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25/09/2025

GERALDINA COLOTTI
Italie : la révolution bolivarienne et la Flottille de la liberté

Geraldina Colotti, Resumen Latinoamericano, 24/9/2025
Traduit par Tlaxcala

 


Dans le port d’Otrante, le drapeau vénézuélien flotte aux côtés des drapeaux palestiniens. Un jeune homme grimpe au mât du navire Ghassan Kanafani, dédié à l’un des écrivains palestiniens les plus importants du siècle dernier, journaliste et homme politique, assassiné à Beyrouth par une bombe placée dans sa voiture par le Mossad, le 8 juillet 1972. Il était une figure importante du Front populaire de libération de la Palestine. Aujourd’hui, le drapeau du Venezuela flotte au vent, aux côtés de celui de la Palestine. D’autres militants montent sur le pont, saluent le poing levé devant la caméra pour la campagne « Le Venezuela est un espoir, pas une menace », et crient à tue-tête : « Je m’engage avec Maduro, gringos go home ! » et « Palestine-Venezuela, un seul drapeau ».

Depuis la ville apulienne du Salento, située sur la côte adriatique et considérée comme le point le plus oriental de l’Italie, la Flottille de la liberté se prépare également à partir pour Gaza. « Il y a un équipage maritime, mais aussi un équipage terrestre, qui prépare le voyage et le suivra dans toutes ses phases », explique Schoukri Hroub, qui est ici le coordinateur logistique de l’Union démocratique arabe-palestinienne (UDAP).

La plupart des bateaux, réunis au sein de la Global Sumud Flotilla, ont pris la mer en direction de la ville martyre de Palestine, chargés d’aide humanitaire pour une population affamée et décimée par un génocide que personne ne parvient à arrêter. Global signifie que l’équipage provient de dizaines de pays, et « Sumud » est un mot arabe qui signifie « résilience » et « persévérance inébranlable », pour indiquer la détermination des militants à ne pas se laisser intimider par les menaces du criminel Netanyahou : menaces qui sont toutefois prises au sérieux, compte tenu de la liberté d’action que lui ont laissée ses maîtres occidentaux, en lui permettant d’étendre et de multiplier une occupation à des fins évidentes d’épuration ethnique et d’extermination, qui a maintenant atteint son paroxysme.

La « Sumud » a déjà reçu plus d’un drone d’avertissement et, au moment où nous écrivons ces lignes, il a de nouveau été attaqué. Certains députés de la gauche institutionnelle ont symboliquement occupé la salle du Parlement italieb pour demander au gouvernement d’extrême droite, grand sponsor du régime sioniste, de garantir la sécurité de la flottille sur laquelle des députés ont également embarqué.

Le ministre italien de la Défense a assuré avoir envoyé un navire de sauvetage, mais les conditions obligent les militants à abandonner l’aide à d’autres mains. Netanyahou avait déjà demandé aux navigants de remettre l’aide aux mains sanglantes de ses forces armées qui, a-t-il déclaré sans la moindre honte, la remettraient certainement aux Palestiniens. Proposition rejetée par les militants, unis dans cette affaire malgré la diversité de leurs appartenances.




Compte tenu de la situation, l’ambiance est également joyeuse, mais concentrée, dans le port d’Otrante. La Flottille de la liberté a déjà fait ses preuves sur le plan politique en tentant de briser le blocus naval de Gaza. Schoukri se souvient du prix payé le 31 mai 2010. À l’époque, les forces spéciales sionistes avaient attaqué le navire turc Mavi Marmara, qui faisait partie du convoi, dans les eaux internationales. L’opération, qui s’était déroulée à environ 120 km des côtes israéliennes, avait causé la mort de neuf militants et fait des dizaines de blessés, provoquant une vive réaction internationale et entraînant une crise diplomatique entre la Turquie et Israël.

À Otrante, la Flottille de la liberté bénéficie du soutien des différentes composantes territoriales, ainsi que des autorités ecclésiastiques et politiques, qui ont participé aux journées de rencontres, d’information et de débats en préparation du départ, avec des attitudes plus nuancées et des accents humanitaires.

« Nous avons une attitude inclusive et ouverte, la lutte doit s’intensifier car ce combat est mondial et concerne l’humanité tout entière, mais il n’y a aucune ambiguïté sur la nature du génocide et sur le modèle capitaliste qui le détermine dans sa férocité coloniale », déclare Boris Tremolizzo, l’un des coordinateurs.

C’est pourquoi, dans les deux débats centraux, le comité organisateur s’est efforcé d’inviter, outre les personnes qui luttent pour la défense du territoire – paysans, pêcheurs, précaires, étudiants, ouvriers, féministes et écologistes – également des représentants de Cuba et du Nicaragua (alors occupés à d’autres activités), et surtout du Venezuela, attaqué par l’impérialisme usaméricain, qui a envoyé sur les côtes des Caraïbes une flotte opposée à celle de la flottille de la paix, qui dénonce le génocide de Gaza.

Au nom de l’ambassadrice Marilyn Di Luca, Estalina Báez, première secrétaire de la mission diplomatique vénézuélienne auprès de la FAO, a participé aux deux débats – « La faim comme arme de guerre et outil de domination » et « De la Palestine au Venezuela en passant par l’Afrique, la guerre de l’impérialisme ne s’arrête pas » – et a reçu un accueil très favorable.

En compagnie de plusieurs médecins palestiniens, connectés à distance, Estalina a présenté avec précision les données, les initiatives et les dénonciations internationales présentées par le Venezuela pour accompagner les actions de paix entreprises par le président Maduro et le gouvernement bolivarien face à l’agression impérialiste de Donald Trump et Marco Rubio.

