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14/08/2025

L’Espagne s’apprête à déclassifier des milliers de documents secrets sur le Sahara occidental et la Marche verte

ECSAHARAUI, 3/8/2025
Traduit par SOLIDMAR

Madrid (ECS).- Le gouvernement de Madrid entend déclassifier des milliers de documents classifiés antérieurs à 1982, notamment des documents relatifs au retrait soudain du Sahara occidental, à la Marche verte et à la diplomatie secrète pendant la transition démocratique. Ce secret d’État classifié pendant de nombreuses années suscite un intérêt bien au-delà des frontières espagnoles. 

Selon un article publié dans le journal El País le 28 juillet, le gouvernement de Pedro Sánchez est sur le point d’adopter une loi qui représente un changement historique dans la gestion des secrets d’État. Le projet de réforme, qui remplacera la Loi de 1968 sur les secrets officiels héritée du régime franquiste, propose la déclassification immédiate de tous les documents classifiés datant de plus de 45 ans, sauf dans les cas où cela présenterait un risque exceptionnel pour la sécurité nationale. Le journal explique que « le processus de déclassification concernera tous les documents antérieurs à 1982 ».

Derrière cette initiative démocratique se cache une partie importante de l’histoire de la diplomatie espagnole qui pourrait être récupérée. Les chercheurs espagnols attendent ce moment depuis des décennies, tandis que leurs voisins du sud, le Sahara occidental et le Maroc, l’observent avec beaucoup d’enthousiasme. Les documents en question comprennent ceux liés à la fin de la présence espagnole au Sahara occidental, à la Marche verte du 6 novembre 1975 et à la politique secrète de l’Espagne envers le Maroc pendant la transition politique.

Le journal souligne que « parmi ces documents figurent des détails sur le processus qui a conduit au retrait précipité du Sahara occidental en 1975, alors que Franco était sur son lit de mort ». Ce retrait a eu lieu dans un contexte régional très tendu et a souvent été décrit comme improvisé et mené dans des circonstances mystérieuses. Pour le Maroc, tout document attestant la nature des engagements de l’Espagne à l’époque ou indiquant une reconnaissance implicite de la souveraineté marocaine sur le territoire aurait une grande valeur diplomatique et symbolique. Dans le cas contraire, cela constituerait une grave crise diplomatique entre Rabat et Madrid.

Cependant, l’accès à ces archives n’est pas garanti. Le ministre de la Présidence du gouvernement, Félix Bolaños, a averti que la quantité de documents en question est « énorme » (ingente) et que le processus de déclassification « ne sera pas immédiat », mais « progressif, en donnant la priorité aux documents liés aux violations des droits humains ».

À cela s’ajoutent des difficultés matérielles, car « les documents doivent être identifiés, organisés, classés et indexés avec précision » avant d’être transférés à la commission d’archives compétente, puis déposés dans les archives publiques. En d’autres termes, il ne suffit pas que les documents existent et soient déclassifiés, ils doivent également être physiquement accessibles.

La disparité éventuelle de la documentation aura des conséquences politiques, car elle permet à l’État espagnol de maintenir une sorte d’« amnésie stratégique », tout en limitant le droit à la vérité des communautés concernées, en particulier le peuple sahraoui.

Au Maroc, plusieurs médias proches du régime ont suivi cette évolution avec un mélange d’espoir prudent et de vigilance. L’ouverture des archives pourrait révéler les secrets de la Marche verte ou les détails cachés de l’accord tripartite de Madrid. Elle pourrait également confirmer des éléments qui sont restés longtemps cachés, tels que des concessions implicites, la médiation usaméricaine ou les doutes de la haute hiérarchie militaire espagnole.

Pour la démocratie espagnole, le défi est double : premièrement, rendre ces archives fonctionnelles et réellement accessibles, plutôt que simplement déclassifiées sur papier ; deuxièmement, assumer la responsabilité de leur contenu. Comme le souligne El País, « les chercheurs ne peuvent exiger ce qu’ils ne connaissent pas ». Le défi ne se limite donc pas à l’ouverture des dossiers ; il exige également la création d’un catalogue public rigoureux et consultable, sans lequel la transparence restera un mirage.

GIDEON LEVY
Quand Anas Al-Sharif est mort, le journalisme est mort, tout comme la vérité et la solidarité

Les journalistes israéliens refusent de voir qu’un pays qui a tué plus de journalistes dans cette guerre à Gaza que dans tout autre conflit de l’histoire finira un jour par tourner ses armes contre eux.

Une manifestante tient une photo d’Anas Al-Sharif, l’un des quatre journalistes d’Al Jazeera tués lors d’une frappe israélienne quelques jours plus tôt, lors d’une manifestation de solidarité avec les journalistes de la bande de Gaza et condamnant la récente frappe, organisée par des journalistes devant le Syndicat de la presse égyptienne au Caire mercredi. Crédit : AFP/KHALED DESOUKI

Gideon Levy, Haaretz, Aug 13, 2025 11:37
Traduit par Tlaxcala

« Si ces mots vous parviennent, sachez qu’Israël a réussi à me tuer et à faire taire ma voix. ... Dieu sait que j’ai déployé tous les efforts et toute l’énergie dont je disposais pour soutenir et faire entendre la voix de mon peuple, depuis le moment où j’ai ouvert les yeux sur la vie dans les ruelles et les rues du camp de réfugiés de Jabaliya. J’espérais que Dieu prolongerait ma vie jusqu’à ce que je puisse retourner avec ma famille et mes proches dans notre ville natale, Al-Majdal Asqalan, aujourd’hui occupée. Mais la volonté de Dieu a prévalu, et son décret s’est accompli. »

