12/06/2024

Gustavo Petro: Acceptance speech for the Grand Collar of the State of Palestine

Gustavo Petro, Bogotá, June 3, 2024
Translated by Supriyo Chatterjee, Tlaxcala

On June 3, 2024, in Bogotá, Colombian President Gustavo Petro was awarded the Grand Collar of the State of Palestine, the highest civilian order of the State of Palestine. Below is his acceptance speech



Photo:
Andrea Puentes – Presidency of Colombia

“The young people coming out of universities in the United States, coming out in Europe, in Asia, in Africa and in Latin America, are the genuine expression of a new humanity; one that if it survives is going to build a different world, far removed from the material, much more rooted in frugality, but above all in wisdom and knowledge, where humanity no longer finds pages where some human beings kill other human beings.”

I have been awarded many decorations throughout my life. The first ones from my school, which are the ones I remember most; the medals of excellence that Father Pedro gave me -the last one he did not want to give me, but it was his turn-, and I must tell you that this is perhaps the most valuable one I have received because of what it undoubtedly means in the history of the world, in the history of resistance, and now in these fateful days we are living, which mark a point of departure in the history of mankind.

It is not just any event that we are witnessing: these are the new signs of a terrible world, but one that must also be filled with hope. It is not a world as Fukuyama dreamed, without contradictions, totally peaceful. It is a world deeply stressed by politics, perhaps more so than in the twentieth century, which experienced two world wars, which lived through the socialist revolution for almost the entire century.

The struggle between two different systems of understanding the world, of understanding the economy, of understanding society, which could have led to a third conflagration, undoubtedly, we were very close to it, but the responsibility of one and the other, in the Soviet Union and in the United States, which had already been allies in a war, an episode which is sometimes unknown, when together they decided to fight fascism, both the American society and the Soviet society knew very clearly that their enemy was not one of the two, that their enemy was a third one that was beginning to advance as a kind of specter in Europe at that time, throughout the world, carrying with it a series of criminal doctrines that became powerful and that filled drove humanity to one of its worst pages moments.

It cost fifty million dead to get out of that situation, and undoubtedly it was the soldiers of the Soviet and North American peoples who, together with many resistors in Europe, tens of thousands of people who took up arms, who did not agree with fascism, with absolute oppression, with genocide, and knew how to resist, in a journey that in the end was one of the great epic battles of humanity.

ALLISON KAPLAN SOMMER
Ces Israéliens qui se mettent le doigt dans l’œil en se réjouissant de la montée de l’extrême droite “pro-israélienne” en Europe

Allison Kaplan Sommer, Haaretz, 10/6/2024
Traduit par Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les Israéliens feraient bien d’d’écouter des personnalités comme le chef de la Conférence des rabbins européens, le rabbin Pinchas Goldschmidt, qui a écrit à la veille des élections européennes qu’il n’y avait « pas de bons choix » pour les Juifs européens.


Israel Katz, janvier 2023. Photo Olivier Fitoussi

Dans des circonstances normales, les dirigeants et experts israéliens montreraient au moins une certaine détresse en apprenant que les partis d’extrême droite liés au passé nazi et fasciste et aux scandales d’antisémitisme actuels ont dominé les élections au Parlement européen.

Mais, comme pour bien d’autres choses, la guerre contre le Hamas à Gaza et la condamnation mondiale d’Israël ont modifié ce calcul. Après les récentes annonces de l’Espagne, de l’Irlande, de la Norvège et de la Slovénie selon lesquelles elles reconnaîtraient officiellement un État palestinien, la victoire de la droite en Europe a plutôt suscité l’optimisme quant au ralentissement, voire à l’arrêt de la tendance.

Le chef du bureau européen de la chaîne de télévision la mieux notée d’Israël, Elad Simchayoff, a célébré sur X la démission du Premier ministre belge Alexander De Croo , qui avait sévèrement critiqué Israël au cours de la guerre. Les responsables du ministère israélien des Affaires étrangères avaient craint que De Croo ne soit sur le point d’amener la Belgique à suivre les traces des autres pays et à reconnaître un État palestinien.

