse désigne les techniques génomiques visant à insérer, sans modification, du matériel génétique appartenant à un organisme donneur de la même espèce que le receveur, ou appartenant à une espèce apparentée sexuellement compatible, comme indiqué par l'Autorité européenne de sécurité des aliments et la Commission européenne. La mutagenèse dirigée désigne les techniques génomiques visant à modifier l'ADN d'un organisme sans introduire de matériel génétique étranger à l'organisme, appelées SDN-1 et SDN-2 par l'Autorité européenne de sécurité des aliments et la Commission européenne ». L'acronyme NBT, utilisé au niveau international, signifie New Breeding Techniques, et comprend toutes les techniques de correction ciblée du génome, également connues sous le nom d'édition du génome ; ces techniques ont maintenant été nommées TEA (Tecniche di Evoluzione Assistita) en italien, affirmant que le changement de terme peut démontrer leur plus grande “naturalité”. 


 

L'épisode est grave pour plusieurs raisons : pour l'unanimité des forces politiques, qui montre que la protection de l'environnement et la sécurité alimentaire sont considérées par nos parlementaires comme une affaire à résoudre, avec une grande témérité, par un artifice législatif ; pour la confiance que les dirigeants des entités publiques montrent dans les résultats possibles de la recherche, pensant encore une fois à tort - comme par le passé - que la chasse aux brevets et à la propriété du génome ne sont qu'un problème technologique et non une affaire énorme sur la peau des populations de la planète ; pour l'excès de confiance dans la possibilité de progrès de la recherche, renouvelant à travers les TEA le mythe de la pierre philosophale, sûrs que cette fois-ci il ne s'agit pas d'un mythe. Comme le rappelle à juste titre le communiqué de toutes les associations environnementales, de producteurs et de consommateurs, dont beaucoup se sont regroupées à l’enseigne “Changeons l'agriculture”, le vote unanime des commissions renforce un modèle de production intensive basé sur l'illusion que seule la technologie peut résoudre les problèmes de la crise environnementale d’origine anthropogéniques. En réalité, on renforcerait le pouvoir de contrôle des multinationales, des détenteurs de brevets et des entreprises agroindustrielles sur les chaînes agroalimentaires, au détriment des agriculteurs et des citoyens.

 

L'ACU demande la suppression immédiate de l’amendement inutile et nuisible au texte du projet de loi 660, censé soutenir l'agriculture en temps de crise.

 

Alors qu'à l'étranger la discussion implique de nombreux secteurs de la société et que les arguments sont approfondis, ici le sujet lui-même est obscurci et détourné par les motivations d'urgence habituelles (il faut lutter contre la sécheresse), jouant sur le malentendu du “nouveau” comme synonyme d'inoffensif, contrairement aux OGM précédents.  Mais l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne dans l'affaire C-528/16, déjà en 2018, a assimilé à toutes fins utiles les NBT/TEA aux OGM, en soumettant l'expérimentation aux mêmes conditions que les OGM, c'est-à-dire qu'elle n'est possible qu'en respectant certains critères.  Une partie de ces critères sont déjà présents dans la loi sur les semences de 2001 - et sont toujours en vigueur - et concernent l'information sur les champs expérimentaux et l'évaluation des risques pour l'agro-biodiversité, les systèmes agraires et les chaînes agro-alimentaires. La tentative subreptice de la loi de considérer l'expérimentation comme respectant le principe de précaution va à l'encontre de la nécessité d'une information transparente et publique sur l'activité, non pas pendant mais avant qu'elle ne soit réalisée.   En substance, il s'agit d'un coup d'État d'une poignée d'inconnus qui entend balayer des décennies de discussions sur les OGM qui, dans l'UE, ont abouti à l'inclusion du principe de précaution dans les traités. Dans notre pays, les variétés locales ont donc été favorisées, ce qui a certainement été l'un des facteurs de l'affirmation du “Made in Italy”, du maintien d'une production qui, autrement, aurait été retirée du marché et du développement généralisé de la culture biologique. Les méthodes de culture moins technologiques, telles que l'agriculture biologique, sont aujourd'hui rentables, évitent de polluer davantage et favorisent la réhabilitation des terres, et sont en mesure de donner une personnalité et une image au “Made in Italy”. Mais il semble que la pensée dominante des organisations agricoles majoritaires soit de sauver leurs chaînes d'approvisionnement et, avec elles, le système de marché qui est aujourd'hui en crise.

