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26/08/2025

EMMA LUCIA LLANO
Les médias occidentaux ont fabriqué un consensus autour du meurtre de journalistes palestiniens par Israël

 Emma Lucia Llano, FAIR, 22/8/2025
Traduit par Tlaxcala

 Image : Lyna Al Tabal

L’assassinat ciblé par Israël de six membres des médias palestiniens dans la bande de Gaza le 10 août a provoqué une onde de choc dans la communauté journalistique. Bien que l’assassinat de journalistes ait été un outil commun du gouvernement israélien pour la suppression des informations provenant de Gaza, la perte d’Anas al-Sharif, journaliste à Al Jazeera, a été particulièrement douloureuse.

Beaucoup d’entre nous ont été émus par le reportage poignant d’al-Sharif, en le regardant enlever son gilet de presse, soulagé lorsqu’un cessez-le-feu a été annoncé (19/01/2025), jusqu’à voir un al-Sharif languissant rendre compte de la famine (21/7/2025) alors que les gens s’évanouissaient autour de lui. « Continue, Anas, ne t’arrête pas », dit une voix hors caméra. Tu es notre voix. »


Dans son dernier reportage pour Al Jazeera (10/8/2025), le journaliste Anas al-Sharif a rapporté : « Au cours des deux dernières heures, l’agression israélienne sur la ville de Gaza s’est intensifiée. »
 

Trois des victimes étaient des collègues d’Al-Sharif à Al Jazeera, l’un des rares médias à avoir pu maintenir ses journalistes à Gaza malgré le blocus israélien. Alors que des millions de personnes à travers le monde pleuraient non seulement al-Sharif, mais aussi ses collègues Mohammed Qreiqeh, Mohammed Noufal et Ibrahim Zaher, ainsi que les pigistes Moamen Aliwa et Mohammad al-Khaldi, nous étions également très préoccupés par le vide créé par leurs meurtres dans la couverture médiatique sur le terrain du génocide.

Les médias traditionnels ont toutefois utilisé les meurtres de ces journalistes courageux comme une occasion de continuer à répéter les mêmes arguments sionistes qui ont contribué à fabriquer le consentement pour leurs assassinats. FAIR a examiné la couverture initiale de ces assassinats par 15 médias différents : le New York Times, le Los Angeles Times, le Washington Post, le Wall Street Journal, le Financial Times, ABC, CBS, NBC, CNN, Fox, BBC, Politico, Newsweek, Associated Press et Reuters.

Nous avons constaté qu’ils se concentraient principalement sur le discours israélien, tentaient de délégitimer les sources propalestiniennes et ne parvenaient pas à replacer les meurtres dans le contexte plus large du génocide.


 Donner la priorité au prétexte d’Israël

Tous les articles mentionnaient l’allégation d’Israël selon laquelle al-Sharif était un membre du Hamas se faisant passer pour un journaliste, une affirmation que le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), l’Association de la presse étrangère et l’Organisation des Nations Unies ont toutes été jugées sans fondement.

Fox News (11/8/2025) a été le plus loin dans son adhésion au discours « terroriste » d’Israël.

 Quatre des 15 articles (New York Times, 11/8/2025; NBC, 10/8/2025; Fox, 11/8/2025; Wall Street Journal, 11/8/2025) ont mentionné ces allégations dans leur titre ou leur sous-titre. « Israël tue des journalistes d’Al Jazeera lors d’une frappe aérienne, affirmant que l’un d’eux travaillait pour le Hamas », titrait NBC, avec en sous-titre la calomnie israélienne selon laquelle al-Sharif « se faisait passer pour un journaliste ». Fox a proposé « Israël affirme que le journaliste d’Al Jazeera tué dans un raid aérien était le chef d’une « cellule terroriste » du Hamas ».

Le titre original de Reuters(11/8/2025) était « Israël tue un journaliste d’Al Jazeera qu’il qualifie de chef du Hamas », avant d’être modifié en « Une frappe israélienne tue des journalistes d’Al Jazeera à Gaza ».

