14/05/2022

HAIDAR EID
Vous ne pouvez pas comprendre pourquoi Israël a tué Shireen Abu Akleh sans comprendre le sionisme


 Haidar Eid, Mondoweiss, 13/5/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 

Les Palestiniens savent trop bien ce que signifie le sionisme, après avoir vécu avec les conséquences mortelles de cette idéologie raciste.


 Pourquoi ont-ils tué Shireen Abu Akleh ? Telle était la question soulevée dans ma classe Texte et idéologie le jour où l'Israël de l'apartheid a décidé d'assassiner la correspondante d'Al Jazeera en Palestine, Shireen Abu Akleh, en plein jour. Nous étions encore sous le choc et incrédules face à ce qui s'était passé. Mais nous devions répondre à la question posée dans mon cours, qui portait sur le rôle de l'idéologie dans la formation de la conscience humaine. Nous avions déjà abordé plus de sept définitions du terme, allant du marxisme orthodoxe et du néo-marxisme au structuralisme et au post-structuralisme, et plus encore. De toute évidence, nous devions également aborder la question de la relation entre le langage et le pouvoir, c'est-à-dire le discours. Les réponses proposées par mes étudiants allaient, entre autres, de « Israël voulait se débarrasser de Shireen parce qu'elle couvrait ce qui se passait réellement sur le terrain » à « Israël nous déteste » en passant par « l'Israël de l'apartheid veut simplement faire comprendre à tous les Palestiniens qu'il peut faire ce qu'il veut, même à des journalistes connus »,

 

Mais, alors, nous devions essayer d'entrer dans l'esprit du sniper israélien qui a tiré cette balle fatale afin de comprendre l'effet d'une idéologie sectaire et hégémonique sur la conscience humaine. Mes étudiants sont de genres différents et viennent de milieux différents, mais ils ont tous affirmé qu'il était impossible d'affirmer que le crime n'était pas prémédité. Mais nous devions encore discuter du cadre idéologique dans lequel les forces d'occupation israéliennes fonctionnent. Pour cela, nous devions faire la différence entre un mélange d'une approche biologico-religieuse de l'idéologie et d'une approche libérale-humaniste, cette dernière étant ce que l'Occident est convaincu qu’est le régime israélien, et qui est aussi l'image de propagande que l'État juif diffuse au niveau international. Il suffit de regarder la façon dont les grands médias occidentaux ont couvert le meurtre d'Abu Akleh : soit ils ont complètement adopté le récit israélien, soit ils ont simplement joué les imbéciles en demandant une enquête israélienne sur la question !

 

Mais ce n'est pas ce que nous, Palestiniens, y compris tous mes étudiants, pensons. Nous savons que la réponse à cette question réside dans le sionisme.

 

Le sionisme est incontestablement une idéologie d'exclusion qui incarne une forme de fanatisme ethno-religieux. Ainsi, pour répondre à la question soulevée au début du cours, nous devions comprendre, ou plutôt aborder, cette idéologie hégémonique dans l'Israël de l'apartheid et comment elle a réussi, avec succès -nous l’avons admis-, à amener ses zélotes à ne pas voir  l'humanité des Palestiniens autochtones. Le sionisme est l'idéologie motrice d'un mouvement colonialiste qui a colonisé la Palestine par la force, avec la volonté de coloniser le pays et avec d'éventuelles ambitions expansionnistes. Il est devenu l'idéologie officielle et dominante de l'État d'Israël et s'appuie fortement sur l'idée que les Juifs constituent une nation qui a un droit divin à la « terre promise » aux dépens des Palestiniens autochtones.

 

En tant que Palestiniens, nous savons trop bien ce que signifie le sionisme et comment il a réussi à ruiner la conscience de tant de personnes en Israël, de la même manière que l'apartheid a détruit l'esprit de nombreux Sud-Africains blancs. L'histoire nous fournit d'autres exemples flagrants de sectarisme inhumain en Europe et en Amérique il y a à peine 70-80 ans.

 

Mes élèves et moi ne sommes pas nés de mères juives et nous ne sommes pas des locuteurs natifs de l'hébreu, de l'anglais ou de toute autre langue européenne. Nous sommes biologiquement différents des Juifs ashkénazes - nous appartenons à une race différente et, par conséquent, nous ne sommes pas considérés comme aussi intelligents que les Occidentaux blancs. Ces Occidentaux pensent que notre culture est arriérée ou, pour le dire autrement, que notre humanité n'est pas au même niveau que la leur.

