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08/10/2023

AMOS HAREL
Guerre Israël-Gaza : un fiasco catastrophique qui provoquera une onde de choc politique

Amos Harel, Haaretz, 8/10/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 

L'échec du renseignement et la mauvaise préparation israéliens n'étaient pas les seuls problèmes : il semble que la conception défensive opérationnelle d'Israël face à Gaza ait volé en éclats Netanyahou devra payer un prix politique pour sa politique à l'égard du Hamas après la guerre.

 

Un soldat de Tsahal regarde une voiture en flammes dans la ville d'Ashkelon, dans le sud d'Israël, samedi. Photo : Ilan Assayag

 

Vendredi à la mi-journée, un officier supérieur de l'état-major général s'est entretenu avec un invité dans son bureau de Tel-Aviv. Quelques minutes après que l'horloge électronique du bureau a affiché 14 heures, tous deux ont remarqué qu'ils avaient raté l'heure exacte à laquelle la guerre du Kippour avait éclaté il y a 50 ans. La conversation a naturellement dérivé sur les leçons de 1973.

 

« Dans les territoires occupés », dit l'officier, « nous sommes à cinq minutes d'une intifada ». Il dit cela sans savoir qu’il est en train de prophétiser. L'hôte, comme l'ensemble des FDI, était principalement préoccupé par ce qui pouvait se passer en Cisjordanie. Mais au nez et à la barbe de l'establishment de la défense, une attaque sans précédent du Hamas prenait forme au même moment, le long de la frontière de Gaza.

 

Il faut se méfier de l'hystérie excessive. Mais il ne faut pas minimiser la gravité de la calamité qui s'est produite. Israël est en guerre depuis samedi matin. L'attaque du Hamas, qui a pris les services de renseignement israéliens par surprise, a complètement démoli la conception défensive opérationnelle à la frontière de la bande de Gaza. On dénombre plus de 250 morts du côté israélien et plus de 1 590 blessés, un chiffre qui pourrait augmenter de manière significative une fois que tous les sites attaqués auront été fouillés.

Selon des informations en provenance de Gaza, des dizaines de prisonniers et de corps ont été emmenés d'Israël à Gaza. Même en termes d'otages [sic] et de personnes disparues, cette situation n'est pas comparable à l'enlèvement de Gilad Shalit en 2006. On voit mal le gouvernement modérer les frappes aériennes sur Gaza par souci de protéger la vie des prisonniers israéliens. Il est probable que dans le feu de l'action, de telles considérations ne seront pas prises en compte.

 

Israël a parlé de la “doctrine Dahiya”, qui implique la destruction systématique des infrastructures dans les zones fortement peuplées, comme d'une leçon tirée de la deuxième guerre du Liban en 2006. C'est ce qui se passe actuellement à Gaza, avec une grande intensité.

 

Les FDI, le Shin Bet et la police se sont livrés à des combats maison par maison pendant dix heures dans des communautés et des bases militaires où s'étaient retranchés des Palestiniens armés. Dans quelques endroits, comme la ville d'Ofakim et le kibboutz Be'eri, les terroristes se sont retranchés avec des otages [resic].

 

HILO GLAZER
Après une décennie passée dans les cercles les plus radicaux de l’extrême droite israélienne, Idan Yaron est prêt à tout déballer

Hilo Glazer, Haaretz, 6/10/2023

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

NdT

L’auteur de cet article, tout comme 99,99% des journalistes israéliens et occidentaux utilise systématiquement le qualificatif de “terroriste” pour désigner les militants et combattants palestiniens et jamais pour désigner les auteurs de crimes sionistes. N’étant pas d’accord avec cette désignation, je la remplace donc par des termes plus objectifs.

L’universitaire Idan Yaron a pénétré la droite radicale israélienne, gagnant la confiance de ses dirigeants, assistant à leurs réunions et même à un pogrom. Il publie aujourd’hui un livre sur l’héritage kahaniste qu’ils perpétuent.