Elle a montré l’adhésion populaire résolue à la défense de la souveraineté du Venezuela, qui a impliqué tous les secteurs sociaux : des pêcheurs aux paysans, des ouvriers aux jeunes, avec les femmes productrices toujours en première ligne. Des personnes qui voient leur propre survie et leur travail menacés, comme cela a été le cas pour les pêcheurs, pris pour cible par les navires de guerre sous prétexte de lutter contre le trafic de drogue.

Trump, a-t-elle déclaré, bombarde les bateaux de pêche sans avertissement, ce qui fait que beaucoup ont peur de prendre la mer, ce qui compromet leurs activités de pêche habituelles, leur économie, et pourrait même menacer la souveraineté alimentaire du pays, en les empêchant de se procurer de la nourriture. Une fois de plus, a-t-elle ajouté, l’impérialisme utilise à nouveau l’alimentation comme une arme de guerre contre la révolution bolivarienne.

Le même mécanisme criminel est à l’œuvre contre la population de Gaza, à qui l’occupant empêche de se procurer de la nourriture sur ses propres côtes, en les prenant pour cible avec ses fusils. Que dirait, a-t-elle demandé à l’assistance, un pêcheur de ces côtes en signe de solidarité avec les pêcheurs vénézuéliens, attaqués comme ceux de Gaza ? Depuis le public, les comités territoriaux ont répondu sans hésiter : « Gringos go home ! » Et, dans la soirée, lors d’une réunion de paysans et d’écologistes avec la représentante diplomatique vénézuélienne, ils se sont déclarés prêts à impliquer dans cette lutte les pêcheurs des autres côtes et à organiser des jumelages avec les communes et les pêcheurs vénézuéliens.

« Nous défendrons toujours la souveraineté du Venezuela », a répété Schoukri Hroub, rappelant que la liberté de la Palestine a toujours été présente et la solidarité toujours active, tant au niveau international que populaire, de Chávez à Maduro.

Le Venezuela est un espoir, pas une menace. Mais pour l’impérialisme usaméricain et les gouvernements européens hypocrites qui le soutiennent, la véritable menace est celle de l’exemple, qui doit être enterré sous un voile de mensonges avec la complicité des médias hégémoniques qui ont cautionné les fausses informations du prétendu Cartel des Soleils, initialement pour calomnier le capitaine Diosdado Cabello, puis le président Maduro.

La menace que représente le socialisme bolivarien est celle d’avoir lancé un modèle alternatif au capitalisme dominant grâce auquel le Venezuela avait réussi à atteindre les premiers objectifs du millénaire de la FAO en deux fois moins de temps, et c’est pourquoi on a tenté de le bloquer et de l’étouffer par tous les moyens.

C’est pourquoi, comme à Gaza, l’impérialisme utilise la faim et l’alimentation comme arme de guerre. Mais sans succès, car, tout comme en Palestine, malgré les agressions et les « sanctions », le Venezuela a toujours répondu avec créativité, à commencer par la création des Clap, les comités locaux d’approvisionnement et de production, qui sont également des instruments d’auto-organisation sociale.

Aujourd’hui, le pays produit 90 % de ce qu’il consomme, et les données sur la croissance économique, illustrées ces derniers jours par la vice-présidente exécutive, Delcy Rodríguez, sont encore plus prometteuses. Une offense insupportable pour un impérialisme qui bafoue le droit international, comme nous le voyons avec le génocide en Palestine, mais qui a ainsi éveillé la conscience des peuples.



 


LA FLOTILLA GLOBAL SUMUD: Comprender el alcance de la resistencia ciudadana transnacional contra el genocidio
Llamado de los 57


Los diarios Le Monde y Libération se negaron a publicar este llamado. Fue publicado por el diario L’Humanité

Leer en inglés  The Global Sumud Flotilla: Grasping the Scope of a Transnational Citizens' Resistance


La guerra del Estado de Israel contra Gaza es una política de destrucción masiva, pero también una política de crueldad. Ya no se trata solo de producir discursos que califican a ciertas poblaciones de criminales, enemigos o «animales»; se trata de producir cadáveres.

El espectáculo del genocidio nos deja atónitos, pero la destrucción no es el final de todo: inicia nuevas formas de gobernar y, en todo el mundo, mucho más allá de Gaza, nuevos sujetos desvitalizados, atónitos, paralizados. Lo queramos o no, la escena se desarrolla entre tres: los asesinos, los asesinados y los espectadores.

Nosotros, los espectadores, nos convertimos en una población reducida a percibirse, con vergüenza y rabia, como impotente, atrapada en su punto más frágil: la sensibilidad ante lo obsceno, mezclada con el terror y la fascinación; y luego una progresiva desensibilización ante ese mismo espectáculo. Esta política de crueldad busca destruir la imaginación, encerrar la subjetividad en la abyección, impedir que podamos imaginar un futuro.

Apunta a nuestros vínculos, a nuestra capacidad de apego; aísla a los individuos, hace sospechoso cualquier movimiento de empatía e intimida cualquier crítica con amenazas tácitas, pero perfectamente claras. Crea un mundo en el que la pertenencia política se negocia en un consentimiento por defecto, un consentimiento por ausencia de reacción ante el sufrimiento exhibido. Un pacto implícito de gobierno.

“El valor anima al valor”

Este silencio adopta múltiples formas: statu quo institucional, justificación, terror bruto, repugnancia, confusión de responsabilidades (“¿quién hace qué y por qué?”), ambigüedad cognitiva —de la que la propaganda rusa ha hecho un arte (“¿qué importa si es verdad o no?”).

 No se trata solo de ocultar los crímenes y hacer invisible el sufrimiento. Lo que debe permanecer invisible, esta vez, es también nuestra reacción ante ese sufrimiento. Las pequeñas cobardías a las que nos acorralan y nos acostumbran: son precisamente ellas las que permiten el establecimiento del fascismo. La gran deseabilidad que generan el sentido, la dignidad y el valor es lo que asusta a los genocidas y a sus colaboradores: el hecho de que el valor fomenta el valor. Por supuesto, no solo existe Gaza en el mundo: la guerra destroza otros lugares y a muchas personas, a veces más, y con mayor indiferencia.