 

La question soulevée par l'un des étudiants était donc de savoir « si le tireur d'élite qui a abattu Shireen a dîné avec sa famille ce soir-là après l'avoir abattue, et s'il s'est endormi dès qu'il a posé sa tête sur l'oreiller ? » La plupart des élèves, sinon tous, ont estimé que c'était possible car, comme l'a dit l'un d'eux, « regrette-t-on de tuer un insecte ? »

 

Au final, nous avons convenu que le tireur a probablement bien dormi cette nuit-là. Et une raison majeure à cela est l'idéologie. Une raison majeure est le sionisme.

 

Repose en paix, Shireen Abu Akleh

 

NdT

Lire aussi
Nasrallah : le sang de la journaliste Shireen Abu Aqleh est sur les mains des dirigeants arabes

 

11/05/2022

SERAJ ASSI
Le plus grand mythe sur la naissance d’Israël et la Nakba

Seraj Assi, Haaretz, 3/5/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala



L'auteur avec son père

Seraj Assi est un Palestinien né en Israël, titulaire d'un doctorat en études arabes et islamiques de l'université de Georgetown, où il est chercheur invité. Il est professeur adjoint d'arabe à l'université George Mason (Fairfax, Virginie). Il est l'auteur de The History and Politics of the Bedouin. Reimagining Nomadism in Modern Palestine, Routledge 2018.

Il s'agit de l'un des mythes les plus tenaces concernant la guerre de 1948 : La bataille épique entre un redoutable Goliath arabe et un Israël nouveau-né pour libérer la Palestine. Et c'est une fable qui continue à faire du mal aujourd'hui.

Les Palestiniens paient encore le prix de l'un des mythes les plus tenaces entourant la guerre israélo-arabe de 1948. Photo : Photos/AP ; Artwork/Anastasia Shub

Alors que les Palestiniens célèbrent le 74e  anniversaire de la Nakba et que les Israéliens célèbrent les 74 ans de leur État, nous devrions prendre un moment pour démystifier l'un des mythes les plus tenaces entourant la guerre de 1948 : la légende des grandes armées arabes, unifiées dans leur esprit, envahissant Israël pour libérer la Palestine.

Dans une fable traditionnelle perpétuée par les Arabes et les Israéliens, la guerre est décrite comme une bataille épique entre un David juif et un Goliath arabe. Il s'agit là d'une véritable mythification de l'histoire.

Mais ce n’était pas une guerre entre un petit David israélien et un Goliath arabe géant. C'était un Israël très motivé et relativement organisé qui combattait une coalition arabe fragmentée dont les gouvernements étaient entrés en guerre pour se disputer leur part de la Palestine.

Le roi Abdallah Ier de Jordanie était là pour annexer la Palestine et créer une Grande Syrie hachémite. Les Syriens, qui craignent la Jordanie plus qu'Israël, étaient là pour empêcher la Jordanie d'annexer la Cisjordanie. L'Égypte était là pour bloquer les Hachémites, occuper la bande de Gaza et affirmer sa suprématie sur ses voisins arabes. La Palestine était un champ de bataille par procuration pour leurs ambitions et leurs craintes. Le sort des Palestiniens eux-mêmes ne figurait guère dans les calculs des autocrates arabes.

Le mythe de l'infériorité militaire d'Israël a été démoli par les historiens israéliens eux-mêmes. Selon Avi Shlaim, à chaque étape de la guerre, les forces israéliennes étaient plus nombreuses et mieux armées que toutes les forces arabes mobilisées contre elles. À la mi-mai 1948, le nombre total de troupes arabes en Palestine, tant régulières qu'irrégulières, était inférieur à 25 000, alors qu'Israël alignait plus de 35 000 soldats. À la mi-juillet, Israël comptait 65 000 hommes sous les armes, et en décembre, ses effectifs atteignaient un pic de près de 100 000 hommes.

Des volontaires palestiniens dans une tranchée apprennent d’un instructeur à tirer et à se défendre à Toulkarem, en Palestine, pendant le conflit judéo-arabe de 1948. AP Photo

 « L'issue finale de la guerre n'était donc pas un miracle, mais un reflet fidèle de l'équilibre militaire sous-jacent sur le théâtre palestinien. Dans cette guerre, comme dans la plupart des guerres, c’est le côté le plus fort l'a emporté », commente Shlaim, dans The War for Palestine.