Al-Sharif avait été pris pour cible et calomnié par les Forces de défense israéliennes pendant des mois avant son assassinat, et avait rédigé une déclaration en prévision de son assassinat. « Si ces mots vous parviennent, sachez qu’Israël a réussi à me tuer et à faire taire ma voix », a-t-il écrit. Il a demandé au monde entier de continuer à se battre pour la justice en Palestine : « N’oubliez pas Gaza. »

Six des articles (ABC, 11//8/2025; BBC, 11/8 /2025; New York Times, 11/8/2025; NBC,10/8/2025; Fox, 11/8/2025; Wall Street Journal, 11/8/2025) ont complètement omis toute référence ou citation de la dernière déclaration d’al-Sharif. Parmi ces six articles, le New York Times, la BBC, NBC et Fox ont inclus des citations de représentants du gouvernement israélien, choisissant de manière déconcertante de donner la priorité aux voix des assassins d’al-Sharif plutôt qu’à la sienne.

Le New York Times (10/8/2025) a donné au gouvernement israélien toute latitude pour salir la réputation d’un des journalistes qu’il venait d’assassiner, affirmant qu’il était « le chef d’une cellule terroriste » et « responsable d’avoir encouragé les attaques à la roquette contre des civils israéliens ».

Les articles du Wall Street Journal et du New York Times ont consacré la plus grande partie de leur espace à promouvoir le prétexte avancé par Israël pour justifier ces assassinats. Anat Peled, du WS Journal, a consacré les trois premiers paragraphes de son article à détailler la prétendue affiliation d’al-Sharif au Hamas. Ephrat Livni, du Times, a également consacré trois paragraphes à ces fausses allégations, ne laissant qu’un seul paragraphe à la réfutation d’Al Jazeera et du CPJ.

Tous les articles sauf ceux du New York Times (25/10/2008) et Fox (25/11/2008) ont cité le nombre historiquement élevé de journalistes palestiniens tués depuis le 7 octobre 2023. Le bilan s’élève actuellement à192, selon le CPJ [entretemps, il est monté à 219, NdT]. Cependant, seuls quatre articles (ABC, 11/8/2025; CNN, 10/8/2025; Politico,11/8/2025 ; Wall Street Journal, 11/8/2025) ont désigné Israël comme le principal responsable de ces meurtres. Plus généralement, l’agence AP (11/8/2025) a écrit qu’« au moins 192 journalistes ont été tués depuis le début de la guerre d’Israël à Gaza », sans mentionner l’identité de ces journalistes ni celle de leurs assassins.

Six (ABC, BBC, Newsweek, Fox,CBS, Wall Street Journal, LA Times) des 15 articles ne mentionnaient pas le Premier ministre Benjamin Netanyahu, et aucun ne mentionnait le mandat d’arrêt  de la Cour pénale internationale contre lui pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, notamment pour meurtre et pour avoir intentionnellement dirigé des attaques contre une population civile.

Il est important de noter que seuls deux articles (Wall Street Journal,11/8/2025; Washington Post, 11/8/2025) ont même souligné le fait que les cinq autres journalistes tués n’avaient pas été accusés d’appartenir au Hamas. En omettant cette information, les autres médias ont accepté et relayé auprès de leur public la prémisse israélienne selon laquelle il est légitime de tuer un nombre indéfini de passants pour atteindre un membre présumé du Hamas.


Décrivant l’attaque du 7 octobre 2023 comme contexte du meurtre de journalistes, NBC (10/8/2025) précisait que « bon nombre des cibles de ces attaques étaient des civils, notamment des personnes assistant à un festival de musique ». En revanche, les Palestiniens tués par la suite par Israël étaient simplement décrits comme « des personnes [...] dans l’enclave contrôlée par le Hamas ».

