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04/09/2022

RONNY BLASCHKE
La foire aux vanités : comment la Coupe du monde de football est devenue un objet de prestige pour les autocrates

Ronny Blaschke, Neue Gesellschaft, 4/7/2022
Traduit par
Fausto Giudice
 Versión española

 

Ronny Blaschke est un journaliste indépendant allemand spécialisé dans l'arrière-plan politique du sport. Il travaille entre autres pour le Deutschlandfunk, la Süddeutsche Zeitung et la Neue Zürcher Zeitung. Auteur de cinq livres dans lesquels il examine la violence, les formes de discrimination et la géopolitique dans le football. Son dernier ouvrage en date de 2020 est Machtspieler - Fußball in Propaganda, Krieg und Revolution (Joueurs de pouvoir - Le football dans la propagande, la guerre et la révolution). Il est par ailleurs actif dans l'éducation politique. twitter.com/RonnyBlaschke

Depuis l'attribution de la Coupe du monde de football au Qatar, il est moins question de sport que d'achat de voix, d'exploitation des travailleurs sur les chantiers et de violation des droits humains fondamentaux. Dans le classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières pour l'année 2021, le Qatar occupe la 128e  place sur 180 États. Les homosexuels doivent s'attendre à des persécutions. Les partis politiques sont interdits au Qatar. Les médias indépendants qui remettent en question la monarchie héréditaire n'existent pas. Mais du 21 novembre au 18 décembre 2022, la partie du monde passionnée de football aura les yeux rivés sur Doha, au Qatar. Et redorera comme il se doit le blason de cet émirat autoritaire.

 C'était un signe de rejet. Lors de la demi-finale de la Coupe d'Asie 2019, des spectateurs du pays hôte Abou Dhabi lancent des bouteilles et des chaussures sur l'équipe du Qatar. Abu Dhabi est la capitale des Émirats arabes unis, une riche monarchie pétrolière du Golfe persique. Les EAU sont un partenaire important de l'Arabie saoudite. Les deux pays résistent à leur manière à l'influence croissante du Qatar.

 Trois jours après la demi-finale, le Qatar remporte la finale contre le Japon et devient pour la première fois champion d'Asie. Les politiques et les fonctionnaires sportifs des EAU boycottent la cérémonie de remise des prix. « Le football est le reflet des tensions dans le Golfe », explique Jassim Matar Kunji, ancien gardien de but dans la ligue professionnelle qatarie et désormais journaliste pour la chaîne de télévision Al Jazeera. « Des contrats de sponsoring ont été annulés entre les pays et des transferts de joueurs ont été annulés ».

En 2017, un vieux conflit s'est aggravé dans le Golfe. À l'époque, l'Arabie saoudite avait imposé un blocus économique au Qatar. Les EAU, le Bahreïn et l'Égypte se sont joints à eux et ont également suspendu leurs relations diplomatiques avec Doha. Ils reprochaient au Qatar de soutenir des groupes terroristes et d'entretenir une trop grande proximité avec les Frères musulmans et l'Iran. L'Arabie saoudite a suspendu ses exportations de produits alimentaires au Qatar. La compagnie aérienne nationale Qatar Airways n'a plus été autorisée à utiliser l'espace aérien saoudien.

« De nombreux Qataris ont cru à la possibilité d’une invasion saoudienne », explique Jassim Matar Kunji. L'armée saoudienne compte environ 200 000 soldats, celle du Qatar 12 000. Pour compenser son infériorité militaire, le Qatar poursuit une coûteuse stratégie de soft power : avec des investissements de plusieurs milliards dans la culture, la science - et le football, avec de grandes manifestations, des participations à des clubs ou des partenariats de sponsoring avec le Paris Saint-Germain ou le FC Bayern Munich. L'organisation de la Coupe du monde de football fin 2022 est la partie la plus importante de cette stratégie.

Il y a un peu plus de 50 ans, les centres de pouvoir arabes se trouvaient encore au Caire, à Bagdad et à Damas. Les petits cheikhats de la péninsule arabique comme le Koweït, Bahreïn ou les EAU ne jouaient encore aucun rôle. Le Qatar, contrôlé en dernier lieu par les Britanniques, comptait à peine 100 000 habitants l'année de son indépendance en 1971 et était sous la protection militaire de l'Arabie saoudite. En 1990, le tout-puissant Irak a envahi le Koweït et les USA se sont sentis obligés d’intervenir pour le libérer. Les petits États de la région ont pris conscience qu'ils seraient nettement en position d’infériorité en cas d'attaque comparable.