 Pero desde hace dos años, se nos muestra el espectáculo de la destrucción en Gaza al mismo tiempo que se nos pide que no lo nombremos, que no nos indignemos, que no reconozcamos nuestra responsabilidad como miembros de países occidentales que arman al Estado de Israel y avalan sus crímenes. Esta contradicción nos asfixia y nos amputa como sujetos, frente a Gaza, pero también frente al resto del mundo y de la vida.

 Por eso el silencio nos concierne. La Flotilla Global Sumud, formada por una cincuentena de barcos que hoy navegan hacia Gaza, responde directamente a este dispositivo. Denuncia alto y claro, en nombre del derecho internacional. Pero, sobre todo, actúa en otro registro: el del cuerpo.

 Al subir a un barco, al cruzar el mar, ellos y ellas, ciudadanos de todo el mundo, se toman el tiempo del cuerpo y se exponen al peligro de una travesía bajo la amenaza del ejército israelí. Según el derecho internacional, esta acción pacifista y humanitaria es totalmente legal. El peligro proviene únicamente de la impunidad concedida al gobierno israelí.

La flotilla, «una respuesta pacífica, humanitaria, transnacional y popular»

Sería fácil burlarnos de este gesto amateur. Mientras tanto, ponen en juego su vulnerabilidad para responder a la vulnerabilidad masacrada de otros. No se exhiben: ¡dan la vuelta al espectáculo! Oponen a la puesta en escena de la crueldad un contraespectáculo, en el que las personas no se reducen a su potencial devenir cadáver y a su ser espectadores mudos.

Van, actúan y nos recuerdan la posibilidad que siempre tenemos de levantarnos, a la escala minúscula de cada una de nuestras vidas. Porque responder con nuestros cuerpos a lo que se hace a otros cuerpos mantiene abierto el horizonte de un mundo común.

Esta obstinación resuena con otros gestos que, en los últimos años, han transformado el Mediterráneo en un escenario de resistencia. Mientras las fronteras de Europa se militarizan y se cierran, los ciudadanos del sur global las desafían lanzándose al mar, afirmando su derecho igualitario a un futuro, a una vida digna. Contra estas políticas migratorias mortíferas, ciudadanos europeos han fletado barcos de rescate.

Hoy, ciudadanos del sur y del norte se embarcan juntos en una flotilla financiada y organizada exclusivamente con donaciones privadas de todo el mundo, en amistad entre todas las religiones y creencias. No hay más salvados ni salvadores: solo personas que se arriesgan con sus cuerpos para romper el mecanismo de la crueldad. Su gesto se nutre del coraje de los habitantes de Gaza, que siguen en pie y que, entre el hambre y los bombardeos, organizan en el sur del enclave la solidaridad hacia quienes huyen una vez más de la ciudad de Gaza, completamente evacuada, «limpia» por el fuego.

Ante esta destrucción, ha surgido una respuesta pacifista, humanitaria, transnacional y popular en forma de flotilla. Se trata de una contrapolítica de la empatía, que se compromete en la relación de fuerzas en el terreno de lo sensible, afirmando que podemos rechazar la impotencia y la vergüenza, y que nuestros cuerpos pueden conectarse con los de Gaza, aprendiendo de su tradición de perseverancia como resistencia —el «sumud»— que ahora es una brújula global.

“La Flotilla Global Sumud rompe el estupor y da un nuevo impulso a la imaginación”

Sin embargo, esta acción solo tiene un débil eco en los medios de comunicación. Las salidas de los barcos rara vez se cuentan, o se reducen a iniciativas marginales, ingenuas, narcisistas y condenadas al fracaso. Como si se tratara de minimizar lo que, sin embargo, altera profundamente la lógica impuesta. “No cambiará nada. Se confiscarán los cargamentos y se detendrá a los participantes”.

Pero persistir en actuar a pesar de todo no es ingenuidad: este tipo de acción desenmascara la arquitectura del pacto de silencio. Apartarse de él, ridiculizarlo, calificarlo de utópico, es prolongar el estupor, situando lo razonable del lado de la impotencia. La posición de neutralidad es un material conductor de la crueldad. La Flotilla Global Sumud rompe el estupor y da un nuevo impulso a la imaginación. Es una expedición humanitaria, pero también genera un escenario político al que cada uno, en cada nivel y en cada lugar, puede decidir unirse.

Hay que proteger a estos ciudadanos embarcados en nombre de la dignidad humana, ante la incapacidad de nuestros gobiernos para actuar.

Puede firmar este texto en el siguiente enlace https://linktr.ee/ResistanceCitoyenneTransnat

Lista de los 57 firmantes :