 Qualificatifs inutiles

Une pratique courante des médias occidentaux consiste à utiliser des qualificatifs inutiles pour délégitimer les informations provenant de sources palestiniennes. La couverture de l’assassinat d’al-Sharif n’a pas fait exception à la règle.

La BBC (11/8/2025) a écrit : « Selon le ministère de la Santé du territoire, dirigé par le Hamas, plus de 61 000 personnes ont été tuées à Gaza depuis le début de l’opération militaire israélienne. » Les médias occidentaux ont pris l’initiative de renommer le ministère de la Santé de Gaza (GHM) afin de semer le doute sur l’ampleur des atrocités commises par Israël. Ils mentionnent rarement qu’une étude publiée dans The Lancet (8 février 2025) a constaté que le nombre de morts pourrait être de 40 % plus élevé que ce que rapporte le GHM. Le New York Times (10/8/2025) et Reuters (11/8/2025) a également utilisé l’expression « dirigé par le Hamas » pour décrire les personnalités du gouvernement de Gaza.

Ces médias ont également fait preuve d’un parti pris évident dans leur manière de caractériser les victimes. Le New York Times(10/8/2025), lorsqu’il a rendu compte du nombre de victimes à Gaza, a écrit que le GHM ne « fait pas de distinction entre civils et combattants ». Plus tard, le Times a rendu compte des décès israéliens, sans faire de distinction entre les civils et les combattants.

Cela implique que certains décès palestiniens pourraient être considérés comme moins importants, voire justifiés, en raison du statut potentiel de « combattant » des victimes. Les décès israéliens, quant à eux, sont simplement comptabilisés comme des êtres humains. Le Washington Post (11/8/2025) a fait preuve du même double standard dans ses reportages.

NBC (10/8/2025) a écrit : « La plupart des cibles des attaques [du 7 octobre] étaient des civils, notamment des personnes assistant à un festival de musique. » Lorsqu’elle a rendu compte des décès palestiniens, NBC n’a pas mentionné que plus de la moitié des personnes tuées par les  attaques israéliennes ont été des femmes, des enfants et des personnes âgées. Une enquête plus récente a révélé que les civils représentent 83 % des décès, selon les propres données de l’armée israélienne. Le rapport ne décrit pas non plus ce que faisaient les victimes palestiniennes au moment où elles ont été tuées, comme par exemple le fait que près de 1 400 qui ont été abattus alors qu’ils cherchaient de l’aide.

Outre les arguments habituels, huit des quinze articles jettent le doute sur Al Jazeera en mentionnant à plusieurs reprises qu’elle appartient au gouvernement qatari. (Le Qatar, tout comme Israël, fait partie des vingt pays officiellement désignés comme «allié majeur non membre de l’OTAN» par les USA.) Trois des articles (New York Times,10/8/2025; Wall Street Journal,11/8/2025; LA Times,11/8/2025) mentionnent les relations conflictuelles entre le gouvernement israélien et Al Jazeera, le New York Times et le WS Journal consacrant plusieurs paragraphes aux liens présumés de la chaîne avec le Hamas comme base présumée du conflit, plutôt qu’à la couverture critique des actions israéliennes par Al Jazeera.

Fausses équivalences

Le titre original de Reuters (11/8/2025) était rédigé du point de vue des assassins d’al-Sharif.

Seuls trois articles utilisent le mot « famine » (Financial Times, 10/8/2025; CNN,10/8/2025; Newsweek,10/8/2025), et seul le Financial Times mentionne ce mot en dehors des guillemets. Reuters (25/11/2008) et le Wall Street Journal (11/8/2025) ont qualifié la situation respectivement de « crise alimentaire » et de « crise humanitaire qui a poussé de nombreux Palestiniens vers la famine ».