 Simchayoff a tweeté une vidéo de l’annonce en larmes de De Croo, commentant joyeusement : « Au revoir et prenez soin de vous. Nous nous souviendrons toujours de votre manque de clarté morale et de tact, en voyageant jusqu’en Égypte pour prononcer un discours au passage de Rafah quelques instants avant le passage du premier groupe defemmes et d’ enfants otages de retour en Israël. »

En effet, le 24 novembre, De Croo se trouvait à Rafah avant qu’un accord n’aboutisse à la libération de 13 otages du Hamas. Alors que le Premier ministre belge a salué cette libération et appelé à la libération de davantage d’otages, il a réservé des propos durs à l’égard d’Israël , dénonçant la « violence des colons », la violation du droit humanitaire international, le « meurtre de personnes innocentes » et appelant à un « cessez-le-feu permanent ».

Le ministre de la Diaspora, Amichai Chikli, s’est lui aussi moqué des larmes de De Croo, affirmant :« soutenir le terrorisme ne trouve pas un écho auprès du peuple belge ».


Le Premier ministre belge @alexanderdecroo a pleuré hier lorsque son parti a été vaincu. Apparemment, soutenir le terrorisme ne trouve pas un écho auprès du peuple belge.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Israel Katz, censé être le plus haut diplomate du pays, a publié un tweet extrêmement peu diplomatique en anglais et en espagnol, qui présentait un mème des principaux dirigeants espagnols avec des œufs crus et dégoulinants écrasés sur la tête, célébrant le fait que la reconnaissance de l’État palestinien ait été « punies» par les électeurs.

« Le peuple espagnol a puni la coalition @sanchezcastejon et @Yolanda_Diaz_ par une défaite retentissante aux élections. Il s’avère que soutenir les meurtriers et les violeurs du Hamas n’est pas payant », a écrit Katz.

Un satiriste israélien, Matan Blumenblat, a souligné dans un article sur X l’ironie du fait que la position d’Israël et de l’Europe est si lamentable que des Israéliens sont maintenant reconnaissants que « les nazis soient de retour au pouvoir ».

 Il y a des raisons pratiques à l’oscillation du pendule. Comme l’a noté le correspondant diplomatique de Haaretz, Amir Tibon, les responsables israéliens croisent les doigts pour que les résultats des élections améliorent les chances de voir les propositions anti-israéliennes rejetées par l’UE et créent plus d’obstacles aux mesures propalestiniennes que les partis de gauche ont cherché à promouvoir après le déclenchement de la guerre.

Même si cela est compréhensible, il est inconvenant pour un État juif de se réjouir de la montée de personnalités d’extrême droite et xénophobes comme la française Marine Le Pen, le néerlandais Geert Wilders et les représentants d’Alternative pour l’Allemagne, le parti d’extrême droite avec un passé néo-nazi qui a obtenu 16 pour cent des voix aux élections européennes en Allemagne, ce qui en fait le deuxième parti allemand au parlement.

Parmi les autres vainqueurs d’extrême droite : le politicien Grzegorz Braun, le député polonais qui avait utilisé en décembre dernier un extincteur pour éteindre une bougie sur une menorah allumée pour Hanoukka dans l'enceinte du Parlement polonais, expliquant que  son geste visait à « restaurer la normalité et l’harmonie en mettant fin à l’acte de victoire de Satan, du Talmud et du sectarisme » . [voir vidéo]

Les Européens juifs sont beaucoup plus circonspects quant aux résultats, comme ils l’ont été lors des élections. Les Israéliens feraient bien d’écouter des personnalités comme le rabbin Pinchas Goldschmidt, chef de la Conférence des rabbins européens, qui a écrit à la veille des élections qu’il n’il n’y avait « pas de bons choix » pour les Juifs européens.

« Nous craignons pour l’avenir de l’Europe et pour la place que nous y occupons en tant que minorité, quelle que soit la manière dont nous votons et quel que soit le vainqueur », a-t-il écrit.

Une fois les résultats connus, les dirigeants israéliens devraient envisager de faire de même.