Traditionnellement, les décisions les plus importantes au Qatar étaient prises par une poignée de personnes, écrit le politologue Mehran Kamrava dans son livre Qatar : Small State, Big Politics. Au pouvoir depuis des décennies : la dynastie Al Thani, originaire d'Arabie saoudite. En 1995, Hamad ben Khalifa Al Thani a déposé son propre père lors d'un coup d'État sans effusion de sang. En Arabie saoudite et aux EAU, les dirigeants craignaient que le pouvoir ne leur échappe également.

Pour un avenir sans pétrole ni gaz

Le nouvel émir voulait libérer le Qatar de l'emprise de l'Arabie saoudite et a entamé une modernisation. Il a fait construire la chaîne d'information Al Jazeera au milieu des années 90 et a ouvert l'économie aux investisseurs étrangers. Des antennes d'universités renommées des USA, de Grande-Bretagne et de France, trois des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, se sont installées à Doha.

GIDEON LEVY
Quand le Shin Bet est plus gentil que la Cour suprême d'Israël

 Gideon Levy, Haaretz, 4/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice

La bataille sur le caractère, le statut et la composition de la Cour suprême d’Israël est réservée aux experts, et est beaucoup moins importante qu'on ne le pense généralement. C'est comme la bataille sur le caractère du tribunal militaire de la prison d'Ofer, ou la composition de l'orchestre de l’armée. On peut en débattre, écrire des articles d'opinion percutants, faire des discours enflammés et même descendre dans la rue, mais le tribunal militaire d'Ofer restera le tribunal militaire d'Ofer, et l'orchestre des FDI jouera les mêmes marches. Même si Lahav Shani, le directeur musical de l'Orchestre philharmonique d'Israël, dirigeait l'Orchestre des FDI et que le célèbre avocat des droits civils et humains Avigdor Feldman était président du tribunal militaire, cela n'en ferait pas un véritable orchestre ou un véritable tribunal.

La même chose est vraie, croyez-le ou non, de la Cour suprême, appelée Haute Cour de justice lorsqu'elle siège en tant que cour constitutionnelle. Elle est pieds et poings liés au récit national qui, à ses yeux, croyez-le ou non, l'emporte sur tout autre principe. La cour d'Ofer et la cour de Jérusalem sont subordonnées aux mêmes principes et au même establishment de défense presque dans la même mesure ; toutes deux en sont des sous-traitantes. Des luttes passionnées sont menées sur la composition de la Cour suprême, sur le nombre de juges libéraux par rapport aux juges conservateurs - sur les questions essentielles, le résultat est le même. Une seule et même voix, même au sein de la Cour.

À cet égard, la Cour est un étonnant reflet de la société israélienne : à la Cour suprême, comme en politique, les différences entre les individus sont beaucoup, beaucoup plus faibles qu'on ne le dit généralement. Lorsqu'il s'agit de valeurs fondamentales, il n'y a pas de différences. Maintenir la suprématie juive au-dessus de toute autre valeur ; placer les considérations sécuritaires au-dessus de toutes les autres ; ignorer complètement le droit international, comme s'il n'existait pas ; et obéir aveuglément, automatiquement et inconditionnellement aux jeux de pouvoir et de contrôle de l'establishment de la défense - et la Cour suprême capitule sans aucune honte.

Lorsqu'il y a une bataille sur la composition de la Cour suprême des USA, il est clair pour tous que c'est une bataille qui va façonner le visage de la société pour les années à venir, de l'avortement aux lois sur les armes à feu. Aux USA, vous savez qu'un juge libéral sera libéral et qu'un juge conservateur sera conservateur. En Israël, ils suivront tous la même ligne, se blottiront tous dans le giron chaleureux du consensus militaire, et aucun des juges, pas même le dernier des libéraux, n'osera adopter une position différente.