Swann Arlaud (actor), Judith Butler (filósofa), Kaouter Ben Hania (directora), Carolina Bianchi (directora de escena y performer), François Chaignaud (coreógrafo), Grégoire Chamayou (filósofo), Antoine Chevrollier (director), Francesca Corona (directora artística), Angela Davis (filósofa), Virginie Despentes (escritora), Rokhaya Diallo (autora, directora), Alice Diop (directora), Mati Diop (directora), Penda Diouf (autora y directora), Elsa Dorlin (filósofa), Eva Doumbia (autora y directora de teatro), Dominique Eddé (escritora), Annie Ernaux (escritora), Sepideh Farsi (directora), Mame Fatou Niang (profesora universitaria), Hassen Ferhani (director), Hélène Frappat (escritora), Verónica Gago (filósofa), Joana Hadjithomas (artista, directora), Arthur Harari (director), Khalil Joreige (artista, director), Kiyemis (poeta), Ariane Labed (actriz y directora), Melissa Laveaux (autora y compositora), Aïssa Maïga (actriz, directora, guionista y productora), Guslagie Malanda (actriz), Chowra Makaremi (antropóloga del CNRS), Catherine Malabou (filósofa y profesora de filosofía en la Universidad de California en Irvine), Maguy Marin (coreógrafa), Phia Ménard (malabarista, intérprete, coreógrafa y directora), Noémie Merlant (actriz y directora), Dorothée Munyaneza (coreógrafa, bailarina y música), Marie NDiaye (escritora), Olivier Neveux (profesor de estudios teatrales en la ENS de Lyon), Rachid Ouramdame (coreógrafo), Verena Paravel (cineasta, antropóloga), Joel Pommerat (director de escena), Sephora Pondi (actriz), Paul Preciado (filósofo y escritor), Lia Rodrigues (coreógrafa), Elias Sanbar (escritor), Céline Sciamma (directora), Rita Laura Segato (antropóloga), Benjamin Seroussi (comisario), Adam Shatz (escritor), Maboula Soumahoro (Black History Month Association), Justine Triet (directora), Jasmine Trinca (actriz y directora), Virgil Vernier (director), Gisèle Vienne (coreógrafa, directora y artista), Eyal Weizman (director de Forensic Architecture) y Maud Wyler (actriz).

 

LA FLOTTILLE GLOBAL SUMUD: Prendre la mesure d’une résistance citoyenne transnationale contre le génocide
Appel des 57

Les quotidiens Le Monde et Libération ont refusé de publier cet appel. Il a été publié par le quotidien L’Humanité

Read in English  The Global Sumud Flotilla: Grasping the Scope of a Transnational Citizens' Resistance

 


La guerre de l’État d’Israël contre Gaza est une politique de destruction massive, mais aussi une politique de cruauté. Il ne s’agit plus seulement de produire des discours qui qualifient certaines populations de criminels, d’ennemisou d’“animaux ; il sagit de produire des cadavres.

Le spectacle du génocide nous sidère, mais la destruction n’est pas la fin de tout : elle initie de nouvelles façons de gouverner, et partout dans le monde, bien au-delà de Gaza, de nouveaux sujets dévitalisés, sidérés, paralysés. Qu’on le veuille ou non, la scène se joue à trois : les tueurs, les tués, et les spectateurs.

Nous autres, spectateurs, devenons une population réduite à se percevoir, dans la honte et la rage, comme impuissante – prise en son point le plus fragile : la sensibilité à l’obscène, mêlée d’effroi et de fascination; puis une désensibilisation progressive à ce même spectacle. Cette politique de la cruauté cherche à détruire limaginaire, à enfermer la subjectivité dans labjection, à ne plus pouvoir envisager un futur.

Elle vise nos liens, notre capacité d’attachement; elle isole les individus, rend suspect tout mouvement dempathie, et intimide toute critique par des menaces tacites mais parfaitement claires. Elle créée un monde où lappartenance politique se négocie dans un consentement par défaut un consentement par absence de réaction à la souffrance exhibée. Un pacte implicite de gouvernement.

« Le courage encourage le courage »

Ce silence a de multiples formes : statu quo institutionnel, justification, terreur brute, dégoût, brouillage des responsabilités («qui fait quoi, et pourquoi ?»), flou cognitif dont la propagande russe a fait un art («quelle importance que ce soit vrai ou non ?»). Il ne sagit pas seulement de cacher les crimes et de rendre la souffrance invisible.

Ce qui doit rester invisible, cette fois, c’est aussi notre réaction à cette souffrance. Les petites lâchetés auxquelles on nous accule et on nous habitue : ce sont précisément elles qui permettent la mise en place du fascisme. La grande désirabilité que génèrent le sens, la dignité et le courage, c’est cela qui effraie les génocidaires et leurs collaborateurs : le fait que le courage encourage le courage.

Bien sûr il n’y a pas que Gaza dans le monde: la guerre déchiquète ailleurs et beaucoup plus parfois, et dans une plus grande indifférence. Mais depuis deux ans, le spectacle de la destruction à Gaza nous est montré en même temps quon nous demande de ne pas le nommer, ni nous en indigner, ni y reconnaître notre responsabilité en tant que membre de pays occidentaux qui arment lEtat dIsraël et cautionnent ses crimes. Cette contradiction nous asphyxie et nous ampute comme sujets face à Gaza mais aussi face à tout le reste du monde et de la vie. C’est pourquoi le silence nous regarde.

La Flottille Global Sumud, constituée d’une cinquantaine de bateaux aujourd’hui en mer vers Gaza, répond directement à ce dispositif. Elle dénonce haut et clair,au nom du droit international. Mais surtout, elle agit dans un autre registre : celui du corps. En montant sur un bateau, en franchissant la mer, ils et elles, citoyens du monde entier, prennent le temps du corps et sexposent au danger dune traversée sous la menace de larmée israélienne. Selon le droit international, cette action pacifiste et humanitaire est tout à fait légale. Le danger vient de la seule impunité octroyée au gouvernement Israélien.

La flottille, « une riposte pacifiste, humanitaire, transnationale et populaire »

Nous aurions beau jeu de nous moquer du geste, amateur. En attendant, ils mettent en jeu leur vulnérabilité pour répondre à la vulnérabilité massacrée d’autrui. Ils ne se donnent pas en spectacle: ils retournent le spectacle! Ils opposent à la mise en scène de la cruauté un contre-spectacle, où les gens ne sont pas réduits à leur devenir-cadavre potentiel et leur être-spectateurs muets.

Ils vont, ils font, et rappellent la possibilité qui nous est toujours donnée de nous lever, à l’échelle minuscule de chacune de nos vies. Car répondre par des corps à ce qui est fait à d’autres corps garde ouvert l’horizon d’un monde commun. 