À       la veille de la guerre, la façade unitaire arabe cachait des divisions et des fissures profondes. Les dirigeants arabes se méfiaient davantage les uns des autres que d'Israël. Les armées arabes ont traversé la Palestine pour se battre entre elles et se saboter mutuellement.

Ils sont entrés en guerre non pas en tant qu'Arabes, mais en tant qu'Égyptiens, Jordaniens, Syriens et Irakiens. Ils n'avaient ni un commandement unifié ni une vision unifiée. Les Arabes ont porté leur guerre froide en Palestine. Ils menaient une guerre dans une guerre. Toute l'entreprise était vouée à l'échec dès le départ. Pour citer l'historien Eugene Rogan : « Les États arabes sont finalement entrés en guerre pour s'empêcher mutuellement de modifier l'équilibre des forces dans le monde arabe, plutôt que pour sauver la Palestine arabe ».

Aucun des États arabes qui sont entrés en guerre ne souhaitait voir émerger un État palestinien viable sur son flanc. La Jordanie hachémite a travaillé dur pour s'assurer qu'un tel État ne verrait jamais le jour. Il s'agissait d'une grande trahison ourdie en secret.

En novembre 1947, à la veille du plan de partage, le roi Abdallah de Transjordanie rencontre secrètement la dirigeante sioniste Golda Meir pour signer un pacte de non-agression : le roi s'engage à ne pas s'opposer à la création de l'État juif en échange de son annexion de la Cisjordanie.

Trois mois plus tard, en février 1948, les Britanniques donnent leur feu vert au plan secret d'Abdallah. Pas étonnant que la Jordanie soit le seul pays arabe à ne pas s'opposer au plan de partage. Trois mois plus tard, les Britanniques quittent la Palestine, et Israël déclare son indépendance.

Le jour suivant, les Arabes ont déclaré la guerre à Israël, soi-disant pour récupérer la Palestine, mais surtout pour s'affaiblir mutuellement. Lorsque la poussière de la guerre est retombée, la Palestine était perdue.

L'éclat des fusées éclairantes et des feux allumés par des obus de mortier et d'artillerie illumine le ciel au-dessus de la Tour de David dans la vieille ville de Jérusalem, l'un des échanges de tirs les plus violents entre Arabes et Juifs. AP Photo/Jim Pringle

La Transjordanie, quant à elle, a pu s'emparer de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est (avec la bénédiction britannique), tandis que l'Égypte s'emparait de Gaza. Il s'avère que les Hachémites sont entrés en guerre avec deux objectifs : annexer la Cisjordanie et empêcher leur rival acharné, Hadj Amin al-Husseini, le mufti de Jérusalem, de créer un État palestinien viable. Les autres États arabes y sont allés pour contenir la Transjordanie plutôt que pour sauver la Palestine. En fin de compte, les Hachémites l'ont emporté.

Un homme a tout vu venir. Fawzi Qawuqji était le commandant de l'Armée de libération arabe. Alors que l'ALA était une armée de volontaires créée par la Ligue arabe pour contrer l'Armée de la guerre sainte du Mufti, les gouvernements arabes ont empêché des milliers de recrues arabes de rejoindre l'une ou l'autre de ces forces.

Comme beaucoup de ses camarades arabes, Qawuqji a traversé vers la Palestine avec des promesses grandioses de libération. Pourtant, une fois en Palestine, il s'est trouvé aux prises avec la guerre d'usure de l'unité arabe. « Elle était là pour empêcher une guerre entre les États arabes », écrit-il à propos de l'ALA. Au lieu de combattre les sionistes, le commandant arabe devait maintenant se frayer un chemin entre les Hachémites et les nationalistes syriens.

Le roi Abdallah de Transjordanie, à gauche, et son hôte, le roi d'Arabie Saoudite Abdul Aziz Ibn Saoud, à Riyad, en Arabie Saoudite, le 29 juin 1948, lors d'une visite pour discuter de la question palestinienne. AP Photo

Le climat politique arabe qui a donné naissance à l'ALA a posé un grand dilemme à Qawuqji. Il écrit dans ses mémoires : « Le roi Abdallah était déterminé à réaliser son projet de Grande Syrie par le biais de la Palestine. Cette possibilité, plus que toute autre, inquiétait le gouvernement syrien. Quant à l'Irak, qui enverrait son armée sur le champ de bataille en Palestine en passant par la Transjordanie, comment pourrait-il agir ? Aiderait-il la Jordanie dans la réalisation de ce projet ? »

C'était une préoccupation réelle. Après tout, les Irakiens n'étaient pas disposés à contrarier leurs cousins hachémites pour le bien de la Palestine, ni le Mufti, envers lequel ils nourrissaient une profonde méfiance.

