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16/07/2025

OMER BARTOV
Je suis un spécialiste du génocide. Quand j’en vois un, je le reconnais

 Omer Bartov, The New York Times, 15/7/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala  


Un mois après l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, je croyais qu’il existait des preuves que l’armée israélienne avait commis des crimes de guerre et potentiellement des crimes contre l’humanité lors de sa contre-attaque contre Gaza. Mais contrairement aux cris des critiques les plus virulents d’Israël, ces preuves ne me semblaient pas constituer un crime de génocide.

En mai 2024, les Forces de défense israéliennes avaient ordonné à environ un million de Palestiniens réfugiés à Rafah – la ville la plus au sud et la dernière relativement intacte de la bande de Gaza – de se déplacer vers la zone côtière de Mawasi, où il n’y avait que peu ou pas d’abris. L’armée a ensuite procédé à la destruction d’une grande partie de Rafah, un exploit pratiquement accompli en août.

À ce stade, il semblait impossible de nier que le modèle des opérations de Tsahal était cohérent avec les déclarations dénotant une intention génocidaire faites par les dirigeants israéliens dans les jours qui ont suivi l’attaque du Hamas.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahou avait promis que l’ennemi paierait un « prix énorme » pour l’attaque et que l’armée israélienne réduirait en ruines certaines parties de Gaza, où opérait le Hamas, et il avait appelé les « habitants de Gaza » à « partir maintenant, car nous interviendrons avec force partout ». Netanyahou avait exhorté ses citoyens à se souvenir de « ce qu’Amalek vous a fait », une citation que beaucoup ont interprétée comme une référence à l’exigence, contenue dans un passage biblique, appelant les Israélites à « tuer sans distinction hommes et femmes, enfants et nourrissons » de leur ancien ennemi. Les responsables gouvernementaux et militaires ont déclaré qu’ils combattaient des « animaux humains » et ont, plus tard, appelé à « l’annihilation totale ». Nissim Vaturi, vice-président du Parlement, a déclaré sur X que la tâche d’Israël devait être « d’effacer la bande de Gaza de la surface de la terre ». Les actions d’Israël ne peuvent être comprises que comme la mise en œuvre de l’intention exprimée de rendre la bande de Gaza inhabitable pour sa population palestinienne. Je crois que l’objectif était – et demeure aujourd’hui – de forcer la population à quitter la bande de Gaza ou, considérant qu’elle n’a nulle part où aller, de l’affaiblir par des bombardements et de graves privations de nourriture, d’eau potable, d’assainissement et d’aide médicale, à tel point qu’il est impossible pour les Palestiniens de Gaza de maintenir ou de reconstituer leur existence en tant que groupe.

Ma conclusion inévitable est qu’Israël commet un génocide contre le peuple palestinien. Ayant grandi dans un foyer sioniste, vécu la première moitié de ma vie en Israël, servi dans l’armée israélienne comme soldat et officier et consacré la majeure partie de ma carrière à la recherche et à l’écriture sur les crimes de guerre et l’Holocauste, cette conclusion a été douloureuse et j’y ai résisté aussi longtemps que possible. Mais j’enseigne le génocide depuis un quart de siècle. Je sais reconnaître un génocide quand j’en vois un. Ce n’est pas seulement ma conclusion. Un nombre croissant d’experts en études sur le génocide et en droit international concluent que les actions d’Israël à Gaza ne peuvent être qualifiées que de génocide. Il en va de même pour Francesca Albanese, rapporteure spéciale des Nations Unies pour la Cisjordanie et Gaza, et Amnesty International. L’Afrique du Sud a porté plainte pour génocide contre Israël devant la Cour internationale de justice.

Le refus persistant des États, des organisations internationales et des experts juridiques et universitaires d’accorder cette qualification causera des dommages considérables non seulement aux populations de Gaza et d’Israël, mais aussi au système de droit international établi au lendemain des horreurs de l’Holocauste, conçu pour empêcher que de telles atrocités ne se reproduisent. Il s’agit d’une menace pour les fondements mêmes de l’ordre moral dont nous dépendons tous.

Le crime de génocide a été défini en 1948 par les Nations Unies comme « l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, en tant que tel ». Pour déterminer ce qui constitue un génocide, il faut donc à la fois établir l’intention et démontrer qu’elle est mise à exécution. Dans le cas d’Israël, cette intention a été publiquement exprimée par de nombreux responsables et dirigeants. Mais l’intention peut également découler d’un schéma d’opérations sur le terrain, et ce schéma est devenu clair en mai 2024 – et l’est devenu encore plus depuis – lorsque Tsahal systématiquement détruit la bande de Gaza.

La plupart des spécialistes du génocide sont prudents quant à l’application de ce terme aux événements contemporains, précisément en raison de la tendance, depuis son invention par l’avocat juif polonais Raphael Lemkin en 1944, à l’attribuer à tout cas de massacre ou d’inhumanité. Certains soutiennent même que cette catégorisation devrait être totalement abandonnée, car elle sert souvent davantage à exprimer l’indignation qu’à identifier un crime particulier. Pourtant, comme l’a reconnu Lemkin, et comme l’ont ultérieurement reconnu les Nations Unies, il est crucial de pouvoir distinguer la tentative de destruction d’un groupe particulier d’autres crimes de droit international, tels que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.

En effet, alors que d’autres crimes impliquent le meurtre aveugle ou délibéré de civils en tant qu’individus, le génocide désigne le meurtre de personnes en tant que membres d’un groupe, visant à détruire irrémédiablement ce groupe lui-même afin qu’il ne puisse jamais se reconstituer en tant qu’entité politique, sociale ou culturelle. Et, comme l’a signalé la communauté internationale en adoptant la convention, il incombe à tous les États signataires de prévenir une telle tentative, de tout mettre en œuvre pour l’arrêter pendant qu’elle se produit et de punir ensuite ceux qui ont commis ce crime des crimes, même s’il a eu lieu à l’intérieur des frontières d’un État souverain.

Cette désignation a des ramifications politiques, juridiques et morales majeures. Les pays, les hommes politiques et les militaires soupçonnés, inculpés ou reconnus coupables de génocide sont considérés comme inhumains et peuvent compromettre, voire perdre, leur droit à rester membres de la communauté internationale. Une constatation de la Cour internationale de Justice selon laquelle un État est impliqué dans un génocide, surtout si elle est appliquée par le Conseil de sécurité de l’ONU, peut entraîner de lourdes sanctions. Les hommes politiques ou les généraux inculpés ou reconnus coupables de génocide ou d’autres violations du droit international humanitaire par la Cour pénale internationale peuvent être arrêtés hors de leur pays. Et une société qui tolère et se rend complice du génocide, quelle que soit la position de ses citoyens, portera cette marque de Caïn longtemps après que les feux de la haine et de la violence auront été éteints.

Israël a nié toutes les allégations de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide. L’armée israélienne affirme enquêter sur les signalements de crimes, bien qu’elle ait rarement rendu publiques ses conclusions. Lorsque des manquements à la discipline ou au protocole sont constatés, elle inflige généralement de légères réprimandes à son personnel. Les dirigeants militaires et politiques israéliens affirment à maintes reprises que l’armée israélienne agit dans le respect de la légalité, affirment qu’elle lance des avertissements aux populations civiles pour qu’elles évacuent les sites sur le point d’être attaqués et accusent le Hamas d’utiliser des civils comme boucliers humains. En réalité, la destruction systématique à Gaza, non seulement de logements, mais aussi d’autres infrastructures – bâtiments gouvernementaux, hôpitaux, universités, écoles, mosquées, sites du patrimoine culturel, usines de traitement des eaux, zones agricoles et parcs – reflète une politique visant à rendre hautement improbable la renaissance de la vie palestinienne sur le territoire. Selon une enquête récente de Haaretz, environ 174 000 bâtiments ont été détruits ou endommagés, soit jusqu’à 70 % de l’ensemble des structures de la bande de Gaza.