 

11/06/2024

Gustavo Petro: discorso di accettazione del Gran Collare dello Stato di Palestina

Gustavo Petro, Bogotà, 3 giugno 2024
Tradotto da Giulietta Masinova, Tlaxcala

Il 3 giugno 2024, a Bogotà, il Presidente colombiano Gustavo Petro è stato insignito del Gran Collare dello Stato di Palestina, il più alto ordine civile dello Stato di Palestina. Di seguito il suo discorso di accettazione



Foto
: Andrea Puentes - Presidenza della Colombia

“I giovani che escono dalle università degli Stati Uniti, dell'Europa, dell'Asia, dell'Africa e dell'America Latina sono l'espressione genuina di una nuova umanità che, se sopravvive, costruirà un mondo diverso, lontano dal materiale, molto più radicato nella frugalità, ma soprattutto nella saggezza e nella conoscenza, dove l'umanità non trova più pagine dove esseri umani uccidono altri esseri umani”.

Nel corso della mia vita ho ricevuto molte decorazioni. Le prime alla scuola, che sono quelle che ricordo di più; le medaglie di eccellenza che mi ha conferito Padre Pedro - l'ultima non voleva darmela, ma me l'ha data - e devo dirvi che questa è forse la più preziosa che ho ricevuto per il significato che indubbiamente ha nella storia del mondo, nella storia della resistenza e ora in questi giorni fatidici che stiamo vivendo, che segnano un prima e un dopo nella storia dell'umanità.

Non è un evento qualsiasi quello a cui stiamo assistendo: sono i nuovi segni di un mondo terribile, ma che deve anche essere riempito di speranza. Non è un mondo come lo sognava Fukuyama, senza contraddizioni, totalmente pacifico. È un mondo profondamente stressato dalla politica, forse più che nel XX secolo, che ha vissuto due guerre mondiali, che ha vissuto la rivoluzione socialista per gran parte del secolo.

De Belgrade à Beersheba : des armes serbes expédiées vers Israël pendant l’assaut sur Gaza
De Srebrenica 1995 à Gaza 2024, une même logique génocidaire

Sasa Dragojlov à Belgrade et Avi Scharf  à Tel Aviv, BIRN, 10 juin 2024
Traduit par Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

Une enquête conjointe de BIRN [Balkan Investigative Reporting Network] et Haaretz a identifié six vols militaires israéliens de Belgrade à Beersheba cette année, correspondant à des exportations d’armes serbes vers Israël d’une valeur de 15,7 millions d’euros, armes risquant d’être utilisées en violation du droit humanitaire international à Gaza. Peu après 14 heures le 5 février, un passionné d’aviation filmait depuis un champ à côté de l’aéroport de Belgrade lorsqu’il a repéré ce qu’il a décrit comme un avion "rare" en train d’atterrir.

Illustration : Igor Vujcic

L’enthousiaste de l’aviation a publié la vidéo sur sa chaîne YouTube, identifiant l’avion comme un Boeing 707-300. "J’ai eu le plaisir de filmer ce magnifique oiseau classique aujourd’hui à l’aéroport de Belgrade !" a-t-il écrit en anglais.

Avec le numéro de série 272, l’avion appartient à l’armée israélienne. Après quelques heures de repos, il a décollé à précisément 18h04, dans un ciel d’hiver peint en rose par le coucher du soleil.

Gustavo Petro : Discours de réception du Grand collier de l'État de Palestine

Gustavo Petro, Bogotá, 3/6/2024
 Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le 3 juin 2024, à Bogotá, le président colombien Gustavo Petro a été décoré du Grand collier de l'État de Palestine, l'ordre civil le plus élevé de l'État de Palestine. Ci-dessous son discours de réception

 

Photo Andrea Puentes , Présidence de Colombie

« Les jeunes qui sortent des universités aux USA, en Europe, en Asie, en Afrique et en Amérique latine sont l'expression authentique d'une nouvelle humanité qui, si elle survit, construira un monde différent, éloigné du matériel, beaucoup plus enraciné dans la frugalité, mais surtout dans la sagesse et la connaissance, où l'humanité ne trouve plus de pages où des êtres humains tuent d'autres êtres humains ».

