Phrase du jour Quote of the day

Quand le vent souffle fort, il emporte aussi les girouettes

Jean-Luc Mélenchon, à propos de François Ruffin, le Picard debout

04/03/2024

Shwetha Srikanthan
L’approfondissement des liens entre l’Inde et Israël et ses implications pour l’Asie du Sud
Entretien avec Rohan Venkat

Himal Southasian, 14/1/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Entretien avec Rohan Venkat sur le partenariat économique et militaire qui anime les relations entre l’Inde et Israël, et sur la façon dont il s’écarte de l’histoire de la solidarité de l’Inde avec la Palestine.

 Shwetha Srikanthan : Le bombardement brutal de Gaza par Israël a tué plus de 20 000 Palestiniens et en a blessé plus de 50 000 autres en un peu plus de deux mois, depuis l’attaque du 7 octobre par le Hamas. Alors que l’Inde a fermement condamné l’attaque et exprimé sa solidarité avec Israël, elle a récemment voté en faveur de plusieurs projets de résolution aux Nations unies qui critiquaient la conduite d’Israël à Gaza et soutenaient l’aide aux civils palestiniens, après s’être initialement abstenue sur une résolution qui appelait à une trêve humanitaire immédiate et à un accès humanitaire sans entrave à la bande de Gaza. Cela signifie que des changements profonds ont eu lieu dans l’approche de l’Inde à l’égard d’Israël. Pendant la majeure partie de l’histoire de l’Inde indépendante, New Delhi n’avait pas de relations diplomatiques avec Israël. Sous l’égide de Narendra Modi et de Benjamin Netanyahou, l’Inde et Israël ont développé un partenariat militaire important et des liens économiques croissants. Dans une recension [à lire ici en français] de Hostile Homelands : The New Alliance between India and Israel, pour Himal Southasian, Rohan Venkat explore la convergence idéologique de l’hindutva et du sionisme et les conséquences pour le Cachemire et la Palestine, et affirme que l’approfondissement des liens entre l’Inde et Israël ne s’arrête pas là.

Dans cette édition d’Himal Interviews, Rohan Venkat explique que le point commun le plus puissant entre l’Inde et Israël ne réside pas dans les liens commerciaux et militaires qu’ils ont tissés au cours des trois dernières décennies. Rohan explore plutôt la manière dont les mouvements idéologiques qui sont au cœur des dirigeants politiques indiens et israéliens d’aujourd’hui servent à justifier les excès des deux États, ainsi que les implications plus larges de cette situation pour la région de la mer du Sud.

Shwetha : Pour commencer, pourriez-vous nous donner un aperçu de la réaction de l’Inde à la guerre Israël-Gaza et nous expliquer en quoi le virage vers Tel-Aviv que New Delhi a pris plus récemment s’écarte de l’histoire de la solidarité du pays avec les Palestiniens ?

Rohan : Au lendemain de l’attaque du Hamas le 7 octobre et de la réponse de l’État d’Israël, l’Inde a gardé le silence officiel, c’est-à-dire que le ministère des Affaires étrangères n’a fait aucun commentaire sur ce qui se passait pendant quelques jours. Au lieu de cela, la seule réponse officielle que nous ayons eue a été celle du Premier ministre Narendra Modi, qui s’est d’abord exprimé en solidarité avec Israël sur la question, puis qui a eu un appel téléphonique avec Netanyahou quelques jours plus tard. Rien que cela, c’était déjà le signe d’une certaine rupture par rapport aux périodes précédentes, où l’Inde cherchait toujours à mentionner la question palestinienne lorsqu’elle parlait d’Israël, même dans des situations complexes comme celle-ci. Au fil du temps, il est apparu clairement que l’Inde ne s’alignait pas entièrement sur les Israéliens, pas comme l’ont fait les USAméricains ou d’autres États occidentaux, mais qu’elle s’éloignait légèrement de ses propres positions, alors qu’elle s’était initialement abstenue de demander une trêve humanitaire, selon la terminologie utilisée à l’époque pour désigner une sorte de cessez-le-feu.

Et pour comprendre cela, nous devons connaître, comme vous l’avez demandé, l’histoire plus large de l’Inde, les tentatives de l’Inde de créer une sorte de politique à la fois pour Israël et pour la Palestine. L’histoire est complexe et quelque peu alambiquée, en partie parce qu’il s’agit de deux États postcoloniaux qui ont vu le jour à peu près au même moment, à la fin des années 1940, et qui ont lutté pour savoir exactement comment traiter l’un avec l’autre. Mais je pense que les contours de la situation sont simples : l’Inde, après avoir fait quelques efforts initiaux pour reconnaître Israël, a décidé de ne pas le faire, bien qu’un consulat ait été ouvert dans les premières années qui ont suivi l’indépendance, et n’a pas reconnu officiellement Israël avant les années 1990. Au cours de cette période, le pays a été un fervent défenseur de la cause palestinienne, devenant le premier pays au monde à reconnaître l’OLP et s’exprimant fréquemment au nom des Palestiniens. À partir des années 1990, la grande question de la normalisation s’est posée.

Peu de temps après la chute du mur de Berlin, la fin de l’URSS et le passage au mouvement unipolaire usaméricain, ainsi qu’un ensemble de changements dans la politique indienne, où le terrain se déplace un peu plus vers la droite, l’Inde ouvre des liens officiels avec Israël et lentement, au début, puis beaucoup plus rapidement lorsque le premier gouvernement de droite BJP prend en charge Delhi à la fin des années 90, les liens de l’Inde avec Israël sont devenus de plus en plus forts, mais ils sont toujours considérés comme étant équilibrés par le soutien à la cause palestinienne. Au cours de la dernière décennie, le Premier ministre Modi a été beaucoup plus clair quant à l’abandon de ces tropes de l’histoire. Son ministre des Affaires étrangères a parlé des hésitations de l’histoire qui, en raison du vote musulman à l’intérieur du pays, ont éloigné l’Inde d’un partenariat avec Israël. Ainsi, au cours des dix dernières années, nous avons assisté à un soutien beaucoup plus ouvert à Israël, à des connexions ouvertes avec l’État israélien et l’économie israélienne, ainsi qu’à une tentative générale de découplage de la cause israélo-palestinienne dans la politique étrangère de l’Inde. L’Inde maintient donc officiellement son soutien à la Palestine et appelle sur le papier à une solution à deux États, etc. Mais dans la pratique, elle s’est efforcée d’élargir ses liens avec Israël au cours de la dernière décennie.

Shwetha : Au cours de la dernière décennie, l’idéologie nationaliste hindoue a occupé le devant de la scène en Inde. Les membres du gouvernement de Modi et de l’écosystème Hindutva, dirigé par le RSS, traitent la minorité musulmane comme une population subalterne. De nombreux membres de l’actuel gouvernement israélien d’extrême droite seraient également des partisans de la vision du monde de l’Hindutva lorsqu’il s’agit des musulmans. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur cette convergence idéologique entre l’hindutva et le sionisme ?