À ce jour, plus de 58 000 personnes ont été tuées, selon les autorités sanitaires de Gaza, dont plus de 17 000 enfants, qui représentent près d’un tiers du nombre total de victimes. Plus de 870 de ces enfants avaient moins d’un an. Plus de 2 000 familles ont été décimées, selon les autorités sanitaires. De plus, 5 600 familles ne comptent plus qu’un seul survivant. Au moins 10 000 personnes seraient encore ensevelies sous les décombres de leurs maisons. Plus de 138 000 ont été blessées et mutilées.

Gaza a désormais le triste privilège d’avoir le plus grand nombre d’enfants amputés par habitant au monde. Toute une génération d’enfants, victimes d’attaques militaires incessantes, de la perte de leurs parents et d’une malnutrition chronique, souffrira de graves répercussions physiques et mentales pour le restant de ses jours.

Des milliers d’autres personnes atteintes de maladies chroniques n’ont eu qu’un accès limité aux soins hospitaliers. L’horreur de ce qui se passe à Gaza est encore qualifiée de guerre par la plupart des observateurs. Mais c’est une appellation erronée. Depuis un an, Tsahal ne combat plus aucune force militaire organisée. La version du Hamas qui a planifié et mené les attaques du 7 octobre a été détruite, même si le groupe affaibli continue de combattre les forces israéliennes et conserve le contrôle de la population dans les zones non contrôlées par l’armée israélienne.

Aujourd’hui, Tsahal est principalement engagé dans une opération de démolition et de nettoyage ethnique. C’est ainsi que l’ancien chef d’état-major et ministre de la Défense de Netanyahou, le partisan de la ligne dure Moshe Yaalon, a décrit en novembre sur la chaîne de télévision israélienne Democrat TV et dans des articles et interviews ultérieurs la tentative de vider le nord de Gaza de sa population.

Le 19 janvier, sous la pression de Donald Trump, à la veille de son retour à la présidence, un cessez-le-feu est entré en vigueur, facilitant l’échange d’otages à Gaza contre des prisonniers palestiniens en Israël. Mais après la rupture du cessez-le-feu par Israël le 18 mars, l’armée israélienne a mis en œuvre un plan largement médiatisé visant à concentrer l’ensemble de la population gazaouie sur un quart du territoire, réparti en trois zones : la ville de Gaza, les camps de réfugiés du centre et le littoral de Mawasi, à l’extrémité sud-ouest de la bande de Gaza.

Utilisant un grand nombre de bulldozers et d’énormes bombes aériennes fournies par les USA, l’armée semble vouloir démolir toutes les structures restantes et prendre le contrôle des trois quarts restants du territoire. Ce projet est également facilité par un plan qui fournit – par intermittence – une aide alimentaire limitée à quelques points de distribution gardés par l’armée israélienne, attirant ainsi la population vers le sud. De nombreux Gazaouis sont tués dans une tentative désespérée de se procurer de la nourriture, et la famine s’aggrave.

Le 7 juillet, le ministre de la Défense, Israel Katz, a déclaré que l’armée israélienne construirait une « ville humanitaire » sur les ruines de Rafah pour accueillir initialement 600 000 Palestiniens de la région de Mawasi, qui seraient approvisionnés par des organismes internationaux et interdits de quitter la zone.

Certains pourraient qualifier cette campagne de nettoyage ethnique, et non de génocide. Mais il existe un lien entre les crimes. Lorsqu’un groupe ethnique n’a nulle part où aller et est constamment déplacé d’une zone dite sûre à une autre, bombardé et affamé sans relâche, le nettoyage ethnique peut se transformer en génocide. Ce fut le cas lors de plusieurs génocides célèbres du XXe siècle, comme celui des Hereros et des Namas dans le Sud-Ouest africain allemand, aujourd’hui la Namibie, qui a débuté en 1904 ; celui des Arméniens pendant la Première Guerre mondiale ; et même pendant l’Holocauste, qui a commencé avec la tentative allemande d’expulser les Juifs et s’est terminé par leur assassinat.

À ce jour, seuls quelques spécialistes de l’Holocauste, et aucune institution dédiée à sa recherche et à sa commémoration, ont émis un avertissement selon lequel Israël pourrait être accusé de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, de nettoyage ethnique ou de génocide. Ce silence a tourné en dérision le slogan « Plus jamais ça », transformant son sens d’affirmation de résistance à l’inhumanité, où qu’elle soit perpétrée, en excuse, voire en carte blanche pour détruire autrui en invoquant sa propre victimisation passée.

C’est là un autre des nombreux coûts incalculables de la catastrophe actuelle. Alors qu’Israël tente littéralement d’anéantir l’existence palestinienne à Gaza et exerce une violence croissante contre les Palestiniens en Cisjordanie, le crédit moral et historique dont l’État juif s’est jusqu’à présent servi s’épuise. Israël, créé au lendemain de l’Holocauste comme réponse au génocide nazi des Juifs, a toujours insisté sur le fait que toute menace à sa sécurité devait être considérée comme la menace potentielle d’un nouvel Auschwitz. Cela donne à Israël le droit de présenter ceux qu’il perçoit comme ses ennemis comme des nazis – un terme utilisé à maintes reprises par les personnalités des médias israéliens pour décrire le Hamas et, par extension, tous les Gazaouis, sur la base de l’affirmation populaire selon laquelle aucun d’entre eux n’est « non impliqué », pas même les nourrissons, qui grandiront pour devenir des militants.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Dès l’invasion du Liban par Israël en 1982, le Premier ministre Menahem Begin comparait Yasser Arafat, alors retranché à Beyrouth, à Adolf Hitler dans son bunker berlinois. Cette fois, l’analogie est utilisée en lien avec une politique visant à déraciner et à expulser toute la population de Gaza. Les scènes d’horreur quotidiennes à Gaza, dont l’opinion publique israélienne est protégée par l’autocensure de ses propres médias, révèlent les mensonges de la propagande israélienne selon lesquels il s’agirait d’une guerre défensive contre un ennemi de type nazi. On frémit lorsque des porte-parole israéliens prononcent sans vergogne le slogan creux selon lequel Tsahal serait « l’armée la plus morale du monde ».

Certains pays européens, comme la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, ainsi que le Canada, ont faiblement protesté contre les actions israéliennes, notamment depuis la rupture du cessez-le-feu en mars. Mais ils n’ont ni suspendu leurs livraisons d’armes ni pris de mesures économiques ou politiques concrètes et significatives susceptibles de dissuader le gouvernement de Netanyahou.

Pendant un temps, le gouvernement usaméricain a semblé se désintéresser de Gaza. Le président Trump avait initialement annoncé en février que les USA prendraient le contrôle de Gaza, promettant d’en faire la « Riviera du Moyen-Orient », avant de laisser Israël poursuivre la destruction de la bande de Gaza et de se tourner contre l’Iran.

Pour l’instant, on ne peut qu’espérer que Trump fera à nouveau pression sur un Netanyahou réticent pour qu’il parvienne au moins à un nouveau cessez-le-feu et mette fin aux massacres incessants.

Comment l’avenir d’Israël sera-t-il affecté par l’inévitable démolition de sa moralité incontestable, issue de sa naissance sur les cendres de l’Holocauste ? Les dirigeants politiques et les citoyens israéliens devront trancher. Il semble y avoir peu de pression intérieure en faveur du changement de paradigme urgent : la reconnaissance qu’il n’existe pas d’autre solution à ce conflit qu’un accord israélo-palestinien de partage du territoire selon les paramètres convenus par les deux parties, qu’il s’agisse de deux États, d’un seul État ou d’une confédération. Une forte pression extérieure de la part des alliés du pays semble également improbable.

Je suis profondément inquiet qu’Israël persiste dans sa voie désastreuse, se transformant, peut-être de manière irréversible, en un véritable État d’apartheid autoritaire. L’histoire nous l’a enseigné, de tels États ne durent pas. Une autre question se pose : quelles conséquences le revirement moral d’Israël aura-t-il sur la culture de la commémoration de l’Holocauste et sur les politiques de mémoire, d’éducation et de recherche, alors que tant de ses dirigeants intellectuels et administratifs ont jusqu’à présent refusé d’assumer leur responsabilité de dénoncer l’inhumanité et le génocide où qu’ils se produisent ?