Réfléchissant aux réticences mutuelles qui prévalaient entre les États arabes à la veille de la guerre, Qawuqji s'est amèrement lamenté : « Chaque État arabe craignait son soi-disant État frère. Chacun convoitait le territoire de son frère, et conspirait avec d'autres contre son frère. Telle était la situation dans laquelle se trouvaient les États arabes lorsqu'ils se préparaient à sauver la Palestine, et c'est ce qui les a troublés avant tout. Ce n'est qu'après cela, très loin après cela, qu'est venu le problème de la Palestine elle-même ».

Des réfugiés palestiniens ayant fui leurs maisons lors des récents combats en Galilée entre Israël et les troupes arabes affluent de Palestine sur la route du Liban en 1948. Photo : AP

Le choc de la défaite a été biblique. Aucun autre événement de l'histoire arabe moderne n'a été aussi inévitable et pourtant si complètement imprévu.

Pour reprendre les termes de l'intellectuel syrien Constantin Zureiq, qui a inventé le terme « Nakba » dans son livre fondamental The Meaning of the Nakba, il s'agit du « pire désastre qui ait frappé les Arabes dans leur longue histoire ». Il a noté, avec précision : « Sept pays [arabes] partent en guerre pour abolir la partition et vaincre le sionisme, et quittent rapidement la bataille après avoir perdu une grande partie de la terre de Palestine ».

C'était une défaite arabe, mise en scène et orchestrée par les régimes arabes, un désastre auto-infligé pour lequel les Palestiniens ont payé le prix ultime, depuis lors.

En fin de compte, la défaite arabe avait été scellée dès le départ. Comme le grand nationaliste arabe Sati al-Husari le dira plus tard : « Les Arabes ont perdu la Palestine parce que nous étions sept États ».

Le commandant britannique de la Légion arabe de Transjordanie, le brigadier John Bagot ("Glubb Pacha"), à droite, parle aux soldats de son commandement dans un poste avancé près de Ramallah, en Palestine, le 20 juillet 1948. AP Photo

En fait, il ne s'agissait guère d'États arabes, mais d'États clients, sous des auspices coloniaux. En 1948, l'Égypte, l'Irak et la Jordanie étaient encore sous contrôle britannique. L'armée jordanienne, connue sous le nom de Légion arabe, était dirigée par un officier britannique, John Bagot Glubb, alias Glubb Pacha, dont la loyauté était partagée entre les Hachémites et ses supérieurs britanniques.

Il était crédule d'attendre des Arabes qu'ils libèrent la Palestine alors qu’eux-mêmes n'étaient pas libérés. Comme Gamal Abdel Nasser, le futur président égyptien qui a combattu pendant la guerre, l'a dit plus tard dans ses mémoires : « Nous nous battions en Palestine, mais nos rêves étaient en Égypte ».

Ainsi, les armées arabes qui ont envahi « Israël » n'étaient pas des Goliaths. En fait, il n'y avait pas d'armées arabes, seulement un méli-mélo de groupes paramilitaires non coordonnés, qui étaient mal armés et à peine entraînés, hautement improvisés, largement surpassés en nombre et submergés. L'engagement militaire arabe officiel en Palestine était au mieux timide. Les États arabes naissants, qui étaient encore dominés par d'anciens généraux coloniaux et des dirigeants fantoches, n'avaient pas de véritable combativité en eux.

La guerre de 1948 n'était pas tant une guerre israélo-arabe qu'une guerre arabo-arabe. Pour paraphraser la célèbre phrase de Jean Baudrillard : la guerre de 1948 n'a pas eu lieu. Pendant des décennies, depuis 1948, les États arabes ont imposé aux Palestiniens - en exigeant leur gratitude et leur obéissance - leurs sacrifices en temps de guerre au nom de la Palestine. Mais l'histoire montre que l'engagement arabe en faveur de la Palestine relève largement de la légende.

10/05/2022

SEVIM DAĞDELEN
Depuis la base de Ramstein, l'Allemagne suit le programme de guerre US

 

Sevim Dağdelen, Junge Welt, 27/4/2022

Traduit par Le Cri des Peuples

Sevim Dağdelen (Duisburg, 1975) est membre du Bundestag allemand (chambre basse fédérale) depuis 2005 pour Die Linke (le parti de gauche). Elle est présidente  de la Commission des Affaires étrangères et porte-parole du groupe parlementaire pour la politique internationale et le désarmement.