Les médias continuent de répandre l’idée que ce soi-disant conflit a commencé il y a moins de deux ans, comme lorsque NBC (10/8/2025) a écrit : « Israël a lancé l’offensive à Gaza, visant le Hamas, après les attentats terroristes perpétrés par le Hamas contre Israël le 7 octobre 2023. »

Bien que le nombre de victimes ait considérablement augmenté après l’opération du 7 octobre, la violence israélienne à l’encontre des Palestiniens remonte à bien avant cette date. Lors de la fondation de l’État, comme l’ont soigneusement expliqué de nombreux historiens. Au cours des décennies qui ont précédé l’opération du Hamas, le groupe israélien de défense des droits humains B’tselem compte plus de 10 000 Palestiniens tués par les forces israéliennes entre septembre 2000 et septembre 2023, dont la plupart étaient des non-combattants, parmi lesquels plus de 2 400 enfants de moins de 18 ans. (Au cours de la même période, environ 1 300 Israéliens, civils et militaires, ont été tués par des Palestiniens.)

Le Financial Times (10/8/2025) a décrit le génocide en cours comme ayant été « déclenché » par les attentats du 7 octobre, comme si l’opération « Al-Aqsa Flood » était un acte de violence aléatoire sans rapport avec le système d’apartheid qu’Israël impose aux Palestiniens. La BBC (1/8/2025) a décrit la violence israélienne comme une « réponse à l’attaque menée par le Hamas », effaçant complètement l’histoire de l’occupation et du nettoyage ethnique des Palestiniens par Israël, qui précède de loin l’existence du Hamas. Le fait d’occulter ce type de contexte explique en partie pourquoi Israël assassine systématiquement des journalistes palestiniens, dont al-Sharif et ses collègues.

 

25/08/2025

LYNA AL TABAL
La grande Amérique... sans armes ni munitions

Lyna Al-Tabal, Rai Al Youm, 15/8/2025
Traduit par Tlaxcala

Il est un pays qui se proclame première puissance militaire mondiale, un empire qui se targue d’invincibilité, comme si la force seule suffisait … Ainsi débute l’histoire, quelque part dans une contrée lointaine, sur un autre continent… Un pays à peine né, sans mythes fondateurs, bâti sur les cendres de peuples exterminés, et qui a planté son drapeau sur un continent volé. Tout son héritage se résume à un hamburger dégoulinant de graisse et à ce mirage qu’on appelle le rêve américain, scintillant encore dans l’esprit de quelques-uns.

 

Cet article ne disséquera pas la civilisation usaméricaine, ni les guerres où elle a jeté ses fils comme chair à canon, ni les océans de sang qu’elle a versé en traversant les continents, ni la mondialisation qui a avalé les âmes et les cultures. Non… Ici, il sera question d’un drame dérisoire : Cet article traite de l’épuisement des munitions usaméricaines. [1]

Les usines qui jadis vomissaient le fer et la mort sur les champs de bataille du monde entier ne sont plus que des chaînes poussives, traînant leur ennui comme si elles assemblaient des étagères IKEA à prix cassé.

Cette impuissance dévoile l’une des plus grandes humiliations de l’histoire militaire usaméricaine.

Que manque-t-il dans les entrailles du Pentagone ? Presque tout : drones, missiles, obus. L’Ukraine, à elle seule, dévore en quelques semaines ce que l’Amérique fabrique péniblement en une année entière. [2].

Et Israël, quant à lui, ouvre grande sa bouche sur ces mêmes stocks. Ce mois-ci, le Pentagone a suspendu la livraison de missiles Patriot, de missiles de précision et d’obus de mortier... Non, ce n’est pas la conscience des USA qui s’est éveillée, mais leurs réserves qui s’assèchent. Elles ne regorgent plus de munitions… seulement du sang de ceux qu’ils ont bombardés au nom de la démocratie. [3].

Après le 7 octobre, l’USAmérique s’est empressée de voler au secours d’Israël : des millions de dollars injectés dans des cargaisons de missiles, des porte-avions déployés en Méditerranée, des systèmes de défense activés et une pluie de missiles guidés dont on tait le nombre. Tout cela pour défendre les intérêts usaméricains et rejouer la fable de la supériorité militaire. Mais la vérité est moins glorieuse : ces livraisons partent d’entrepôts qui sonnent creux, car le Pentagone lui-même est en manque de munitions. [4].