Palabras del presidente Gustavo Petro luego de recibir la condecoración El Gran Collar del Estado de Palestina


Gustavo Petro, Bogotá, 3 de junio de 2024

El 3 de junio de 2024, en Bogotá, el presidente de Colombia, Gustavo Petro, recibió el Gran Collar del Estado de Palestina, la más alta orden civil del Estado de Palestina. A continuación, su discurso de aceptación


Foto: Andrea Puentes - Presidencia

“Los jóvenes que salen de las universidades en Estados Unidos, que salen en Europa, en Asia, en África y en América Latina, son la expresión genuina de una nueva humanidad; una que si sobrevive va a construir un mundo diferente, muy alejado de lo material, mucho más afincado en la frugalidad, pero sobre todo en la sabiduría y en el conocimiento, donde la humanidad ya no encuentre páginas donde unos seres humanos matan a otros seres humanos”.

10/06/2024

Gomme arabique sanglante : Comment le soda, le chocolat et le chewing-gum financent la guerre au Soudan

Alexandra Wexler à Johannesburg et Nicholas Bariyo à Kampala, Ouganda, The Wall Street Journal, 23/5/2024
Traduit par
Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

 Une milice puissante et l’armée du pays profitent toutes deux du commerce de la gomme arabique, un ingrédient courant.

Environ 80 % de la gomme arabique mondiale est récoltée sur les acacias du Soudan. Photo MOHAMED NURELDIN ABDALLAH/REUTERS

Une fois par semaine, Mohamed Jaber emprunte une route cahoteuse jusqu’à la ville soudanaise d’El Obeid, l’arrière de son camion chargé de sacs remplis de morceaux ambrés de gomme arabique, un ingrédient peu connu mais présent dans le chocolat, le soda, le chewing-gum et d’autres produits de consommation.

Vers la fin de son trajet de 50 miles (80 km), Jaber déclare payer environ 330 $ aux combattants des Forces de soutien rapide (FSR), un groupe paramilitaire accusé par le gouvernement usaméricain de nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité dans la guerre civile soudanaise qui dure depuis un an. Les FSR ont assiégé El Obeid depuis juin et contrôlent trois des quatre principales routes d’accès à la ville, qui est l’un des principaux centres agricoles du Soudan et est tenue par l’armée du pays.

« Se déplacer en convois est le seul moyen de rester en sécurité, mais ça coûte très cher », dit Jaber. « Tout le monde doit payer » .

09/06/2024

GARY FIELDS
1984, c’est maintenant : la novlangue et le déni du génocide

Gary Fields, Jadaliyya, 30/4/2024
Traduit par
Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

Fin mars, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a publié le rapport de Francesca Albanese confirmant ce que les chercheurs en génocide, les reporters sur le terrain à Gaza et les États-nations à la Cour internationale de justice ont soutenu pendant des mois à propos de la guerre d’Israël contre l’enclave : l’assaut d’Israël contre le peuple de Gaza a atteint le seuil du génocide. Intitulé « Anatomie d’un génocide », le rapport décrit à grands traits et avec des détails graphiques ce qui est apparu comme l’offensive militaire la plus destructrice menée contre un territoire et son peuple depuis la Seconde Guerre mondiale. Cet assaut israélien a entraîné la mort de plus de 34 000 Gazaouis, dont plus de 14 000 enfants ; la destruction d’hôpitaux, d’écoles et de toutes les universités de Gaza ; l’arasementde 75 % du parc de logements et des infrastructures civiles de Gaza, y compris les usines de dessalement d’eau et les centrales électriques ; la destruction de sources de production alimentaire telles que des boulangeries et des fermes ; et l’anéantissement de symboles culturels, notamment des mosquées et des églises. 


Antonio Rodríguez, Mexique

En parallèle à ce carnage, comme le note le rapport, l’État d’Israël s’est engagé dans un effort délibéré pour éradiquer la population de Gaza en empêchant les produits de première nécessité – nourriture, eau, carburant et médicaments – d’entrer sur le territoire et a même tué des centaines de travailleurs humanitaires essayant de livrer des cargaisons d’urgence au peuple gazaoui.