Cette obstination résonne avec d’autres gestes qui, ces dernières années, ont transformé la Méditerranée en scène de résistance. Alors que les frontières de l’Europe se militarisent et se ferment, des citoyens du sud global les bravent en prenant la mer, affirmant leur droit égal à un futur, à une vie digne. Contre ces politiques migratoires mortifères, des citoyens européens ont affrété des bateaux de sauvetage.

Aujourd’hui, citoyens du sud et du nord embarquent ensemble dans une flottille exclusivement financée et organisée par des dons privés à travers le monde, en amitié entre toutes les religions et les croyances. Plus de sauvés ni de sauveurs : seulement des gens qui y vont de leurs corps pour briser le mécanisme de la cruauté. Leur geste se nourrit du courage des habitants de Gaza, toujours debout et qui, dans la faim et les bombardements, organisent au sud de l’enclave la solidarité envers ceux qui fuient encore une fois Gaza City, entièrement évacuée, «nettoyée» dans le feu.

Face à cette destruction, une riposte pacifiste, humanitaire, transnationale et populaire a grossi sous la forme de la flottille. C’est une contre-politique de l’empathie, qui s’engage dans le rapport de force sur le terrain du sensible, en affirmant que nous pouvons refuser l’impuissance et la honte, et que nos corps peuvent se relier à ceux de Gaza, en apprenant de leur tradition de persévérance comme résistance le «sumud» désormais boussole globale.

« La Flottille Global Sumud brise la sidération et redonne souffle à l’imaginaire »

Or cette action ne trouve qu’un faible écho médiatique. Les départs de bateaux sont rarement racontés, ou alors réduits à des initiatives marginales, naïves, narcissiques, vouées à l’échec. Comme si l’on cherchait à minorer ce qui déplace pourtant profondément la logique imposée. «Cela ne changera rien. Les cargaisons seront confisquées, les participants seront arrêtés »

Mais persister à agir malgré tout n’est pas de la naïveté: ce type daction démasque larchitecture du pacte du silence. Sen détourner, le ridiculiser, le qualifier dutopique, cest prolonger la sidération en plaçant le raisonnable du côté de limpuissance. La position de neutralité est un matériau conducteur de la cruauté. La Flottille Global Sumud brise la sidération et redonne souffle à l’imaginaire. C’est une expédition humanitaire, mais elle produit aussi une scène politique – que chacun et chacune peut, à chaque niveau et à chaque place, choisir de rejoindre.

Il faut protéger ces citoyens et citoyennes embarqués au nom de la dignité humaine, face à la faillite de nos gouvernements à agir. 

Vous pouvez signer cette tribune sur le lien suivant

Liste des 57 signataires :

Swann Arlaud (Comédien), Judith Butler (Philosophe), Kaouter Ben Hania (Réalisatrice), Carolina Bianchi (Metteuse en scène et performeuse) François Chaignaud (Chorégraphe), Grégoire Chamayou (Philosophe), Antoine Chevrollier (Réalisateur), Francesca Corona (Directrice artistique), Angela Davis (Philosophe), Virginie Despentes (Ecrivaine), Rokhaya Diallo(Autrice, réalisatrice), Alice Diop (Réalisatrice), Mati Diop (Réalisatrice), Penda Diouf (Autrice metteur en scène), Elsa Dorlin (Philosophe), Eva Doumbia (Autrice metteur en scène), Dominique Eddé (Ecrivaine), Annie Ernaux (Ecrivaine), Sepideh Farsi (Réalisatrice), Mame Fatou Niang (Professeur des universités), HassenFerhani (Réalisateur), Hélène Frappat (Ecrivaine), Verónica Gago (Philosophe), Joana Hadjithomas (Artiste, réalisatrice), Arthur Harari (Réalisateur), Khalil Joreige (Artiste, réalisateur), Kiyemis (Poète), Ariane Labed (Actrice et réalisatrice), Melissa Laveaux (Autrice, compositrice), Aïssa Maïga (Actrice, réalisatrice, scénariste, productrice), Guslagie Malanda (Comédienne), Chowra Makaremi (Anthropologue au CNRS), Catherine Malabou (Philosophe et professeure de philosophie à l’Université de Californie à Irvine)Maguy Marin (Chorégraphe), Phia Ménard (Jongleuse, performeuse, chorégrapheet metteuse en scène), Noémie Merlant (Actrice et réalisatrice), Dorothée Munyaneza (chorégraphe, danseuse et musicienne), Marie NDiaye (Ecrivaine), Olivier Neveux (Professeur d’études théâtrales à l’ENS de Lyon), Rachid Ouramdame (Chorégraphe), Verena Paravel(Cinéaste, anthropologue), Joel Pommerat (Metteur en scène), Sephora Pondi (Comédienne), Paul Preciado (Philosophe et écrivain)Lia Rodrigues (Chorégraphe), Elias Sanbar (Ecrivain), Céline Sciamma (Réalisatrice)Rita Laura Segato (Anthropologue), Benjamin Seroussi (Commissaire), Adam Shatz (écrivain), Maboula Soumahoro (Black History Month Association), Justine Triet (Réalisatrice), Jasmine Trinca (Actrice et réalisatrice), Virgil Vernier (Réalisateur), Gisèle Vienne (chorégraphe – metteur en scène et artiste), Eyal Weizman (directeur de Forensic Architecture), Maud Wyler (Comédienne).

 

AMEER MAKHOUL
La reunión tripartita USA-Israel-Siria y el acuerdo de seguridad


Ameer Makhoul, Progress Center for Policies, 24/9/2025

Traducido por Tlaxcala


Introducción

Según los medios de comunicación israelíes, el acuerdo de seguridad entre Israel y Siria, que la administración Trump desea firmar el 29 de septiembre de 2025 al margen de la Asamblea General de las Naciones Unidas, será objeto de una reunión tripartita entre Trump, Netanyahu y Charaa.