Ceux qui participent à la culture mondiale de commémoration et de souvenir construite autour de l’Holocauste devront faire face à un jugement moral. La communauté plus large des spécialistes du génocide – ceux qui étudient le génocide comparé ou tout autre génocide ayant marqué l’histoire humaine – se rapproche de plus en plus d’un consensus pour qualifier les événements de Gaza de génocide.

En novembre, un peu plus d’un an après le début de la guerre, le spécialiste israélien du génocide Shmuel Lederman a rejoint le courant croissant d’opinion selon lequel Israël était impliqué dans des actes génocidaires. L’avocat international canadien William Schabas est arrivé à la même conclusion l’année dernière et a récemment qualifié la campagne militaire israélienne à Gaza de « génocide absolu ».

D’autres experts du génocide, comme Melanie O’Brien, présidente de l’Association internationale des spécialistes du génocide, et le spécialiste britannique Martin Shaw (qui a également déclaré que l’attaque du Hamas était génocidaire), sont parvenus à la même conclusion, tandis que le chercheur australien A. Dirk Moses, de la City University de New York, a décrit ces événements dans la publication néerlandaise NRC comme un « mélange de logique génocidaire et militaire ». Dans le même article, Uğur Ümit Üngör, professeur à l’Institut NIOD d’études sur la guerre, l’Holocauste et le génocide, basé à Amsterdam, a déclaré qu’il existe probablement des chercheurs qui ne pensent toujours pas qu’il s’agisse d’un génocide, mais « je ne les connais pas ».

La plupart des spécialistes de l’Holocauste que je connais ne partagent pas, ou du moins n’expriment pas publiquement, ce point de vue. À quelques exceptions notables près, comme l’Israélien Raz Segal, directeur du programme d’études sur l’Holocauste et le génocide à l’Université Stockton dans le New Jersey, et les historiens Amos Goldberg et Daniel Blatman de l’Université hébraïque de Jérusalem, la majorité des universitaires qui se sont penchés sur l’histoire du génocide nazi des Juifs sont restés remarquablement silencieux, tandis que certains ont ouvertement nié les crimes d’Israël à Gaza ou accusé leurs collègues les plus critiques de discours incendiaires, d’exagérations démesurées, d’empoisonnement des puits et d’antisémitisme.

En décembre, le spécialiste de l’Holocauste Norman J.W. Goda a estimé que « des accusations de génocide comme celle-ci ont longtemps servi de cache-misère à des contestations plus larges de la légitimité d’Israël », exprimant son inquiétude quant au fait qu’elles « ont atténué la gravité du mot génocide lui-même ». Cette « diffamation génocidaire », comme l’a qualifiée le Dr Goda dans un essai, « déploie toute une série de clichés antisémites », notamment « l’association de l’accusation de génocide avec le meurtre délibéré d’enfants, dont les images sont omniprésentes sur les ONG, les réseaux sociaux et autres plateformes qui accusent Israël de génocide ».

En d’autres termes, montrer des images d’enfants palestiniens déchiquetés par des bombes de fabrication américaine lancées par des pilotes israéliens constitue, selon cette vision, un acte antisémite.

Plus récemment, le Dr Goda et un historien européen respecté, Jeffrey Herf, ont écrit dans le Washington Post que « l’accusation de génocide lancée contre Israël puise dans de profonds puits de peur et de haine » présents dans « des interprétations radicales du christianisme et de l’islam ». Elle « a déplacé l’opprobre des Juifs en tant que groupe religieux/ethnique vers l’État d’Israël, qu’elle dépeint comme intrinsèquement mauvais ».

Quelles sont les ramifications de ce clivage entre spécialistes du génocide et historiens de l’Holocauste ? Il ne s’agit pas seulement d’une querelle universitaire. La culture mémorielle créée ces dernières décennies autour de l’Holocauste englobe bien plus que le génocide des Juifs. Elle joue désormais un rôle crucial dans la politique, l’éducation et l’identité. Les musées consacrés à l’Holocauste ont servi de modèles pour la représentation d’autres génocides à travers le monde. L’insistance sur le fait que les leçons de l’Holocauste exigent la promotion de la tolérance, de la diversité, de l’antiracisme et du soutien aux migrants et aux réfugiés, sans parler des droits humains et du droit international humanitaire, s’enracine dans une compréhension des implications universelles de ce crime au cœur de la civilisation occidentale à l’apogée de la modernité. Discréditer comme antisémites les spécialistes du génocide qui pointent le génocide israélien à Gaza menace d’éroder le fondement des études sur le génocide : la nécessité constante de définir, prévenir, punir et reconstruire l’histoire du génocide. Prétendre que cette démarche est motivée par des intérêts et des sentiments malveillants – qu’elle est mue par la haine et les préjugés mêmes qui sont à l’origine de l’Holocauste – est non seulement moralement scandaleux, mais ouvre également la voie à une politique de négationnisme et d’impunité. De même, lorsque ceux qui ont consacré leur carrière à l’enseignement et à la commémoration de l’Holocauste persistent à ignorer ou à nier les actes génocidaires d’Israël à Gaza, ils menacent de saper tout ce que l’étude et la commémoration de l’Holocauste ont défendu au cours des dernières décennies. À savoir la dignité de chaque être humain, le respect de l’État de droit et l’impérieuse nécessité de ne jamais laisser l’inhumanité s’emparer du cœur des peuples et orienter les actions des nations au nom de la sécurité, de l’intérêt national et de la vengeance pure et simple.

Ce que je crains, c’est qu’au lendemain du génocide de Gaza, il ne soit plus possible de poursuivre l’enseignement et la recherche sur la Shoah comme auparavant. L’État d’Israël et ses défenseurs ayant invoqué sans relâche la Shoah pour dissimuler les crimes de Tsahal, l’étude et la mémoire de la Shoah pourraient perdre leur prétention à la justice universelle et se replier sur le même ghetto ethnique où elles ont commencé à la fin de la Seconde Guerre mondiale : une préoccupation marginalisée des survivants d’un peuple marginalisé, un événement ethniquement spécifique, avant de réussir, des décennies plus tard, à trouver sa juste place comme leçon et avertissement pour l’humanité tout entière. Tout aussi inquiétante est la perspective que l’étude du génocide dans son ensemble ne survive pas aux accusations d’antisémitisme, nous privant ainsi de la communauté cruciale d’universitaires et de juristes internationaux pour prendre le relais, à une époque où la montée de l’intolérance, de la haine raciale, du populisme et de l’autoritarisme menace les valeurs qui étaient au cœur des efforts scientifiques, culturels et politiques du XXe siècle. La seule lumière au bout de ce tunnel si sombre est peut-être la possibilité qu’une nouvelle génération d’Israéliens affronte son avenir sans se réfugier dans l’ombre de l’Holocauste, même si elle devra porter la tâche du génocide de Gaza perpétré en son nom.

Israël devra apprendre à vivre sans recourir à l’Holocauste pour justifier son inhumanité. Malgré toutes les souffrances atroces que nous observons actuellement, cela est précieux et pourrait, à long terme, aider Israël à envisager l’avenir de manière plus saine, plus rationnelle et moins craintive et violente. Cela ne compensera en rien le nombre effarant de morts et de souffrances des Palestiniens. Mais un Israël libéré du fardeau écrasant de l’Holocauste pourrait enfin accepter l’inévitable nécessité pour ses sept millions de citoyens juifs de partager leur terre avec les sept millions de Palestiniens vivant en Israël, à Gaza et en Cisjordanie, dans la paix, l’égalité et la dignité. Ce sera la seule possibilité de rédemption par la justice.

