Carrières Centrales. Ce nom résonne dans la
mémoire des Casablancais et des Marocains. Les 7 et 8 décembre 1952, Casablanca fut le théâtre d’émeutes violentes. Ces événements, qui se déroulèrent dans le quartier des Carrières Centrales, furent déclenchés par l’assassinat de Farhat Hached, leader syndicaliste tunisien et fervent défenseur de l’indépendance des pays du Maghreb. La révolte des ouvriers et habitants de ce quartier précaire devint rapidement un symbole de la lutte anticoloniale au Maroc. Immersion…
Sabrina El Faiz, lebrief.ma, 5/12/2024
Pour les actualités de British Pathé, tout ça, ça n'était que des "émeutes communistes"
Au début des années 1950, le Maroc vivait sous le protectorat français, instauré en 1912. Bien que ce régime colonial se soit appuyé sur une administration modernisatrice, il avait engendré de nombreuses inégalités sociales, marginalisé les populations rurales et réprimé toute forme de revendication politique !
Les Carrières Centrales, pour ceux qui ne le connaissent pas, est un quartier ouvrier situé en périphérie de la ville. A l’époque, il accueillait une population majoritairement marocaine, vivant dans des conditions précaires. Ce quartier était le repère des ouvriers travaillant dans les industries et chantiers de Casablanca, souvent exploités et privés des droits les plus fondamentaux. C’est dans ce contexte que l’influence des syndicats et mouvements nationalistes, tels que le parti de l’Istiqlal, s’y était considérablement développée.
Farhat Hached, secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et figure emblématique des luttes indépendantistes en Tunisie, était perçu comme un allié naturel par les militants marocains. Son assassinat, le 5 décembre 1952, par des membres de la Ligue anticommuniste, un groupe paramilitaire proche des colons, fut un choc pour l’ensemble du Maghreb.
La presse des prépondérants se déchaîne
Le déclenchement des émeutes
Le 7 décembre, des manifestations furent organisées à travers le
Maroc pour dénoncer le meurtre de Farhat Hached. À Casablanca, les
protestations prirent une ampleur particulière dans les Carrières
Centrales. La colère des habitants s’exprima d’abord par des
rassemblements pacifiques. Des ouvriers, des militants nationalistes et
des syndicalistes appelèrent à une grève générale pour exprimer leur
solidarité avec les Tunisiens et leur rejet de la violence coloniale.
Mais la tension monta rapidement. La présence renforcée des forces de
l’ordre françaises, venues réprimer toute contestation, attisa la colère
des manifestants. Des affrontements éclatèrent entre les habitants et
la police, transformant les rues du quartier en champ de bataille. Les
protestations initialement pacifiques se transformèrent en émeutes
violentes.
Les forces coloniales, surprises par l’ampleur de la mobilisation, réagirent avec une brutalité extrême ! La police et l’armée furent déployées en masse pour disperser les manifestants. Des tirs à balles réelles furent rapportés, causant de nombreuses pertes humaines. Selon les sources historiques, plusieurs dizaines de personnes furent tuées et des centaines d’autres blessées.
Les autorités françaises procédèrent également à une vague d’arrestations. Des militants nationalistes, des syndicalistes et de simples habitants furent arrêtés en masse. Les témoignages recueillis plus tard évoquèrent des scènes de violence inouïe, marquées par des exactions et des actes d’humiliation envers les Marocains.
Malgré cette répression féroce, les émeutes des Carrières Centrales ont connu un retentissement national et international. Elles démontrèrent l’ampleur du rejet du régime colonial.
Ces événements ne restèrent pas confinés à Casablanca. Dans plusieurs villes marocaines, des manifestations similaires éclatèrent, montrant la solidarité des Marocains face à la répression coloniale. Les émeutes de décembre 1952 devinrent symbole de résistance populaire contre l’oppression et donnèrent une nouvelle impulsion au mouvement nationaliste.
Sur la scène internationale, ces événements attirèrent l’attention
sur la situation des pays du Maghreb sous domination coloniale. Les
revendications des mouvements indépendantistes marocains gagnèrent en
légitimité, notamment auprès de l’Organisation des Nations unies (ONU).
Aujourd’hui encore, les émeutes de décembre 1952 restent gravées dans la
mémoire collective marocaine et surtout casablancaise. Elles rappellent
les sacrifices consentis pour la liberté, ainsi que l’importance de la
solidarité entre les peuples du Maghreb dans leur quête d’émancipation.
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