Rohan : Il est important de se rappeler, bien sûr, que si ces deux choses sont étroitement liées, ce que l’État indien choisit de faire et ce que la large base idéologique du parti au pouvoir fait sont des choses légèrement différentes. C’est pourquoi l’Inde, en particulier sous la direction de Modi, s’est montrée très habile à mélanger ces deux courants idéologiques et politiques quand elle le souhaite et à les séparer quand elle le veut.  Pour situer le contexte, les relations de l’Inde avec les Émirats arabes unis, qui sont un émirat musulman, sont aussi fortes, beaucoup plus fortes, en fait, que ses relations avec Israël. L’Inde dispose donc d’une certaine marge de manœuvre pour faire des choses qui ne reflètent pas nécessairement les fondements idéologiques sous-jacents. 


Borj Khalifa accueille Narendra Modi avec faste lors de sa visite officielle aux Émirats arabes unis en juillet 2023

03/03/2024

La Vierge rouge & les Cannibales
Louise Michel et les Kanak

Sur les 4253 Communard·es (dont 23 femmes) déporté·es en Nouvelle-Calédonie suite à l’écrasement sanglant de la Commune de Paris, Louise Michel fut pratiquement la seule à ne pas entrer dans la logique de la « colonisation pénitentiaire », dont le but sera résumé par Victor Hugo dans son célèbre discours sur l’Afrique de 1879 : « Versez votre trop-plein dans cette Afrique, et du même coup résolvez vos questions sociales, changez vos prolétaires en propriétaires » . 

Louise prend fait et cause pour les « Canaques », lorsque ceux-ci se soulèvent en 1878 contre le génocide en cours. «[…]  Cette écharpe rouge de la Commune a été divisée, là-bas, en deux morceaux, une nuit où deux Canaques, avant d’aller rejoindre les leurs, insurgés contre les blancs, avaient voulu me dire adieu. » Au cours des sept années de déportation, Louise fraternisa avec les Kanak et tira deux livres de ses échanges. Alors que la plupart des déportés se rangeaient du côté des forces de répression coloniales, Louise Michel est l’exception lumineuse, pionnière d’un anticolonialisme qui a trop souvent fait défaut à la gauche française, toutes tendances confondues. Des textes à découvrir, d’une femme puisant dans sa condition féminine la force de s’opposer au racisme, au patriarcat et au spécisme. « Quel est l’être supérieur, de celui qui s’assimile à travers mille difficultés des connaissances étrangères à sa race, ou de celui qui, bien armé, anéantit ceux qui ne le sont pas ? »

La Vierge Rouge, la Pétroleuse, l’institutrice, l’infirmière, la combattante Louise Michel est condamnée à la déportation après l’écrasement de la Commune de Paris. Elle arrive en Nouvelle-Calédonie en décembre 1873 et y restera jusqu’en juillet 1880, après quoi, bénéficiant d’une amnistie, elle rentrera en France. Elle établit très rapidement un rapport fraternel avec les Kanak, échangeant, conversant avec eux, apprenant leurs langues, écoutant leurs récits, enseignant à leurs enfants. Quand des insurgés viennent une nuit l’avertir de leur soulèvement imminent, elle leur montre comment sectionner les fils du télégraphe pour saboter les communications des occupants et leur donne son écharpe rouge, relique de la Commune (elle adoptera dans la dernière partie de sa vie tumultueuse le drapeau noir). Cette relique, pieusement conservée, donnera l’idée aux militants indépendantistes kanak des années 1960 d’appeler leur mouvement Les Foulards Rouges.

Louise Michel a écrit deux textes issus de sa rencontre du deuxième type. Ce sont ces documents historiques précieux que nous republions pour les rendre accessibles à toute personne ne fréquentant pas les temples du savoir et leurs rayonnages. L’ouvrage est complété par des analyses sur les déportés de 1848, 1855 et 1871, et couronné par l’incroyable discours de Victor Hugo sur l’Afrique.

Table des matières

·        Légendes et chansons de gestes canaques
par Louise Michel, Nouméa 1875…………….8

·        Légendes et chants de gestes canaques
par Louise Michel,  Paris 1885………………….44

·        Louise Michel et les Kanak : amorce d’une réflexion anti-impérialiste
par Lucie Delaporte, 2018………………………235

·        Déportés en Nouvelle-Calédonie : l’improbable rencontre des communards et des insurgés algériens
par Lucie Delaporte, 2018………………………248

·        Les déportés de 1848
par Marcel Émerit, 1948…………………………257

·        Les communards contre les Canaques
par Jean Bruhat, 1981………………………….....266

·        Commune(s), communards, question coloniale
par Alain Ruscio, 2022……………………………..275

·        Discours sur l’Afrique
 par Victor Hugo, 1879……………………………299

 

 

 

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02/03/2024

GIDEON LEVY
Une jeep de l’armée israélienne percute deux adolescents palestiniens à vélo, puis l’un d’eux est abattu à bout portant

Gideon Levy & Alex Levac (photos), Haaretz, 2/3/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Une jeep de l’armée israélienne, à la poursuite de deux adolescents palestiniens circulant sur un vélo électrique, les percute et ils sont jetés à terre. Un soldat place son fusil sur le cou de l’un d’eux et appuie sur la gâchette. Imru Swidan, 17 ans, est toujours dans un état critique et paralysé.

Imru Swidan avant d’être abattu

Cette fois-ci, il n’y a pas de place pour le doute, ni pour les questions, les excuses ou les mensonges de l’unité du porte-parole des forces de défense israéliennes : les vidéos témoignent de ce qui s’est passé. Elles montrent une jeep blindée à la poursuite de deux jeunes qui roulent sur une bicyclette électrique. Le côté de la jeep heurte violemment les cyclistes, les faisant tomber du vélo. L’un d’eux parvient à s’échapper, l’autre est couché sur le ventre, face contre terre. L’un des soldats qui sort de la jeep place le canon de son fusil sur le cou du garçon. L’image est floue, mais un agrandissement permet de comprendre ce qui s’est passé ensuite : une balle pénètre dans le cou du jeune homme, brisant la partie supérieure de sa colonne vertébrale. Paralysé et placé sous respirateur, il se trouve actuellement dans l’unité de soins intensifs d’un hôpital de Naplouse.

L’événement rappelle l’incident impliquant Elor Azaria, le « tireur d’Hébron », qui, en 2016, avait abattu un « terroriste » palestinien qui avait déjà été abattu et maîtrisé, mais dans un format plus sinistre. Dans ce cas, le jeune n’est pas mort sur la route, et on ne sait pas exactement ce que les deux cyclistes - 17 et 15 ans - avaient fait pour justifier la poursuite par la jeep, ni ce qui a déclenché la fureur des soldats, qui ont décidé d’essayer d’exécuter l’un des jeunes en lui tirant une balle dans le cou à bout portant.

Ces questions troublantes resteront à jamais sans réponse. Cette semaine, l’unité du porte-parole des FDI n’a pas perdu de temps pour blanchir, truquer et dissimuler la vérité, se contentant de la réponse habituelle, générique, évasive et fictive, à la question de Haaretz : « Un certain nombre de terroristes ont lancé des engins explosifs sur une unité des FDI qui opérait près du village d’Azzun dans le [territoire de la] brigade Ephraim le 13 février 2024. Une unité des FDI qui se trouvait sur le site a pris des mesures pour les arrêter et, dans ce cadre, a tiré sur l’un d’entre eux ».

