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04/01/2025

FALASTINE SALEH
Comment les ONG internationales racialisent et réduisent au silence la société civile palestinienne

Falastine Saleh, MEE , 2/1/2025

Falastine Saleh est une féministe, écrivaine et militante du BDS vivant à Ramallah, en Palestine.

Pour obtenir le soutien des ONG, nous sommes censés nous dépouiller de notre identité « émotionnelle » et devenir les porte-parole creux de déclarations qui diluent la vérité sur le génocide israélien.
Le secteur humanitaire a toujours eu des problèmes en Palestine, mais la façon dont il fonctionne depuis le début du génocide à Gaza est plus troublante que jamais.

Carlos Latuff

Après la signature des accords d’Oslo en 1993, et sous le couvert de la « construction de l’État », les donateurs internationaux et les principales ONG sont arrivés avec des programmes libéraux pré-établis, utilisant des termes tels que « autonomisation » [empowerment], « développement » et « création d’un État ».
En apparence, ils sont venus pour aider. En réalité, leur présence servait d’autres objectifs, bien éloignés du soutien à la libération palestinienne.
Ces organisations, intentionnellement ou non, ont activement dépolitisé la lutte palestinienne, fragmenté les mouvements de base et renforcé la dépendance à l’égard de l’aide internationale, qui donne la priorité aux intérêts de la politique étrangère plutôt qu’aux besoins de la population.
En présentant la question comme un problème de « développement » ou d’« aide humanitaire », les ONG ont détourné l’attention de la violence structurelle de l’occupation israélienne vers la résolution de problèmes techniques. La lutte palestinienne pour la liberté a été réduite à des questions telles que le « renforcement des capacités », complètement dépouillée de son essence politique.
Cette tendance n’a jamais été aussi évidente que lors du génocide en cours à Gaza, où les organisations humanitaires se précipitent pour répondre à la crise immédiate, mais où leur refus de s’attaquer aux causes profondes est assourdissant.
Elles se concentrent uniquement sur la distribution de l’aide tout en évitant de nommer la nature délibérée de la catastrophe ou de tenir Israël pour responsable de ses crimes de guerre.


 