Les USA, cette puissance qui jurait pouvoir mener deux guerres de front, peinent aujourd’hui à tenir un seul champ d’usure. Quelques attaques des Houthis suffisent à vider leurs silos, chaque missile de défense tiré coûtant l’équivalent d’une école en Californie… et il faudra des mois pour en fabriquer un autre — à supposer qu’ils y parviennent.[5].

La campagne en mer Rouge, engloutissant 1,5 milliard de dollars, a achevé de saigner les stocks : 125 missiles Tomahawk expédiés, 155 missiles Standard tirés, et sept drones Reaper abattus par les Houthis [6].

Pourtant, les Houthis ne sont qu’une résistance artisanale face à la véritable ombre qui plane : la Chine. Ah, la Chine… Dans une guerre ouverte, l’Amérique ne tiendrait pas plus d’une semaine. Oui, sept jours, et ses arsenaux seraient vides [7].

Les missiles de croisière antinavires (LRASM) constituent la pièce maîtresse pour contenir la flotte chinoise. Or, le Pentagone n’en détient qu’environ 200 aujourd’hui, alors qu’il en faudrait entre 800 et 1 200 pour espérer dissuader – ou repousser – une invasion chinoise de Taïwan [8].

Certes, les USA ont su inonder les océans de navires militaires et commerciaux pendant la Seconde Guerre mondiale… puis ils les ont bradés après la victoire et fermé leurs chantiers. Résultat : aujourd’hui, la première puissance mondiale fabrique péniblement cinq navires commerciaux transocéaniques, pendant que la Chine en aligne 1 794. Oui, cinq contre mille sept cent quatre-vingt-quatorze. Superpuissance, vraiment ? [9]

Les rares navires militaires que les USA parviennent encore à produire coûtent une fortune. Exemple frappant : la marine a englouti 22,5 milliards de dollars pour trois destroyers de classe Zumwalt… avant d’annuler le programme. Pourquoi ? Parce que le canon à bord était jugé trop cher. Oui, même pour l’Amérique, il y a des limites au délire [10].


Projet de bouclier antimissile des États-Unis d'Amérique, par Etta Hulme, 2000

Les USA ne peuvent-ils pas remplacer leurs armes ? Oui… mais pas avec la rapidité nécessaire. Ils admettent eux-mêmes leur incapacité à suivre la cadence si jamais ils devaient affronter un adversaire de force équivalente [11]. Même dans le domaine naval, la dégringolade est flagrante : en 1987, la marine usaméricaine comptait près de 600 navires. Aujourd’hui ? À peine 300. Pendant ce temps, la capacité de construction navale de la Chine est… 230 fois supérieure. Imaginez le tableau. [12]. La Chine est aujourd’hui une puissance maritime à part entière, dotée de la plus grande flotte navale du monde, tandis que les USA exhibent leurs porte-avions géants, coûteux à l’excès… mais presque sans munitions.

Pire encore : la marine usaméricaine admet elle-même que la production des missiles intercepteurs SM-6 — capables d’abattre des missiles de croisière, balistiques, voire hypersoniques — est frappée du même déficit que la fabrication des projectiles de 155 mm.

Les USA visent désormais une production de 100 000 obus par mois, mais n’en fabriquent encore que 40 000, contre 14 000 il y a deux ans. Le goulot d’étranglement n’est pas seulement industriel : il est chimique. Le TNT, indispensable à ces armes, est importé… du Canada. Pour produire 100 000 obus, il faudrait des tonnes de cette matière.

Sur les 40 000 obus fabriqués, 18 000 dorment dans des entrepôts, inutilisables faute d’explosif. Le Pentagone promet la construction de nouvelles usines, mais le temps joue contre lui : tout avance à une lenteur mortelle si la guerre éclate demain  [13].