Les mots manquent. Deux adolescents sur un vélo deviennent « un certain nombre de terroristes », leur transgression n’étant pas claire ; « a pris des mesures pour les arrêter » est la façon dont l’armée décrit le tir à bout portant sur un jeune désarmé et sans défense qui était allongé face contre terre sur la route, ce qui ressemble plus à une tentative d’exécution qu’à toute autre chose. « A pris des mesures pour l’arrêter » ? Les soldats auraient pu très facilement arrêter le jeune prostré sur la route, mais ils ont préféré lui tirer dessus alors qu’il était blessé et immobile. Après la fusillade, les soldats sont partis sans arrêter personne.

Vidéo de l’incident

Un acte à la Elora Azaria, mais les temps ont changé de manière méconnaissable. Personne ne sera jugé pour avoir procédé à des exécutions en uniforme, pas après l’épisode Azaria et encore moins après la guerre dans la bande de Gaza. Personne n’a même l’intention d’enquêter sur cet incident ; l’unité du porte-parole de l’armée israélienne ne s’est pas intéressée à la vidéo qui documente l’acte. La jeep dont les soldats ont fait cela portait un drapeau israélien sur un mât imposant. C’est au nom de ce drapeau qu’ils ont abattu l’adolescent blessé sur la route, alors qu’ils auraient pu facilement le placer en détention.

Imru Swidan est un jeune homme de 17 ans originaire de la ville d’Azzun, à l’est de la ville cisjordanienne de Qalqilyah, de l’autre côté de la frontière de Kfar Sava. Depuis 2003, l’entrée orientale de la ville est bloquée et, depuis le 7 octobre, son entrée principale, au sud, est également fermée par une grille en fer. Seule une entrée reste ouverte, par l’ouest, via le village voisin de Khirbet Nabi Elias, où de fréquents barrages surprise de l’armée bloquent pendant de longues heures la circulation en direction et en provenance de la ville. Peu avant notre arrivée à Azzun cette semaine, les soldats étaient encore là, harcelant les habitants ; heureusement pour nous, nous sommes arrivés après leur départ.

La famille Swidan vit dans le complexe résidentiel familial au centre de la ville. Dans le salon où nous avons été reçus, deux guitares sont accrochées au mur et, à côté, du matériel de sonorisation appartenant au cousin d’Imru. Imru est dans un hôpital privé de Naplouse, complètement paralysé. Sur les photos prises sur place, on peut voir qu’un tube respiratoire lui a été inséré dans la gorge, qu’une attelle maintient son cou, que son visage est d’un blanc effroyable. Il est difficile de savoir s’il est conscient. Il murmure parfois quelque chose, dit sa mère. Elle pense qu’il demande qu’on lui récite des versets du Coran, car sa mort est proche.

Son père, Mohammed, 42 ans, est à ses côtés, et sa mère, Arwa, 33 ans, lui rend également visite, bien entendu. Le couple a quatre fils et deux filles - Imru est l’aîné, sa mère n’avait pas encore 17 ans lorsqu’elle l’a eu. Les déplacements des parents à Naplouse pour voir leur fils sont extrêmement difficiles. En raison des nombreux points de contrôle autour de Naplouse - la ville est presque assiégée depuis le début de la guerre - le voyage dure des heures, bien que la distance soit relativement courte. Voilà à quoi ressemble aujourd’hui la vie dans toute la Cisjordanie.

Arwa Swidan, mère d’Imru

C’était le 13 février, un mardi, il y a deux semaines. Les FDI font de fréquentes incursions à Azzun, comme c’était le cas ce midi-là. La mère d’Imru raconte que lorsqu’il s’est levé ce matin-là, vers 10 heures, comme d’habitude, elle l’a envoyé au marché pour acheter des légumes. Comme son vélo électrique était hors d’usage, il s’est rendu chez un voisin, un lycéen de 15 ans qui est son ami depuis l’enfance et qu’il rencontre tous les jours (et qui a demandé à ce que son nom ne soit pas mentionné). Avec le vélo de son ami, il a fait les courses pour sa mère. Mais il a oublié d’acheter de la pita, et elle l’a renvoyé. Cette fois, il ne reviendra pas. Il a été abattu à quelques centaines de mètres de chez lui, sur la rue principale de la ville.

Les soldats ont envahi la ville par l’entrée Est, qui est fermée. Imru pédale, son ami se tient sur le vélo. Nous n’avons aucune information sur ce qu’ils ont fait en chemin, jusqu’à ce que la vidéo montre la jeep les poursuivant puis les renversant. Une ambulance palestinienne appelée sur le site a été bloquée pendant dix minutes, selon le témoignage recueilli par Abd al-Karim Sa’adi, chercheur de terrain pour l’organisation israélienne de défense des droits humains B’Tselem. Ce n’est qu’après le départ des soldats que les ambulanciers ont pu accéder au jeune blessé.

Il a été transporté à l’hôpital Omar al-Qassem d’Azzun, puis à l’hôpital Darwish Nazzal de Qalqilyah, et comme il était dans un état critique, il a été transféré à Naplouse. Là, selon les habitants d’Azzun, il a eu la chance d’être soigné par un habitant de sa ville, le Dr Abdallah Harawi, un chirurgien réputé. La mère du chirurgien est décédée le jour même, mais il a opéré Imru. Une radiographie montre les dégâts considérables causés à la moelle épinière par la balle.

Imru Swidan avant d’être abattu

Selon sa mère, Imru a quitté l’école pendant la pandémie de COVID, alors qu’il était en dixième année, et depuis lors, il est resté chez lui, désœuvré. Son père est ouvrier d’entretien dans des hôpitaux israéliens. L’année dernière, il travaillait à l’hôpital Meir, à Kfar Sava, mais depuis la guerre, un bouclage a été imposé en Cisjordanie, si bien qu’il est hors de question de se rendre à son ancien travail. De nombreux membres de la famille élargie ont travaillé en Israël et parlent l’hébreu.

Vers midi, après qu’Imru est retourné chercher le pain, des amis ont appelé sa mère pour lui dire qu’il avait été blessé. Stupéfaite, elle a téléphoné à son mari, qui avait commencé un nouveau travail dans un atelier de couture dans le village voisin de Jayous. Il s’est immédiatement rendu à l’hôpital de Naplouse, tout comme sa femme et d’autres membres de la famille.

À leur arrivée, Imru sortait d’un scanner et sa mère s’est évanouie à sa vue. Elle est rentrée chez elle le soir, dans une maison remplie de voisins et de membres de sa famille. Aujourd’hui, elle prie Dieu tous les jours pour que l’état de son fils s’améliore. Pour l’instant, rien ne laisse présager une telle amélioration.

29/02/2024

DEMOCRACY NOW!
Vie et mort d'Aaron Bushnell : Un aviateur US s'immole pour protester contre le soutien des USA à Israël dans la bande de Gaza
Entretien avec Levi Pierpoint et Ann Wright

Democracy Now!, 28/2/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 Invités

  •     Levi Pierpont, ancien membre de l'armée de l'air US, objecteur de conscience et ami d'Aaron Bushnell.
  •     Ann Wright,colonelle de l'armée US à la retraite et ancienne fonctionnaire du département d'État US.