Khalil Awawdeh

La semaine dernière, la Cour a démontré, de façon si typique, son attitude de carpette envers l'establishment de la défense, mais cette fois-ci, sa conduite a pris des proportions grotesques. Il est difficile de trouver quelque chose de plus ridicule que la façon dont la plus haute cour du pays ferme les yeux, endurcit son cœur et prononce un “oui” soumis aux caprices du service de sécurité du Shin Bet, et la façon dont le Shin Bet se moque d'elle. Le Shin Bet a manqué de respect à la cour, l'a ridiculisée et humiliée, et la cour l'a encore une fois cru lorsque l'agence lui a craché au visage en disant qu'il pleuvait. Il n'y a aucune entité dans le pays, à part l'establishment de la défense et les colons - allez à Homesh et voyez comment les colons se moquent des sentences de la cour, avec le soutien de l'armée - qui puisse faire de la Cour la risée de tous.

La Haute Cour a rejeté la demande de libération du détenu administratif Khalil Awawdeh, qui a fait une grève de la faim de six mois, au motif que son état n'a pas changé et que sa détention sans charges est justifiée. Le lendemain, le Shin Bet a annoncé sa libération, crachant au visage des juges. Soudain, il s'avère que le cruel Shin Bet est plus humain que la Haute Cour. C'est la façon dont l'agence punit la Cour et les juges “libéraux” qui ont également rejeté la requête, les juges Anat Baron et Khaled Kabub. Soudain, il est devenu évident qu'il n'y a aucune différence entre eux et le juge Alex Stein, et entre eux tous et le juge Noam Sohlberg, un colon.

La guerre sur le caractère de la Cour suprême a été réglée il y a longtemps. La prochaine commission des nominations judiciaires pourra choisir les juges en jouant à pile ou face. Peu importe qui formera le prochain gouvernement. Tant que perdurera la situation dans laquelle le gouvernement soutient la perpétuation de l'apartheid, une chose est sûre : quelle que soit la composition de la Cour suprême, elle le soutiendra et cautionnera tous ses crimes. L'apartheid a des collaborateurs à Jérusalem.

03/09/2022

Luis E. Sabini Fernández
Constelación ominosa

Luis E. SabiniFernández, 3/9/2022

No es habitual, como panorama o perspectiva lo que vamos a enumerar:La segunda mitad del 2022 nos permite, más bien nos obliga, a considerar:

  •  CONTAMINACIÓN PLANETARIA FUERA DE CONTROL

La humanidad ha construido nuestro mundo presente, la realidad, abusando cada vez más de los poderes que hemos ido adquiriendo y atesorando. Mientras las sociedades habidas hasta hace un par de siglos se valían del sol y el agua como fuerzas y palancas del desarrollo humano, el industrialismo permitió emplear una energía acumulada en millones de años en pocos siglos (todos los cálculos sobre las existencias de petróleo no pasan los tres siglos).

Pero el uso en cantidades extraordinarias de energía fosilizada trajo consigo tam-bién la aparición de residuos cuantiosos. Para apenas señalar uno de los más recientes: los plásticos desechados han generado por ejemplo “islas” oceánicas de millones de km2.

El optimismo tecnológico que caracteriza nuestro presente diseñó navíos “tragaplásticos” con los cuales nos prometieron  salvar el error anterior de haber generado tantos desechos fuera de control. Pero la situación no ha resultado tan sencilla. Como los plásticos son un invento humano, no son naturales, no se biodegradan como todos los elementos, sólidos, líquidos o gaseosos de la naturaleza. La erosión, claro, los achica, los desmenuza hasta hacer partículas microscópicas, que siguen empero en los mares. Ya sea depositándose en los fondos marinos, obstruyendo el “almácigo” oceánico que es todo fondo marino o, “tripulado” por microorganismos que siguen así sus marchas marinas. Investigadores han comprobado que estas partículas microplásticas, tripuladas como dije por microorganismos despiertan grandes apetencias en peces, algunos peces al menos como anchoas (con los que se ha experimentado), que los engullen ávidamente. Así tenemos microplásticos incorporados a las cadenas alimentarias y por lo tanto depositados en humanos (que somos casi siempre el fin de todas las cadenas alimentarias).  Se trata de cuerpos extraños, no alimentarios, que a muchos les hace temer serán origen de tumoraciones.