 

Comme l'ont montré les inondations en Romagne, le système le plus avancé d'agriculture de marché est très vulnérable au changement climatique et la lutte contre la sécheresse ne trouvera pas de sitôt un réconfort dans la recherche sur le génome. Depuis le début des années 1980, la recherche sur le génome espère trouver un élément d'ADN à transférer pour rendre toutes les variétés de plantes possibles résistantes au stress hydrique, à commencer par le riz, sans y parvenir jusqu'à présent. Mais il y a là une contradiction interne insurmontable, que tant le monde de la recherche que les parlementaires qui l'ont votée si superficiellement ne prennent pas en compte : c'est le marché. Le même marché qui pousse à financer des recherches coûteuses et à arracher les connaissances agricoles des mains des agriculteurs rendra les inventions introduites inutiles. Parce que les cultures à hauts revenus sont irriguées, parce que les plantes produisent plus si elles sont irriguées, et parce qu'il est plus facile de cultiver des plantes nées dans des climats de savane et des variétés de céréales plus rustiques et anciennes que les variétés actuelles, que d'acheter (très cher) du blé issu de la recherche sur les variétés transgéniques. Les anciens OGM ont échoué sur le marché pour des raisons économiques et pas tellement pour des questions génétiques ; ces dernières étaient importantes en raison de la perte de biodiversité qui s'est produite et des mutations induites, des faits qu'il faut empêcher de continuer à expérimenter dans le dos des populations de la planète. L'unanimité obtenue lors du vote en faveur de des TEA ne fait que montrer la distance qui existe désormais entre la vie des gens et celle des hommes/femmes politiques italien·nes. On dit que ce vote contribuera à soutenir les produits fabriqués en Italie : j'aimerais que l'on m'explique comment et pourquoi. Ce que je vois tous les jours quand je vais au marché local, c'est la foule (en constante augmentation) devant les étals de légumes de rebut, ceux qui sont vendus aujourd'hui pour 1,5/2 euros, alors qu'il y a encore trois mois, ils coûtaient moins d'un euro le kg. Et dans les supermarchés, je vois les offres du jour s'épuiser rapidement, au détriment des produits certifiés et plus chers.

 

Les Italiens mangent de plus en plus ce qu'ils peuvent acheter avec les faibles revenus dont ils disposent, et il faudrait pousser la recherche pour trouver des systèmes de culture moins coûteux et moins polluants, capables d'améliorer l'alimentation de masse et, à travers elle, la santé de la population.   

   

01/06/2023

GIDEON LEVY
À 70 ans, personne en Cisjordanie ne me soupçonne d'être un agent du Shin Bet

Gideon Levy, Haaretz, 1/6/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala


Gideon Levy, par Gil Cohen Magen, AFP/Getty Images

Lorsque mon grand-père a eu 70 ans, ses amis ont fêté son anniversaire. Dans le salon du petit appartement de la rue Rozenbaum à Tel Aviv, qui se transformait la nuit en chambre à coucher de ma grand-mère, des amis du vieux pays [les grands-parents venaient de Saaz/Žatec, dans les Sudètes, en Bohême du Nord, Tchécoslovaquie, NdT], dont je me souviens encore des noms, se sont réunis : Franzi, Ilsa, Pepi, Artur, Binka, Irma, Josef, Netka. Il y avait peut-être aussi Mme Korf, peut-être Mme Knopfelmacher, peut-être M. Gronich, l'avocat de la famille, peut-être Mme Simon, l'agent d'assurance.