HÉCTOR BUJARI SANTORUM
Des cagoules, des rois et des messages cachés : la triade qui a fait exploser Torre Pacheco sous les yeux de l’Espagne



Pour comprendre ce qui s’est passé à Torre Pacheco, il faut souligner deux points : la myopie volontaire à l’égard du Maroc et le paternalisme progressiste qui transforme le migrant en être de lumière abstrait.

Héctor Bujari Santorum, Nueva Revolución, 16/7/2025

Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

La victime, identifiée uniquement comme Domingo, âgé de 68 ans, se rendait comme chaque matin au cimetière lorsqu’il a croisé trois jeunes. Non seulement ils lui ont fracturé le septum nasal, mais cette agression a brisé le fragile pacte de cohabitation d’une commune d’environ 40 000 habitants, où près de 30 % de la population est d’origine étrangère.

Ce qui a suivi, à savoir des attaques contre des commerces et une intervention policière controversée, n’était pas « justice pour Domingo ». C’était un scénario écrit par les nazis dans la rue, abandonné par l’État depuis ses bureaux et exploité sans vergogne par le Maroc.

Il est certain qu’avant cet incident, des mouvements importants étaient déjà en cours dans le contexte politique :

1.                  5 juillet : Le PP reçoit officiellement le délégué du Front Polisario lors de son congrès national.

2.                 8 juillet : Réponse marocaine : le Maroc ferme les postes-frontières de Ceuta et Melilla.

3.                 9 juillet : Des émeutes éclatent à Torre Pacheco après l’agression d’un homme âgé.

4.                10 juillet : Lettre adressée à Alberto Nuñéz Feijóo par Nizar Baraka, secrétaire général de l’Istiqlal et ministre du Développement du Maroc.

5.                 12 juillet : Le Maroc réactive le Comité pour la libération de Ceuta et Melilla après 11 ans d’inactivité.

Sur les 13 personnes arrêtées, seules 3 sont poursuivies pour l’agression de l’homme âgé qui a déclenché les émeutes. En outre, la Garde civile a identifié 120 personnes, dont beaucoup se sont vu retirer des objets pouvant être utilisés comme armes, selon les informations fournies par le colonel Francisco Pulido, chef de la Garde civile dans la région de Murcie.

Ce même soir, à Torre Pacheco, alors que des nazis et des voyous détruisaient des kebabs et transformaient les rues en terrain de jeu, les forces de sécurité qui, quelques semaines auparavant, avaient semé la terreur parmi les ouvriers de Cadix à coups de matraques et de balles en caoutchouc, faisaient marche arrière avec leurs véhicules. Silence complice pour un gouvernement qui a besoin des spectres de l’extrême droite... tout en finançant le monstre par sa lâcheté passive.

Au milieu du chaos, des commerces comme celui de Hassan, propriétaire d’un kebab, ont été touchés. « Ce furent cinq minutes très difficiles », a-t-il raconté. Ils étaient « cagoulés, armés de pierres et de machettes. Certains clients se sont réfugiés dans les toilettes ; nous nous sommes échappés par l’arrière, mais d’autres personnes nous attendaient ». Son témoignage reflète la peur ressentie par les commerçants qui n’avaient rien à voir avec le conflit.

Derrière les cagoules néonazies, il n’y a pas d’idéologues, seulement des mercenaires de la violence qui filment leurs exploits pour se cacher ensuite. Alors que ces voyous ne sont jamais qualifiés de lumpen (terme jalousement réservé à la population maghrébine), beaucoup passent sous silence leur double jeu. Je parle de cette génération de Marocains qui, en Espagne, feignent la rébellion antisystème, mais qui, en privé, sont les lèche-bottes du roi Mohammed VI, scandant les slogans de la DGED (services secrets marocains) entre les prières dirigées par des imams-espions. Et qui paie les pots cassés ? Les seuls innocents : la femme qui cueille des fraises à Huelva et les travailleurs dignes, ceux qui ont traversé le détroit pour se construire une vie digne.

L’Espagne et l’Europe les utilisent comme une armée de réserve, tout comme la France utilise nos jeunes dans ses vignobles ou la Suisse dans ses hôtels. Ils sont la chair à canon du capital transnational : aujourd’hui dans les serres de Torre Pacheco, demain dans les entrepôts d’Amazon. Brisés par la machine, utilisés comme boucs émissaires et abandonnés par un État qui ne se souvient de leur existence que lorsqu’il transforme leurs quartiers en champs de bataille.

Pour comprendre le drame de Torre Pacheco, il faut démanteler deux mensonges fondamentaux. Premièrement, la myopie volontaire sur le Maroc. Beaucoup émettent des opinions sur le royaume alaouite à partir de leur ignorance, voire de leur imagination. Ils ignorent que rien n’y est ce qu’il semble être, pas même ce que le cynisme le plus extrême pourrait imaginer. Sous la façade d’une monarchie modérée se cache un État hybride où les services secrets (DGED), les imams et les narcotrafiquants dansent au rythme du même scénariste : le palais royal. Ceux qui ne comprennent pas cette machine à triple fond ne parviendront jamais à déchiffrer ce qui s’est passé en Murcie.

Le Maroc n’est pas un pays ami de l’Espagne, mais son principal adversaire. Il s’enhardit face à l’absence de réponse et à la faiblesse du gouvernement espagnol, et sait en outre qu’il bénéficie du soutien des USA et d’Israël. Telle est la réalité.

Ensuite, le paternalisme progressiste qui transforme le migrant en être de lumière abstrait. Ce racisme complexé, aussi néfaste que celui de l’extrême droite, cache une vérité dérangeante : il existe bel et bien des délinquants marocains, comme dans toute communauté de 5 000 personnes. Mais réduire tout le monde à cette étiquette est aussi stupide que de nier leur existence.

Le véritable crime, c’est l’analyse paresseuse : soit on sanctifie, soit on diabolise.

Ils arrivent toujours en retard. Ceux-là mêmes qui instrumentalisent aujourd’hui la cause sahraouie – en annonçant des soutiens théâtraux ou des retraits stratégiques selon que ça convient à leur discours – brillent par leur absence dans les tranchées quotidiennes de la résistance. Leur activisme de salon se réduit à pointer du doigt les positions des Sahraouis eux-mêmes, alors que la réalité crie haut et fort : ils se fichent complètement de la lutte réelle. Tout n’est que pure instrumentalisation politique, un marché aux puces où la dignité d’un peuple devient une monnaie d’échange.

Comme le dénonce un militant antiraciste bien connu : « Commencer la journée en écoutant le maire de Torre Pacheco établir un lien entre immigration et délinquance sans données — seulement « sa perception » —, puis voir Marlaska pontifier sur les droits humains... le même Marlaska du massacre de Melilla ». Ici, une correction s’impose : c’était à Nador, pas à Melilla. Qu’un militant « oublie » le lieu n’est pas une négligence : c’est une stratégie. Car cela permet de diluer les responsabilités. Le massacre a été perpétré par des bourreaux bien précis : la police marocaine sous les ordres de son régime, sous les applaudissements de la bourgeoisie locale et avec la complicité nécessaire du gouvernement espagnol. Manipuler le nom du lieu est la première étape pour blanchir le sang.

Quand une personne issue de l’immigration commet un délit, la loi s’applique exactement comme pour n’importe qui d’autre. Ce sont des gens qui vivent et travaillent ici, un point c’est tout. Ici, les fascistes sont peu nombreux, mais leurs complices sont trop nombreux. Donc, si nous voulons vraiment viser plus haut, regardons qui a intérêt à ce que tout cela se passe. Si la « révolte » de Torre Pacheco avait été dirigée contre les patrons exploiteurs qui s’y trouvent, on aurait déjà envoyé les tanks.

Les quartiers ouvriers sont devenus des banlieues marginalisées, confrontées à des problèmes économiques, culturels et de cohabitation. Un discours pro-immigration vide, sans plan social ni urbanistique, n’offre pas des conditions dignes à la classe ouvrière, migrants inclus, qui voit ses quartiers se détériorer. C’est ainsi que le fascisme s’installe : par l’abandon d’une social-démocratie qui prétend les défendre mais qui fait partie des élites autoproclamées.

