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14/08/2021

JORGE MAJFUD
L'intelligence du Tyrannosaurus : la logique myope du business

JorgeMajfud, 13/8/2021
Traduit par Fausto Giudice

.Le 25 février 2021, le président Joe Biden a ordonné une frappe militaire à la frontière syrienne avec l'Irak (du côté syrien, bien sûr, afin de ne pas perturber les autorités et les médias du protectorat irakien), en représailles aux attaques d'une milice pro-iranienne depuis la ville irakienne d'Erbil. Bien entendu, cette action n'a fait la une d'aucun grand média occidental, le tout à l’enseigne du dix-neuvièmiste « nous avons été attaqués sans raison et avons dû nous défendre »

Vieille histoire. Nous n'allons pas revenir sur le génocide des autochtones sur ce continent, jamais appelé par son nom. Pour rappeler un cas récent, le 22 août 2008, sous la présidence Obama, après le bombardement d'Azizabad en Afghanistan, les responsables militaires usaméricains (dont Oliver North, condamné et gracié pour avoir menti au Congrès dans le cadre du scandale Iran-Contra dans les années 1980) ont déclaré que tout s'était parfaitement déroulé, que le village les avait accueillis par des applaudissements, qu'un chef taliban avait été tué et que les dommages collatéraux avaient été minimes. Minimes. C'est le sens de la valeur de la vie d'autrui. Il n'a pas été signalé à l'époque que des dizaines de personnes avaient été tuées, dont 60 enfants.

Dans un article mineur pour les futurs historiens, le New York Times du 25 février cite le gouvernement usaméricain qui déclare à propos du nouveau bombardement que « cette réponse militaire a été proportionnelle et a été menée sur la base de mesures diplomatiques appropriées ». Comme depuis le XIXe siècle, le gouvernement anglo-saxon s'arroge, sans le dire, des droits spéciaux d'intervention dans le monde pour rétablir l'ordre de Dieu et des bonnes affaires. Comme le publiait la United States Democratic Review de New York en 1858, dans son article "The Fate of Mexico", « les gens de cette espèce ne savent pas comment être libres et ne le sauront jamais tant qu'ils n'auront pas été éduqués par la démocratie américaine, par laquelle le maître les dominera jusqu'à ce qu'ils apprennent un jour à se gouverner eux-mêmes... La Providence nous oblige à prendre possession de ce pays... Nous ne prendrons pas le Mexique pour notre propre intérêt, ce qui serait une plaisanterie impossible à croire. Non, nous allons prendre le Mexique pour son propre bénéfice, pour aider les huit millions de pauvres Mexicains qui souffrent du despotisme, de l'anarchie et de la barbarie ».

Neuf ans plus tôt, le journal Springfield de Chicago analysait l'offense des Mexicains pour avoir donné des terres libres d'impôts aux citoyens usaméricains au Texas, mais les avoir forcés par des lois barbares à libérer leurs esclaves : « Nos compatriotes avaient le droit de se rendre au Mexique sur la base du droit sacré du commerce ». La liberté des maîtres de la terre à la liberté du marché et du droit sacré à la propriété. Rien n'a changé, sauf les scénarios et le paysage technologique, du fait simple et inévitable du progrès millénaire de l'humanité.

Or, ni le New York Times ni l'administration Biden ne mentionnent que dans les attaques des sauvages miliciens pro-iraniens, un seul USAméricain a été tué et que dans cette riposte sobre et proportionnée, 17 indigènes innocents ont dû mourir sous les décombres. En vertu de la glorieuse constitution usaméricaine de 1787, un Noir valait les trois cinquièmes d'un Blanc (bien entendu, les Blancs n'étaient pas à vendre ; cela ne concernait que le calcul électoral dans lequel les Noirs ne votaient pas). Dans les attentats les plus récents, le ratio est fixé à 1/17. Quelqu'un connaît-il le nom des victimes ? Que se serait-il passé si l'armée mexicaine ou chinoise avait tué 17 USAméricains sur le sol américain ? Cette arrogance raciste, couverte par d'innombrables couches de maquillage linguistique, par la lassitude et l'anesthésie de l'habitude, reste aussi vive qu'aux temps de l'esclavage et du colonialisme sauvage.

GILAD ATZMON
Les Juifs sionistes blancs sont mal placés pour nous faire des sermons sur le racisme

Gilad Atzmon, 13/8/2021
Traduit par Fausto Giudice


Une étude de l'université de Stanford révèle : « Environ 80 % des répondants (juifs de couleur) ont déclaré avoir "fait l'expérience de la discrimination" dans les milieux juifs, notamment les synagogues, les congrégations et les communautés spirituelles juives ».