L'une des amies, probablement Elsa Aufricht, mais je n'en suis pas certain, a récité un long maqama - un genre de récit en prose rimé d'origine arabe, remis au goût du jour en Israël vers 1960 par l'écrivain Haim Hefer - en allemand, en l'honneur de celui qui fêtait son anniversaire. J'avais 10 ans. C'était l'Europe centrale à Tel Aviv. Il y avait des petits fours, des gespritzten (panaché de vin blanc et de limonade), un gâteau au chocolat avec de la crème fouettée appelé “gav hatzvi” (épaule de cerf), ou encore pischinger ou malakoff, que ma grand-mère Trude préparait. Les dames portaient encore les fourrures qu'elles avaient apportées de “là-bas”, ou des tailleurs en jersey d'Iwanir ou des ensembles tricotés d'Aled avec une broche au revers ; elles fumaient des Dubek 10 dans un porte-cigarette. Mon grand-père ne quittait jamais la maison autrement qu'en costume, généralement avec un nœud papillon.  Nous étions des sabras, des nouveaux juifs, sains et robustes, qui allions bientôt écouter Pink Floyd et entrer dans l'armée, et eux, c'étaient des déplacés qui s'accrochaient de toutes leurs forces aux restes d'Europe qu'ils s'étaient conservés ici, loin du Levant, qu'ils ne pouvaient supporter. Ils ne s'intègreraient jamais ici, alors ils nous semblaient encore plus âgés. L'allemand qu'ils parlaient, que je considérais comme une langue réservée aux vieux, n'était pas la seule raison pour laquelle j'avais l'impression qu'il s'agissait d'un événement pour les personnes âgées. À l'époque, les septuagénaires étaient considérés comme très vieux.

 Rozenbaum 6

Mon grand-père Viktor utilisait déjà une canne depuis quelques années, une habitude qui avait commencé, soi-disant, pour que les gens lui laissent leur place dans le bus, ou du moins c'est ce qu'il disait, mais en fait il en avait de plus en plus besoin. Le bandage herniaire qu'il portait le gênait également dans ses mouvements. À l'époque, il n'y avait pas beaucoup de personnes plus âgées que mon grand-père. Il m'entraînait dans ses fréquents déplacements vers les cabinets d'avocats poussiéreux d'Allenby Street, afin d'obtenir des réparations de la part de l'Allemagne pour des amis. Il m'emmenait dans deux de ses cafés habituels, un petit et un grand, et commandait des taxis place HaBima en utilisant les deux seuls mots qu'il connaissait en hébreu : “Rozenbaum shesh” [six]. Il m'attendait sur le balcon de son appartement avec les livres de politique et de philosophie en allemand qu'il avait commandés à Robinson Books dans la rue Nahalat Binyamin, après avoir marqué au crayon les passages qu'il me lirait, et mes yeux se fermaient d'ennui. Il me destinait à la grandeur, en vain.

Lorsque l'accord de cessez-le-feu de la guerre d'usure a été signé le 7 août 1970, il m'a envoyé un télégramme de félicitations. J'étais en Amérique, dans le cadre d'une mission de jeunesse auprès des communautés juives de la côte Est. Nous avons dansé la hora pour eux, vêtus de chemises brodées, au son de “Shir La'shalom”. Mon grand-père pensait que la paix était revenue et il a envoyé un télégramme à son petit-fils. Même à l'époque, je trouvais que c'était une chose bizarre à faire.

La vie a filé à toute allure et j'aurai 70 ans ce vendredi 2 juin. Ce mot roule sur la langue plus facilement qu'à 60 ans, l'année de la véritable crise de la vieillesse, du moins pour moi. La tentation est grande de croire que mon grand-père était un vieux 70 ans et que je suis un jeune de 70 ans. De recourir au cliché selon lequel les septuagénaires sont les nouveaux cinquantenaires. Il est assez facile d'affirmer que cet âge a ses avantages : j'ai déjà vu des gens me céder leur place dans le bus. Mais c'était tellement humiliant. Lorsque cela s'est reproduit, j'ai pensé qu'il valait mieux mourir.