Dans un acte qui a capté l'attention du monde entier, Aaron Bushnell, un membre actif de l'armée de l'air US âgé de 25 ans, s'est immolé par le feu devant l'ambassade d'Israël à Washington dimanche pour protester contre l'assaut d'Israël sur Gaza et le soutien des USA à la campagne militaire. Bushnell, qui a diffusé son action en direct, a déclaré : « Je ne serai plus complice d'un génocide », avant de s'immoler par le feu et de crier à plusieurs reprises « Palestine libre » alors qu'il était englouti par les flammes. Il a été déclaré mort à l'hôpital plus tard dans la journée. Democracy Now ! s'entretient avec l'ami de Bushnell et objecteur de conscience Levi Pierpont, qui affirme que la mort de son ami n'était pas un suicide mais qu'il s'agissait d'utiliser sa vie pour envoyer un message en faveur de la justice. « Nous devons honorer le message qu'il a laissé », déclare Pierpont, qui affirme que Bushnell est mort « pour attirer l'attention des gens sur le génocide qui se déroule en Palestine ». Ann Wright, colonelle de l'armée US à la retraite et ancienne diplomate, retrace l'histoire de l'auto-immolation pour protester contre la guerre et explique comment l'acte de Bushnell pourrait avoir un impact sur la politique usaméricaine dans le cadre de la guerre contre Gaza. « C'était un acte de courage, un acte de bravoure, pour attirer l'attention sur la politique des USA », déclare Mme Wright, qui apporte son soutien à Pierpont et à d'autres anciens combattants qui militent pour la paix, en direct à l'antenne.

Transcription

 AMY GOODMAN : Ici Democracy Now !, democracynow.org, The War and Peace Report. Je suis Amy Goodman à New York, avec Juan González à Chicago.

Un avertissement à notre public : Cette séquence contient des images et des descriptions graphiques.

Le matin du 25 février, Aaron Bushnell, un membre actif de l'armée de l'air US âgé de 25 ans, a publié sur Facebook un lien vers le service de diffusion de vidéos en direct Twitch avec une légende qui disait, je cite : « Beaucoup d'entre nous aiment se demander : “Qu'est-ce que je ferais si vivais pendant l'esclavage ? Ou du temps de Jim Crow dans le Sud ? Ou de l'apartheid ? Que ferais-je si mon pays était en train de commettre un génocide ? La réponse est que vous êtes en train de le faire. En ce moment même » a-t-il écrit.

Aaron Bushnell a ensuite envoyé à un ami une copie de son testament, qu'il avait préparé quelques jours auparavant. Il y confie son chat à son voisin pour qu'il en prenne soin. Quelques heures plus tard, peu avant 13 heures (heure locale), Aaron Bushnell s'est dirigé vers l'ambassade d'Israël à Washington, portant son uniforme de l'armée de l'air. Il a lancé la retransmission en direct sur son téléphone et s'est exprimé alors qu'il s'approchait des portes de l'ambassade.

    AARON BUSHNELL : Je suis un membre actif de l'armée de l'air des USA et je ne serai plus complice d'un génocide. Je suis sur le point de m'engager dans un acte de protestation extrême, mais comparé à ce que les gens ont vécu en Palestine des mains de leurs colonisateurs, ce n'est pas du tout extrême. C'est ce que notre classe dirigeante a décidé de considérer comme normal. »

AMY GOODMAN : Aaron Bushnell a ensuite posé son téléphone par terre, s'est placé devant la porte de l'ambassade d'Israël et s'est aspergé d'un liquide, avant de s'immoler par le feu. Il a crié plusieurs fois « Palestine libre » alors qu'il était consumé par les flammes. Ce sont ses derniers mots.

On peut voir un agent [de sécurité de ‘lambassade] arrivé sur les lieux brandir une arme et la pointer sur Aaron Bushnell alors qu'il brûle vif et s'effondre sur le sol. Un policier l'asperge avec un extincteur. Alors que l’agent continue de pointer son arme sur Aaron, le policier lui crie, je cite, « Je n'ai pas besoin d'armes. J'ai besoin d'un extincteur. »

Aaron Bushnell a été transporté dans un hôpital voisin et son décès a été constaté quelques heures plus tard. Son acte extrême de protestation contre l'assaut d'Israël sur Gaza a fait la une des journaux du monde entier. Des veillées ont été organisées en son honneur à Washington, ici à New York, à San Antonio, au Texas, à Portland et ailleurs.

Ali Abunimah, fondateur de The Electronic Intifada, a écrit sur les réseaux sociaux, je cite : « Aaron Bushnell a donné sa vie pour que l'Amérique entende son message : Mettez fin au génocide. Il a continué à appeler "Palestine libre" malgré une douleur intense et horrible. Il a donné sa vie pour que les habitants de Gaza puissent vivre. Il n'y a pas de plus grand amour que celui-là. J'éprouve de la tristesse et de l'admiration pour cet être humain », a écrit Abunimah.

Pour en savoir plus, nous sommes rejoints par deux invités. Ann Wright, ancienne colonelle et ancienne diplomate usaméricaine, a passé 29 ans dans l'armée US et dans la réserve. En mars 2003, elle a démissionné. Elle a depuis travaillé avec les groupes anti-guerre CodePink et Veterans for Peace. Elle est co-auteure de Dissent : Voices of Conscience. Son nouvel essai sur Common Dreams s'intitule « Pourquoi quelqu'un se tuerait-il pour arrêter une guerre ? À propos d'Aaron Bushnell et d'autres » Elle nous rejoint depuis Hawaï. Elle a démissionné en 2003 à cause de la guerre en Irak. Levi Pierpont, un ami d'Aaron Bushnell, nous rejoint depuis Southfield, dans le Michigan. Ils se sont rencontrés lors de l'entraînement de base à la base aérienne de Lackland à San Antonio, au Texas, en mai 2020. Levi est ensuite devenu objecteur de conscience.

Nous vous souhaitons à tous deux la bienvenue à Democracy Now ! C'est une rubrique très difficile à réaliser. Levi, nous voulons commencer par vous. Vous étiez un ami d'Aaron. Parlez-nous de lui, puis dites-nous quand vous avez appris ce qui s'était passé. Racontez-nous votre rencontre, votre décision de devenir objecteur de conscience - lui est resté dans l'armée - et ce que vous avez compris de ce qui s'est passé ce week-end.

LEVI PIERPONT : Oui. J'ai rencontré Aaron Bushnell lors de l'entraînement de base. Et dès le premier jour où je l'ai rencontré, j'ai vu qu'il était vraiment gentil. J'ai très vite compris qu'il avait un sens aigu de la justice. Nous sommes devenus amis. Et chaque fois que les gens à l'entraînement de base parlaient de moi ou de lui, nous prenions la défense l'un de l'autre. Et il m'a toujours défendu.