07/06/2024

FRANCO “BIFO” BERARDI
Amalek : traumatisme, ténèbres et loups travestis

Avertissement : cet article contient deux vidéos de rappeurs israéliens appelant au génocide. Personnes sensibles s’abstenir.

 Franco “Bifo” Berardi, il disertore, 5/6/2024
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

« Va maintenant et frappe Amalek. Vouez à la destruction tout ce qui leur appartient. Tu ne les épargneras pas et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et brebis, chameaux et ânes » (1 Samuel 15.2-3)

 Dans les ténèbres

« Ces gens méritent de mourir, ils méritent une mort douloureuse, une mort atroce, et au lieu de ça, ils s'amusent sur la plage », déclare sur la chaîne Canal 12 Yehuda Shlezinger, correspondant pour les affaires religieuses d’ Israel Hayom, un journal israélien de droite à grand tirage, après avoir vu une photo de deux Palestiniens se baignant dans la mer sur une plage de Gaza. « Nous avons besoin de beaucoup plus de vengeance, d'un fleuve de sang gazaoui ».

« Ce serait bien », écrit Meghan Stack, auteure d'un article publié dans le New York Times sous le titre “The View Within Israel Turns Bleak, « ce serait bien si M. Shlezinger était une figure marginale ou si les Israéliens étaient scandalisés par ses fantasmes sanglants. Mais malheureusement, ce n'est pas le cas ».

L'article de Meghan est rempli d'informations que je qualifierais de choquantes si nous n'étions pas habitués à l'horreur : « En février, selon un sondage, une majorité d'Israéliens s'oppose à l'envoi de nourriture et de médicaments à Gaza ».

Meghan Stack rapporte que certains musiciens rappeurs, très écoutés par les jeunes Israéliens, appellent à l'anéantissement et prêchent qu'il n'y aura pas de pitié pour les rats qui seront exterminés dans leurs terriers.


 De nombreux magasins affichent des produits sur lesquels on peut lire : « Achevez-les » [Finish them]. Cette phrase, Nikki Haley l'a inscrite sur une bombe destinée à tuer des enfants palestiniens.

Traduction littérale de ces deux mots : « Exterminez-les ».

Comment Israël en est-il arrivé là ?

06/06/2024

GIDEON LEVY
La solution à l’enlisement d'Israël dans le Nord réside dans la fin de la guerre à Gaza

Gideon Levy, Haaretz, 5/6/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le succès ne se discute pas, et certainement pas en Israël. Après le succès éclatant dans la bande de Gaza, nous adopterons le même modèle au Liban : une grande guerre, une victoire totale. Nous l'avons déjà dit à maintes reprises : nous n'avons rien oublié et nous n'avons rien appris. Mais nous n'avons jamais appliqué cette platitude en lambeaux à un laps de temps aussi court.


Des résidents déplacés du nord d'Israël dans un campement de protestation près de la route 90, le mois dernier. Photo Gil Eliahu

Les leçons tirées des guerres sont toujours oubliées à un moment ou à un autre, mais devons-nous oublier la leçon de la guerre à Gaza avant même qu'elle ne soit terminée, pour répéter la même erreur ? La folie d'Israël lui fait honte, comme l'arrogance de croire que la victoire est dans notre poche.

Disons-le tout de suite : comme celle qui l'a précédée à Gaza, la guerre qui est sur le point de se développer dans le nord sera classée comme une autre guerre choisie. Si Israël n'aurait pas dû envahir Gaza avec toutes ses forces dans le seul but de tuer, de détruire et de punir, principalement pour étancher sa soif de vengeance - une guerre choisie évidente -, la guerre du Liban sera, elle aussi, classée parmi toutes les guerres choisies d'Israël.