Pendant ce temps, la Chine emprunte le chemin inverse : elle grossit son arsenal d’armes, de navires et de porte-avions à un rythme cinq à six fois supérieur à celui des USA, et les fabrique de plus en plus chez elle [14].

Oui, l’USAmérique reste, sur le papier, la première puissance militaire… mais à quoi sert une arme sans munitions ? Comme l’a si bien résumé Mackenzie Eaglen : « C’est un miracle que l’armée américaine possède encore quelque chose qui puisse exploser. » [15].

Comment en est-on arrivé là ?

Les USA ont bâti une puissance militaire titanesque… Un empire qui a englouti des milliards de dollars dans des systèmes d’armement démesurés : avions de combat, missiles guidés, porte-avions, pendant que les stocks de munitions s’évaporaient.

Le budget colossal de la défense usaméricaine — près de 850 milliards de dollars par an — consacre à peine 17 % à l’armement. Le reste ? 22 % pour les salaires des militaires, et la plus grande part, 39 %, pour l’entretien et les opérations [16].

L’arsenal usaméricain déborde d’armes de luxe : des missiles Tomahawk à 2 millions de dollars l’unité, des intercepteurs à 28 millions pièce, et des F-35 à 100 millions chacun.



À court de munitions, par Taylor Jones

Mais la guerre en Ukraine a mis en lumière un paradoxe cruel : dans une guerre d’usure, la quantité écrase la qualité. Kiev tient encore grâce à une stratégie pragmatique : des drones bon marché, lancés par essaims, qui frappent sans ruiner leur armée. Une idée simple… et diablement efficace [17]. Une approche qui heurte de plein fouet la mentalité du Pentagone, obsédé par la sophistication technologique. Et même s’il décidait de changer de cap aujourd’hui, il se heurterait à la lourdeur bureaucratique et à des programmes d’armement qui exigent quinze ans de développement avant de voir le jour [18]... En temps de guerre, quinze ans, c’est déjà la fin.

Cher lecteur, suspendez un instant votre lecture. Ouvrez YouTube… Écoutez Jeffrey Sachs éreinter la politique usaméricaine, ou Douglas Macgregor disséquer les armes et la capacité de l’institution militaire à en assumer le coût. Puis revenez, et dites-moi franchement : est-ce vraiment un arsenal formidable ?

L’administration usaméricaine prétend avoir trouvé des solutions. En réalité, ce sont des mines déguisées. Parmi elles : introduire des technologies commerciales et assouplir les spécifications techniques pour accélérer la production. Une mesure qui, certes, pourrait hâter les cadences… mais au prix d’une autre menace : celle de sacrifier la performance sur le champ de bataille [19].

Autre “solution” ? Construire des usines aux USA et au Canada… Une idée brillante, en effet — surtout pour une guerre qui débutera en 2040 [20]... Troisième “remède miracle” : signer des accords de production conjointe avec des alliés dits “fiables”. Problème : le temps nécessaire à leur conclusion suffirait pour voir deux guerres éclater… et se terminer.

Comment, dans ces conditions, l’USAmérique peut-elle rassurer le monde sur sa puissance, quand elle n’arrive même pas à s’assurer elle-même que ses stocks d’armes ne s’évaporeront pas avant le premier coup de feu ?

Trump sait qu’un affrontement avec la Russie ou la Chine ne lui laissera qu’un joujou : l’arme nucléaire. Tout le reste, c’est du décor. Alors ce sommet Trump-Poutine, en Alaska ? Un piège, poli, nappé de vodka et de sourires. Pendant ce temps, les Russes avancent en Ukraine. L’OTAN rôde, cherche le flanc tendre de Moscou, du côté de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie. Trump rêve de pousser Poutine dans un coin : “Cède-moi des territoires.” Mais comment le vainqueur cède-t-il ses trophées ?