El Roto

  • ALTERACIONES PLANETARIAS… EL ANTROPOCENO ES NUESTRO

La sociedad contemporánea apenas tiene registro de la cantidad e intensidad de inundaciones, sequías, incendios  (claro que una buena cantidad, provocados por el hombre para ampliar tasas particulares de ganancia), desbordes de diques de cola (altamente tóxicos), deshielos de altas cumbres y permafrost, –crisis biológica de especies muy perseguidas y hostigadas (sobre todo por el hombre, pero también y cada vez más, por alteraciones climáticas).

¿Estamos alterando el planeta, como podemos desgraciadamente ver con la plasti-ficación de los mares o los derretimientos de glaciares y nieves otrora “eternas”, y empu-jando a la extinción a tantas especies, y a la vez, ¿no nos estamos alterando nosotros?

  • MEDICALIZACIÓN SOCIAL NO POR SABER SINO POR… MIEDO

Con la pandemia declarada por la OMS mediante una redefinición, la medicalización generalizada resultó altamente efectiva. La pregunta es para qué. El miedo fue el motor de comportamiento. Con el que se generó  una ofensiva mediática, que logró una regimentación social pocas veces vista. El saldo de este emprendimiento de alcance planetario es variado: desde el punto de vista sanitario no se sabe si ha empeorado o mejorado la salud social, aunque la reiteración de las recaídas en el Covid19 da pábulo a temer que no ha sido una jugada saludable; desde el punto de vista de la gestión empresarial la oferta de inoculaciones vendidas como vacunas aunque en casi todos los casos con técnicas médicas tan  alejadas del concepto inicial de vacunación que  debería haberse optado por una nueva denominación –terapias génicas–, en cambio, las llamadas vacunas han sido un negocio formidable de alcance mundial. Y dada la denominación buscada y aceptada por los estados bobos que integran la OMS, la calidad de vacuna de un medicamento libera al fabricante de responsabilidad penal por un perjuicio al inoculado,  que se traslada al estado donde se encuentra la población objeto de ese tratamiento, algo bien distinto por cierto a la regla, teórica, que es que el laboratorio debe responsabilizarse por daños ocasionados por su medicación. [1]

JACK KHOURY / HAGAR SHEZAF
Khalil Awawdeh arrête sa grève de la faim suite à un accord sur sa libération le 2 octobre

Jack Khoury et Hagar Shezaf, Haaretz, 31/8/2022
Traduit par
Fausto Giudice

Khalil Awawdeh, dont les images ont choqué le monde au milieu de sa grève de plus de 170 jours, a mis fin à sa grève après avoir conclu un accord sur sa remise en liberté le 2 octobre

Khalil Awawdeh, dont les avocats ont averti qu'il pouvait mourir à tout moment après 170 jours de grève de la faim, a annoncé qu'il mettait fin à sa grève après qu'un accord a été conclu pour mettre fin à sa détention administrative le 2 octobre.

Le détenu administratif palestinien Khalil Awawdeh, qui a entamé une grève de la faim pendant plus de 170 jours avec une pause de deux semaines, la semaine dernière à l'hôpital Assaf Harofeh de Be'er Ya'akov, en Israël. Photo : Sinan Abu Mayzer Reuters

Dans une vidéo, Awawdeh a déclaré qu'il resterait à l'hôpital pour traitement et surveillance jusqu'à son rétablissement. « C'est une nouvelle victoire dans la série de victoires pour les détenus administratifs qui ont mené une lutte pour leur libération et leur liberté. Je mets fin à la grève après avoir appris ma victoire ».

 La femme d'Awawdeh a célébré la nouvelle de la libération de son mari : « Khalil a prouvé que le prisonnier palestinien peut remporter une victoire sur l'occupation ».

Le Jihad islamique palestinien a déclaré que la « campagne historique qu'il a menée sera enregistrée dans les annales de la lutte palestinienne ».

Une source égyptienne de haut niveau a déclaré à Haaretz que des responsables égyptiens participaient aux pourparlers en coulisses avec Israël pour obtenir la libération d'Awawdeh, qui était apparemment une condition promise dans le cadre du récent accord de cessez-le-feu dans la bande de Gaza. La source a ajouté que les pourparlers visant à obtenir la libération du commandant du Jihad islamique Bassam al-Saadi, sont toujours en cours.

Soutenu par une garantie égyptienne, Awawdeh a signé qu'il ne reprendra pas d’ “activités terroristes” comme condition de sa libération le 2 octobre, a déclaré une source de sécurité israélienne, ajoutant qu'Israël le libérera tant qu'il n'y aura aucune raison de croire le contraire.