La troisième guerre du Liban, qui est aux portes, sera bien sûr décrite, comme ses prédécesseuses, dont le première s'appelait Opération Paix en Galilée et a éclaté, soit dit en passant, le 6 juin 1982, et dont la seconde a éclaté en juillet 2006, comme une guerre qui nous a été imposée : que faire lorsque la Galilée est abandonnée et en flammes ? Rester assis et se taire ? Baisser la tête ? La discussion sur une guerre dans le nord est une discussion unilatérale. Personne ne présente l'alternative (et il y en a une). La seule question qui se pose est celle du calendrier.

Nous devons dispenser le Nord de la punition du Hezbollah, et cela, dit-on, ne peut se faire que par la guerre. Comme à Gaza. Une fois de plus, les Forces de défense israéliennes vont envahir, occuper, tuer et être tuées ; le front intérieur sera battu comme il ne l'a jamais été auparavant, et l'armée le sera probablement aussi. 

Portion du mur frontalier Liban-Israël. Au-dessus de l'image d'Al Qods : "La Porte du Retour"

Le terrible verbe “intensifier” a été transféré vers le nord. Intensifier la guerre. Le chef d'état-major a déjà annoncé que nous avions atteint le point où il fallait prendre une décision. Il a parlé de la seule décision qu'il connaisse : une autre guerre. Il n'y a pas d'alternative, absolument pas d'alternative.

Bien sûr qu'il y a une alternative. Au milieu de tout le bruit, de tout le feu et de toute la souffrance des habitants du nord, la raison pour laquelle le Hezbollah attaque a été oubliée, et on a fait en sorte qu'elle soit oubliée : la guerre à Gaza. Il y a maintenant deux alternatives : l'une, vers laquelle nous nous dirigeons, consiste à reproduire le fiasco de Gaza jusqu'aux abords de Beyrouth. La seconde, qui est trop bonne, est d'arrêter la guerre à Gaza. La paix en Galilée ne sera obtenue que de cette manière. Un accord garantira toujours plus qu'une nouvelle guerre, qui risque d'être la pire des guerres d'Israël.

05/06/2024

JADALIYYA
La dissidence juive aux USA
Entretien avec Marjorie N. Feld, auteure du livre “The Treshold of Dissent: A History of American Jewish Critics of Zionism”

Marjorie N. Feld (Harrisburg, Pennsylvanie, 1971) est professeure d'histoire au Babson College, dans le Massachusetts (USA), où elle donne des cours sur l'histoire sociale, l'histoire du travail et l'histoire du genre, la justice alimentaire et la durabilité aux USA. Elle est membre des conseils consultatifs académiques des Archives des femmes juives et de l’organisation
Jewish Voice for Peace [Voix Juive pour la Paix], fondée en 1996.
Elle est l'auteure de Lillian Wald :  A Biography (The University of North Carolina Press, 2012), qui a remporté le prix Saul Viener Book Prize de l'American Jewish Historical Society et de Nations Divided : American Jews and the Struggle over Apartheid (Nations divisées : les Juifs américains et la lutte contre l'apartheid) (Palgrave McMillan, 2014). Son nouveau livre, The Treshold of Dissent: A History of American Jewish Critics of Zionism (Le seuil de la dissidence : une histoire des critiques juifs américains du sionisme) vient d’être publié (New York University Press, 2024). Ci-dessous une interview de l’auteure et un extrait de son livre.

Jadaliyya, 3/6/2024
Traduit par Layân Benhamed, édité par Fausto Giudice, Tlaxcala

Jadaliyya (J) : Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ?

Marjorie Feld (MF) : J'ai commencé ce livre il y a huit ans, à l'intersection de mes observations au sein de la communauté juive usaméricaine et de mes propres intérêts de recherche. J'avais longtemps vu des dirigeants communautaires juifs usaméricains et des laïcs marginaliser les Juifs usaméricains qui n’étaient pas d’accord avec le soutien inconditionnel à Israël. Dans mes recherches pour mon livre sur les Juifs usaméricains et l'apartheid, j'ai interviewé des militants qui ont souligné leur malaise face à ce soutien remontant aux années 1960. Lorsque je suis retournée dans les archives pour faire des recherches pour ce livre, j'ai trouvé un continuum ininterrompu de critiques du sionisme usaméricain remontant à la fin du XIXe siècle. Dans Threshold, j'explique les visions du monde et les perspectives des critiques du sionisme usaméricain et je retrace leur parcours dans la vie communautaire juive aux USA.