Ce n’est pas la volonté de Dieu qui a déterminé le sort du journaliste Anas Al-Sharif dimanche, ainsi que celui de trois autres journalistes et de deux civils, dans la tente de presse adjacente à l’hôpital al-Shifa de la ville de Gaza. Ce n’était pas la volonté de Dieu, mais plutôt celle d’un drone militaire israélien criminel qui a pris pour cible Al-Sharif, le correspondant le plus éminent d’Al Jazeera dans cette guerre. Ce n’est pas la volonté de Dieu, mais celle d’Israël qui a voulu l’exécuter au motif qu’il dirigeait une « cellule du Hamas », sans présenter la moindre preuve à l’appui.

Beaucoup dans le monde ont cru à la version de l’armée, tout comme ils avaient cru que les Forces de défense israéliennes n’avaient pas tué la journaliste d’Al Jazeera Shireen Abu Akleh à Jénine en 2022. Même ceux qui veulent croire qu’Al-Sharif était un chef de cellule doivent se poser la question suivante : qu’en est-il des cinq personnes qui ont été tuées avec lui ? Étaient-elles des adjoints du chef de la cellule ? On ne peut croire quoi que ce soit venant d’une armée qui massacre des journalistes de sang-froid ou d’un État qui n’autorise pas la libre couverture de la guerre, pas même les reportages sur le chef de la cellule terroriste de Jabaliya.

Il est difficile de croire – ou peut-être n’y a-t-il plus rien de difficile à croire – le peu d’intérêt suscité ici [en Israël] par le meurtre de quatre journalistes. La presse israélienne était divisée entre ceux qui ont ignoré l’affaire et ceux qui ont rapporté qu’Israël avait éliminé un terroriste. Sans aucune information, presque tout le monde s’est mobilisé pour raconter l’histoire dictée par les Forces de défense israéliennes, au mépris de la vérité. Et au mépris de la solidarité envers un collègue courageux.

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Des Palestiniens récitent la Fatiha dans un cimetière de la ville de Gaza, mardi, sur la tombe du correspondant d’Al Jazeera Anas Al-Sharif, tué avec d’autres journalistes lors d’une frappe israélienne. Crédit : AFP/BASHAR TALEB

La seule preuve présentée était une photo d’Al-Sharif avec le chef du Hamas Yahya Sinwar. C’est en effet un motif d’exécution.

Un million de fois plus courageux que n’importe quel journaliste israélien, et moins complaisant au service de la propagande de son État et de son peuple que Nir Dvori et Or Heller, Al-Sharif aurait pu enseigner les fondamentaux du journalisme aux membres des médias israéliens.

Le chutzpah de la presse ici est sans limites : Al Jazeera est une chaîne de propagande, hurlent les reporters des chaînes de télévision israéliennes, qui ont donné une mauvaise réputation à la propagande ultranationaliste et à la dissimulation de la vérité pendant cette guerre.

Si Al Jazeera est de la propagande, alors qu’est-ce que Channel 12 ? Et les chaînes 11, 13, 14 et 15 ? Ont-elles un quelconque rapport avec le journalisme dans cette guerre ?


Des enfants palestiniens et un journaliste inspectent la tente détruite d’Al Jazeera à l’hôpital Al-Shifa de Gaza, lundi, après une frappe nocturne de l’armée israélienne. Crédit : AFP/BASHAR TALEB

Lorsque le journalisme est mort, la vérité et la solidarité ont également disparu. Ceux qui ont tué plus de journalistes dans cette guerre que dans toute autre guerre de l’histoire – 186 selon le Comité pour la protection des journalistes basé à New York, 263 selon B’Tselem – tourneront un jour leurs armes contre nous, les journalistes israéliens qui ne trouvons pas grâce à leurs yeux. Il est difficile de comprendre comment les journalistes israéliens ne parviennent pas à saisir cela. Ou peut-être ont-ils l’intention de continuer à se soumettre à la machine de propagande israélienne, car à leurs yeux, c’est ça le journalisme.

Mais cette semaine, l’armée israélienne a bombardé une tente de presse, et les scènes que vous n’avez pas vues étaient horribles : des corps de journalistes ont été retirés de la tente en feu, et leurs collègues israéliens applaudissaient ou restaient silencieux. Quelle honte, tant sur le plan personnel que professionnel. En quoi est-ce moins choquant que le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en 2018 ? Parce qu’ils n’ont pas démembré le corps d’al-Sharif ?

Les amis d’Al-Sharif et son testament indiquent qu’il savait qu’il était une cible. Lorsque l’armée israélienne a commencé à proférer des menaces de mort à son encontre en octobre, Irene Khan, rapporteure spéciale des Nations unies sur la liberté d’expression, s’est dite inquiète pour son sort. Al-Sharif, a-t-elle déclaré, était le dernier journaliste encore en vie dans le nord de la bande de Gaza. C’est précisément pour cette raison qu’Israël l’a tué. « N’oubliez pas Gaza », tels ont été ses derniers mots dans son testament.