Le Maroc promeut l’islam malékite, contrôlé par le roi MohamedVI en tant que «Commandeur des croyants». Par l’intermédiaire de l’Institut MohammedVI, il forme des imams pour l’Europe comme alternative au salafisme, gagnant ainsi un soutien institutionnel. En Espagne, environ 40% des imams ont été formés là-bas. Beaucoup ne se contentent pas de diriger des mosquées, mais exercent également un contrôle social sur la communauté maghrébine et diffusent la ligne officielle de Rabat. Ainsi, le Maroc surveille sa diaspora, contrôle le discours religieux et évite les critiques à l’égard du régime. Certaines fédérations islamiques en Espagne ont des liens directs avec le gouvernement marocain, comme le Conseil supérieur des oulémas, dont les membres sont élus par le roi et agissent depuis l’intérieur du pays.

Selon des sources du ministère marocain de l’Intérieur, Rabat a financé des pressions politiques par le trafic de drogue, renforçant ainsi sa position diplomatique : un véritable « narco-État diplomatique ».

Les réseaux criminels combinent immigration clandestine et trafic de haschisch. Par exemple, un réseau opérant entre Ceuta et Ibiza a utilisé des mineurs comme passeurs pour transporter des immigrants et 22kg de haschisch, pour un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros.

En outre, le Maroc a utilisé les crises migratoires comme moyen de pression, assouplissant ses frontières en période de tensions diplomatiques. Un exemple flagrant : la crise de mai 2021 à Ceuta, avec 8 000 migrants en 48 heures, qui a contraint l’Espagne à adopter une position plus favorable à Rabat.

Certains frappent les immigrés, applaudissent ceux qui le font et votent pour ceux qui encouragent ces pratiques : des pions du capital qui nous maintiennent dans l’opposition tandis que l’accumulation s’accélère. D’autres réclament l’ouverture des frontières pour avoir davantage de pauvres à leur service. C’est tout.

لینا الطبال

I stand with Francesca Albanese من در کنار فرانچسکا آلبانیزی هستم

 دکتر لینا الطبال، رأی الیوم، ۱۱ ژوئیه ۲۰۲۵

 اصل عربی

 لینا الطبال لبنانی است، دکترای علوم سیاسی دارد، وکیل آموزش‌دیده و استاد روابط بین‌الملل و حقوق بشر است

 

 من عنوان این مقاله را به انگلیسی انتخاب کردم. نه به این دلیل که می‌خواهم لاف بزنم یا به این دلیل که بیشتر به جهانی شدن زبان اعتقاد دارم تا به انصاف این کار. بلکه به این دلیل که این جمله، بدون اجازه، به اعلامیه همبستگی جهانی تبدیل شده است. من در کنار فرانچسکا آلبانیزی هستم. من در کنار فرانچسکا آلبانیزی هستم، جمله‌ای کوتاه، اما پر از معناست... فقط پنج کلمه. آرام گفته می‌شود، اما برای امنیت ملی خطرناک تلقی می‌شود...

 چطور؟ در حال حاضر یک زن ایتالیایی به خاطر غزه تحت پیگرد قانونی قرار دارد. او هیچ ژن مقاومتی، هیچ پیوند خانوادگی با غزه، هیچ گذشته‌ای که با نکبت مشخص شده باشد، حتی یک عکس هم ندارد. او عرب نیست، در اردوگاه به دنیا نیامده، با شعارهای آزادی‌خواهانه بزرگ نشده است. او یک خیال‌پرداز چپ‌گرا نیست، شاید هرگز آثار مارکس را در کافه‌ها نخوانده باشد. او هرگز سنگی به سمت یک سرباز اسرائیلی پرتاب نکرده است... او صرفاً وظیفه حرفه‌ای خود را انجام می‌داد. ترامپ گفت: "دیوانه".

 او که این برچسب را برای خود قائل است و مانند یک خودشیفته وقتی در مقابل زنی که در برابر بی‌عدالتی سکوت نمی‌کند، از حال می‌رود، آن را پخش می‌کند. نام او فرانچسکا آلبانیز است. این وکیل و دانشگاهی ایتالیایی، گزارشگر ویژه سازمان ملل متحد برای حقوق بشر در سرزمین‌های فلسطینی اشغالی از سال ۱۹۶۷ است. او به عنوان یک کارمند دولت بین‌المللی، پشت یک میز سفید می‌نشیند و گزارش‌هایی را با استفاده از زبان دقیق و اصطلاحات حقوقی بی‌طرفانه تهیه می‌کند. او سخنران بااستعدادی نیست، اما موضع خود را به روشنی و بدون ابهام بیان کرد: آنچه در غزه اتفاق می‌افتد، نسل‌کشی است. او این را به صورت سیاه و سفید در یک گزارش رسمی که به عنوان بخشی از وظایفش منتشر شد، به زبانی قابل فهم تحت قوانین بین‌المللی نوشت: آنچه اسرائیل در غزه انجام می‌دهد نسل‌کشی است. یک شبه، نام او خطرناک شد و باید پاک می‌شد، همانطور که ارتش اسرائیل خانه‌ها را در رفح ویران می‌کند.

 نام او با یک موشک سیاسی پاک شد و او در فهرست تحریم‌ها به همراه قاچاقچیان انسان و تأمین‌کنندگان مالی تروریست‌ها قرار گرفت. حالا می‌دانم: در این دنیا، تنها کاری که باید بکنی این است که دروغ نگویی تا از سفر منع شوی، حساب‌هایت مسدود شود و از سیستم بین‌المللی کنار گذاشته شوی. فرانچسکا قانون را زیر پا نگذاشت؛ او آن را اجرا کرد. و این جرم واقعی اوست. او در تعریف خود اشتباه نکرد، در زبان خود اغراق نکرد، از اختیارات خود فراتر نرفت. او به سادگی نام جنایت را به زبان آورد. نه، این گزارش در مورد نسل‌کشی بومیان آمریکا نیست. همچنین در مورد ویتنام، فسفر سفید، بغداد یا طرابلس نیست...

 این گزارش، گذشته آمریکا را به آتش نمی‌کشد؛ این با یک هدیه‌ی آشکار سروکار دارد. و با حقوقی که وقتی آنها را مطالبه می‌کنیم از دست می‌روند... این گزارش درباره‌ی عدالت بین‌المللی است که در مقابل چشمان ما خفه می‌شود، و منشور حقوق بشر که آن هم در مقابل چشمان ما در حال ناپدید شدن است. در حالی که گناهکاران در شورای امنیت نشسته‌اند. این گزارش درباره‌ی جهانی است که در آن دروغگویان مجازات نمی‌شوند. جهانی که در آن به خاطر عشق خالصانه، به خاطر بخشش بدون انتظار، به خاطر صحبت شجاعانه، به خاطر تلاش برای جبران آسیب‌ها کشته می‌شوید. این گزارش منحصراً درباره‌ی جهان تاریک است. این جهانی که همه‌ی کسانی را که نمی‌خواهند مانند آن باشند، خفه می‌کند. فرانچسکا اولین نفر نبود. وقتی اساسنامه‌ی رم ایجاد شد، ایالات متحده با دیوان کیفری بین‌المللی با عنوان یک "ویروس قانونی"با آن رفتار کرد زیرا نمی‌توانست آن را کنترل کند...

 بیل کلینتون آن را امضا کرد (بدون تصویب آن). سپس جورج دبلیو بوش از راه رسید، امضای خود را پس گرفت و به اصطلاح «قانون تهاجم لاهه» را  تصویب کرد که به موجب آن در صورت محاکمه یک سرباز آمریکایی توسط دادگاه، حمله نظامی به هلند مجاز شمرده می‌شد... باراک اوباما، مرد خردمند، این قانون را لغو نکرد... سپس ترامپ، کابوی بور با دو تپانچه در کمرش، تیر خلاص را به عدالت زد... او فاتو بنسودا، دادستان کل سابق دادگاه، را به خاطر گشودن پرونده‌های علیه افغانستان و فلسطین مجازات کرد. ویزای او را لغو کرد، دارایی‌هایش را مسدود کرد و او را به دار آویخت، توییت‌های طعنه‌آمیزش. سپس کریم خان، رئیس فعلی دادگاه، آمد.