Idan Yaron : « J’ai pris le café avec des gens qui avaient du sang sur les mains, des gens qui avaient commis des crimes graves, parce qu’à mon avis, il est hors de question qu’il y ait un tabou dans le monde universitaire quand il s’agit de certains domaines de la connaissance ». Photo : Sraya Diamant

Le signal du pogrom a été donné quelques heures seulement après une opération de guérilla menée le 21 juin dans une station-service près de la colonie d’Eli, en Cisjordanie, au cours de laquelle quatre Israéliens ont été tués et quatre autres blessés. La cible de ceux qui voulaient prendre des mesures de représailles était le village palestinien voisin de Luban Al Sharqiya. Un grand nombre de jeunes hommes sont arrivés, non seulement du noyau dur de la “jeunesse des collines” de la colonie de Yitzhar, mais aussi des étudiants des yeshivas et des kollels (yeshivas pour hommes mariés) de la région.

Parmi les dizaines de manifestants qui se dirigeaient vers le village et incendiaient les champs en chemin, il était difficile de rater Idan Yaron, un sociologue et anthropologue social qui, à 69 ans, était beaucoup plus âgé que ceux qui l’entouraient.  Yaron, qui mène des recherches approfondies sur l’extrême droite en Israël, en particulier sur le mouvement créé par le rabbin ultranationaliste d’origine usaméricaine Meir Kahane, s’est retrouvé mêlé à la foule en colère.

« J’ai assisté à l’incident avec eux de la manière la plus directe, tout en filmant tout, au grand dam de certains jeunes », raconte aujourd’hui Yaron. « Bien entendu, je n’ai pris part à aucune activité violente ».

Quelqu’un a-t-il tenté d’empêcher les actes de violence ?

« Il y avait des forces [de sécurité], même si elles n’étaient pas nombreuses, dont des soldats, des agents de la police aux frontières et d’autres policiers. Mais elles ne sont pas intervenues de manière particulièrement énergique, si ce n’est en lançant des gaz lacrymogènes et en tirant en l’air lorsque de jeunes Palestiniens du village se sont approchés. Des dizaines d’yeux ont vu ce qui se passait là-bas ».

Avez-vous envisagé d’intervenir vous-même ?

« J’ai décidé de dépasser la question immédiate de la prévention d’une injustice - et brûler des champs ou l’atelier de menuiserie d’un Palestinien innocent est une injustice absolue à mes yeux - et je me suis demandé si j’étais prêt à dépasser ma limite : infliger une violence réelle ou un dommage physique à une autre personne. Dans l’affirmative, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour l’empêcher. Mais dans cette situation particulière, j’ai pensé que ma vocation m’obligeait à surmonter le sentiment d’injustice qui prenait forme sous mes yeux, afin d’être présent dans les événements et de les faire connaître en temps voulu. Tendre un miroir, générer un discours et à travers lui, peut-être plus tard, façonner une réalité différente et cohérente avec mes valeurs ».

Lorsque les flammes se sont éteintes, les résultats du carnage sont apparus clairement : cinq des habitants de Luban al-Sharqiya avaient été blessés par des tirs à balles réelles. Une dizaine de maisons avaient été dégradées, des vitrines de commerces avaient été brisées, de vastes terres agricoles avaient été incendiées et une trentaine de véhicules brûlés. L’un d’entre eux, d’ailleurs, était la voiture de Yaron, qu’il avait garée à l’orée du village. En découvrant cela, le chercheur s’est demandé s’il n’était pas allé trop loin en s’accrochant à l’idée d’être un observateur participatif. « La voiture était foutue », dit-il. « Les vitres, les rétroviseurs, les phares, l’extérieur était sérieusement endommagé, tout était cassé. Mais comme le moteur n’était pas endommagé, j’ai réussi à rentrer chez moi ».

