Africa Intelligence, 17/1/2025
Ces dernières semaines, J. Peter Pham, ancien envoyé spécial pour les Grands Lacs puis pour le Sahel sous le premier mandat de Donald Trump, a multiplié les prises de contact avec l'entourage du futur président américain. Le chercheur de formation à l'éternel nœud papillon fait office de grand favori pour assumer la fonction de sous-secrétaire d'État aux affaires africaines, qui lui avait déjà échappé de peu en 2016.
Le 8 janvier, il s'est notamment entretenu en marge d'une partie de golf avec le fils du vainqueur de l'élection présidentielle de novembre 2024, Donald Trump Jr. Le quadragénaire, qui montre une appétence croissante pour les sujets de politique étrangère, rentrait alors tout juste d'un déplacement au Groenland ayant suscité de vives questions en raison des visées du successeur de Joe Biden sur ce territoire stratégique. Grands amateurs de chasse, Donald Trump Jr. et son frère Eric Trump ont pris part à des safaris armés dans plusieurs pays africains au cours de la dernière décennie, parmi lesquels le Zimbabwe et la Zambie.
J. Peter Pham a aussi cherché à se rapprocher de la commission des affaires étrangères du Sénat, présidée par le républicain de l'Idaho Jim Risch. Alors que toute nomination au poste de sous-secrétaire d'État aux affaires africaines nécessite le blanc-seing de la chambre haute, l'ancien envoyé spécial pour le Sahel, qui n'a pas souhaité répondre à nos sollicitations, veille à s'assurer du soutien d'un maximum d'élus dans cette perspective.
Cercles africanistes républicains
Un tel feu vert ne sera cependant pas nécessaire pour Joe Foltz, qui, comme l'a révélé Africa Intelligence (AI du 08/01/25), est "fléché" pour prendre la tête de la direction Afrique du National Security Council (NSC), rattaché à la Maison blanche. Cet ancien cadre de l'agence américaine de développement international (USAID), au tropisme africain marqué, officie actuellement au sous-comité des affaires étrangères pour l'Afrique de la Chambre des représentants, organe piloté par le républicain John James. Il a exposé sa vision de ce que pourrait être la politique africaine du second mandat de Donald Trump à Michael Waltz, le futur conseiller à la sécurité nationale, à l'occasion d'un tête-à-tête en décembre.
Avant même d'être officiellement confirmés dans leurs fonctions, Joe Foltz et J. Peter Pham ont reçu, chacun de son côté en décembre, une délégation congolaise dépêchée à Washington par Félix Tshisekedi.
Après avoir un temps envisagé de prendre les rênes de la chancellerie américaine en Hongrie, Tibor Nagy, sous-secrétaire d'État aux affaires africaines entre 2018 et 2021, pourrait quant à lui se voir adoubé sous-secrétaire d'Etat à la gestion. Parmi les plus élevées du Département d'Etat, la fonction implique entre autres la supervision de l'ensemble du réseau diplomatique des États-Unis à l'étranger.
D'autres personnalités associées aux cercles africanistes républicains sont évoquées pour rejoindre la future administration. Ancien directeur Afrique du NSC sous le président George W. Bush, après plusieurs années passées à la CIA, Cameron Hudson figure parmi les recrues potentielles. Tout comme Joshua Meservey, qui occupe actuellement le poste de senior fellow au Hudson Institute, après avoir officié pendant sept ans à la très conservatrice Heritage Foundation. Très proche des milieux trumpistes, ce think-tank plaide depuis plusieurs mois pour que les États-Unis deviennent le premier État à reconnaître le Somaliland, une position à rebours de celle de l'administration de Joe Biden, favorable à une "politique de la Somalie unique" (AI du 02/08/24).
Autre figure respectée des milieux républicains sur les questions africaines, John Tomaszewski, alias "JT", devrait conserver son poste de conseiller Afrique auprès du sénateur de l'Idaho Jim Risch. À la tête de la commission des affaires étrangères du Sénat, ce dernier jouira d'une influence non négligeable sur la conduite de la politique étrangère américaine, allant de la validation des ambassadeurs à l'adoption de sanctions.
Courant évangélique
Adepte d'une forme de diplomatie "familiale", Donald Trump, connu pour son peu d'intérêt pour l'Afrique, pourra en outre sous-traiter certains pans de sa politique sur ce continent à des membres de son clan. À cet égard, un nom revient souvent : celui de Massad Boulos, dont le fils, Michael Boulos, est le mari de Tiffany Trump, quatrième enfant du futur président. Nommé conseiller spécial pour le Moyen-Orient, Massad Boulos dispose de solides relais d'affaires au sein de la diaspora libanaise établie en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale.
Le beau-père de Massad Boulos, le Franco-Burkinabè Michel Zouhair Fadoul, avait fondé en 1966 le groupe Fadoul Afrique, qui détient dans la région une dizaine de sociétés actives dans le BTP, l'industrie, l'audiovisuel et la distribution automobile. Outre le Burkina Faso, l'entreprise est présente en Côte d'Ivoire, au Bénin, au Togo et au Cameroun. Michel Zouhair Fadoul est également impliqué dans la gestion de SCOA Nigeria, une société spécialisée dans la vente de véhicules, basée à Lagos et dirigée par son gendre depuis plusieurs années. Bien que son périmètre officiel demeure pour l'heure cantonné au Moyen-Orient, Massad Boulos a confié à certains proches ne pas exclure de s'impliquer sur des dossiers africains à l'avenir.
Au-delà des réseaux diplomatiques traditionnels, l'entourage de Donald Trump en charge de l'Afrique devra par ailleurs composer avec le poids du courant évangélique, dont est issue une frange importante de l'électorat républicain. Plusieurs voix en son sein ont dénoncé au cours des dernières années la dimension supposément "woke" de la politique étrangère de Joe Biden, notamment sur le continent africain. Parmi les institutions liées à ce mouvement, la Liberty University, située en Virginie, montre un intérêt croissant pour l'Afrique. Ces dernières années, ses murs ont ainsi accueilli plusieurs rencontres de haut niveau qui ont rassemblé des personnalités africaines de premier plan, parmi lesquels l'ancien président ghanéen Nana Akufo-Addo et l'ex-vice-présidente libérienne Jewel Taylor.
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