L’autonomisation des Palestiniens
L’arrivée de ces organisations a fracturé la société civile palestinienne d’une manière qui, en fin de compte, a servi leurs propres objectifs.
Avant leur intervention, le mouvement de libération palestinien était mené par des groupes de base - travailleurs, agriculteurs, étudiants, féministes, organisations de jeunesse et partis politiques - qui étaient unis dans leur lutte contre le colonialisme israélien. Les ONG sont arrivées et ont compartimenté cette résistance collective, introduisant des cadres favorables aux donateurs qui ont imposé leurs propres définitions de l’« autonomisation » des Palestiniens.
Ce qu’elles n’ont pas reconnu - intentionnellement ou non - c’est que ces groupes ne défendaient pas de meilleurs salaires, des droits fonciers ou l’égalité des sexes ; ils luttaient pour leur survie et leur liberté face à l’occupation israélienne d’ une manière naturellement intersectionnelle.
Pire encore, au fil des ans, la société civile palestinienne est devenue dépendante du financement que ces ONG attiraient. Mais ce financement était assorti de conditions.
Les donateurs internationaux, guidés par des intérêts de politique étrangère, ont fixé les conditions, créant des critères de financement qui décourageaient l’organisation politique et pénalisaient ceux qui osaient affronter les réalités du colonialisme israélien.
Autrefois audacieuses et intransigeantes, les ONG palestiniennes ont été poussées à l’autocensure afin de préserver leur financement.
Cette dépendance n’a pas seulement neutralisé l’activisme palestinien, elle a permis à l’occupation de prospérer. En intervenant pour fournir des services et une aide qui devraient légalement relever de la responsabilité de la puissance occupante, l’existence même des organisations humanitaires en Palestine renforce le système d’oppression qu’elles prétendent combattre.
Elles n’ont peut-être pas construit les murs de la prison, mais elles contribuent sans aucun doute à les maintenir.
Alors que nous sommes confrontés aujourd’hui à l’horrible réalité du génocide, les échecs du secteur humanitaire me sont apparus douloureusement - je les ai vécus.
Au début du génocide à Gaza, je travaillais dans le département de plaidoyer et de communication d’une ONG internationale de premier plan. Ce dont j’ai été témoin était plus qu’une complicité, c’était un effacement actif des voix palestiniennes. Les mensonges, le détournement cognitif et la manipulation dont j’ai été victime ont dépassé tout ce que j’aurais pu imaginer.
Apaiser les sionistes
Un incident est particulièrement frappant. L’organisation a choisi de s’associer à un groupe israélien, une décision discrètement orchestrée par le bureau régional et cachée au personnel local jusqu’au dernier moment.
Lorsque nous l’avons appris, nous avons été scandalisés. Nous avons expliqué qu’un tel partenariat ne violait pas seulement le mandat de l’organisation, mais qu’il avait des implications politiques profondément problématiques, en particulier à ce moment critique.
Nos préoccupations ont été rejetées d’emblée par la direction régionale, majoritairement blanche. Elle nous a accusés de partialité et a même remis en question notre engagement en faveur des droits humains et de la mission de l’organisation.
Malgré nos objections, ils sont allés de l’avant, en donnant la priorité à l’approbation des donateurs et en apaisant les dirigeants de l’organisation connus pour leurs opinions sionistes tranchées.
Mais la manipulation ne s’est pas arrêtée là. Tout ce que nous écrivions - des tweets aux rapports - devait être soumis à un « processus d’approbation » épuisant qui ressemblait davantage à de la censure. Ils ont même embauché un membre blanc du personnel européen dont la seule tâche était d’éditer et d’approuver tout ce qui sortait de notre département.
Cette personne a bloqué les déclarations qui dénonçaient les crimes de guerre d’Israël, a insisté pour insérer de fausses équivalences dans nos rapports et a décidé quelles vérités étaient suffisamment acceptables pour être publiées.
Le fait que nous soyons des Palestiniens vivant sous l’occupation et que nous écrivions à partir de notre expérience n’avait aucune importance. Nos voix étaient réduites au silence en faveur de récits qui donnaient la priorité aux intérêts politiques de l’organisation et aux relations avec les donateurs.
Le racisme dans le secteur humanitaire va bien au-delà des politiques - il imprègne les pratiques d’embauche et la culture du lieu de travail.
Lors d’un entretien récent avec une ONG internationale de premier plan en Palestine, on m’a posé une question aussi insultante que révélatrice : « Comment allez-vous séparer le fait d’être Palestinien du travail ? »
Par cette seule question, mes années d’expérience, mes compétences et mon professionnalisme ont été balayés, réduits à mon identité palestinienne - un problème à leurs yeux. De toute évidence, le fait d’être Palestinienne me rendait non professionnelle, partiale et inapte dans leur cadre.
Une hypocrisie insupportable
Les questions n’ont fait qu’empirer.
On m’a demandé comment j’allais « gérer ma frustration » en tant que Palestinienne travaillant dans le cadre de leurs soi-disant lignes rouges. Ils ont fait référence à un panel auquel j’avais participé et au cours duquel j’avais critiqué les organisations humanitaires pour leur complicité dans le génocide de Gaza et m’ont demandé de justifier mes remarques.
Ma réponse - que ces critiques étaient fondées sur des faits et ne devaient pas être balayées sous le tapis - les a visiblement mis mal à l’aise. J’ai quitté l’entretien en me sentant en colère, attaquée et profondément discriminée.
Il ne s’agit pas seulement d’un mauvais entretien ou d’une terrible organisation. Il s’agit d’un secteur qui réduit systématiquement au silence les voix palestiniennes.
En tant que Palestiniens, nous sommes considérés comme trop émotifs, trop partiaux, trop peu professionnels pour travailler dans un secteur qui prétend défendre la justice et les droits humains.
C’est tout un secteur où l’on attend de nous que nous nous dépouillions de notre identité, que nous devenions les porte-parole creux de déclarations qui diluent la vérité, servent le statu quo et permettent leur inaction.
L’hypocrisie est insupportable. Alors que notre peuple est massacré à Gaza, nous sommes soumis au racisme anti-palestinien par les organisations mêmes qui prétendent défendre les droits humains. Ces institutions exigent de nous la neutralité, alors qu’elles sont elles-mêmes tout sauf neutres.
J’en ai fini avec ce secteur pour l’essentiel. Je me considère chanceuse d’avoir développé d’autres compétences, que je peux utiliser pour gagner ma vie sans compromettre mes valeurs.
J’invite tous les travailleurs des ONG palestiniennes à faire de même. Construisez quelque chose en dehors de ce système oppressif, car le système ne changera jamais. Il n’a pas été conçu pour cela.
Les Palestiniens méritent mieux. Nous nous battrons pour notre liberté, nous nous battrons pour servir la justice, et nous le ferons à nos conditions, pas aux leurs.