Idan Yaron n’était pas présent ce jour-là par hasard. Au cours des dix dernières années, il a tissé des liens, dont certains sont devenus de véritables amitiés, avec des activistes de premier plan parmi les jeunes des collines, dont certains sont des disciples de Meir Kahane. En effet, Yaron est devenu un visage familier dans les cercles d’extrême droite et a acquis un accès quasi total au groupe le plus dur des disciples du défunt rabbin. Par exemple, Yaron a assisté l’année dernière à une cérémonie commémorative en l’honneur d’Eden Natan-Zada, soldat déserteur et auteur d’une fusillade en 2005 qui a tué quatre personnes et en a blessé beaucoup d’autres dans la ville arabe israélienne de Shfaram. Natan-Zada a ensuite été battu à mort. Yaron s’est également joint aux dirigeants du mouvement lorsqu’ils se sont rendus sur les lieux ensanglantés d’attaques palestiniennes, et il était présent lors des événements commémorant le massacre, en 1994, de 29 fidèles musulmans au Tombeau des Patriarches à Hébron, qui se sont déroulés sur la tombe du “juste et héroïque” Baruch Goldstein, l’auteur de ce massacre.

Cérémonie commémorative en 2020 pour Baruch Goldstein, qui a tué 29 fidèles musulmans à Hébron en 1994. Idan Yaron a assisté à l’événement annuel cette année.  Photo fournier par  Idan Yaron

SALAH LAMRANI
French abaya ban: State conspiracy mongering and institutional harassment

 Salah Lamrani, Le Club de Mediapart, 22/9/2023

The author is a French literature  teacher and union activist

 France’s new Education Minister, Gabriel Attal, launched the 2023 school year with a thunderous announcement: “I decided it will no longer be possible to wear an abaya at school”, he said, in the name of a preposterous conception of secularism (or “laïcité”) adopted by President Emmanuel Macron. This “abaya ban” is a serious violation of the fundamental rights of presumed Muslim (i.e., racialized) pupils, who are unfairly stigmatized and discriminated against. Though he is the youngest Minister of the Fifth Republic, 34-years-old Gabriel Attal used the oldest and dirtiest trick in the book, namely the politics of scapegoating an oppressed, defenseless minority. Just like his predecessors, who were fond of such nauseating polemics that obscure the real and glaring problems of the French educational system.

Aminata, Assma, Yasmine, Alicia, Hassina, sent home for “non-compliant outfits”


What is an abaya?

The term “abaya” refers to a variety of dresses of varying lengths, which are in no way religion-specific garments, but simple fashion items with a cultural connotation at most. Major brands such as Zara, H & M and Dolce & Gabbana have been making their own for a long time. As proof of this, when Sonia Backès, the French Secretary of State in charge of Citizenship, was shown on TV several types of dresses to know if they were abayas and whether they should be accepted or forbidden in schools, she hesitated, stammered and toke a side step, replying that “it depends on the context”. Thus, in a quasi-official manner, the criteria for acceptance or rejection do not depend on the garment itself, but on the pupil wearing it and her presumed religion, which can only be determined on the basis of skin color and/or name. At the height of hypocrisy, Gabriel Attal justified this blatant discrimination by saying that “you shouldn’t be able to distinguish, to identify the religion of pupils by looking at them”.

 A traumatic start to the school year

Yet this is exactly what has been happening since the start of the school year, with hundreds, if not thousands, of middle and high school girls being
scrutinized, hounded, stigmatized and humiliated, even blackmailed, ordered to partially undress or be sent home for wearing outfits as neutral as a tunic, skirt or kimono, deemed too loose or too covering, as if the suspected modesty was a crime of lese-laicity. This obsession with controlling women’s bodies is reminiscent of the colonial period. Ironically, such a step places France alongside retrograde countries such as Saudi Arabia and Afghanistan that have instituted a “morality police” enforcing a strict dress code, with the notable distinction that French bans do not apply to everyone, but only to pupils presumed to be Muslim.

 

 “Aren't you pretty? Unveil yourself!” Propaganda poster distributed in 1957 by the Fifth Bureau of Psychological Action of the French Colonial Army in Algeria, urging Muslim women to take off their Islamic scarf.