J'ai fini par être libéré en tant qu'objecteur de conscience. Nous nous sommes parlé tout au long de ce processus. Au moment où j'ai commencé à avancer dans le processus et à approcher de sa fin - je suis sorti en juillet 2023 - il a estimé qu'il était déjà suffisamment proche de sa propre date de fin pour décider de ne pas suivre le même chemin. Je l'ai compris, car le processus d'objection de conscience peut durer plus d'un an. Je savais donc qu'il était toujours dans le coup.

Il est ensuite allé faire SkillBridge [Pont de talents, programme de formation professionnelle de l'armée, NdT] dans l'Ohio, et c'est là que je l'ai rencontré à Toledo, le 5 janvier. C'était la première fois que je le voyais depuis l'entraînement de base. Et c'est malheureusement la dernière fois que je l'ai vu. Et, bien sûr, vous savez, l'autre jour, j'ai appris ce qui s'était passé. Donc, oui.

AMY GOODMAN : Nous vous présentons nos plus sincères condoléances, Levi. Quand vous avez appris, avez-vous d'abord entendu qu'un homme s'était auto-immolé, puis qu'il s'agissait d'Aaron ?

LEVI PIERPONT : Oui. Je venais de voir les gros titres. Je ne pense pas avoir cliqué sur l'un d'entre eux pour lire quoi que ce soit. Et oui, lundi, une amie m'a contacté, et elle savait que j'avais été objecteur de conscience, que j'avais été dans l'armée de l'air, et qu'elle savait que l'histoire en général pourrait être difficile pour moi. Elle ne savait pas que je le connaissais. Et c'est elle qui m'a finalement envoyé son nom par SMS. J'ai immédiatement craqué, je l'ai appelée et je lui ai dit : « C'était mon ami. Je suis allé à l'entraînement de base avec lui. » Et elle m'a réconforté. Et j'ai repensé à toutes les conversations que nous avions eues. J'ai revu le dernier SMS que j'ai reçu de lui. Et j'ai pleuré.

JUAN GONZÁLEZ : Et, Levi, dans ces conversations, avez-vous eu une idée de la raison pour laquelle Aaron a décidé de s'engager dans l'armée et de l'évolution de son point de vue sur l'armée usaméricaine ?

LEVI PIERPONT : Oui. Je sais que lorsque nous avons parlé pour la première fois, nous avions les mêmes objectifs et les mêmes intérêts pour l'armée. Nous voulions en quelque sorte sortir de notre bulle, découvrir les USA, le monde, rencontrer des gens d'autres horizons. Je me souviens donc que lorsque nous avons tous deux appris où nous serions stationnés, c'était un peu ironique. J'ai appris que j'allais être stationné à la base aérienne de Minot, et il a appris qu'il allait retourner à Lackland, où nous avIons suivi notre entraînement de base. Nous avons donc tous les deux eu le sentiment que nous allions peut-être explorer un peu moins de choses que ce que nous pensions, mais que nous étions prêts pour notre carrière.

Et je sais qu'au fil des ans, nous avons tous les deux changé d'avis sur la guerre, en grande partie à cause de ce que nous avons vu dans l'armée, en grande partie à cause des choses que nous avons apprises parce que nous en faisions partie. Et je sais que lui et moi avons été encouragés par des personnes sur YouTube qui réalisaient des vidéos sur les mouvements de justice sociale aux USA ;

JUAN GONZÁLEZ : J'aimerais inviter Ann Wright à participer à la conversation. Sur la question des auto-immolations, nous en avons déjà eu deux pour protester contre la guerre à Gaza. Mais vous avez fait remarquer que pendant la guerre du Viêt Nam, pas moins de cinq USAméricains se sont auto-immolés pour protester contre l'engagement des USA au Viêt Nam. Pourriez-vous nous en parler ? Vous avez récemment écrit à ce sujet pour Common Dreams.

ANN WRIGHT : Oui. C'est une situation triste, c'est certain. Nous sommes de tout cœur avec la famille et les amis d'Aaron.

De même, il y a presque 60 ans, en 1965, alors que la guerre du Vietnam commençait, une femme quaker de 82 ans, Alice Herz, s'est suicidée par auto-immolation, suivie environ six mois plus tard par un autre quaker, Norman Morrison, de Baltimore, qui s'est rendu au Pentagone et s'est immolé par le feu, sans savoir que l'endroit qu'il avait choisi au Pentagone se trouvait juste en dessous du bureau du secrétaire à la défense McNamara. Apparemment, son auto-immolation a eu un effet important sur McNamara, bien qu'il n'ait pas arrêté la guerre dans un premier temps, mais elle a eu un effet sur lui personnellement et sur sa famille. Puis un jeune homme à San … - ou plutôt, d'abord à New York, sur la place des Nations unies. Donc, oui, il y a eu cinq personnes qui se sont immolées par le feu à cause d'une décision politique des USA d'entrer en guerre.

Et maintenant, nous avons - vous savez, 60 ans plus tard, nous avons deux personnes en moins de trois mois qui ont fait le même acte, je dirais, courageux de se suicider pour attirer l'attention du public usaméricain et du monde sur ce dont les USA sont complices, c'est-à-dire le génocide israélien et le génocide usaméricain des Palestiniens à Gaza.

AMY GOODMAN : Je voulais juste passer en revue quelques autres exemples historiques qui ont provoqué des ondes de choc dans de multiples conflits. Vous avez Thich Quang Duc, un moine qui a attiré l'attention sur le traitement des bouddhistes vietnamiens par le gouvernement ; puis Mohamed Bouazizi en Tunisie, qui a déclenché le printemps arabe en s'immolant par le feu - c'était avant l'Égypte, et cela a déclenché le soulèvement en Tunisie ; Malachi Ritscher, un musicien qui a appelé à la fin de l'invasion usaméricaine de l'Irak. Un manifestant pro-palestinien s'est également immolé devant le consulat d'Israël à Atlanta en décembre, mais nous ne connaissons pas son nom. Cet événement n'a pratiquement pas attiré l'attention.

Et il y a eu tout un débat dans les médias en ce moment, ceux qui en parlent comme - ne veulent même pas en parler. Je veux dire, je pense qu'au début, des journaux comme le New York Times n'ont même pas rapporté qu'il avait dit « Palestine libre », et d'autres médias non plus. Puis, au fil du temps, ils ont parlé de ce qui s'était passé. Mais toute la question d'entrer dans un débat sur la maladie mentale et de ne pas vouloir encourager quelque chose comme ça alors que vous entendez quelqu'un comme Ali Abunimah parler de l'incroyable bravoure d'Aaron, qu'en pensez-vous ?

ANN WRIGHT : Eh bien, c'est incroyablement courageux. Et une personne - eh bien, il n'y a aucune preuve qu'Aaron souffrait d'une quelconque maladie mentale. C'était une personne très consciencieuse qui voyait ce que les USA faisaient dans le cadre de son poste au sein de l'armée usaméricaine. On pourrait dire qu'il n'est pas le premier à se suicider à cause de ce que font les USA. Chaque jour, 22 vétérans se suicident à cause de ce qu'ils ont fait dans l'armée usaméricaine. Ce qu'a fait Aaron est donc très, très courageux. Je ne peux pas m'imaginer franchir ce pas. C'était un acte de courage, un acte de bravoure, pour attirer l'attention sur les politiques usaméricaines.