Négociations pour la paix, au lieu de Panzers pour la guerre !


Ce n'est pas le moment de se laisser prendre à la propagande de guerre. Le nouveau militarisme met au défi notre résistance.

La guerre en Ukraine n'est plus qu'une question d'armes, d'armes, d'armes. Plus d'armes et des armes toujours plus lourdes. Tous les tabous de l'après-guerre tombent. La diplomatie est passée par pertes et profits.

Un nouveau militarisme allemand dans le sillage du militarisme américain est le point de référence de ce gouvernement allemand. Alors que le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, est à Moscou pour promouvoir un cessez-le-feu rapide et la fin de la guerre, les membres de l'OTAN poussent l’alliance militaire à faire la guerre à la Russie.

Les soldats ukrainiens ne sont qu'un moyen de parvenir à une fin. Entre-temps, l'objectif est devenu de porter la guerre en Russie même.

Ramstein est la grande base aérienne usaméricaine dans le sud-ouest de l'Allemagne.

Ramstein signifie guerre

L'OTAN est préoccupée par la victoire et rien d'autre. À cette fin, Washington a convoqué une réunion spéciale des représentants de l’industrie d’armement à la base aérienne américaine de Ramstein, en Rhénanie-Palatinat.

Au lieu de soutenir Guterres et de considérer le conseil de guerre américain sur le sol allemand comme un affront politique calculé à la souveraineté démocratique [de l'Allemagne], le gouvernement SPD/Verts a envoyé la ministre de la défense Christine Lambrecht pour y participer et a annoncé qu'il allait de l'avant à toute vapeur : le gouvernement du SPD [sociaux-démocrates], des Verts et du FDP [libéraux-démocrates] livre maintenant des chars allemands à l'Est, comme cela lui a été exigé. Jusqu'à la victoire. Il ne doit pas y avoir de paix négociée.

L'ambassadeur ukrainien et militant néonazi Andrij Melnyk s'est finalement imposé à la table du cabinet du chancelier Olaf Scholz. Il ne fait aucun doute que les armes allemandes finissent par aller aux bataillons d'extrême droite intégrés à la Garde nationale et à l'armée ukrainienne, et personne au sein du gouvernement allemand ne montre la moindre inquiétude à ce propos.

« Guépard », « Martre », « Puma », « Renard », « Boxer », « Léopard » : ce qui ressemble à la liste inoffensive de l'encyclopédie « La vie des animaux, par Grzimek » menace de devenir le programme d'extension du conflit ukrainien en une troisième guerre mondiale contre la puissance nucléaire russe. En fournissant des armes lourdes, l'Allemagne et l'OTAN deviennent de facto des cobelligérants dans la guerre.

Le militarisme défie notre résistance

La situation est brûlante. Et l'administration américaine jette de l'huile sur le feu, ce qui permet au gouvernement allemand de s’enflammer à son tour. Le chef du Pentagone, Lloyd Austin, a annoncé à Ramstein que Washington remuerait « ciel et terre » pour armer l'Ukraine en vue d'une nouvelle guerre. Et le sous-secrétaire d'État parlementaire britannique aux forces armées, James Heappey, déclare à Kiev qu'il est légitime d'attaquer la Russie avec des armes britanniques et de mener des frappes sur son territoire.

Lambrecht fournit les chars allemands qui seront utilisés pour gagner la guerre d'usure. Ramstein est le symbole d'un programme de guerre de l'OTAN. Les gagnants ont déjà été déterminés : les fabricants d'armes. Ce programme est mené sur le dos des populations en Europe. Ce n'est pas le moment de se laisser duper par la propagande de guerre. Le nouveau militarisme met au défi notre résistance.


08/05/2022

بولات اوکودژاوا: دهمین گُردانِ زمینیِ ما
روز پیروزی

بولات اوکودژاوا

     این جا،

پرنده گان نمی خوانند

  درختان نمی بالند

تنها مائیم،

شانه به شانه کاشته می شویم

درین زمین.

زمین می سوزد و می چرخد

دودی ، میهنِ مان را پوشانده 

راهی جز پیروزی نمانده است.

 پیروزی برایِ همه

 به هربهائی 

 به انتظارِ ما آتشِ مرگ باری است

 چه ناتوان است ، اما

 رهاکنید تردید ها را.....!

