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04/10/2021

SHANY LITTMAN
« Le boulot n'a pas été fini en 1948 : le pays n'a pas été vidé de ses Arabes »
Avi Mograbi sur son dernier documentaire, « Les 54 premières années - Un manuel abrégé d'occupation militaire »

Shany Littman, Haaretz, 4/10/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala 

Le dernier documentaire du cinéaste israélien chevronné Avi Mograbi s'appuie sur les témoignages accablants de soldats pour dénoncer l'occupation israélienne. Ne vous attendez pas à le voir à la télévision israélienne ou dans un festival de cinéma local.

 

Avi Mograbi : il n’est pas surpris par la série de rejets en Israël. Photo : Hadas Parush

Le nouveau film d'Avi Mograbi, "The First 54 Years - An Abbreviated Manual for Military Occupation" [Les 54 premières années - Un manuel abrégé d'occupation militaire], n'a figuré à l'affiche d'aucun des festivals du film organisés en Israël cette année et, jusqu'à présent, aucune chaîne de télévision israélienne n'a souhaité le diffuser. Les fondations à but non lucratif qui soutiennent habituellement les films documentaires n'ont pas non plus voulu s'impliquer cette fois-ci, bien que Mograbi soit un cinéaste de longue date très apprécié, dont les films précédents ont connu un grand succès et ont été présentés dans des dizaines de festivals de cinéma dans le monde entier.

Le nouveau film de Mograbi a également commencé à faire le tour des festivals internationaux de cinéma et a obtenu une mention honorable au Festival du film de Berlin. Mais Mograbi n'a pas été très surpris par la série de rejets dont le film a fait l'objet en Israël.

"Même si [la précédente ministre de la culture] Miri Regev n'a pas été en mesure de faire passer la loi sur la loyauté culturelle, j'ai eu le sentiment que le message n'a pas été reçu", dit, faisant référence à la législation proposée par Regev qui aurait suspendu le financement gouvernemental à des institutions "enfreignant les principes du pays."

"Certes, on peut toujours dire que je suis le réalisateur blessé et aigri. Mais c'est un continuum intéressant. Soit c'est un film affreux, soit il y a quelque chose là-dedans que les gens ne veulent pas aborder. D'un autre côté, c'est un énorme succès à l'étranger."

Vous a-t-on donné des explications sur les rejets en Israël ?

"Non. Et je ne suis pas non plus du genre à aller enquêter. Je savais que ce film allait soulever des problèmes".

L'une des raisons, pense-t-il, est que le film est basé sur des témoignages de soldats recueillis par Breaking the Silence, l'organisation israélienne anti-occupation fondée par des vétérans de l'armée. Le groupe recueille des témoignages d'abus présumés commis par l'armée dans les territoires occupés depuis 1967 et de situations troublantes dans lesquelles les soldats se sont trouvés pendant leur service militaire.

"Breaking the Silence ne fait pas partie des organisations les plus populaires en Israël, c'est le moins que l'on puisse dire", plaisante Mograbi. "J'ai aussi le sentiment que le personnage que j'incarne dans le film met même en colère les gauchistes, en raison du cynisme [du personnage], du fait qu'à sa base, il y a le mal. Parce que même lorsque nous faisons de mauvaises choses, nous ne voulons pas penser que nous agissons par malveillance. Mais ce personnage ne se soucie pas de cela. Tout ce qui lui importe, c'est d'accomplir les objectifs qu'il s'est fixés."

Mograbi joue une sorte d'expert ou de conférencier qui explique comment mener une occupation militaire de la manière la plus efficace possible. L'"expert" organise le film autour du développement chronologique de l'occupation dans les territoires et autour de quelques principes importants qui la soutiennent. Entrecoupées de témoignages d'anciens soldats, les explications de l'expert machiavélique révèlent l'effrayante méthodologie du processus. Le résultat est un film délibérément didactique, pratiquement un film d'instruction. "Si vous voulez faire votre propre métier, je vous aiderai à sauter certaines parties ennuyeuses", plaisante Mograbi.

En fait, vous coupez court à l'obscurcissement et présentez l'occupation presque comme une formule mathématique, montrant qu'il n'y a rien d'aléatoire.

"Quand on regarde le résultat, on comprend que ça n'a pas pu arriver comme ça. Quelqu'un, quelque part, a dû s'asseoir et y réfléchir. Je ne dis pas que ce manuel existe dans un coffre-fort de la direction des opérations du ministère de la défense, mais il existe dans l'esprit des nombreuses personnes qui ont créé cette chose", affirme-t-il.

Un logiciel espion avancé de la société israélienne Candiru a été découvert sur des ordinateurs russes, turcs et palestiniens

 Amitai Ziv, Haaretz, 3/10/2021
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le logiciel malveillant très ciblé est vendu par l'entreprise israélienne à des clients qui l'utilisent pour espionner des journalistes, des dissidents et d'autres personnes, indique la société de cybersécurité ESET dans un nouveau rapport.