El 22 de este mes se celebró una reunión preparatoria entre el ministro de Asuntos Exteriores sirio y el ministro de Asuntos Estratégicos israelí. Los medios de comunicación israelíes, citando a Independent Arabia Saudi, indicaron que la administración Trump estaba presionando a Netanyahu para que convocara la reunión tripartita en esa fecha.

Notas

En su discurso del 23 de septiembre ante la Asamblea General, Trump afirmó haber resuelto siete conflictos armados, lo que no es del todo exacto, y argumentó que eso lo hacía merecedor del Premio Nobel de la Paz. Al mismo tiempo, Tom Barrack, embajador de USA en Turquía y enviado especial para los asuntos sirios y libaneses, declaró que la paz en la región estaba lejos de ser un hecho y era poco probable, y que los acuerdos de seguridad no duraban. En una larga entrevista concedida a Sky News, subrayó que USA no libraría las guerras de otros, un principio firmemente arraigado en la doctrina de Trump. Sin embargo, Trump presentó el acuerdo de seguridad entre Israel y Siria como el «octavo conflicto» que había resuelto.

En la realidad siria, en medio de las rivalidades regionales e internacionales, Israel no está interesado en la normalización, mientras que Turquía se opone firmemente a cualquier posibilidad de que el régimen sirio se sume a los acuerdos de Abraham, dada su alianza de seguridad con Israel. Desde el punto de vista usamericano, el acuerdo de seguridad podría evolucionar hacia una solución política global y una paz duradera. Pero Washington tiene claro que Israel no se retirará de Siria, ni del monte Hermón, ni, por supuesto, de los Altos del Golán, ocupados en 1967 y anexionados en virtud de la legislación israelí.

En la misma entrevista, Barrack subrayó que Israel no se retirará de las cinco posiciones que ocupa en el Líbano desde la última guerra, y añadió que la derrota de Hezbolá es tarea del ejército libanés, al que describió como «mayoritariamente suní», frente al partido chií. Consideraba que la composición sectaria del ejército era un factor clave para desarmar a Hezbolá, basándose en la identidad y la doctrina. Este enfoque se ajusta a la cláusula del acuerdo que impide a Irán utilizar el territorio sirio, mientras que Israel y USA subrayan el carácter sectario del ejército sirio. De hecho, atribuye al régimen sirio un papel funcional en los asuntos internos del Líbano para garantizar resultados favorables a Israel y USA.

La administración usamericana sigue una doctrina de «diplomacia respaldada por la fuerza». Como evita librar las guerras de otros en la región, amenaza tanto a Siria como al Líbano con la fuerza militar israelí, dejándolos bajo el peso de la intervención israelí, llevada a cabo casi exclusivamente por la Fuerza Aérea israelí.

Israel parece dispuesto a mostrar flexibilidad en lo que respecta al uso del espacio aéreo sirio, limitándolo exclusivamente a ataques contra Irán o a la prevención de transferencias de armas. También busca imponer un equilibrio con Turquía en Siria, con el objetivo de compartir el poder según las condiciones israelíes. Esta “flexibilidad”, según Washington, es posible porque Israel posee capacidades estratégicas que compensan las concesiones. No obstante, Israel no abandonará su doctrina de larga data con el antiguo régimen sirio, es decir, la estrategia de “guerra entre guerras”, que consiste en atacar de forma preventiva cualquier capacidad emergente antes de que provoque un enfrentamiento a gran escala.

Otra condición del acuerdo es la prohibición de transferir armas pesadas sirias al sur de Damasco. También incluye un acuerdo, conforme a las condiciones israelíes, que exige al régimen sirio integrar a los “grupos minoritarios” —en particular, los drusos y los kurdos, tal y como los define Israel— en el sistema político, así como un acuerdo especial para la región de Suwayda. Según los medios de comunicación israelíes, Israel financiaría a unos 3000 combatientes en Suwayda mediante ayuda militar y estaría detrás del despliegue de banderas israelíes y de los llamamientos a la secesión y la autodeterminación lanzados por algunos círculos drusos sirios.

Sobre esta cuestión, Israel no logra alcanzar un consenso interno. Algunos afirman que impulsar el separatismo druso podría complicar la situación de Israel a largo plazo, ya que sus obligaciones se refieren a sus ciudadanos drusos, y no a los ciudadanos sirios. Otro punto de vista sugiere que Israel debería profundizar en las identidades fragmentadas de Siria, en particular entre los drusos y los kurdos, para servir a sus intereses políticos, incluso si eso significa ceder su alianza con las FDS a Turquía en el noreste de Siria, al tiempo que mantiene su influencia en Suwayda en el marco de un reparto del poder aprobado por Turquía.

Conclusión

Israel, con el apoyo de USA, aprovecha la debilidad interna del régimen sirio y su búsqueda de legitimidad internacional para imponer un acuerdo de seguridad que se ajuste totalmente a sus condiciones, en particular el mantenimiento de su ocupación y la consolidación de su influencia en Siria.

Israel sigue una estrategia destinada a evitar una guerra directa con Turquía, imponiendo en su lugar un reparto del poder en Siria.

El acuerdo de seguridad tripartito —Trump, Netanyahu y Sharaa— que se firmará en Nueva York el 29 de septiembre otorga a Israel una influencia sin precedentes en materia de seguridad en Siria, con el respaldo de la comunidad internacional.

Este acuerdo sirve para reducir la influencia francesa en los asuntos sirios y libaneses.

Si bien puede aportar cierta estabilidad al régimen sirio, lo hace en detrimento de la soberanía nacional, lo que lo convierte en mucho más que un simple acuerdo de “seguridad”.