Les personnes qui connaissent l'histoire du sionisme sont conscientes de la riche histoire des abus des juifs blancs (alias ashkénazes) envers les juifs arabes et sépharades en Israël. Dans les années qui ont suivi la création de l'État israélien, des centaines de bébés ont disparu. Leurs parents, pour la plupart des immigrants juifs du Yémen, ont appris que leurs enfants étaient morts, mais on soupçonne qu'ils ont été secrètement donnés à des familles juives blanches sans enfants. Le gouvernement israélien a approuvé, au début de cette année, un accord de dédommagement de 162 millions de shekels [42 millions d’€] avec les familles de ces enfants "disparus".


Le fait d'utiliser la population israélienne comme cobaye n'a pas été inventé par Netanyahou ou/et Pfizer. Dans les années 1950, des échantillons de sang prélevés sur des Juifs yéménites ont été testés pour déterminer s'ils avaient du "sang noir". Selon le Times of Israel, "60 cœurs ont été prélevés sur les corps de nouveaux immigrants du Yémen post-mortem à des fins de recherche médicale, dans le cadre d'un projet prétendument financé par les USA». Toujours à la même période, l'État juif a irradié en masse les enfants arrivés d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient pour tenter de lutter contre la teigne. Dans les années qui ont suivi, beaucoup de ces enfants sont morts de cancer. En 1995, le gouvernement israélien a décidé d'indemniser les victimes et les familles de l'affaire de la teigne.

À   la fin des années 1950-1960, des immigrants juifs du Maroc ont été aspergés de DDT dès que leurs pieds ont touché la "terre promise". Pour eux, ce départ amer n'était qu'une introduction à des décennies d'abus et d'humiliations qui ont toujours cours.

GIDEON LEVY
« Ils choisissent une personne à tuer, puis la manifestation est terminée » : Imad Duikat, 6ème martyr de Beita

Gideon Levy et Alex Levac (photos), Haaretz, 12/8/2021
Traduit par Fausto Giudice

Imad Duikat est le sixième Palestinien à être abattu par les troupes israéliennes lors des récentes manifestations contre l'avant-poste de colons d'Evyatar, et le 40e à être tué en Cisjordanie depuis mai.

Ali est porté dans la pièce dans les bras de l'oncle Bilal, le frère de son père. Tout le monde se tait, certains yeux se remplissent de larmes à la vue du petit bébé. Ali n'a pas encore deux mois - et son père a été tué vendredi dernier par les forces de défense israéliennes. Une seule balle a été tirée sur lui et a touché sa poitrine à une distance de quelques centaines de mètres.


Ali Duikat, père d'Imad qui a été tué vendredi dernier, berçant son petit-fils et homonyme, cette semaine

Imad Duikat, un simple ouvrier, faisait partie des centaines d'habitants du village de Beita en Cisjordanie, qui se rassemblent chaque vendredi en face d'Evyatar, un avant-poste illégal que les colons ont quitté pour l'instant mais dont les habitations sont toujours là, intactes. Les dirigeants du village insistent sur le fait qu'ils n'auront pas de repos tant que la dernière pierre n'aura pas été enlevée d'Evyatar et que la terre -qui, selon eux, appartient à Beita et à trois autres villages voisins - n'aura pas été rendue à ses propriétaires.

Duikat, 38 ans, buvait de l'eau dans un gobelet jetable dans la chaleur de midi lorsqu'il a été abattu. Le gobelet se trouve maintenant au centre du mémorial improvisé - un cercle de pierres - que ses amis ont placé autour de la tache de sang séché, là où la balle l'a transpercé. Son fils Ali, un nourrisson, et ses quatre sœurs ne le reverront jamais. Le grand-père d'Imad, également prénommé Ali, serre son petit-fils contre son cœur et l'embrasse.

Cette simple maison, située au cœur de Beita, est plongée dans le deuil. Nous y sommes arrivés en début de semaine pour rendre visite au père, au frère, aux enfants et aux autres parents d'Imad. Les femmes en deuil étaient au premier étage. Un groupe d'hommes de la région s'était réuni pour se consoler dans une salle au centre du village.

La semaine dernière, nous étions également à Beita pour documenter le meurtre du plombier local,Shadi Shurafi , 41 ans et père de quatre enfants, au début du mois. Il a été abattu un soir alors qu'il allait vérifier les principales vannes d'eau du village, près de l'autoroute, en tenant une clé à molette. (Mardi de cette semaine, l'unité du porte-parole des FDI nous a informés que le corps de Shurafi avait finalement été rendu à sa famille pour être enterré, sur directive des politiciens israéliens).

Une affiche de deuil avec la photo d'Imad Duikat