02/09/2022

CHIARA CRUCIATI
Nouveau record de MbS : une Saoudienne condamnée à 45 ans de prison pour un touit

Chiara Cruciati, il manifesto, 1/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice

Arabie  saoudite :  Nourah bint Said Al-Qahtani accusée d'attaquer le tissu social avec l'utilisation d'Internet. Ce n’est que le dernier cas de répression, alors que circule la vidéo d'un passage à tabac d’un groupe de femmes par la police. Dans le royaume toute réalité qui s'écarte du “citoyen parfait”, l'homme saoudien sunnite, est criminalisée

Nourah bint Said Al-Qahtani

Le record de 34 ans de prison pour des messages critiques à l'égard du régime saoudien, écopés début août par la doctorante et militante de l'Université de Leeds attivista Salma al-Shebab, a déjà été battu. Un tribunal antiterroriste du royaume des Saoud a condamné Nourah bint Said al-Qahtani à 45 ans de prison pour « utilisation d'Internet afin de détruire le tissu social » et « violation de l'ordre public en utilisant les médias sociaux ».

Un couperet s’est abattu sur les Saoudiennes, et les militantes en particulier, ces dernières années : arrestations, longues détentions émaillées de tortures et d'abus sexuels, procès-mascarade que le régime de Ryad tente de couvrir avec de petites ouvertures (droit de conduire ou de voyager sans permis du tuteur) et en recevant de visiteurs de haut niveau un blanc-seing pour continuer comme ça (dernier en  date : Joe Biden en juillet).

À propos d'al-Qahtani on en sait peu : l'Association saoudienne Dawn (Democracy for the Arab World Now, fondée par la journaliste Jamal Khashoggi, dépecé par une escouade de tueurs saoudiens au consulat d'Istanbul en octobre 2018) dit n'avoir pris connaissance de l'affaire qu'après avoir obtenu son dossier auprès de sources internes au tribunal : « Les allégations à son encontre sont très étendues. Ils utilisent la loi anti-terroriste et la loi anti-cybercriminalité qui criminalisent tout post qui critique, même de loin, le gouvernement ».

Dans le cas d'al-Qahtani, a ajouté Abdullah Alaoudh, directeur de Dawn, les autorités saoudiennes l'ont emprisonnée pour avoir simplement gazouillé ses opinions. L'ONG saoudienne Alqst a également exprimé son inquiétude : « Comme nous le craignions, nous assistons à une détérioration alarmante de la situation des droits humains en Arabie saoudite ».

Dans la ligne de mire des activistes saoudien·nes, il y a aussi l'administration Biden et le Parti démocrate, qui, dans les années de la présidence Trump, avaient exercé une pression sans précédent pour que l'aide militaire et les accords commerciaux avec un régime liberticide soient revus.

Une fois à la Maison Blanche, cependant, Uncle Joe a redonné à un prince, Mohammed ben Salmane décadent, la légitimité dont il avait besoin pour agir sans être inquiété. Lundi, le département d'État usaméricain était intervenu dans l'affaire al-Shebab en réaffirmant qu'il avait clairement fait savoir à son allié « que la liberté d'expression est un droit humain universel ». Ils n'ont pas dû comprendre.

La condamnation hénaurme d'al-Qahtani s'accompagne presque simultanément d'un autre exemple éclatant de répression de la dissidence. Une affaire qui envahit les médias sociaux saoudiens grâce à une vidéo volée rendue publique mardi : des agents de la police morale saoudienne, épaulés par des hommes en civil, matraquent et ceinturent un groupe de femmes dans l'orphelinat pour filles de Khamis Mushait, dans la province d'Asir.

Parmi eux, note Ali Al Ahmed, célèbre analyste saoudien, fondateur et directeur de l'Institut des affaires du Golfe, sur Twitter, figure Mohamed Yahia Al Binawi, chef de la police de la ville. La « faute » de ces femmes : avoir entamé une grève de la faim pour protester contre les conditions de vie dans l'orphelinat.