Le général Yehuda Vach et son colonel de frère, criminels de guerre israéliens

Ci-dessous deux articles  sur les ignobles frères Vach, le général Yehuda et le colonal Golan, traduits par Fausto Giudice, Tlaxcala

L’armée privée du général Yehuda Vach : le fossé se creuse entre Tsahal et les commandants voyous

Éditorial de Haaretz, 2/1/2025

Le rapport d’enquête sur le commandant de la 252e  division, le général de brigade Yehuda Vach, révèle avant tout la confusion qui règne aujourd’hui dans les Forces de défense israéliennes entre les objectifs, les règlements et les valeurs de l’armée, et la vision personnelle du monde de ses commandants supérieurs, qui dictent d’autres objectifs et une autre culture de la guerre qui met inutilement en danger les soldats des FDI et entraîne des tirs aveugles sur les civils de la bande de Gaza, y compris sur les enfants.
Vach est né et a grandi dans la colonie de Kiryat Arba, en Cisjordanie, et a fréquenté l’académie prémilitaire de Bnei David, dans une autre colonie de Cisjordanie, Eli. En août dernier, il a été nommé commandant de la 252e division, qui opère dans le corridor de Netzarim à Gaza.
Dans le rapport d’enquête de Kubovich, une longue liste d’officiers et de soldats décrivent Vach comme quelqu’un qui agit de manière irréfléchie, et dont la conduite a même conduit à la mort de huit réservistes lorsqu’il les a poussés à avancer sans que la zone soit d’abord débarrassée des bombes et des terroristes. « Il a rendu la 16e brigade folle en voulant atteindre la route la plus au nord », a déclaré un officier qui a combattu sous ses ordres. « Ça s’est fait sans les outils appropriés, sans les unités de génie, sans les autres troupes nécessaires ».
Vach a également été au centre d’un rapport d’enquête publié il y a deux semaines, qui a révélé l’arbitraire et la banalité avec lesquels les Palestiniens sont tués dans le corridor de Netzarim. Il a également révélé comment chaque Palestinien tué est considéré comme un terroriste. Un grand nombre des incidents décrits dans ce rapport ont eu lieu alors que Vach présidait le corridor de Netzarim.
Aujourd’hui, de nouvelles preuves sont apparues montrant que Vach suivait un autre ensemble de lois. Par exemple, il a fixé à ses soldats l’objectif de déloger quelque 250 000 Palestiniens du nord de la bande de Gaza. « Ce n’est qu’en perdant des terres que les Palestiniens apprendront la leçon nécessaire », a-t-il déclaré.
Vach avait également son propre agenda en ce qui concerne l’aide humanitaire envoyée à Gaza. Il a dit à ses subordonnés que « selon lui, pas un seul camion ne devait entrer ». Il fallait rendre la vie dure aux convois qui entraient et les harceler ». Il leur a également dit « qu’il n’y a pas d’innocents à Gaza ». Selon un officier présent, il ne s’agissait pas d’une opinion personnelle, mais d’une « doctrine opérationnelle - ce sont tous des terroristes ».
De plus, Vach a amené son frère, le colonel de réserve Golan Vach, dans la zone contrôlée par sa division. Son frère commandait une petite force connue sous le nom de Pladot Heavy Engineering Equipment [Équipement de génie lourd Pladot, sic) « Il s’agissait d’une équipe de soldats et de civils qui ressemblaient à des jeunes des collines [colons de Cisjordanie, NdT] », a déclaré un officier. « Le seul objectif de cette force était de démolir Gaza ».

Le colonel Golan Vach, frère de Yehuda Vach

Le comportement de Vach montre que les hauts commandants de l’armée ont complètement perdu le contrôle. Il révèle également leur consentement - même s’il n’est que tacite - au fait que les unités opèrent de manière indépendante, une sorte d’armée dans l’armée.
Les FDI doivent enquêter sur la conduite de Vach et l’exclure de tout poste de commandement supérieur. Dans une telle position, il mettrait en danger ses soldats par son manque de prudence, ainsi que les résidents civils de Gaza, dont il considère la vie comme bon marché.

L’article ci-dessus est l’éditorial principal de Haaretz, tel qu’il a été publié dans les éditions en hébreu et en anglais du journal.

