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23/01/2025

JEFFREY SACHS
L’idéologie génocidaire d’Israël doit être affrontée et stoppée

Les extrémistes violents qui contrôlent aujourd’hui le gouvernement israélien sont convaincus qu’Israël a le droit biblique, voire le mandat religieux, de détruire le peuple palestinien.

Jeffrey D. Sachs, CommonDreams, 30/9/2024
 Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala

Lorsque le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou est monté à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies la semaine dernière, des dizaines de gouvernements ont quitté l’hémicycle. L’opprobre mondial jeté sur Netanyahou et son gouvernement est dû à la violence dépravée d’Israël à l’encontre de ses voisins arabes. Netanyahou prône une idéologie fondamentaliste qui a fait d’Israël la nation la plus violente du monde.


Netanyahou s’adresse à l’Assemblée générale des Nations unies le 27 septembre 2024 et brandit deux cartes du Moyen-Orient : The Curse, « la malédiction » incluant l’Iran, la Syrie, l’Irak et le Liban ; The Blessing, « la bénédiction » ,  montrant une nouvelle route commerciale traversant l’Arabie Saoudite, protégée par les É.A.U, l’Égypte et le Soudan, sans le Qatar.

Le credo fondamentaliste d’Israël soutient que les Palestiniens n’ont aucun droit à leur propre nation. La Knesset israélienne a récemment adopté une déclaration rejetant la création d’un État palestinien sur ce que la Knesset appelle la Terre d’Israël, c’est-à-dire le territoire situé à l’ouest du Jourdain.
« La Knesset d’Israël s’oppose fermement à la création d’un État palestinien à l’ouest du Jourdain. La création d’un État palestinien au cœur de la Terre d’Israël constituera un danger existentiel pour l’État d’Israël et ses citoyens, perpétuera le conflit israélo-palestinien et déstabilisera la région ».
Qualifier le territoire situé à l’ouest du Jourdain de « cœur de la Terre d’Israël » est stupéfiant. Israël est une partie de la terre à l’ouest du Jourdain, pas la terre entière. La Cour internationale de justice a récemment statué que l’occupation par Israël des terres palestiniennes (celles situées à l’extérieur des frontières d’Israël au 4 juin 1967, avant la guerre de juin 1967) était manifestement illégale. L’Assemblée générale des Nations unies a récemment voté à une écrasante majorité en faveur de la décision de la CIJ et a appelé Israël à se retirer des territoires palestiniens dans un délai d’un an.
Il convient de rappeler que lorsque l’empire britannique a promis une patrie juive en Palestine ottomane en 1917, les Arabes palestiniens constituaient environ 90 % de la population. Au moment du plan de partage des Nations unies de 1947, la population arabe palestinienne représentait environ 67 % de la population, bien que le plan de partage ne proposât de donner aux Arabes que 44 % des terres. Aujourd’hui, Israël revendique 100 % des terres.
Les sources de cette chutzpah israélienne sont nombreuses, la plus importante étant le soutien apporté à Israël par la puissance militaire usaméricaine. Sans le soutien militaire des USA, Israël ne pourrait pas régner sur un régime d’apartheid dans lequel les Arabes palestiniens représentent près de la moitié de la population, mais ne détiennent aucun pouvoir politique. Les générations futures s’étonneront que le lobby israélien ait réussi à manipuler l’armée usaméricaine au détriment de la sécurité nationale des USA et de la paix dans le monde.
Outre l’armée usaméricaine, il existe une autre source d’injustice profonde d’Israël à l’égard du peuple palestinien : le fondamentalisme religieux véhiculé par des fanatiques tels que le fasciste autoproclamé Bezalel Smotrich, ministre israélien des finances et le ministre de la défense nationale Itamar Ben-Gvir. Ces fanatiques s’accrochent au livre biblique de Josué, selon lequel Dieu a promis aux Israélites la terre « du désert du Néguev au sud jusqu’aux montagnes du Liban au nord, de l’Euphrate à l’est jusqu’à la mer Méditerranée à l’ouest » (Josué 1:4).
La semaine dernière, à l’ONU, Netanyahou a une nouvelle fois revendiqué la terre d’Israël sur des bases bibliques : « Lorsque j’ai pris la parole ici l’année dernière, j’ai dit que nous étions confrontés au même choix intemporel que Moïse a présenté au peuple d’Israël il y a des milliers d’années, alors que nous étions sur le point d’entrer dans la Terre promise. Moïse nous a dit que nos actions détermineraient si nous léguerions aux générations futures une bénédiction ou une malédiction ».