سپس کریم خان، دادستان کل فعلی، که پرونده دشوار غزه و فهرستی از نام‌های به همان اندازه سنگین به او سپرده شده بود، از راه رسید: نتانیاهو، گالانت... بار دیگر، شمشیر انتقام سیاسی بازگشت و شمشیر عدالت را تهدید کرد. کریم خان با تهدیدهایی از سوی کنگره، کاخ سفید و تل‌آویو مواجه شد. دونالد ترامپ در اولین روز حضورش در کاخ سفید، قانون اعمال تحریم‌ها علیه دادگاه بین‌المللی کیفری را امضا کرد. مردی با اصالت پاکستانی که جرات می‌کند به نام‌های غیرقابل لمس دست بزند؟ بازی تمام شد. بنابراین، یک نهاد بین‌المللی، با تمام کارکنان و تجهیزاتش، تحت تحریم‌های ایالات متحده قرار گرفت، گویی یک شبه‌نظامی مسلح است...

کارمندان آن از سفر، کار و حتی نفس کشیدن آزادانه منع شدند... چه کسی گفته است که آمریکا مانع عدالت می‌شود؟ تا زمانی که به تل‌آویو یا پنتاگون نزدیک نشود. و در یک لحظه صراحت، جو بایدن با لحنی پیچیده گفت: این قوانین برای اعمال بر "مردان سفیدپوست" نوشته نشده‌اند، بلکه برای آفریقایی‌ها... و در صورت لزوم برای پوتین نیز اعمال می‌شوند. و با این اوصاف، تناقض کامل می‌شود: ۸۵ درصد از پیگردها و اقدامات قضایی در دادگاه کیفری بین‌المللی شامل آفریقایی‌ها می‌شود. و وقتی پرونده‌هایی علیه غربی‌ها باز می‌شود، عدالت به یک تهدید تبدیل می‌شود...

و دادگاه به یک هدف. و حالا شما هم می‌دانید: وقتی از خط قرمز عبور می‌کنید، این دادگاه است که قضاوت خواهد شد، قاضی است که قضاوت خواهد شد، و شاهد است که قضاوت خواهد شد. آنچه باقی می‌ماند قاتل است... که در ردیف جلو نشسته، به دوربین‌ها لبخند می‌زند و دعوت‌نامه‌هایی برای یک کنفرانس حقوق بشر دریافت می‌کند. چرا که نه؟  ترامپ ضربه مهلکی به قوانین بین‌المللی وارد کرد، از پشت به دادگاه کیفری بین‌المللی خنجر زد، سپس بقایای سیستم حقوق بشر را دفن کرد و جسد را به سمت ما پرتاب کرد: "آنجا، دفنش کنید،" او با همان لحنی که در طول قتل عام‌های سواحل سوریه دستور می‌داد، زمانی که علوی‌ها زیر آوار دفن شدند، بدون شاهد، بدون تحقیقات، گاهی بدون نام، فقط یک شماره... یک سوراخ، و همه چیز تمام شد. ترامپ مثل یک کابوی رفتار کرد: اول شلیک کرد و بعد اعلام کرد که هدف، تهدید امنیتی ایجاد می‌کند. همه اینها در مقابل دیدگان تمام جهان. و در مقابل دیدگان ما نیز... به طور دقیق، در مقابل دیدگان اروپا. اروپا این قوانین را از خاکستر جنگ‌هایش، عقده‌های روانی حل نشده‌اش و ترسش از خودش جعل کرد. و امروز ساکت تماشا می‌کند... با تمام عقده‌های روانی‌اش، اروپا امروز ساکت می‌ماند. فرزند برحق خود را با خونسردی دفن می‌کند، همانطور که مادران در غزه فرزندان خود را دفن می‌کنند... با یک قطره اشک، زیرا زمان، اجازه گریه طولانی نمی‌دهد. حالا می‌فهمی؟ همه قوانین حقوق بشر، از اساسنامه رم گرفته تا منشور بین‌المللی، به خوبی به سمینارهای دانشگاهی و دوره‌های آموزشی که با اعطای دیپلم و عکس‌های متخصصان خوشحال به پایان می‌رسند، می‌چسبند.

و همه چیز در واشنگتن تصمیم گرفته می‌شود. اینگونه است که عدالت بین‌المللی در عصر هژمونی اجرا می‌شود: فهرستی از تحریم‌ها... و فرش قرمز برای جلاد. آیا داستان را به درستی فهمیدید؟ یک زن ایتالیایی در فهرست تروریست‌های سیاسی ایالات متحده... نام او فرانچسکا آلبانیز است. او اهل غزه نیست، جنگ را تجربه نکرده، در محاصره به دنیا نیامده است. او سلاح یا بمبی در کیفش پنهان نمی‌کند، به هیچ سازمان مخفی تعلق ندارد... او از دنیای حقوق، از نهادهای سازمان ملل متحد، از یک بوروکراسی بی‌طرف می‌آید... تنها کاری که او انجام داد نوشتن یک گزارش رسمی در مورد وقایع غزه بود... او آنچه را که دید نوشت: خون، آوار، یک جنایت به خودی خود...

او نوشت که آنچه در آنجا اتفاق می‌افتد یک عملیات امنیتی یا دفاع از خود نیست، بلکه نسل‌کشی است... او کار خود را به زبان گزارش انجام داد، بدون شعار، بدون فریادهای جنگی، بدون حتی کشیدن یک هندوانه نیمه قرمز در حاشیه... فرانچسکا آلبانیز نظم جهانی را به لرزه درآورد زیرا دروغ نگفت... او قوانین دیپلماتیک را نقض نکرد... او به سادگی قانون را اجرا کرد...

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15/07/2025

HAARETZ
Le mode de paiement par l’armée israélienne des conducteurs civils de bulldozers révèle le véritable objectif des démolitions systématiques à Gaza
Crimes de guerre, vous avez dit crimes de guerre ?

Éditorial, Haaretz, 13/7/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala  

Alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahou négocie un cessez-le-feu avec le Hamas, des centaines de bulldozers, d’excavatrices et de bulldozers blindés Caterpillar D9 israéliens poursuivent leurs efforts pour rendre Gaza inhabitable pendant des années.

La position officielle des Forces de défense israéliennes concernant les démolitions de maisons dans la bande de Gaza est que les travaux menés par des centaines d’engins lourds sont nécessaires pour des raisons opérationnelles.

En d’autres termes, l’armée israélienne ne donne l’ordre de raser des bâtiments résidentiels ou autres que lorsqu’ils constituent, par exemple, un danger pour les soldats ou entravent la circulation des véhicules militaires.

Cependant, le modèle selon lequel l’armée israélienne indemnise les opérateurs d’engins lourds à Gaza semble contredire cette affirmation. Selon un article publié la semaine dernière dans l’édition hébreue de Haaretz, l’armée propose de payer 2 500 shekels (environ 640 €) aux conducteurs de bulldozers et d’excavatrices pour raser un bâtiment de trois étages maximum et 5 000 shekels (1280 €) pour des structures plus hautes.

Cette structure tarifaire incite clairement les entrepreneurs à démolir autant de bâtiments que possible, aussi rapidement que possible. Si ces opérations étaient véritablement motivées par des besoins militaires, il serait difficile de justifier une telle indemnisation.

Le fait que le paiement soit effectué quotidiennement ou mensuellement renforce ce point. Même ainsi, cela représente beaucoup plus que ce que les opérateurs gagneraient pour un travail similaire en Israël, certains gagnant jusqu’à 30 000 shekels [7 700€] par mois selon certaines sources. Ces salaires élevés visent à compenser les risques mortels qui dissuadent de nombreux professionnels du secteur de se rendre à Gaza.