JUAN GONZÁLEZ : Levi Pierpont, je voulais vous demander - vous avez grandi en tant que chrétien évangélique. Aaron Bushnell a assisté à des services religieux catholiques pendant son entraînement de base. Comment pensez-vous que ses opinions religieuses ont influencé ses croyances et, en fin de compte, son action ?

LEVI PIERPONT : Je pense qu'en fin de compte, au moment où il a fait ce qu'il a fait, il ne s'identifiait à aucune religion en particulier. Mais je sais que pour moi, même si je suis plus agnostique que je ne l'ai été en grandissant, mes racines évangéliques m'influencent toujours. Elles influencent mon sens de la justice. Et elles m'ont dit, dès mon plus jeune âge, qu'il fallait défendre ses convictions. J'imagine que c'était la même chose pour Aaron. Ainsi, même si je ne crois pas qu'il croyait encore à la foi catholique au moment de sa mort, je sais que cette éducation a eu un impact profond sur lui, et je suis sûr qu'elle a influencé son sens de la justice.

AMY GOODMAN : Levi Pierpont, Aaron vivait à San Antonio, où se trouve la base de Lackland. Il faisait beaucoup de travail d'entraide avec des sans-abri, il était très connu dans ces campements. Comment voulez-vous que nous nous souvenions de lui, en pensant à lui ces derniers jours, à ce dont vous parlez dans les veillées et avec vos amis ?

LEVI PIERPONT : Je veux que les gens se souviennent que sa mort n'est pas vaine, qu'il est mort pour mettre en avant ce message. Je ne veux pas que quelqu'un d'autre meure de cette façon. S'il m'avait posé la question, je l'aurais supplié de ne pas le faire. J'aurais fait tout ce que j'aurais pu pour l'en empêcher. Mais, de toute évidence, nous ne pouvons pas le ramener. Et nous devons honorer le message qu'il a laissé. Je lui aurais dit que ce n'était pas nécessaire pour faire passer le message. Je lui aurais dit qu'il y avait d'autres moyens. Mais en voyant la façon dont les médias réagissent maintenant, maintenant que cela s'est produit, il est difficile de ne pas penser qu'il avait raison, que c'était exactement ce qu'il fallait pour attirer l'attention des gens sur le génocide qui se produit en Palestine. Je veux que les gens se souviennent de son message.

JUAN GONZÁLEZ : Et, Ann Wright, quel est votre sentiment sur la façon dont le mouvement ici dans ce pays pour arrêter cette guerre génocidaire à Gaza s'est construit, et ce que le sacrifice d'Aaron Bushnell peut contribuer à cela ?

ANN WRIGHT : Eh bien, c'est un mouvement énorme, énorme. Et l'administration Biden doit le reconnaître, comme l'ont dit les invités précédents. Je veux dire que les électeurs leur adressent un message. Il s'agit d'un mouvement massif de jeunes, de personnes de toutes les religions, qui disent, quel que soit leur confession religieuse, que cette tuerie est condamnable. Il faut y mettre fin.

Et je dirais à Levi, vous savez, nous avons des vétérans pour la paix, et nous avons About Face, des organisations d'anciens combattants qui aimeraient vous offrir leur soutien, parce que c'est dur, vraiment dur. Mais c'est pour le peuple de Gaza, le peuple de Palestine, que nous faisons cela, pour mettre fin à ces politiques horribles, horribles, que notre pays mène actuellement. Le meurtre d'innocents pour les USA et pour Israël doit cesser. Et cessez le feu maintenant.

AMY GOODMAN : Ann, je crois savoir qu'une flottille pour Gaza est en train de s'organiser. Nous n'avons que 30 secondes. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agit ?

ANN WRIGHT : Oui. Nous devons agir. Je veux dire qu'en ce moment, il y a beaucoup de discussions. Des camions sont bloqués dans tout le nord de l'Égypte. Et notre mouvement pour la flottille de Gaza, nous allons bientôt faire quelque chose. Et nous vous tiendrons tous au courant - pardonnez-moi - dès que nous aurons les plans pour défier à nouveau le blocus naval israélien de Gaza.

AMY GOODMAN : Et savez-vous, Levi, puisqu'il ne nous reste que 10-15 secondes, si Aaron aurait qualifié cela de suicide ?

LEVI PIERPONT : Non, absolument pas.

AMY GOODMAN : Expliquez.

LEVI PIERPONT : C'était - il n'avait pas de pensées de suicide. Il pensait à la justice. C'est de cela qu'il s'agissait. Il ne s'agissait pas de sa vie. Il s'agissait d'utiliser sa vie pour envoyer un message.

AMY GOODMAN : Je tiens à vous remercier tous les deux pour votre présence parmi nous. Levi Pierpont, ami très cher d'Aaron Bushnell, lui, Levi, est un objecteur de conscience. Et Ann Wright, vétérane de l'armée US depuis 20 ans. Amy Goodman et Juan González. Merci de nous avoir rejoints.

AMIRA HASS
Gaza et Israël, un nouveau jeu d’association de mots

 Amira Hass, Haaretz, 26/2/2024
Traduit par Fausto Giudice,
Tlaxcala

Leurs morts reposent sur la place. Des réalisations tactiques impressionnantes. Aujourd’hui, nous avons tué des dizaines de terroristes. L’armée a tué des policiers qui protégeaient les camions d’aide des pillards. Et ainsi de suite

Ghetto de Varsovie, Pologne, avril 1943


École de l’UNRWA, ghetto de Gaza, février 2024

Assiégés. Ils le sont - pas nous. Le parking de longue durée de l’aéroport international Ben-Gourion explose de voitures. Nous les bombardons. Laissons-les apprendre une leçon. Affamés. Entassés les uns sur les autres. Environ 50 000 personnes par kilomètre carré.

Qui compte ? Les atrocités du 7 octobre. Les blessés. Les bombardés. Les assoiffés. Ce sont eux. Nos otages. Bombardés. C’est nous qui les bombardons. Ils boivent de l’eau contaminée. Que boivent les otages ? Quatre cents personnes font la queue pour des toilettes. Diarrhée. Il n’y a ni eau ni papier toilette. Les prix sont très élevés. Comment les otages se débrouillent-ils ? Il n’y a pas non plus de serviettes hygiéniques. Avec quoi les otages se débrouillent-ils ?

Un père pleure en portant son bébé mort. Vous ne le verrez pas à la télévision israélienne. Le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinwar, marche en tongs dans un tunnel. Oui, on l’a vu à la télévision israélienne. Avec ses enfants. Quelque 10 000 enfants palestiniens ont été tués. Peut-être 11 000 déjà. Combien de bébés ? Qui peut les compter ? Nous les avons bombardés. Nous les avons tués. Une fille en robe rose. Un garçon qui aimait les glaces. Des linceuls en plastique bleu. Une fosse commune. Des linceuls en tissu blanc.

