Traduit par Fausto Giudice
Le Dr Ahmad Majdalani (Damas, 1956) est membre du comité exécutif de l'OLP et président du Département du travail et de la planification de l’Autorité palestinienne à Ramallah. @MajdalaniAhmad
Bennett va-t-il perpétuer les politiques toxiques de Netanyahou à l'égard des Palestiniens ? L'Union européenne et l'administration Biden vont-elles confirmer leurs belles paroles sur les droits et la liberté ?
Après avoir consacré sa carrière politique à la destruction de toute perspective de paix, le départ de Benjamin Netanyahou ne sera pas pleuré par grand monde, à l'exception de ses amis Orban, Bolsonaro et de l'équipe à l'origine du « Deal du siècle » du président Trump.
Mais la vraie question ne concerne pas un nom, un individu, mais les politiques qui représentent son véritable héritage : l'incitation à la haine, le racisme, la discrimination et une occupation coloniale illégale font partie des politiques que M. Netanyahou a si fortement inscrites dans la vie politique d'Israël par le biais de lois telles que la loi sur l'État-nation juif.
Et la vraie question est maintenant de savoir si le nouveau gouvernement israélien se contente de changer de nom, ou s'il a l'intention de mettre fin à cet héritage colonial raciste au profit d'une solution politique globale et juste avec le peuple palestinien.
Si le nouveau gouvernement israélien est intéressé par l'instauration d'une paix durable, il devrait tirer les leçons de la situation de ces dernières semaines. Il devrait avoir le courage d'examiner les causes profondes et prendre la décision claire de considérer le peuple palestinien comme des égaux, plutôt que comme les sujets d'une approche suprématiste juive dans toute la Palestine historique.
La formule n'est pas difficile. Elle commence par plusieurs mesures immédiates que ce gouvernement doit prendre afin de montrer son sérieux, notamment la mise en œuvre des accords qu'Israël a signés avec l'OLP.
Il ne s'agit, bien entendu, que d'une première étape : l'objectif final de tout processus politique entre Israël et la Palestine devrait être la mise en œuvre du droit international et des résolutions pertinentes des Nations unies, notamment les résolutions 242, 338 et 2334 du Conseil de sécurité des Nations unies. Ceci devrait être considéré comme un principe de base pour ceux qui soutiennent un ordre mondial fondé sur des règles.
Les signaux que le nouveau gouvernement recevra de la communauté internationale sont particulièrement pertinents. Tout excès d'enthousiasme à l'égard du nouveau gouvernement, en l'absence de politiques claires visant à mettre fin à l'occupation, sera considéré par Israël comme un feu vert pour poursuivre sur sa lancée.
Il y a quelques jours à peine, le haut représentant de l'UE, M. Josep Borrell, a expliqué au Conseil de sécurité de l'ONU que lorsqu'ils imposent des sanctions, c'est pour provoquer un changement de politique, et que « l'UE sera toujours du côté de ceux qui demandent le respect de leurs droits universels... Dans de nombreux cas, face au refus des gouvernants de respecter les droits fondamentaux des populations, nous avons imposé des sanctions ».
L'UE exige qu'Israël modifie sa politique criminelle de colonisation et d'annexion forcée depuis des décennies, mais elle n'a jamais mis sur la table la question des sanctions. Étant le principal partenaire commercial d'Israël, la position actuelle de l'UE et celle de plusieurs de ses États membres n'incitent pas Israël à changer de politique, à respecter les droits fondamentaux, mais lui offrent plutôt l'impunité.
Je pense que les Palestiniens et les Israéliens méritent tous deux de vivre en sécurité et de jouir des mêmes mesures de liberté, de prospérité et de démocratie.
Mon administration poursuivra sa diplomatie discrète et implacable à cette fin. pic.twitter.com/mXe39TyVMz
- Président Biden (@POTUS) 20 mai 2021
Mais il ne s'agit pas seulement de l'UE. L'administration Biden a défini une nouvelle politique : que « les Palestiniens et les Israéliens méritent également de vivre en sécurité et de jouir des mêmes mesures de liberté, de prospérité et de démocratie ».
Traduire cette nouvelle politique usaméricaine en actes doit être une priorité. Il ne s'agit pas seulement de construire des relations bilatérales palestino-usaméricaines saines, mais aussi de s'assurer qu'Israël n'utilise pas ou n'exploite pas ses relations avec les USA, y compris son acquisition d'armes et son soutien financier, pour violer le droit international ou les droits inaliénables du peuple palestinien. La reddition de comptes reste le mot clé manquant dans les relations entre les USA et Israël.
Le nouveau gouvernement israélien doit comprendre le scénario actuel : la politique de Netanyahou consistant à attaquer les Palestiniens des deux côtés de la ligne verte, ainsi qu'à nier les droits de ceux qui sont en exil, n'ont pas entraîné la capitulation des Palestiniens. Au contraire, elle a poussé les Palestiniens de partout à rappeler au monde qu'il n'y aura pas de solution sans la réalisation de nos droits.
Sheikh Jarrah et Silwan sont devenus des symboles de cette lutte non seulement parce qu'ils se trouvent à Jérusalem, mais aussi parce qu'ils symbolisent un racisme israélien flagrant, imposant des lois qui ne font que discriminer les Palestiniens.
Si Israël était vraiment la démocratie libérale qu'il prétend être, il se désignerait comme l'État de tous ses citoyens, et non pas seulement comme l'État du peuple juif. Et il permettrait aux Palestiniens de récupérer leurs biens d'avant 1948.
Je porte encore les papiers de notre maison à Safad, et je ne suis pas le seul.
L'attention portée par le monde à Israël/Palestine au cours des dernières semaines devrait se traduire par une approche proactive visant à garantir que tous, Israéliens et Palestiniens, puissent exercer leurs droits dans le cadre de la mise en œuvre des obligations d'Israël en vertu du droit international. C'est aussi simple que cela.
D'après ce qui a été dit jusqu'à présent, il semble que le nouveau gouvernement israélien ne s'engage pas à respecter ces principes, mais qu'il prendra plutôt quelques mesures cosmétiques ici et là. Le Premier ministre Bennett et d'autres ont mentionné le soutien à davantage d'infrastructures pour les colonies. Ils ne se sont pas engagés à respecter leurs obligations en vertu des accords signés, et encore moins à approuver la solution à deux États.
Adopter cette approche signifie simplement perpétuer l'héritage toxique de Benjamin Netanyahou.
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