À la vidéo et à la colère des Saoudiens et des Saoudiennes qui a explosé sur les médias sociaux, les autorités ont répondu en annonçant l'ouverture d'une enquête. Mais le problème demeure : le régime a intensifié sa répression de toute forme de dissidence, réelle ou supposée, et des réalités qui s'écartent » du modèle du « citoyen parfait" du royaume, l'homme saoudien sunnite. La spirale aspire les femmes, les migrants, les chiites et les journalistes.

GIDEON LEVY
Mustafa, 16 ans, s’est pris deux balles. Il a survécu, mais pas Momen, 15 ans
Scènes de la vie quotidienne dans Al Khalil occupée

Gideon Levy et Alex Levac, (photos), Haaretz, 2/9/2022 

Traduit par Fausto Giudice

Lors d'une manifestation près d'Hébron (Al Khalil), les troupes israéliennes ont tiré des balles en caoutchouc puis des balles réelles sur Mustafa Al Hasis, 16 ans. Blessé, il a été laissé étendu sur la route avant d'être autorisé à recevoir des soins médicaux. Peu de temps après, Momen Jaber, 15 ans, a été tué au même endroit.

Mustafa Al Hasis, chez lui à Hébron. « Disons qu'il a jeté des pierres », explique son père. « Ils tirent des caoutchoucs, puis à balles réelles et après ça, cette bousculade inhumaine par les soldats ? Où est l'humanité ? »

Mustafa Al Hasis entre lentement dans la pièce. Un jeune de 16 ans et demi, avec un déambulateur. Sa famille s'empresse de lui apporter des coussins pour qu'il soit plus à l'aise sur le canapé ; d'autres se précipitent pour apporter des ventilateurs. Grand et pâle - sa jambe gauche cicatrisée et recousue, pleine de vis et d'implants en platine - il s'allonge lentement. On lui a ordonné de ne pas se peser sur le pied pendant trois mois.

Mustafa, qui vit à Hébron, a été envoyé par sa mère un jour au début du mois dernier pour acheter du poulet et des légumes au marché local en plein air. Il est tombé sur une manifestation houleuse de Palestiniens près du poste de contrôle des Forces de défense israéliennes qui divise la ville, et y a apparemment pris une part active. On lui a tiré dessus deux fois, puis quatre soldats l'ont traîné sur quelques dizaines de mètres comme un sac, l'ont jeté au sol et l'ont laissé là pendant 40 minutes, les yeux bandés et menotté. Il dit que les soldats lui ont également donné des coups de pied sur tout le corps. Ils ont fini par le relâcher et il a ensuite été hospitalisé dans deux établissements médicaux locaux, où il a subi une intervention chirurgicale. Aujourd'hui, nous le trouvons allongé dans le salon de la maison de ses parents, dans le quartier tranquille et excentré de Wadi Al Hariya, dans la partie sud de la ville.

Pour se rendre à la maison, il faut traverser toute la longueur de l'immense ville animée d'Hébron. Le père de Mustafa, Khalil, 47 ans, vêtu d'une jellaba de couleur claire, et sa mère, Firiel, 47 ans également, vêtue de noir, nous accueillent. Mustafa a huit frères et sœurs. Le fait qu'il soit sorti de tout cela vivant et libre incite la famille, et personne d'autre que ses parents, à montrer leur joie, leur excitation et leur fierté même devant des étrangers.

01/09/2022

GIDEON LEVY
Meretz ne doit pas faire liste commune avec le parti travailliste, aveugle à l'occupation

Gideon Levy, Haaretz, 1/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice

Avec la formation de deux listes sionistes de gauche à la Knesset, l'une pour le parti travailliste et l'autre pour le parti Meretz, il n'est plus possible de prétendre qu'il n'y a pas de différence entre eux.

Meretz a présenté une liste dans laquelle se distinguent les opposants à l'occupation, ceux pour qui la lutte est la première bannière, au-dessus de toute autre. Les travaillistes ont présenté une liste qui ne compte pas un seul opposant actif à l'occupation. Ce n'est pas une question insignifiante.

Conclusion : Les deux partis ne doivent pas se présenter ensemble, sinon la différence idéologique qui les sépare pourrait bien être occultée.