Ici reposent leurs morts sur la place. Des réalisations tactiques impressionnantes, déclare le porte-parole de l’armée. Nous nous efforçons de ne pas blesser les civils innocents. Aujourd’hui, nous avons tué des dizaines de terroristes. L’armée a tué des policiers qui protégeaient les camions d’aide des pillards. Un soldat est tué lors d’un affrontement avec des terroristes à Gaza. Ils protégeaient leur maison. Y avait-il une maison ?

Laissons les forces de défense israéliennes terminer leur travail à Gaza. Nos soldats savent travailler. Le mouvement ouvrier semble être de retour. Drapeau rouge. Ligne rouge. Ne pas s’arrêter au rouge. Franchissez les lignes rouges. Combien y en a-t-il ? Qui peut les compter ? Nous sommes à court de mots. Le silence. L’indifférence. Que sont 10 000 enfants morts ?

Nous ne vous oublierons pas, enfants des communautés israéliennes proches de Gaza. Un œil pour un œil. Des milliers d’yeux pour un œil. Des milliers d’enfants blessés.

Un enfant amputé d’un membre. Bombes intelligentes. Des obus stupides. Le président Isaac Herzog écrit un vœu sur un obus. Un garçon couvert de poussière tremble de partout. Où est sa mère ? Il a peur et elle lui manque. Une fille tremble de tous ses membres. Où est son père ? Il cherche des moyens de quitter Gaza. L’horreur et la mort comme moyen d’expulsion. Vous ne le verrez pas à la télévision israélienne. Il y a les médias sociaux. Des soldats devenus fous. Pourquoi téléchargent-ils des photos compromettantes d’eux-mêmes ?

La Cour internationale de justice a rejeté la demande de l’Afrique du Sud d’émettre une injonction contre une offensive terrestre à Rafah. Il est encore temps. Washington fournira plus d’armes à Israël. Il n’y a plus de temps. Les USA vérifient les cas où des civils palestiniens ont pu être tués par leurs munitions. Et le monde reste immobile. On ne peut pas comparer. La guerre se poursuivra pendant de nombreux mois, a déclaré Benjamin Netanyahou. Où va-t-il trouver tant de jeunes qui vont tuer ? Et se faire tuer ?

À Miami. Le fils du premier ministre. Une presse voyeuriste. Le journalisme sérieux. Le journal de droite Makor Rishon. « Vos frères iront à la guerre et vous resterez les bras croisés », lit-on dans une publicité sponsorisée par des réservistes s’adressant à la communauté ultra-orthodoxe ; elle a été publiée ce mois-ci dans Makor Rishon, le journal « pour les gens qui pensent différemment ». L’annonce mentionne le nombre de diplômés des écoles religieuses sionistes qui ont été tués dans les combats.

Ailleurs dans ce numéro, il est écrit : « 1 962 ans après l’abattage de la dernière génisse rouge par Ismaël Ben Phiabi (un grand prêtre), et après une décennie d’efforts de l’Institut du Temple pour obtenir une génisse rouge pure par une multitude de moyens qui n’ont pas encore fait leurs preuves, il semble qu’ils se rapprochent de l’objectif, qui pourrait même être atteint dans un avenir prévisible ».

Où était le rédacteur en chef ? C’était le titre d’un article d’Arnon Segal, « The Red Heifer Status Report », Le rapport de situation de la Génisse Rouge. Les cendres d’une génisse rouge ont été utilisées pour purifier un juif qui est entré en contact avec un cadavre, et permettront aux juifs de se déplacer sur Al-Aqsa/le Mont du Temple et, avec l’aide de Dieu, de construire le troisième Temple.

« Le prochain point à l’ordre du jour concerne cinq vaches rouges importées des USA ; elles sont élevées au centre d’accueil des visiteurs à Tel Shiloh3, rapporte Segal. Tel Shiloh, la ville antique, est Khirbet Seilun, à partir de laquelle le village de Qaryut s’est développé au nord-est de Ramallah, en Cisjordanie. Khirbet Seilun faisait partie du village, dont les habitants ont été expulsés. Comme les Palestiniens à Susya. L’archéologie expulse.

Les colons, aidés par l’armée, ont également expulsé les habitants de Qaryut de leurs sources. Les troupeaux de génisses juives casher expulsent les bergers de leurs terres et les agriculteurs de leurs sources d’eau. L’industrie du lait et de la viande comme outil d’expulsion. L’abattage casher. Les mitsvot [les 613 prescription de la Torahs]. Le peuple élu. Les génisses rouges pour les sacrifices. Certaines des cinq vaches, rapporte Segal, « ont atteint l’âge de 2 ans et sont aptes à être utilisées comme génisses rouges, mais elles ont franchi la ligne d’arrivée avec quelques poils blancs ».

Après les bombardements, quelques cheveux blanchissent sur la tête des enfants de Gaza. Linceuls blancs. Linceuls bleus. Un charnier. Les FDI fouillent les cimetières. Ramène les corps dans des camionnettes. La ligne d’arrivée. La ligne rouge.

Le rabbin Azaria Ariel, de l’Institut du Temple, a déclaré à Segal : « Le Saint, béni soit-il, décide. Ce n’est pas pour rien qu’Il a placé le Temple là où il se trouve. Il existe une sensibilité particulière à cet égard : pour déplacer quelque chose à cet endroit par les voies naturelles, un large consentement du peuple d’Israël sera nécessaire ».

C’est ce qu’il a dit, et il nous a laissés dans l’expectative. Déplacer « quelque chose ». Qu’est-ce que cela signifie ? Quelque chose comme le Dôme du Rocher ? Quelque chose comme la Mosquée du Sud (Al-Aqsa) ? Et « par les voies naturelles ». Qu’est-ce que cela signifie ? Un tremblement de terre ? Une attaque aérienne ? Un explosif puissant ? « La terre ouvrit sa gueule et les engloutit, eux et leurs familles » (Nombres 16:32) Miracles.

Des miracles. Par la main de Dieu. Par la main d’Allah. L’un est grand et l’autre est plus grand. Tout est écrit dans les saintes écritures.

 

Les motifs de l’auto-immolation d’ Aaron Bushnell : des informations confidentielles sur les forces US combattant dans les tunnels de Gaza

Cet article est paru dans le tabloïd New York Post du 27 février. Nous l’avons traduit tel quel.-Tlaxcala

Jack Morphet , Andy Tillett et Kate Sheehy, New York Post, 27/2/2024

Aaron Bushnell a affirmé qu’il avait des informations secrètes sur des troupes usaméricaines combattant dans les tunnels du Hamas sous Gaza, quelques heures avant de s’immoler par le feu dans un « acte de protestation extrême » contre Israël, a déclaré mardi un ami proche au Post.

L’aviateur de 25 ans - qui a servi dans la 70e  escadre de renseignement, de surveillance et de reconnaissance de l’armée de l’air, mais qui a également interagi avec des groupes anarchistes radicaux en ligne - a affirmé qu’il avait une "autorisation top secrète" pour les données du renseignement militaire lors de l’appel à son ami samedi soir, a-t-il dit.

« Il m’a dit samedi que nous avions des troupes dans ces tunnels, que c’étaient des soldats usaméricains qui participaient aux meurtres » a affirmé l’ami, dont les liens avec Bushnell ont été vérifiés par le Post.