J : Quels thèmes, enjeux et littératures particuliers le livre aborde-t-il ?

MF : Chaque chapitre analyse une période distincte et un groupe d'acteurs historiques, des Juifs usaméricains qui se souciaient profondément de la vie juive usaméricaine et qui étaient également critiques du sionisme usaméricain pour des raisons spécifiques. Le livre examine comment et pourquoi ces individus ont choisi d’entrer an dissidence par rapport au sionisme usaméricain, et comment la communauté juive usaméricaine au sens large a réagi à leur dissidence. Par exemple, certains Juifs usaméricains du début du XXe siècle, les sujets du premier chapitre de “Threshold”, craignaient que le sionisme ne fasse paraître tous les Juifs usaméricains plus loyaux envers une nation qui n'était pas les USA. En plein climat de xénophobie et racisme de l'USAmérique de Jim Crow, ils redoutaient les accusations antisémites de double loyauté et rejetaient le sionisme dans cet esprit. Les dirigeants sionistes juifs usaméricains de cette époque craignaient également profondément l'antisémitisme et s'inquiétaient du fait que toute division au sein de la communauté créerait une vulnérabilité et menacerait l'intégration des Juifs dans le courant dominant blanc.

Les sujets du deuxième chapitre, des Juifs libéraux et anti-communistes de gauche au milieu du siècle, voyaient le sionisme comme diminuant la vitalité de la vie juive en dehors d'Israël, et aussi comme diminuant les valeurs libérales des Juifs usméricains. Les pertes immenses de l'Holocauste rendaient ces critiques particulièrement conscients de la nécessité de trouver des endroits sûrs pour la vie juive ; ils n'étaient pas d'accord pour dire qu'un État juif garantirait la sécurité juive.

Au sein des mouvements de libération à partir des années 1950, les leaders anticolonialistes arabes, palestiniens et afro-américains et leurs alliés ont commencé à critiquer le colonialisme de peuplement d'Israël, et certains Juifs usaméricains étaient ouverts à ces leçons. Ceux-ci, avec le mouvement anti-guerre, sont les sujets des deux derniers chapitres du livre. Les dirigeants ont critiqué l'oppression des Palestiniens par Israël, puis son occupation de la Palestine après 1967 ; ils craignaient pour l'avenir de la vie juive usaméricaine et l'isolement résultant du soutien inconditionnel de la communauté à Israël. Le soi-disant “consensus” sur le sionisme isolait les Juifs des courants et des mouvements progressistes du XXe siècle jusqu'à nos jours.

Why so many young Jews are turning on Israel | Simone Zimmerman | The Big Picture S4E7
Watch the movie 'Israelism'



With college campuses all over the US gripped by intense battles around free speech, antisemitism and Palestinian rights - the voices of young Jewish Americans have led the way. One of the boldest and most prominent voices is that of Simone Zimmerman. Zimmerman was raised in a conservative Zionist household, taught to idolise and support Israel as the highest aspiration of all young Jewish Americans like her. But as she got older, she began to question whether there was another side to Israel she was being sheltered from - and when she sought answers, she was shocked at what she discovered. Prompted by conversations with Palestinians under occupation and Jewish activists, she went home and began to organise in an attempt to stop her government’s military support for Israel, and as she puts it, “live out the values of justice I was raised on”. On the frontlines of protests in campuses and halls of power, she suddenly found herself a target of accusations by pro-Israeli groups, who now called her “antisemitic” and threatening her online. After October 7, she became more determined than ever to challenge the beliefs in her community about Israel, and the reluctance by many to see the horrific reality of what’s happening in Gaza. This week on The Big Picture, we sit down with Simone Zimmerman to talk about her story, which has been documented in a provocative new documentary called ‘Israelism’, and whether we’re witnessing a turning point in how young Jewish-Americans see Israel, and how young Americans see their government’s support for the occupation.

Check out Simone Zimmerman’s work with If Not Now here: https://www.ifnotnowmovement.org

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