Le monde entier le saura : Israël soutient ses officiers criminels de guerre

Gideon Levy, Haaretz,  2/1/2025

Si la police militaire n’ouvre pas immédiatement une enquête sur la conduite du général de brigade Yehuda Vach, si Vach n’est pas immédiatement suspendu de son poste de commandant de la 252e  division et détenu pour interrogatoire, si l’armée ne renonce pas immédiatement à ses actions et si le gouvernement ne fait pas de même, alors les Israéliens, la Cour pénale internationale et le monde entier sauront tous que les Forces de défense israéliennes ont un commandant de division soupçonné d’avoir commis des crimes de guerre à grande échelle, mais qu’il reste à son poste et continue à vivre sa vie comme si rien ne s’était passé.
Chaque jour où Yehuda Vach reste à son poste est un jour de plus de preuves - non seulement des crimes de guerre commis par l’armée, mais aussi du fait qu’Israël les soutient. Vach, qui a bien entendu grandi dans la colonie de Kiryat Arba et a fréquenté l’académie prémilitaire d’Eli, n’est pas un cheval fou hors du commun qui doit être maîtrisé. Vach est l’armée israélienne, et l’armée israélienne est Israël.
Le débat porte sur la question de savoir si Israël a perpétré ou non un nettoyage ethnique dans la bande de Gaza. Le débat porte même sur la question de savoir si l’armée israélienne est en train de perpétrer un génocide.
Si un commandant de division à Gaza dit à ses officiers qu’à son avis, il n’y a pas d’innocents à Gaza - non pas en tant qu’opinion personnelle, mais en tant que doctrine de combat - alors le génocide est l’esprit du commandant. Si un commandant de division réprimande ses officiers pour « ne pas avoir atteint l’objectif », et que l’objectif est d’expulser environ 250 000 résidents de leurs maisons, alors le nettoyage ethnique est la politique déclarée des FDI.
Et si, sous le commandement de ce commandant de division, une version israélienne du groupe Wagner russe se promène - une bande violente de soldats et de civils, pour la plupart des colons religieux - et que personne ne sait d’où ou de qui elle tire son autorité, à part le fait que son commandant est le frère du commandant de la division, et si elle démolit systématiquement les habitations et les maisons des habitants de la région, et si elle démolit et aplatit systématiquement maison après maison à Gaza, dans le but de détruire Gaza et de s’assurer qu’aucun Palestinien ne pourra rentrer chez lui, alors, en plus de commettre des crimes de guerre, l’armée est également corrompue et pourrie de l’intérieur.
Le rapport d’enquête stupéfiant de Yaniv Kubovich sur les actions de Vach ne peut être rejeté avec l’idée qu’il n’est qu’une « exception de plus » à la norme pour les officiers. Les chefs de l’armée, qui parlent bien et ont l’air aimable, l’ont choisi pour commander d’abord l’école de formation des officiers, puis une division. Ils croient en lui et en son parcours. Ils s’identifient à lui.
Gaza a été détruite à cause de Vach et de ses semblables, et à cause de tous ceux qui ne les ont pas arrêtés. Pladot Heavy Engineering Equipment, la force commandée par le frère du commandant de la division (quelle coïncidence), a détruit Gaza non pas dans le cadre d’une opération partisane menée par des personnes assoiffées de vengeance, mais au nom de l’armée et en son nom. « Ce n’est qu’en perdant des terres que les Palestiniens apprendront la leçon nécessaire », a déclaré Vach à ses subordonnés.
L’armée n’est pas un club de débat. L’armée d’occupation est à Gaza pour accomplir ses missions. Et c’est Vach qui a défini ces missions. En entendant ce qu’il a fait, j’ai la nostalgie de Meir Har-Zion, un commando de l’unité 101, qui a assassiné cinq Bédouins pour se venger du meurtre de sa sœur en 1954.
Qu’est-ce que le timide Har-Zion, avec son meurtre de cinq personnes, comparé à Vach, avec son plan d’expulsion de 250 000 personnes et son rêve non dissimulé de tuer tous les habitants de Gaza, puisqu’ils sont tous des terroristes ?
Les crimes de guerre à Gaza sont montés d’un cran depuis l’époque relativement innocente, compatissante et humaine de l’unité 101. Aujourd’hui, la mort et la destruction sont massives et les crimes sont commis en masse. Vach méprise également la vie de ses propres soldats. Peut-être que cela incitera les Israéliens à comprendre qui sont les commandants de cette guerre.
Mais malgré la douleur causée par la perte des huit soldats tués à cause de la négligence et de l’indifférence de Vach, les centaines de Palestiniens tués dans la zone de mort connue sous le nom de corridor de Netzarim poussent un cri encore plus fort.
L’ancien chef d’état-major des FDI, Moshe Dayan, a écrit un jour qu’à son avis, Har-Zion était le meilleur soldat que les FDI aient jamais produit. Aujourd’hui, ce meurtrier a un héritier. En mars, lui et sa division sont censés retourner dans le corridor de Netzarim.
Si un commandant de division réprimande ses officiers pour « ne pas avoir atteint l’objectif » d’expulser quelque 250 000 habitants de Gaza de leurs maisons, alors le nettoyage ethnique est la politique déclarée des FDI.