Mais le fait est que chaque fois que je descends du bus, je m'accroche à tous les poteaux possibles pour ne pas trébucher, et je me plains en silence des jeunes qui mettent leurs pieds sur les sièges. Ce n'est qu'en voyageant en Cisjordanie que l'ignominie de la vieillesse devient un avantage : plus personne ne nous soupçonne, le photographe Alex Levac et moi, d'être des agents du Shin Bet, des commandos infiltrés de l’unité Douvdevan ou même des colons. Ceux-là sont tous plus jeunes que nous. Jusqu'à présent, seul Levac a été appelé hadj par des Palestiniens.

Je pensais que ce serait plus dur que ça d'avoir 70 ans.

NdT : Bon anniversaire, Gideon ! 



provisoire

31/05/2023

AMIRA HASS
“Chema Israel” : les paroles de Primo Levi résonnent dans le quotidien des Israéliens et des Palestiniens

 Amira Hass, Haaretz, 30/5/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

“Vous qui vivez en toute quiétude
Bien au chaud dans vos maisons,
Vous qui trouvez le soir en rentrant
La table mise et des visages amis”

Premiers vers de “Chema” [Écoute], poème liminaire du livre Si c'est un homme, de Primo Levi (1946)

Ø Alors que vous vous réveilliez avec la prière de Chema à la radio, les engins de terrassement de l'administration civile israélienne en Cisjordanie rasaient déjà une école, trois tentes et une citerne d'eau, et des dizaines de milliers de travailleurs se pressaient aux postes de contrôle pour entrer en Israël.

Ø Pendant que vous vous brossiez les dents, de jeunes hommes en tsitsit [franges] coupaient un olivier et des milliers de travailleurs continuaient à franchir les points de contrôle.

Ø Pendant que vous faisiez une omelette, des soldats arrêtaient un berger, lui liaient les poignets, lui couvraient les yeux avec un tissu et l'emmenaient dans une base militaire.

Ø Alors que votre fils partait à l'école, les soldats tiraient des grenades lacrymogènes et les femmes et les enfants s'étouffaient.

Ø Alors que la nounou des bébés arrivait, des policiers israéliens déguisés en marchands de fruits et légumes faisaient une descente dans le camp de réfugiés de Jénine.

Ø Pendant que vous enfourchiez votre vélo, il y avait déjà trois morts et huit blessés dans le camp ; une école avait été détruite ; cinq mètres cubes d'eau achetée avaient été gaspillés ; une tente s'était effondrée ; des chèvres effrayées s'étaient dispersées ; une femme s'était évanouie à cause des gaz lacrymogènes et avait été transportée d'urgence à l'hôpital ; 13 arbres avaient été abattus ; des soldats excités par leur mission réussie étaient retournés à leur jeep et des ouvriers avaient atteint les chantiers quatre heures après avoir quitté leur maison.

Ø En arrivant au travail, vous avez reçu un message WhatsApp de votre frère, le soldat : « Tu me manques ».

Ø Pendant que vous vérifiiez vos courriels sur votre ordinateur, trois fonctionnaires de l'administration civile rejetaient les demandes de 286 agriculteurs qui souhaitaient accéder à leurs terres de l'autre côté du mur de séparation.

Ø Pendant que vous discutiez avec un collègue, la Croix-Rouge informait une mère que l'armée ne la laissait pas rendre visite à son fils malade en prison.

Ø Pendant votre pause-café, un garçon fondait en larmes parce qu'un soldat avait pointé un fusil sur lui à un poste de contrôle volant sur la route de Naplouse.

Ø Pendant que vous alliez aux toilettes, l'administration civile approuvait la construction de 48 unités de logement dans un avant-poste de colonie qui avait été légalisé.

Ø Pendant que vous envoyiez votre rapport hebdomadaire au patron, le ministre des Finances annonçait qu'il volait 120 millions de shekels (30 millions d’€) supplémentaires aux recettes de l'Autorité palestinienne.