 

 

24/09/2025

AMEER MAKHOUL
La réunion tripartite USA-Israël-Syrie et l’accord de sécurité

Ameer Makhoul, Progress Center for Policies, 24/9/2025

 اللقاء الثلاثي الامريكي الاسرائيلي السوري والاتفاق الأمني

Traduit par Tlaxcala

 


Introduction

Selon les médias israéliens, l’accord de sécurité entre Israël et la Syrie, que l’administration Trump souhaite signer le 29 septembre 2025 en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, fera l’objet d’une réunion tripartite réunissant Trump, Netanyahu et Charaa.

Une réunion préparatoire a eu lieu le 22 de ce mois entre le ministre syrien des Affaires étrangères et le ministre israélien des Affaires stratégiques. Les médias israéliens, citant Independent Arabia Saudi, ont indiqué que l’administration Trump faisait pression sur Netanyahou pour qu’il convoque la réunion tripartite à cette date.

Notes

Dans son discours du 23 septembre devant l’Assemblée générale, Trump a affirmé avoir résolu sept conflits armés, ce qui n’est pas tout à fait exact, et a fait valoir que cela le qualifiait pour le prix Nobel de la paix. Parallèlement, Tom Barrack, ambassadeur des USA en Turquie et envoyé spécial pour les dossiers syrien et libanais, a déclaré que la paix dans la région était loin d’être acquise et peu probable, et que les accords de sécurité ne durent pas. Dans une longue interview accordée à Sky News, il a souligné que les USA ne mèneraient pas les guerres des autres, un principe fermement ancré dans la doctrine de Trump. Pourtant, Trump a présenté l’accord de sécurité israélo-syrien comme le « huitième conflit » qu’il a résolu.

Dans la réalité syrienne, au milieu des rivalités régionales et internationales, Israël n’est pas intéressé par la normalisation, tandis que la Turquie s’oppose fermement à toute possibilité que le régime syrien rejoigne les accords d’Abraham, compte tenu de son alliance sécuritaire avec Israël. Du point de vue usaméricain, l’accord de sécurité pourrait évoluer vers un règlement politique global et une paix durable. Mais Washington est clair sur le fait qu’Israël ne se retirera pas de Syrie, ni du mont Hermon, ni, bien sûr, du plateau du Golan, occupé en 1967 et annexé en vertu de la loi israélienne.

Dans la même interview, Barrack a souligné qu’Israël ne se retirera pas des cinq positions qu’il occupe au Liban depuis la dernière guerre, ajoutant que la défaite du Hezbollah est la tâche de l’armée libanaise, qu’il a décrite comme « majoritairement sunnite », face au parti chiite. Il considérait la composition sectaire de l’armée comme un facteur clé pour désarmer le Hezbollah, sur la base de l’identité et de la doctrine. Cette approche s’aligne sur la clause de l’accord empêchant l’Iran d’utiliser le territoire syrien, tandis qu’Israël et les USA soulignent le caractère sectaire de l’armée syrienne. Elle attribue en effet au régime syrien un rôle fonctionnel dans les affaires intérieures du Liban afin de garantir des résultats favorables à Israël et aux USA.

L’administration usaméricaine suit une doctrine de « diplomatie soutenue par la force ». Comme elle évite de mener les guerres des autres dans la région, elle menace à la fois la Syrie et le Liban avec la force militaire israélienne, les laissant sous le poids de l’intervention israélienne, menée presque exclusivement par l’armée de l’air israélienne.

Israël semble disposé à faire preuve de souplesse en ce qui concerne l’utilisation de l’espace aérien syrien, en la limitant exclusivement à des frappes contre l’Iran ou à la prévention de transferts d’armes. Elle cherche également à imposer un équilibre avec la Turquie en Syrie, en visant un partage du pouvoir selon les conditions israéliennes. Cette « flexibilité », selon Washington, est possible parce qu’Israël possède des capacités stratégiques qui compensent les concessions. Néanmoins, Israël n’abandonnera pas sa doctrine de longue date avec l’ancien régime syrien, à savoir la stratégie de « guerre entre les guerres », qui consiste à frapper de manière préventive toute capacité émergente avant qu’elle ne provoque une confrontation à grande échelle.

Une autre condition de l’accord est l’interdiction du transfert d’armes lourdes syriennes au sud de Damas. Il comprend également un accord, conforme aux conditions israéliennes, exigeant du régime syrien qu’il intègre les « groupes minoritaires » – en particulier les Druzes et les Kurdes, tels que les définit Israël – dans le système politique, ainsi qu’un arrangement spécial pour la région de Soueïda. Selon les médias israéliens, Israël financerait environ 3 000 combattants à Soueïda par le biais d’une aide militaire et serait à l’origine du déploiement de drapeaux israéliens et des appels à la sécession et à l’autodétermination lancés par certains cercles druzes syriens.

Sur cette question, Israël ne parvient pas à trouver un consensus interne. Certains affirment que pousser au séparatisme druze pourrait compliquer la situation d’Israël à long terme, car ses obligations concernent ses citoyens druzes, et non les citoyens syriens. Un autre point de vue suggère qu’Israël devrait plutôt approfondir les identités fragmentées de la Syrie, en particulier parmi les Druzes et les Kurdes, afin de servir ses intérêts politiques, même si cela signifie céder son alliance avec les FDS à la Turquie dans le nord-est de la Syrie, tout en conservant son influence à Soueïda dans le cadre d’un partage du pouvoir approuvé par la Turquie.

 

Conclusion

Israël, soutenu par les USA, exploite la faiblesse interne du régime syrien et sa quête de légitimité internationale pour imposer un accord de sécurité entièrement conforme à ses conditions, notamment le maintien de son occupation et la consolidation de son influence en Syrie.

Israël poursuit une stratégie visant à éviter une guerre directe avec la Turquie, en imposant plutôt un partage du pouvoir en Syrie.

L’accord de sécurité tripartite — Trump, Netanyahou et Sharaa — à conclure à New York le 29 septembre accorde à Israël une influence sans précédent en matière de sécurité en Syrie, avec l’aval de la communauté internationale.