« Son travail consistait à traiter des données de renseignement. Une partie de ce qu’il traitait concernait le conflit Israël- Gaza ».

« L’une des choses qu’il m’a dites, c’est que ce qui est arrivé sur son bureau [...] c’était que l’armée usaméricaine était impliquée dans le génocides qui se déroule en Palestine », a déclaré l’ami, faisant référence à la guerre d’Israël contre le groupe terroriste palestinien Hamas à Gaza.

« Il m’a dit que nous avions des soldats sur le terrain qui tuaient un grand nombre de Palestiniens.

Il y a trop de choses que je ne sais pas, mais je peux vous dire que le ton de sa voix avait quelque chose qui me disait qu’il avait peur », a déclaré le copain.

« Je n’avais jamais entendu ce ton dans sa voix. »

Bien que Bushnell ait affirmé qu’il transmettait des informations top secrètes à son ami, il n’y a aucun moyen de vérifier si c’est vrai.

La Maison Blanche a déclaré à plusieurs reprises qu’elle n’enverrait pas de troupes américaines sur le terrain à Gaza, et le président Biden a déclaré qu’il espérait négocier un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas cette semaine.

Selon le New York Times, des forces d’opérations spéciales usaméricaines ont été déployées en Israël depuis l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre, afin « d’identifier les otages, y compris les otages usaméricains », après que le groupe en a capturé plus de 200 au cours de son raid.

Les forces spéciales ont également participé à l’élaboration de la stratégie des troupes israéliennes à Gaza, qui débusquent les membres du Hamas dans le réseau de tunnels situé sous le territoire, mais le rapport précise que les troupes [US] « ne sont pas affectées à des rôles de combattants ».

L’armée de l’air a confirmé que le titre de Bushnell était « technicien des services d’innovation » [sic], mais n’a pas précisé l’habilitation de sécurité dont il disposait. Elle n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire du Post mardi.

L’ami - qui a précisé qu’il [Aaron] ne « soutenait pas le Hamas d’une manière ou d’une autre » - s’est dit surpris car Bushnell n’avait jamais violé son habilitation militaire auparavant.

« Il a une habilitation de sécurité depuis quatre ans maintenant, et c’est la seule fois, à ma connaissance, qu’il a enfreint le protocole et donné des informations qu’il n’aurait pas dû donner », a déclaré l’ami à propos de leur conversation.

« Il était effrayé », a déclaré l’ami à propos de Bushnell, qui a grandi dans un complexe religieux controversé dans une petite ville côtière du Massachusetts, mais qui a fini par s’immoler devant l’ambassade d’Israël à Washington, DC, vers 13 heures dimanche, en criant « Libérez la Palestine ! »

Quelques minutes avant de s’immoler, Bushnell avait diffusé en direct une brève allocution vidéo dans laquelle il déclarait qu’il ne serait « plus complice d’un génocide ».

Dans son dernier message sur Facebook, Bushnell a également écrit : « Beaucoup d’entre nous aiment se demander ... Que ferais-je si mon pays commettait un génocide ? La réponse est que vous êtes en train de le faire. En ce moment même ».

Des messages non confirmés publiés sur Reddit et liés à un compte semblant appartenir à Bushnell comprenaient des diatribes contre Israël et justifiaient l’attaque terroriste du Hamas.

Ils ont été publiés dans des groupes anarchistes et anti-policiers, à côté de messages plus banals sur des logiciels informatiques et des demandes de conseils en matière de carrière.

Sur sa page Facebook, Bushnell soutenait également le collectif anarchiste Burning River et Mutual Aid Street Solidarity.

L’ami de Bushnell a déclaré qu’il n’avait aucune idée que le fervent chrétien se suiciderait, d’autant plus que l’aviateur lui avait dit auparavant qu’il était contre le suicide.

« Il a dit que cela allait à l’encontre du plan de Dieu, qu’il y avait toujours de meilleures solutions que le suicide, que le suicide n’allait rien arranger », a déclaré l’ami à propos des commentaires que Bushnell lui avait faits à l’époque.

« Pour qu’Aaron ait fait ce qu’il a fait, il y avait des choses qui l’empêchaient d’agir », a ajouté l’ami.

« Les problèmes qu’il voyait, il ne pouvait pas les résoudre. Il aurait pris cette décision pour essayer de faire en sorte que quelqu’un d’autre puisse résoudre le problème ».

L’ami a déclaré que lorsqu’il a appris que le suicide avait été diffusé en direct, « ma première réaction a été de me dire : "Ce n’est pas possible" ».

« Le suicide n’est pas quelque chose qu’Aaron ferait », a déclaré l’ami.

Il a ajouté que lorsque les deux hommes ont discuté de ce que Bushnell disait avoir découvert sur la guerre, « je lui ai dit de suivre sa conscience, qui l’a toujours mené dans la bonne direction auparavant », bien que Bushnell n’ait pas fait allusion à ce qu’il ferait le lendemain.

« Aaron était très analytique, il aura pris ce genre de décision après y avoir réfléchi longuement.

Aaron se présente extérieurement comme la personne la plus calme, la plus froide et la plus posée que vous puissiez connaître », a ajouté l’ami.

« Vous regardez la vidéo de lui, et vous voyez à quel point il est calme, cool et posé, et c’est sa personnalité normale.

« Le plus bouleversé que nous ayons jamais vu ... c’est qu’il allait prendre une hache et couper du bois ».

L’ami, qui connaissait Bushnell depuis son adolescence, a déclaré qu’il voulait à l’origine s’engager dans l’armée, mais qu’après avoir examiné de plus près toutes les branches des forces armées, le jeune homme a opté pour l’armée de l’air ou la marine.

« Il a tiré à pile ou face [et a choisi] l’armée de l’air. C’était en 2019 », raconte l’ami.

Au cours des années suivantes, Bushnell - qui était « honnête », plein d’ « ntégrité » et » aurait fait  n’importe quoi pour aider n’importe qui, n’importe quand » - a eu du mal à se conformer constamment à la ligne militaire, a déclaré l’ami.

« Quiconque s’engage dans l’armée, les yeux brillants et tout feu tout flamme comme Aaron, et s’implique dans des activités liées au renseignement sur les transmissions, finira dans l’esprit du corps des transmissions ou partira », a déclaré l’ami, faisant référence au système de communication et d’information de l’armée.

« Aaron n’a pas adhéré à l’état d’esprit du Signal Corps.

Cet état d’esprit peut être décrit comme le fait de faire de petits compromis avec sa propre force intérieure pour ne plus être la personne que l’on était auparavant » a déclaré la source.

« Aaron ne pouvait pas faire ça, ce n’était pas dans sa nature ».

* NdT
Renseignements pris, Aaron a grandi dans une communauté œcuménique chrétienne qualifiée par certains de charismatique et par d’autres de « secte controversée », comptant 200 membres, la Communauté de Jésus, appartenant à l’Église de la Transfiguration créée par des moines bénédictins à Orleans, sur la Baie de Cape Cod, dans le Massachusetts. Les membres de la communauté s’exprimant sur les réseaux sociaux ont manifesté depuis le 7 octobre des positions pro-israéliennes pures et dures.