 به تنهائی فرومی ریزد در شب ، دهمین گُردانِ زمینیِ ما .

 به پایان نرسیده جنگ

   فرمانِ دیگری می رسد

 به جُستجویِ ما سرگردان است نامه رسان.

  اُوج می گیرد شفقی سُرخ

 مسلسل ها ، بی وقفه به آتش

 راهی جز پیروزی نمانده است .

 پیروزی برایِ همه

 به هر بهائی

 به انتظارِ ما آتشِ مرگ باری است

 چه ناتوان است ، اما

 رهاکنید تردیدها را.....!

 به تنهائی فرومی ریزد درشب ، دهمین گُردانِ زمینیِ ما.

 از کورسک تا اُری اُل

 ما را تا دروازۀ دشمن کشانده است ، جنگ

 آری ، این چنین است.....ای برادر....!

 روزگاری به یاد می آوریم ، همۀ این ها را 

 و باورمان نمی شود.

 اینک ما ، نیازی جز پیروزی نداریم.

 پیروزی برایِ همه

 به هربهائی

 به انتظار ما آتشِ مرگ باری است

 چه ناتوان است، اما

 رهاکنید تردیدها را.....!

 به تنهائی فرومی ریزد در شب ، دهمین گُردانِ زمینیِ م

Min. 36:00


GIDEON LEVY
« Faut-il éliminer Yahya Sinwar ? »: de gauche à droite, les sionistes appellent en chœur au meurtre

Gideon Levy, Haaretz, 7/5/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 

Voilà à quoi ressemble un discours incendiaire : les médias et les réseaux sociaux sont inondés d'appels à assassiner le leader d'un mouvement politique - même s'il s'agit d'un mouvement religieux, extrémiste et violent - dans une quête sanguinaire de vengeance. C'est aussi à cela que ressemble un chœur rauque uniforme : du Meretz de gauche (Uri Zaki) aux kahanistes, des journalistes Amnon Abramovich (TV Channel 12) à Ben Caspit (Maariv), chacun d'entre eux appelle à l'élimination du chef du Hamas Yahya Sinwar. Un État, une voix.

Yahya Sinwar

Ils rivalisent pour trouver l'épithète appropriée et digne de lui, crapule ou ordure. Oh, quels patriotes ! Si seulement c'était possible, le lapider en place publique attirerait des multitudes aux festivités. La nation se contentera au moins de provoquer sa mort par tout autre moyen. C'est la seule réponse que l'État d'Israël, emmené par les médias incendiaires, peut offrir à la suite d'attaques terroristes.

La dernière en date était particulièrement horrible elle ea été perpétré à la hache. Mais le meurtre à la hache est-il vraiment plus cruel que tout autre type de meurtre ? La hache est emblématique de la faiblesse de quelqu'un qui pourrait rêver de tuer en avion au milieu de la nuit. Mais il n'avait pas d'avion, ni même de canon.

Évidemment, le meurtre à la hache est barbare, mais en quoi est-il différent du meurtre d'une jeune fille de 19 ans voyageant innocemment en taxi avant d'être abattue par un soldat ? En quoi, dans l'intention ? Le soldat n'avait-il pas l'intention de tuer en tirant à balles réelles sur un taxi rempli de femmes à Jénine ? Quelle autre intention avait-il ?

De telles questions se posent après chaque attaque terroriste, tout comme la réaction instinctive d'Israël, qui se répète d'une manière qui ne peut que conduire au désespoir. N'oubliant rien et n'apprenant rien, combien de fois l'assassinat sera-t-il proposé comme solution, alors que toutes les fois précédentes, il n'a servi à rien, causant dans la plupart des cas encore plus de dégâts.

Même si l'on met de côté la question de la légalité ou de la moralité d'un État exécutant des personnes sans procès, il reste la question de son efficacité, qui n'a jamais été prouvée.

On peut aussi, d'une certaine manière, ignorer l'image répugnante et pathétique des médias, qui se sont presque unanimement lancés dans une campagne, demandant plus d'assassinats, plus d'invasions, plus de conquêtes.

On ne peut oublier qu'en Israël, les assassinats sont aussi une affaire politique. Ce ne sont pas seulement les cibles qui sont politiques - des personnes qui, dans des États respectueux de la loi, ne sont pas des cibles légitimes - les meurtres proprement dits sont politiques. Ils sont destinés à satisfaire des besoins et des objectifs politiques, en montrant au public que « quelque chose est fait ». Une solution instantanée.