Zehava Galon (g.), Meretz et  Merav Michaeli (travaillistes)

Le prix de la dilution est plus élevé que le risque, qui n'existe presque pas, que l'un ou l'autre parti ne passe pas le seuil électoral. Les sionistes qui ne peuvent pas dormir à cause de l'occupation plus qu'autre chose, et qui croient encore au mensonge des deux États, ont voté pour Meretz. Ceux qui se considèrent de gauche, pour qui l'occupation est une question épuisante, importante mais pas cruciale, « on-veut-bien-deux-États-mais-yapadepartenaire », ont voté pour le parti travailliste. Ces deux approches ne doivent pas être combinées. Il n'y a pas de place dans le petit camp mourant de la gauche sioniste pour plus de goulasch, même si le désir du cœur est l'existence d’une gauche non sioniste en Israël.

Il est difficile de comprendre pourquoi c'est Meretz qui appelle à l'unité. Il serait plus approprié pour les travaillistes de faire tout leur possible pour s'unir, comme ils l'ont toujours fait. De mélanger le Mapai avec Ahdut Ha'avoda, les deux avec Rafi, les travaillistes avec le Mapam, malgré toutes les différences. On peut dire à la décharge de la lideure travailliste Merav Michaeli qu'elle voit les différences. À son détriment, on peut dire qu'elle fuit ces différences comme le feu. L'aspiration de Meretz à une fusion découle de la peur de l'échec et de l'impression de faire passer les intérêts du parti avant les intérêts nationaux, mais c'était censé être l'héritage du Meretz précédent. Avec Zehava Galon à sa tête, Mossi Raz en deuxième position et Gaby Lasky en sixième position - trois personnes qui ont passé leur carrière d'une manière qui suscite l'admiration pour la lutte contre l'occupation - Meretz n'a pas à rougir de son caractère unique, et il doit le préserver par tous les moyens. S'il s'associe aux travaillistes, Meretz perdra son image, qui a finalement été rajeunie. 

En revanche, les travaillistes présentent une liste de personnes aveugles à l'occupation. Aucun de ses candidats ayant une chance réaliste d'être élu à la Knesset ne sait quoi que ce soit de l'occupation, de son aspect de près et de son caractère criminel et maléfique. L'occupation ne les intéresse même pas. Il se peut que la dernière visite de Michaeli en Cisjordanie remonte à l'époque où nous sommes allés ensemble dîner dans le village de Ramin en l'honneur du plus ancien détenu administratif de l'époque, Osama Barham. Un quart de siècle s'est écoulé depuis lors. Aujourd'hui, elle et son parti n'ont pas un mot à dire sur la détention administrative - l'emprisonnement sans charges - même lorsque l'une de ses victimes les plus courageuses est en train d’agoniser.

Meretz ne peut pas se présenter sur la même liste que ceux qui ignorent l'occupation. Il y en a plus qu'assez à la Knesset, presque tous ses membres juifs. Un Meretz qui s'unit à de tels politiciens trahira sa voie. Il l'a fait ces dernières années, et c'est une bonne chose qu'il se soit, dans une certaine mesure, remis de cela. « Naama Lazimi [travailliste, militante LGBTQ+, NdT] et ses collègues sont plus à gauche que Meretz », a écrit Nehemia Shtrasler (Haaretz, mardi), menaçant de permettre la montée de l'extrême droite au pouvoir en raison du refus de Michaeli de s'unir à Meretz. Pour Shtrasler, la gauche, c'est d'abord et avant tout le mouvement syndical, pas l'occupation. Même l'éditorial du Haaretz de lundi encourageait Michaeli à accepter la fusion, mettant en garde contre une "tragédie politique" - le retour de Benjamin Netanyahou au pouvoir.

Pour les amateurs du genre horreur, ce sont des considérations qui ne doivent pas être prises à la légère. Mais il y a aussi des considérations plus importantes, d'ordre idéologique. Si un parti sioniste qui combat l'occupation n'a pas sa place, même la plus petite, à la Knesset, alors il n'y a plus de gauche sioniste en Israël, elle aura été mise à mort.

Il est très difficile, voire impossible, de s'opposer à l'occupation et de rester sioniste. Il est très difficile, voire impossible, d'être un Juif non sioniste en Israël. Nous devons donner à Meretz l'infime chance de prouver que c'est possible. Si Meretz est dilué dans le parti travailliste, seuls les Arabes s'opposeront à l'apartheid - et cela montrera qu'Israël est pire que l'Afrique du Sud. Là-bas, au moins, des Blancs, dont beaucoup de Juifs, se sont battus contre le régime.