Cet accord sert à réduire l’influence française dans les dossiers syrien et libanais.

S’il peut apporter une certaine stabilité au régime syrien, il se fait au détriment de la souveraineté nationale, ce qui en fait bien plus qu’un simple accord de « sécurité ».

CHAIM LEVINSON
Plus isolé que jamais, Netanyahou va tenter de persuader Trump de tenir bon pour remporter la victoire à Gaza

L’Assemblée générale des Nations unies a démenti le grand mensonge de Netanyahu et montré que, contrairement à ce qu’il affirme, les États arabes, les USA et d’autres pays occidentaux souhaitent tous que le Hamas soit écarté. Trump doit désormais décider quelle voie permettra d’y parvenir le plus rapidement : un accord imposé à Israël ou la conquête de la ville de Gaza.

Chaim Levinson, Haaretz, 24/9/2025
Traduit par Tlaxcala

Le Premier ministre Benjamin Netanyahou se rendra mercredi soir à une fête qui est déjà terminée. Tous les invités importants sont partis, et il arrive en même temps que l’équipe de nettoyage venue balayer les confettis. Vendredi, jour de son discours, aucun dirigeant mondial important ne sera en ville pour le rencontrer.

Il est seul, plus isolé que jamais, accroché au bord de la falaise, avec seulement la main de Donald Trump pour l’empêcher de tomber.

Paresh Nath

La 80e Assemblée générale des Nations unies a peut-être été la plus dure à l’égard d’Israël. Netanyahu, qui s’est présenté pendant des années comme un génie diplomatique, qui a méprisé tous ceux qui n’étaient pas d’accord avec lui, qui a ignoré tous les avertissements sur la détérioration de la situation en Israël, est resté chez lui à regarder la télévision tandis que ceux qu’il considérait autrefois comme ses alliés lui tournaient le dos.

L’initiative franco-saoudienne visant à reconnaître l’État palestinien prend de l’ampleur, même si elle n’a pas de poids pratique immédiat. La réunion à huis clos entre les dirigeants arabes et musulmans et Trump au siège de l’ONU, au cours de laquelle ils ont discuté de Gaza, a été beaucoup plus significative.

Parmi les participants figuraient l’émir du Qatar et le président turc. Leur objectif : persuader Trump qu’une fin immédiate de la guerre était possible – les États arabes prendraient le contrôle de Gaza, la reconstruiraient et écarteraient le Hamas.

Il est frappant de constater que presque aucun détail de cette réunion n’a filtré dans les médias arabes. Un responsable qatari qui s’est entretenu avec Haaretz a refusé de révéler ce qui avait été dit, mais son ton suggérait une certaine satisfaction. Israël, notamment, n’avait pas été invité – et ce n’était pas à cause de Rosh Hashanah, le nouvel an juif.

Lundi, ce sera au tour de Netanyahou de rencontrer Trump à la Maison Blanche. Son discours de vendredi sera destiné à la consommation intérieure, comme d’habitude. Il répétera ses « cinq conditions » pour mettre fin à la guerre à Gaza, mais les véritables décisions seront prises à Washington.

« Trump est fortement influencé par la dernière personne qui se trouve dans la pièce avec lui », a déclaré l’un des confidents du président à Haaretz. « Netanyahou entendra de sa bouche tout ce qu’il a entendu des dirigeants arabes. »

Pendant ce temps, l’envoyé spécial Steve Witkoff, qui était également présent à New York, s’efforce de sauver le « plan Witkoff » : la libération de dix otages, un cessez-le-feu et la garantie par Trump de la fin de la guerre.

Witkoff est depuis longtemps proche de la famille régnante qatarie Al-Thani. Depuis la tentative d’assassinat ratée d’Israël contre les dirigeants du Hamas, le Qatar a coupé tout contact direct avec Israël, mais continue de négocier avec Washington.

Son espoir est de conclure un accord avec les USAméricains qui forcerait Israël à céder. Ces derniers jours, Witkoff et le Premier ministre qatari Mohammed Al-Thani ont bricolé une nouvelle lettre du Hamas proposant la libération de dix otages.

Il n’est pas certain que Witkoff parvienne à convaincre Trump, ni que Netanyahou l’emporte.

L’objectif de Netanyahou est de convaincre Trump d’attendre encore un peu, en lui faisant croire que la prise imminente de la ville de Gaza va transformer la guerre. Il montre à des journalistes amis des rapports des services de renseignement – des rapports soigneusement sélectionnés, bien sûr – qui soulignent la crainte du Hamas face à la conquête imminente de la ville. Selon lui, il ne faut plus que quelques mois, puis soit la victoire sera remportée, soit la prochaine stratégie sera prête.

Trump l’a soutenu jusqu’à présent, et Netanyahou veut plus de temps face aux pressions croissantes.

Au cœur du dilemme de Trump se trouve une question simple : qu’est-ce qui permettra de renverser le Hamas plus rapidement : un accord imposé à Israël, avec l’intervention des États arabes pour mettre fin à la guerre, ou la conquête de la ville de Gaza ?

La grande supercherie de Netanyahou est le mythe selon lequel il est le seul à vouloir se débarrasser du Hamas. La réunion de l’ONU de cette semaine a souligné un consensus qui existe depuis deux ans et que Netanyahou s’est efforcé de minimiser : les États arabes, les USA et l’Occident veulent tous que le Hamas soit renversé et remplacé par un gouvernement civil normal [sic].

Huit mois après son entrée en fonction, Trump reste difficile à cerner. Son discours à l’ONU était parfois incohérent, à l’image des divagations des complotistes antivaxx sur Facebook. Pourtant, à certains moments, il se montre vif et saisit clairement la dynamique.

Quel Trump Netanyahou rencontrera-t-il lundi : le tonton maboul à la table de Rosh Hashanah ou l’homme d’affaires qui sait flairer le mensonge ? Nous le saurons lundi.