Il est douteux qu'il existe un domaine dans lequel les médias israéliens soient aussi unifiés et influents, exprimant le désir obscène des masses, poussant à mener des attaques violentes de vengeance. « Faut-il éliminer Sinwar ? », demandait une légende sur les fils d'actualité en début de semaine, comme s'il s'agissait d'une émission de télé-réalité. Des meurtres à la demande. Le grand nombre de ces meurtres a masqué l'atmosphère illégitime dans laquelle se déroule la conversation sur la réponse à apporter à ces attaques.

Sinwar n'est pas le pire des ennemis. Son successeur sera pire. Sinwar ne sera pas non plus le premier Yahya du Hamas qu'Israël élimine en vain. L'élimination de Yahya Ayyash, son prédécesseur, n'a rien donné d'autre à Israël qu'une vague d'attentats-suicides au cours desquels 60 Israéliens ont été tués.

Réduire le problème posé par les attaques terroristes à un seul dirigeant est une façon lâche d'éviter de s'attaquer aux véritables problèmes. Comme si la terreur ne découlait pas du blocus, de l'occupation, de la brutalité des policiers à la mosquée al-Aqsa, de la violence des colons et du meurtre d'innocents en Cisjordanie. Comme si la terreur était personnifiée par Sinwar, seulement Sinwar. Si la terreur est Sinwar, tuons-le, et le calme reviendra.

Si la terreur est liée à l'échange de prisonniers contre Shalit, dans lequel Sinwar a été libéré après 23 ans de prison, alors il y a une solution facile. Pas de libération de prisonniers, seulement des assassinats, la « dissuasion », et la paix sera rétablie. Israël a essayé cela mille et une fois sans succès. Cela ne marchera pas non plus maintenant.

Évidemment, nous ne pouvons pas rester silencieux face à la terreur. Au contraire, nous devons en parler. Avec le Sinwar vivant. Lui parler, directement ou indirectement, de la levée du blocus. Lui parler des droits dont son peuple a été privé, de sa dignité bafouée. Nous n'avons jamais, mais jamais, essayé de le faire sérieusement.

06/05/2022

JOANNA STRAUGH
USA : c’est la Cour suprême qu’il faut abolir, pas l’arrêt Roe contre Wade !

Joanna Straugh,workers.org, 3/5/2022

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La Cour suprême des USA dispose des voix nécessaires pour annuler Roe v. Wade, l’arrêt historique de 1973 légalisant l'avortement aux USA. C'est ce qu'a révélé un projet d'avis du juge Samuel Alito qui a fuité dans la presse sans l'autorisation de la Cour. Cette fuite, sans précédent dans l'histoire, visait à alerter le public de l'attaque prévue par la Cour Suprême.

L'une des milliers de manifestant·es lors d'une manifestation d'urgence à Foley Square, New York City, le 3 mai. (WW Photo : Toni Arenstein)

 Selon le projet d’avis, l'annulation de Roe v. Wade est justifiée et mettrait fin aux protections fédérales du droit à l'avortement, permettant aux États de dicter les lois sur l'avortement. Alors que l'opinion majoritaire fait référence aux lois des États comme reflétant « la volonté du peuple », un sondage Gallup de mai 2021 montre que le public usaméricain soutient le droit à l'avortement dans tous les cas ou dans la plupart des cas à 80%.

Pourtant, au moins 23 États interdiraient l'avortement immédiatement si la Cour suprême annulait le jugement Roe v. Wade. D'autres restreindraient davantage l'avortement. De plus, des États comme le Texas et l'Oklahoma ont adopté des lois qui récompensent la population contre les demandeuses d'avortement et les cliniciens qui en pratiquent en offrant des primes de 10 000 $ à toute personne qui identifie et dénonce quelqu'un qui, selon elle, aide une personne à obtenir un avortement. Treize États ont des « lois gâchette » qui appliquent automatiquement une interdiction de l'avortement. 

Quelques États ont promis d'être un « refuge » pour les personnes ayant besoin d'un avortement, mais leurs efforts risquent d'être rendus vains puisque d'autres États annoncent des lois interdisant de franchir les frontières de l'État pour obtenir un avortement. Une restriction qui à la fois oblige et interdit de franchir les frontières de l'État pour se faire avorter intensifie les barrières et toutes les répressions associées à la criminalisation. 