Dans la pratique, cependant, pour de nombreux opérateurs, ce travail reflète également un engagement idéologique. Parmi eux figure un groupe important de colons, tandis que les Arabes israéliens [=Palestiniens de 48], qui constituent une part importante du secteur des engins lourds en Israël, sont notablement absents.

Les conversations avec les personnes sur le terrain, qu’il s’agisse d’employés civils de l’armée israélienne ou de réservistes, révèlent que beaucoup abordent leur travail avec un sentiment de vengeance lorsqu’ils conduisent leurs bulldozers à travers les ruines des villes de Gaza.

Le résultat est que, tandis que le Premier ministre Benjamin Netanyahou négocie un cessez-le-feu avec le Hamas, des centaines de bulldozers, d’excavatrices et de bulldozers blindés Caterpillar D9 israéliens poursuivent le processus qu’ils ont entamé ces derniers mois : intensifier leurs efforts pour rendre Gaza inhabitable pendant des années.

Cette destruction n’est pas un effet secondaire des besoins militaires, mais un objectif en soi.

Il est profondément troublant de constater la destruction de biens civils sans objectif militaire impératif, une destruction disproportionnée par rapport à tout avantage militaire obtenu et le ciblage de sites religieux, d’hôpitaux et d’autres bâtiments à vocation humanitaire ou éducative est défini comme un crime de guerre, en particulier si cette destruction vise à garantir que les Palestiniens de Gaza n’aient nulle part où retourner, dans le cadre d’un plan de transfert ou d’expulsion de population.

Israël doit mettre fin immédiatement à ces activités.



FRANCESCA ALBANESE
DALL’ECONOMIA DELL’ OCCUPAZIONE ALL’ ECONOMIA DEL GENOCIDIO
Rapporto al Consiglio per i diritti umani delle Nazioni Unite


 Leggi anche
L’economia del genocidio e le aziende tecnologiche
Silvia Ribeiro

ZVI BAR’EL
Les conflits sectaires permettent à Israël de “cogérer” la Syrie

Selon l’interprétation syrienne des événements, Israël prévoit d’exploiter les conflits internes dans le pays, en particulier dans le district druze, afin de s’imposer comme une « force de police » capable d’empêcher le gouvernement d’établir son contrôle sur l’ensemble du pays.

Zvi Barel, Haaretz, 15/7/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala  

Alors qu’Israël examine attentivement les possibilités d’une normalisation – ou tout au moins d’un accord de sécurité, voire d’une simple entente – avec le nouveau gouvernement syrien, le pays du président Ahmed al-Charaa est en feu, au sens propre comme au figuré. La Syrie reste un État sans gouvernement, puisque son gouvernement central ne contrôle que 60 à 70 % de son territoire.


Al-Charaa, vu par Kamal Sharaf, Yémen

Les Israéliens ont déjà oublié le massacre des Alaouites dans le district de Lattaquié, en Syrie, en mars, qui a fait 1 700 morts. Il en va de même pour les violents affrontements qui ont opposé en avril les membres de la communauté druze et les forces gouvernementales ou les forces alliées au gouvernement. L’attaque du 22 juin contre l’église Mar Elias, qui a fait au moins 25 morts, n’a pas non plus beaucoup impressionné Israël.

Mais dimanche, une autre flambée de violence dangereuse s’est produite, qui pourrait dégénérer en un nouvel affrontement entre les Druzes et le gouvernement. Et dans ce conflit, Israël est déjà profondément impliqué.

En apparence, tout a commencé par un incident banal. Un jeune marchand de légumes druze a été victime d’un vol commis par un gang de Bédouins alors qu’il conduisait son camion de légumes sur la route principale entre Soueïda et Damas. Les vols ne sont pas rares dans le district sud de Soueïda et font depuis longtemps partie intégrante de l’« économie » de la région.

Mais cette fois-ci, le vol a dégénéré en affrontements généralisés. En réponse à cela, et après que des Bédouins ont enlevé plusieurs membres de la communauté druze, des Druzes armés ont capturé certains membres de la tribu bédouine qui vit dans la ville de Soueïda.

Les otages ont ensuite été libérés, mais les affrontements, qui ont donné lieu à des tirs de mortier, à l’utilisation de drones et de mitrailleuses, ont fait 40 morts et une centaine blessés. Depuis lors, le nombre de morts est passé à 90 et les affrontements se poursuivent au moment où nous écrivons ces lignes.

Le gouvernement syrien a rapidement annoncé lundi qu’il intervenait pour rétablir le calme et a commencé à déployer des forces de police et des chars vers le lieu des affrontements. À la suite d’informations faisant état de frappes israéliennes dans cette ville à majorité druze, le ministre syrien de la Défense a annoncé un cessez-le-feu, mettant officiellement fin à toute lutte intestine dans la région.

La réponse du régime syrien est celle que prendrait n’importe quel pays qui souhaite mettre fin aux affrontements armés et empêcher leur propagation à d’autres régions du pays. Mais à Soueïda, ville druze, la situation est pour le moins un peu plus compliquée.

Militialand

En mai, les dirigeants druzes de Soueïda ont signé un accord avec le gouvernement visant à apaiser les violences qui avaient éclaté précédemment. En vertu de cet accord, les milices druzes – qui sont plusieurs – sont censées remettre leurs armes à l’armée syrienne et, à une date ultérieure, être intégrées à celle-ci. Un accord similaire a été conclu avec les forces kurdes opérant sous l’égide des Forces démocratiques syriennes, qui contrôlent le nord du pays.

L’accord avec les Druzes stipule également que les forces de sécurité syriennes seront chargées d’assurer la sécurité sur la route principale entre Damas et Soueïda, celle-là même où le marchand de légumes a été agressé, déclenchant les derniers affrontements.

En vertu de cet accord, les forces de sécurité syriennes sont censées assurer la sécurité de l’ensemble du district. Mais ici, elles se heurtent à l’opposition de certaines milices druzes, dont les loyautés sont partagées entre les trois chefs spirituels de la communauté.

Certaines milices ont déclaré être disposées à coopérer avec l’armée. Mais l’une d’entre elles, fidèle au chef spirituel Hikmat al-Hijri, a déclaré qu’elle ne déposerait pas les armes tant qu’une armée nationale syrienne n’aurait pas été mise en place. Une autre a déclaré qu’elle ne faisait pas confiance à la promesse du gouvernement syrien de protéger les Druzes, ajoutant que si la milice finit par être intégrée à l’armée, cela ne se fera que si les forces druzes constituent une unité distincte chargée de protéger leur district d’origine.

En conséquence, l’armée et la police syriennes n’ont jusqu’à présent pas été en mesure d’entrer dans le district. Et selon les Druzes, elles n’ont pas non plus protégé la route principale entre Soueïda et Damas.

L’ironie, c’est que les milices, les dirigeants druzes et le gouvernement s’accordent tous à dire que le problème est dû à l’absence du gouvernement tant dans le district que sur la route principale. Le régime fait valoir, avec beaucoup de raison, que son échec est dû à l’opposition des Druzes à l’entrée de ses forces dans la région. Les Druzes, en revanche, affirment qu’il s’agit d’un échec délibéré visant à compromettre leur sécurité.

« Les causes de cette escalade sont claires et récurrentes », a déclaré dans un communiqué la milice des Hommes de la dignité, la plus importante des milices druzes, dirigée par Laith al-Balous. « Elles commencent par l’absence délibérée des forces de l’État sur l’artère vitale qui relie Damas à Soueïda et se poursuivent par les attaques répétées contre des civils sur cette route, que le gouvernement ignore depuis des mois. »

Comme lors des affrontements d’avril, les dirigeants druzes ont cette fois encore demandé à la communauté internationale d’intervenir pour « protéger la minorité druze de l’anéantissement ». Cela a ébranlé le gouvernement d’Al-Charaa, car cela le présente comme incapable de protéger ses citoyens et comme laissant les milices et les gangs sévir et attaquer les civils, parfois les Alaouites, parfois les Druzes.