Poutine n’est pas idiot. Il connaît la suite du scénario : céder, c’est se tirer une balle dans le Kremlin. La guerre nucléaire ? Même lui sait qu’on n’en sort pas vivant. Alors il fouille ses poches : une troisième voie. Un pot-de-vin géopolitique. Une licence pour des terres rares ? Le monde en solde, édition spéciale. Est-ce possible ? Peut-être. Mais Poutine ne lâchera rien. Et Trump, lui, n’a rien à offrir.

Pendant ce temps, l’Europe compte les chaises. France, Allemagne : fantômes. Quant à Zelensky, on lui a imposé la guerre, on lui imposera la paix. Le sommet ressemble à une salle des ventes : Washington qui braille, prêt à acheter une trêve à crédit, juste le temps de remplir ses rayons… avant que la Chine ne frappe à la porte de Taïwan.

Que va-t-il se passer en Alaska ? Pas une épopée. Juste un marchandage. Peut-être que Trump comprendra enfin qu’on peut “gagner” une guerre en la refilant à d’autres. L’Europe, hébétée, se jettera dans les bras de l’OTAN comme une veuve dans les bras du croque-mort. Et Trump ? Il gardera sa carte : l’Atlantique. À jouer plus tard. Quand Pékin viendra réclamer Taïwan.

Quant aux missiles et à la technologie des Russes et des Chinois, ils hantent les couloirs du Pentagone comme un spectre obstiné. Mais n’allons pas plus loin : c’est une autre histoire, digne d’un autre article — celui des illusions de la dissuasion et du cauchemar qui pèse sur un empire persuadé de son invincibilité.

 

Notes

[1]  Bryant Harris, US seeks to ramp up munitions production for Ukraine, Israel, Defense News, oct. 31, 2023

[2] Benjamin Parker, US Military Aid to Ukraine, , Foreign Policy,  March 13,  2024

[3]  Bryant Harris, Defense News.

[4] Bradley Bowman  & Mark Montgomery, America’s arsenal is in need of life support, Defense News, Oct. 12, 2022.

[5] Business Insider, Houthi attacks exposed US Navy ammo supply shortfalls. Déclarations de l'amiral James Kelby devant la commission des crédits de la Chambre des représentants, le 15 mai 2025.

[6] AP News, US Red Sea operations costs, June 20, 2024.

[7]  Center for a New American Security, Dangerous Straits: Wargaming a Future Conflict over Taiwan, 2023.

[8] Bradley Bowman & Mark Montgomery, Defense News.

[9 The Pentagon’s missing missiles, The Week, July 28, 2025.

[10] The Week.

[11] W. Beaver, America Must Remedy Its Dangerous Lack of Munitions, Heritage Foundation, 2023.

[12] AP News, Dwarfed by China in shipbuilding, 2024.

[13] Sam Skove, US Army plans to ramp up artillery production for Ukraine, Newsweek ,  Feb. 7,  2024.

[14] Bryant Harris & Noah Robertson, Soaring US munitions demand strains support for Israel, Ukraine, Defense News, Taiwan,  Apr. 30,  2024 .

[15] Defense News, Oct. 12, 2022.

[16] The Pentagon’s missing missiles, The Week, July 28, 2025

[17] Benjamin Parker, US Military Aid to Ukraine, Foreign Policy, March 13, 2024.

[18]  Stacie Pettyjohn & Hannah Dennis, The Pentagon Isn’t Buying Enough Ammo, Foreign Policy, May 21 ,  2024

[19] Defense News, Apr.30,  2024 .

[20] The Week, July 28, 2025.

LYNA AL TABAL
La Gran América... sin armas ni municiones

Lyna Al-Tabal, Rai Al Youm, 15/8/2025
Traducido por Tlaxcala

Existe un país que se considera la primera potencia militar mundial... Así comienza la historia en una región geográfica lejana, en otro continente... Un país muy joven, sin leyendas, nacido sobre las ruinas de pueblos exterminados, que ha izado su bandera sobre un continente robado. Todo su legado se puede resumir en una hamburguesa grasienta y en el sueño yanqui que brilla en la mente de algunos.