Un logiciel espion fabriqué par Candiru, une société d'outils de piratage basée à Tel-Aviv, a été découvert sur plusieurs ordinateurs en Europe et au Moyen-Orient, a indiqué la société de cybersécurité ESET.

L'entrée du bureau de Candiru à Tel Aviv, en 2018. Photo : Ofer Vaknin

Dans son rapport de septembre, ESET écrit que selon les recherches publiées par Citizen Lab et le Microsoft Threat Intelligence Center en juillet au sujet du maliciel Devils Tongue de Candiru, celui-ci est "vendu à des tiers, qui peuvent en abuser pour espionner diverses victimes, notamment des défenseurs des droits humains, des dissidents, des journalistes, des militants et des politiciens".

Selon le rapport, les chercheurs d'ESET ont "découvert des indications du maliciel DevilsTongue dans nos données de télémétrie, affectant environ 10 ordinateurs" en Albanie, en Russie et au Moyen-Orient. Le malware a été trouvé en Israël, dans les territoires palestiniens, en Turquie et dans d'autres parties de la région.

Il indique également que "le maliciel est très ciblé : chaque victime de DevilsTongue que nous avons identifiée disposait d'un échantillon personnalisé avec des ressources PE uniques pour cette victime". La mention de l’"obscure firme d'espionnage mercenaire israélienne", comme Candiru est surnommée dans le rapport, est susceptible de perturber les Israéliens.

En juillet, Microsoft et Google ont signalé un certain nombre de vulnérabilités de type "zero-day" découvertes dans le système d'exploitation Windows et dans le populaire navigateur ouèbe Chrome. Candiru avait exploité ces vulnérabilités afin d'attaquer des cibles dans une centaine de pays, de l'Iran et du Liban à l'Espagne et au Royaume-Uni.

Pourquoi nous sommes solidaires de Mimmo Lucano, le hors-la-loi

Gaetano Lamanna , il manifesto, 3/10/2021
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala 

13 ans et 2 mois de prison : c’est la condamnation incroyable prononcée en première instance par le tribunal de Locri contre Mimmo Lucano, l’ancien maire de Riace, en Calabre, suspendu en 2018, dont le crime est d’avoir hébergé et intégré des immigrants, faisant ainsi revivre ce village frappé par la désertification. Ci-dessous la réaction d'un encien dirigeant communiste et syndical calabrais, aujourd'hui actif dans le Syndicat des retraités de la CGIL-FG

Délit d’'humanité. Il s'agit d'une contradiction flagrante entre le droit et la justice, qui ne vont pas toujours de pair. Souvent, pour rendre ou faire rendre justice, il faut changer une loi. Cela s'est produit à plusieurs reprises.

Traité comme un criminel. Avant le procès, on lui a ordonné de quitter Riace. Il ne pouvait pas retourner dans son village, même pour rendre visite à son père âgé et malade. Il était considéré comme pire qu'un mafioso. Or, il se trouve que Mimmo Lucano n'est pas un mafioso, mais un citoyen honnête, bon et généreux. Une tête dure, comme beaucoup en Calabre. Nous sommes confrontés à une contradiction flagrante entre le droit et la justice. La loi n'est pas toujours en accord avec la justice. Souvent, pour rendre ou faire rendre justice, il faut changer une loi. Cela a été fait à de nombreuses reprises. Mais c'est un processus long et laborieux. Il faut parfois des batailles, des mouvements, des pétitions populaires, des référendums, pour que le parlement se décide à changer une loi injuste ou à promouvoir des droits.

Ce fut le cas avec le Statut des travailleurs. Il en était de même pour le ius soli (droit du sol). Il en va de même pour les crimes d'honneur, l'avortement, le divorce, et bien d'autres exemples pourraient être cités. La loi, qui est la base du droit, évolue, suit l'histoire et est mise à jour en fonction des changements historiques et politiques. Aux époques grecque et romaine, l'esclavage n'était pas illégal. Au Moyen Âge, les privilèges féodaux et le servage étaient légaux. Le droit n'est pas neutre.

La plupart du temps, il ne fait que codifier des règles, des conventions, des coutumes, déjà en usage. Il transforme le statu quo en loi. Il prend généralement acte des relations de pouvoir. Avec la Révolution française, la bourgeoisie montante a renversé l'ancien monde féodal, façonné à la mesure de l'aristocratie, serré par des contraintes, des privilèges et des règles qui empêchaient l'accumulation du capital, le libre marché et le développement industriel. Plus récemment, sous les gouvernements dirigés par Berlusconi, nous avons également vu des lois ad personam, des crimes déclassés ou faits disparaître du code du jour au lendemain.