Le gouvernement n’a même pas été en mesure d’empêcher l’attaque contre l’église Mar Elias, qui a été attribué à l’État islamique, mais qui pourrait avoir été perpétré par d’anciens membres mécontents de la milice d’Al-Charaa, Hayat Tahrir al-Cham. Tout cela se passe alors qu’Al-Charaa visite les capitales du monde entier, essayant de montrer qu’il contrôle totalement la situation et promettant qu’il peut protéger tous les Syriens afin de mobiliser les énormes investissements dont la Syrie aura besoin pour sa reconstruction.

Mais le problème ne s’arrête pas là. Israël s’est imposé comme un acteur clé dans le sud de la Syrie et sur le plateau du Golan syrien, non seulement en tant que partie contrôlant de vastes territoires sur lesquels il a construit des bases militaires, mais aussi en tant que garant de la sécurité de la communauté druze.

Par conséquent, lorsque les dirigeants druzes font appel à la communauté internationale, la Syrie interprète cela comme un appel à l’intervention israélienne. Et en effet, Israël est intervenu. Lundi, lorsque l’armée syrienne a tenté d’envoyer des chars dans le quartier en proie à des troubles, elle a été attaquée par des avions israéliens qui ont bloqué leur avancée.

L’explication officielle d’Israël est que l’attaque visait à empêcher les chars d’entrer dans le district. « La présence de tels véhicules dans le sud de la Syrie pourrait constituer une menace pour Israël. Les Forces de défense israéliennes ne permettront pas l’existence d’une menace militaire dans le sud de la Syrie et s’efforceront de l’empêcher. »

Selon cette explication, l’attaque de l’armée israélienne visait à empêcher la Syrie de violer la « ligne de contrôle » établie par Israël, qui fait désormais l’objet de négociations entre Israël et la Syrie.

Mais cette explication n’a pas vraiment convaincu le gouvernement syrien, qui considère cette attaque comme une violation de la souveraineté syrienne et une ingérence israélienne dans les affaires intérieures du pays. De plus, alors que les médias israéliens s’empressent de rapporter les accords et la coordination avec le gouvernement syrien ainsi que les progrès de la Syrie sur la voie de la normalisation avec Israël, l’intervention militaire israélienne montre qu’aucun accord de sécurité n’a encore été conclu.

Selon l’interprétation des événements par la Syrie, Israël prévoit d’exploiter les conflits internes dans le pays, en particulier dans le district druze, afin de s’imposer comme une « force de police » capable d’empêcher le gouvernement d’établir son contrôle sur l’ensemble du pays. Dans la pratique, le contrôle géographique du territoire syrien par Israël a ainsi fait de ce dernier un partenaire dans la gestion du pays.

La connexion turque

Cette évolution dangereuse se produit alors même que les USA s’efforcent d’aider le gouvernement d’Al-Charaa à stabiliser son pouvoir dans tout le pays.

Copains comme cochons: Ryad, 25 mai 2025

Depuis que le président Donald Trump a serré la main d’Al-Charaa. lors de sa visite en Arabie saoudite, où il a levé les sanctions contre la Syrie, ouvrant ainsi grand la porte à la coopération internationale avec le nouveau gouvernement syrien, l’ambassadeur usaméricain en Turquie et envoyé spécial en Syrie et au Liban, Tom Barrack, a exercé de fortes pressions sur les Kurdes pour qu’ils mettent en œuvre l’accord qu’ils ont signé avec Al-Charaa et rejoignent l’armée nationale.

On ne sait toujours pas comment Washington va gérer la question druze, l’implication d’Israël dans ce dossier et le territoire contrôlé par Israël. Il est toutefois important de rappeler que la Turquie est également impliquée dans toutes ces questions. Ankara est devenu le protecteur d’Al-Charaa, avec la bénédiction de Washington et de Riyad.

Al-Charaa reçu par Ilham Aliyev, Monsieur BOAI (Bons offices auprès d'Israël)

La Turquie et Israël ont mis en place un mécanisme de coordination grâce à la médiation de l’Azerbaïdjan. Samedi, Bakou a également accueilli Al-Charaa, et « en marge » de cette visite, de hauts responsables syriens, dont le ministre des Affaires étrangères Asaad al-Shibani, ont rencontré des responsables israéliens. Néanmoins, le mécanisme de coordination vise uniquement à prévenir les affrontements « involontaires » entre les Forces de défense israéliennes (FDI) et les forces turques, et non à traiter les activités des FDI dans le sud de la Syrie.

La Turquie estime qu’Israël doit se retirer de tout le territoire syrien et revenir aux lignes établies dans l’accord de séparation des forces de 1974. Elle tente actuellement de convaincre l’administration usaméricaine d’adopter cette position et de persuader Al-Charaa de subordonner tout accord avec Israël à cette condition.

 

 

توري باتشيكو: المهاجرون يزرعون، و فوكس يحصد
Torre Pacheco : les migrants sèment, Vox récolte
Torre-Pacheco, los inmigrantes siembran la huerta y Vox recoge los frutos

 

Torre Pacheco : les migrants sèment, Vox récolte

La région de Murcie a offert à l'extrême droite sa première victoire électorale lors des élections générales de 2019. Son discours, plein de contradictions, repose sur trois piliers fondamentaux : l'agriculture, l'eau et l'immigration.

Murcie a été la première et la seule communauté autonome où Vox a remporté la victoire aux dernières élections générales de 2019. Le parti d'Abascal a obtenu près de 30 % des voix et a détrôné le PP. D'un côté, il se vante de défendre les campagnes et encourage les agriculteurs à irriguer sans contrôle. De l'autre, il établit un lien entre immigration et délinquance dans un discours plein de contradictions qui ne repose pas sur des données, mais sur la peur. Et la commune de Torre-Pacheco, en plein cœur de la campagne de Carthagène, en est le meilleur exemple.

Cette commune murcienne essentiellement agricole compte environ 36 000 habitants, dont près de 11 000 étrangers, soit 30 % de la population. La migration a commencé dans les années 80, lorsque le transfert d'eau du Tajo vers la Segura a été achevé et que l'agriculture à sec est devenue une agriculture d'irrigation. Nous avons tenté de comprendre la réalité locale et de connaître le discours du parti d'extrême droite, ses conséquences et ses contradictions dans une région où la tragédie écologique de la Mar Menor monopolise le débat politique.

توري باتشيكو: المهاجرون يزرعون، و فوكس يحصد

 منحت منطقة مورسيا اليمين المتطرف أول انتصار انتخابي له في الانتخابات العامة لعام 2019. ويستند خطابه، المليء بالتناقضات، إلى ثلاث ركائز أساسية: الزراعة والمياه والهجرة.

كانت مورسيا أول وحيدة منطقة ذات حكم ذاتي فاز فيها حزب فوكس في الانتخابات العامة الأخيرة التي جرت في عام 2019. حصل حزب أباسكال على ما يقرب من 30٪ من الأصوات وأطاح بحزب الشعب. من ناحية، يتباهى الحزب بالدفاع عن الريف ويشجع المزارعين على الري دون رقابة. من ناحية أخرى، يربط بين الهجرة والجريمة في خطاب مليء بالتناقضات لا يستند إلى بيانات، بل إلى الخوف. وتعد بلدة توري-باشكو، الواقعة في قلب ريف قرطاجنة، أفضل مثال على ذلك.

تضم هذه البلدية الريفية في مورسيا حوالي 36000 نسمة، منهم حوالي 11000 أجنبي، أي 30% من السكان. بدأت الهجرة في الثمانينيات، عندما اكتمل نقل المياه من نهر تاجو إلى نهر سيغورا وتحولت الزراعة البعلية إلى زراعة ري. حاولنا فهم الواقع المحلي والتعرف على خطاب الحزب اليميني المتطرف وعواقبه وتناقضاته في منطقة تحتكر فيها المأساة البيئية في مار مينور النقاش السياسي.