Mohammad Sabaaneh

Ce que Netanyahou n’a pas dit à ses collègues dirigeants (dont la plupart avaient de toute façon quitté la salle), c’est que Moïse a tracé un chemin génocidaire vers la Terre promise (Deutéronome 31) :

« [L’Éternel détruira ces nations devant toi, et tu les déposséderas. C’est Josué qui passera devant vous, comme l’Éternel l’a dit. L’Éternel leur fera ce qu’il a fait à Sihon et à Og, rois des Amoréens, et à leur pays, lorsqu’il les a détruits. L’Éternel les livrera devant toi, et tu les traiteras selon tous les commandements que je t’ai prescrits ».
Les extrémistes violents israéliens pensent qu’Israël a l’autorisation biblique, voire un mandat religieux, de détruire le peuple palestinien. Leur héros biblique est Josué, le commandant israélite qui a succédé à Moïse et qui a mené les conquêtes génocidaires des Israélites. (Netanyahou a également fait référence aux Amalécites, un autre cas de génocide d’ennemis des Israélites ordonné par Dieu, dans un « coup de sifflet » clair à l’intention de ses partisans fondamentalistes). Voici le récit biblique de la conquête d’Hébron par Josué (Josué 10) :
« Josué et tout Israël avec lui montèrent d’Églon à Hébron, et ils l’attaquèrent. Ils s’en emparèrent et la frappèrent du tranchant de l’épée, elle, son roi, toutes ses villes et tous ceux qui s’y trouvaient. Il ne laissa aucun survivant, selon tout ce qu’il avait fait à Églon. Il la dévoua par interdit, avec tous ceux qui s’y trouvaient ».
Il y a une profonde ironie dans ce récit génocidaire. Il est presque certain qu’il n’est pas historiquement exact. Rien ne prouve que les royaumes juifs soient nés de génocides. Il est plus probable qu’ils soient nés de communautés cananéennes locales ayant adopté les premières formes de judaïsme. Les fondamentalistes juifs adhèrent à un texte du VIe siècle avant l’ère chrétienne qui est très probablement une reconstruction mythique d’événements supposés survenus plusieurs siècles auparavant, et une forme de bravade politique qui était courante dans la politique de l’ancien Proche-Orient. Le problème, ce sont les politiciens israéliens du XXIe siècle, les colons illégaux et les autres fondamentalistes qui proposent de vivre et de tuer selon la propagande politique du VIe siècle avant notre ère.
Les fondamentalistes violents d’Israël sont en décalage d’environ 2 600 ans avec les formes acceptables d’administration publique et de droit international d’aujourd’hui. Israël est tenu de respecter la charte des Nations unies et les conventions de Genève, et non le livre de Josué. Selon la récente décision de la CIJ et la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies qui l’appuie, Israël doit se retirer dans les douze mois à venir des territoires palestiniens occupés. Selon le droit international, les frontières d’Israël sont celles du 4 juin 1967, et non celles qui vont de l’Euphrate à la mer Méditerranée.
La décision de la CIJ et le vote de l’Assemblée générale des Nations unies ne constituent pas une décision contre l’État d’Israël en tant que tel. Il s’agit uniquement d’une décision contre l’extrémisme, en fait contre l’extrémisme et la malveillance de part et d’autre de la ligne de démarcation. Il y a deux peuples, chacun ayant environ la moitié de la population totale (et les divisions sociales, politiques et idéologiques internes ne manquent pas au sein des deux communautés). Le droit international exige que deux États vivent côte à côte, en paix.
La meilleure solution, que nous devrions rechercher et espérer le plus tôt possible, est que les deux États et les deux peuples s’entendent et se renforcent l’un l’autre. D’ici là, cependant, la solution pratique consistera à envoyer des forces de maintien de la paix et à fortifier les frontières pour protéger chaque partie de l’animosité de l’autre, tout en donnant à chacune la possibilité de prospérer. La situation totalement intolérable et illégale est le statu quo, dans lequel Israël règne brutalement sur le peuple palestinien.
Il faut espérer qu’il y aura bientôt un État de Palestine, souverain et indépendant, que la Knesset le veuille ou non. Ce n’est pas le choix d’Israël, mais le mandat de la communauté mondiale et du droit international. Plus vite l’État de Palestine sera accueilli en tant qu’État membre de l’ONU, avec la sécurité d’Israël et de la Palestine soutenue par les forces de maintien de la paix de l’ONU, plus vite la paix s’installera dans la région.


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