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07/07/2024

GIDEON LEVY
La chutzpah des négasionistes
Israël n'a pas le droit de critiquer Roger Waters et d'autres personnes qui nient les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre

Gideon Levy, Haaretz, 7/7/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

Israël est horrifié par Roger Waters. Israël est horrifié par les négationnistes du 7 octobre. Il n’y a rien de pire aujourd’hui aux yeux des Israéliens que de nier les atrocités. Ils ont raison. Cela revient à nier l’Holocauste. Les atrocités du 7 octobre sont la justification abusive d’Israël pour tout ce qu’il a fait depuis, et c’est pourquoi leur rage est si féroce.


Aux yeux d’Israël, il est même impossible de ne pas savoir qu’il y a un bébé israélien parmi les otages, même s’il y a 17 000 enfants palestiniens morts, dont la plupart des Israéliens nient l’assassinat odieux.

Guy Lerer, de l’émission d’actualité HaTzinor sur la Chaîne 13, comme ses collègues animateurs propagandistes de télévision, a délibéré la semaine dernière entre deux possibilités : soit Waters est devenu fou, soit il est trompeur. Lerer a choisi les deux. Waters n’est ni l’un ni l’autre, mais il n’a pas besoin de moi pour le défendre.

Le déni du 7 octobre est en effet une injustice qui témoigne d’un manque de compréhension. Le 7 octobre, des crimes horribles ont été commis contre des milliers d’Israéliens innocents, même si des bébés n’ont pas été assassinés dans des fours. On peut et on doit être choqué par ce qu’Israël a fait à Gaza depuis lors, même sans entretenir des théories complotistes sans fondement sur le 7 octobre.

On peut et on doit avoir de l’empathie pour les victimes israéliennes, du festival Nova au kibboutz Nir Oz, d’Ofakim au kibboutz Be’eri, et en même temps être choqué par les crimes d’Israël à Gaza et exprimer sa solidarité avec les millions de victimes qui s’y trouvent. Mettre en doute la véracité de tel ou tel détail n’est pas pertinent, car l’image globale du 7 octobre est claire et choquante.

Le fait que Waters pleure tous les matins pour les enfants de Gaza, comme il l’a dit dans une interview avec Piers Morgan, est une marque d’honneur pour lui et sa conscience. Je connais ses larmes, elles sont sincères.

J’aimerais que davantage d’Israéliens pleurent pour les enfants de Gaza. Ils sont tués, blessés et rendus orphelins en masse. Et pourtant, il ne faut pas minimiser l’ampleur du désastre israélien.

Cela dit, Israël n’a pas le droit de critiquer les négationnistes du 7 octobre ou de toute autre catastrophe nationale. Peu de nations nient les désastres qu’elles ont perpétrés contre d’autres peuples comme le fait le peuple d’Israël. Israël surpasse tous ceux qui nient la vérité, qui se mentent à eux-mêmes et aux autres.

De la négation de l’existence d’un peuple palestinien vivant en Palestine depuis des générations, en passant par la négation de la Nakba, jusqu’à la négation des massacres aveugles à Gaza - 100 ans de négation.

Une société qui vit dans un tel déni, qui n’a pas la moindre notion d’acceptation de la responsabilité et de reconnaissance de la vérité, ou au moins de respect pour ses victimes, a besoin de beaucoup d’audace pour dénoncer ceux qui nient son désastre. Quelle différence y a-t-il entre les négationnistes du 7 octobre et les négationnistes de la Nakba, le désastre d’un peuple qui a perdu son monde, son pays, sa terre, ses biens et son honneur en 1948 ?

Combien d’Israéliens sont prêts à reconnaître la Nakba, et quand Israël la reconnaîtra-t-il officiellement ? Israël nie également les horreurs et les crimes de l’occupation et nie l’existence de l’apartheid. Il s’agit de dénis plus flagrants que celui du 7 octobre, car ils concernent une situation permanente et sans fin.

 


Pour la caricature politique de jeudi de Haaretz, le merveilleux Amos Biderman a dessiné Waters debout sur une pile de cadavres, à côté de maisons de kibboutz en flammes et de terroristes de la Nukhba enlevant des Israéliens pour les emmener à Gaza. Waters demande dans la caricature : Où sont les preuves ? Biderman aurait pu dessiner une image similaire, celle d’Israël se tenant sur les ruines de la Palestine, ou au moins sur les ruines de Gaza, et demandant : « Où sont les preuves ? Où sont les preuves ? ».

Où sont les preuves que nous avons procédé à un nettoyage ethnique en 1948 et que nous n’avons pas permis aux réfugiés de retourner dans leur pays ? Où sont les preuves que lorsque deux peuples vivent sous un même gouvernement et que l’un d’entre eux jouit de tous les droits tandis que l’autre, qui vit sous une occupation éternelle, n’a aucun droit, il s’agit d’un apartheid ?

Où est la preuve qu’Israël a tué des dizaines de milliers d’innocents à Gaza ? Où sont les preuves que des enfants meurent de faim à Gaza ? Où sont les preuves, et qui ici est le négateur ?

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