Nombreux sont ceux qui craignent qu'un précédent de ce type puisse renverser d'autres décisions progressistes de la Cour suprême, sans que l'on puisse voir la fin de l'abrogation des droits et de la criminalisation de la population.

L'intensité de l'indignation à la perspective de perdre le dernier lambeau de protection des droits reproductifs a enflammé un mouvement de protestation qui s'étend. Des rassemblements ont spontanément éclaté dans les villes des USA le 3 mai, à l'initiative de nombreux groupes. Des majorités de plus en plus larges de jeunes, dont la vie est la plus profondément affectée par ces lois, considèrent cet assaut comme un nouveau point de rupture dans toute une série : démantèlement des syndicats, mise en cage des migrants, attaques contre les jeunes transgenres, brutalités policières racistes, etc.

La perspective de l'annulation de l'arrêt Roe v. Wade conduit à des appels à en finir avec la Cour suprême elle-même, un organe non élu, nommé à vie, créé pour servir les intérêts de la classe dominante.


Il faut abolir la Cour suprême, pas les droits reproductifs !

01/05/2022

GIDEON LEVY
Hanan Khadour : elle était née en plein couvre-feu de la 2ème Intifada. Elle est morte 19 ans plus tard au milieu des affrontements israélo-palestiniens


Gideon Levy et Alex Levac (photos), Haaretz, 30/4/2022

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

Lorsque Hanan Khadour est née, Jénine était sous contrôle de l'armée israélienne en raison de l'opération « Bouclier défensif », et son père a dû la porter à l'hôpital dans ses bras. Il y a trois semaines, elle est montée à bord d'un taxi collectif dans la même ville, qui grouillait de soldats et de tireurs d'élite israéliens. Une seule balle a transpercé son corps

Le père endeuillé Mahmoud Khadour, avec son jeune fils Mohammed

Hanan Khadour était née le 1er  décembre 2002. Sa mère, Abir, était à son huitième mois lorsque les contractions ont commencé. L'hôpital le plus proche se trouvait à Jénine, à 12 kilomètres de chez elle dans le village de Faqua, mais il n'y avait aucun moyen de s'y rendre à cause des barrages routiers. C'était la période qui a suivi l'opération « Bouclier défensif » durant la deuxième Intifada, et le camp de réfugiés de Jénine était toujours bouclé. Abir a accouché à la clinique du médecin du village : Hanan est née prématurée. Elle avait un besoin urgent d'un incubateur, mais aucun n'était disponible localement. Le médecin a dit à la famille que la survie du nouveau-né dépendait de son transport urgent à l'hôpital.

Son père, Mahmoud, a décidé qu'il devait tout faire pour donner à sa fille une chance de vivre, comme il dit maintenant.

Mahmoud a appelé le service d'ambulances d'urgence du Croissant-Rouge juste après sa naissance, mais on lui a répondu qu'ils ne pouvaient pas se rendre à Faqua, l'armée ne les laissant pas passer. Il a alors conduit avec le petit bébé jusqu'à la berme de terre que l'armée avait érigée pour isoler le village de Jénine. Il est sorti de la voiture, sa fille dans les bras. Les soldats de l'autre côté de la barrière ont menacé de lui tirer dessus s'il faisait un pas de plus.

« Vous pouvez me tirer dessus », leur a-t-il dit, « mais j'emmène ma fille à l'hôpital ».

« C’est quoi le problème avec ta fille ? », lui a demandé un soldat.


Une banderole commémorative pour Hanan Khadour près de sa maison, cette semaine. « Nous sommes nés à une époque difficile, dans un endroit qui ne réalise pas un seul de nos rêves », dit son père.

« Elle vient de naître, et elle est sur le point de mourir », a-t-il répondu.

Finalement, Mahmoud a fini par franchir la barrière à pied. Une ambulance du Croissant-Rouge l'attendait et a transporté Hanan à l'hôpital de Jénine, où elle a été placée dans une couveuse, où elle a passé le mois suivant. Mais ce n’était pas la fin de son calvaire. Lorsqu'elle a eu un an et qu'elle a commencé à marcher, une anomalie congénitale a été découverte dans sa hanche et elle a été hospitalisée pendant 21 jours, cette fois à l'hôpital Mukassed de Jérusalem-Est, où l'anomalie a été corrigée. Son père n'a pas été autorisé à être avec elle, l'accès lui étant refusé pour des raisons de sécurité.

C’est ainsi qu’a commencé la courte vie d'Hanan Khadour, qui s'est terminée la semaine dernière.