Ø Pendant que vous montiez sur le toit pour fumer et vous étirer, un jeune Palestinien était placé à l'isolement à la prison de Kishon, à son huitième jour de détention, après avoir été interrogé par le service de sécurité du Shin Bet pendant 15 heures et demie, assis et attaché à une chaise basse.

Ø Pendant que vous et votre mère décidiez de ce que vous alliez préparer pour le dîner du vendredi soir, le ministère palestinien des Finances annonçait que les employés de l'Autorité palestinienne ne recevraient ce mois-ci que 60 % de leur salaire, et 62 véhicules attendaient déjà au poste de contrôle volant.

Ø Pendant que vous écrasiez une cigarette, un médecin de la prison donnait de l'acétaminophène au jeune interné qui s'était plaint de douleurs dorsales et d'engourdissement des mains, et un soldat du poste de contrôle volant tirait des grenades incapacitantes sur les conducteurs et les passagers qui sortaient de leur voiture.

Ø Pendant que vous retourniez à l'ordinateur, un officier de l'infrastructure de l'administration civile ordonnait la destruction d'une conduite d'eau dans un village de la vallée du Jourdain.

Ø En quittant le bureau, vous n'avez pas remarqué les ouvriers en train de construire un immeuble de luxe au milieu des ficus, dans le cadre d'un programme de démolition et de reconstruction.

Ø Pendant que vous alliez chercher votre fils aîné à l'école (un plaisir du jeudi), un chauffeur de la municipalité d'Hébron remplissait un réservoir d'eau à partir du tuyau principal à l'entrée de la ville palestinienne de Bani Nai'm, et les soldats libéraient le berger qu'ils avaient arrêté. Il avait mal à la tête parce que les soldats ne lui avaient pas donné d'eau.

Ø Pendant que votre fils vous parlait du match de football, quatre jeunes hommes portant un grand drapeau israélien envahissaient une maison près d'une source dont ils se sont emparés il y a longtemps dans un village à l'ouest de Ramallah.

Ø Pendant que vous vous rendiez à l'épicerie de votre quartier, le chauffeur de la municipalité d'Hébron apportait de l'eau à un quartier qui n'a pas eu l'eau courante depuis trois mois parce que la pression de l'eau est trop faible en raison des restrictions imposées par Israël sur les quantités d'eau distribuées aux non-Juifs.

Ø Alors que vous rentriez chez vous, des adolescents portant des kippot ont donné des coups de pied à un vieil homme portant un keffieh.

Ø Pendant que vous changiez une couche, un adolescent de la "“jeunesse des collines” a tweeté : « Louons Dieu pour la forte présence juive dans la région et pour les bergers juifs qui ont reconquis le territoire... Les Bédouins [du village d'Ein Samiya] quittent la région... Nous voulons que tous les Bédouins... quittent le pays. Il y a de meilleurs pâturages en Arabie saoudite ».

Ø Pendant que vous coupiez une tomate, le journal télévisé annonçait qu'un Arabe a été reconnu coupable d'incitation et condamné à un an de prison.

Ø Pendant que vous lisiez une histoire à votre fils, la Haute Cour de justice rendait deux arrêts qualifiés, l'un autorisant l'État à détruire des villages et à les remplacer par un champ de tir militaire, l'autre permettant au Shin Bet de continuer à détenir un Palestinien qui était déjà en garde à vue sans inculpation ni preuves depuis 19 mois d'affilée.

Ø Pendant que les cris de votre bébé vous réveillaient, des soldats masqués faisaient une descente dans 17 villages, camps de réfugiés et quartiers, arrêtant huit hommes. Et pendant que vous vous remettiez au lit, un petit garçon de 4 ans mouillait sa culotte parce que les soldats avaient fait sortir toute sa famille de leur maison et l'avaient emmenée dans la cour, leurs fusils braqués sur eux.

Ø Pendant que vous vous réveilliez, neuf ordonnances sur le vol de terres rédigées par des juristes militaires attendaient la signature du chef de l'administration civile.

Et il y eut un soir, il y eut une nuit et il y eut un bonjour Israël.