Este artículo no trata de la civilización usamericana, ni de las guerras en las que ha enviado a sus hijos a matar y morir, ni de la sangre que ha derramado por todos los continentes, ni de la globalización que ha secuestrado las culturas de los pueblos. Este artículo trata del agotamiento de las municiones usamericanas. [1]

Las fábricas que vertieron hierro y destrucción en las guerras de todo el mundo se han convertido hoy en máquinas lentas y aburridas, como si fabricaran muebles baratos para IKEA... Esta incapacidad revela una de las mayores decepciones de la historia militar usamericana.

¿Qué falta en los almacenes del Pentágono? Casi todo... drones, misiles, municiones. Solo Ucrania consume en pocas semanas el equivalente a un año de producción usamericana de municiones de artillería [2].

E Israel, por su parte, abre la boca sobre esos mismos almacenes. Este mes, el Pentágono ha suspendido la entrega de misiles Patriot, misiles de precisión y proyectiles de mortero... No, la conciencia de los USA no ha despertado, solo se están vaciando los almacenes que alimentan las guerras, y están rebosantes de la sangre de aquellos a quienes bombardean [3].

Después del 7 de octubre, USA se apresuró a apoyar a Israel: millones de dólares financian miles de misiles, portaaviones en el Mediterráneo, sistemas de defensa aérea activados y un número no revelado de misiles guiados. Todo ello para proteger los intereses yanquis y reproducir el discurso de la superioridad militar. Pero la realidad es más dura: estos envíos se producen cuando el propio Pentágono se enfrenta a una escasez de municiones[4].

USA, la potencia que se prometió a sí misma librar dos guerras a la vez, es hoy incapaz de gestionar un solo frente de desgaste. Los ataques de los hutíes han obligado por sí solos a la marina a lanzar misiles de defensa aérea cuyo costo unitario equivale al de una escuela en California, y se necesitarán meses para reemplazarlos, si es que pueden ser reemplazados[5].

La campaña en el Mar Rojo, que ha costado 1500 millones de dólares, ha vaciado aún más las reservas de armas: USA ha disparado 125 misiles Tomahawk y 155 misiles Standard, y ha perdido siete drones Reaper derribados por los hutíes[6].

Sin embargo, los hutíes siguen siendo una resistencia rudimentaria en comparación con la verdadera amenaza: China.

Ah, China... En una futura guerra con China, USA solo aguantaría una semana... Sí, siete días, y se quedaría sin municiones[7].

Los misiles de crucero antibuque (LRASM) son el arma principal para amenazar a la flota china. El Pentágono cuenta actualmente con unos 200 misiles de este tipo, pero en cualquier guerra futura con China necesitaría entre 800 y 1200 para disuadir o derrotar cualquier invasión china de Taiwán [8].

Es cierto que USA intensificó la construcción de buques militares y comerciales durante la Segunda Guerra Mundial, pero los vendió después de la guerra y cerró sus astilleros. Debido a los altos costos, hoy en día produce cinco buques comerciales transoceánicos, frente a los 1794 que produce China.[9]

Los pocos buques militares construidos por USA también son excesivamente caros. He aquí un ejemplo: la marina gastó 22 500 millones de dólares en la construcción de tres destructores de la clase Zumwalt, pero canceló el programa porque el cañón embarcado era demasiado caro [10].

Proyecto de escudo antimisiles de los Estados Unidos de América, por Etta Hulme, 2000

¿No pueden los USA reemplazar sus armas? Sí, pero no con la suficiente rapidez, y reconocen su incapacidad para satisfacer la demanda de municiones si tuvieran que enfrentarse a un adversario de fuerza equivalente [11]. Incluso en materia de construcción naval, la marina usamericana contaba con unos 600 buques en 1987, frente a solo 300 en la actualidad. La capacidad de construcción naval de China es 230 veces superior... Imagínense [12]. China es hoy una potencia marítima y posee la mayor flota naval, mientras que USA ha construido portaaviones gigantes, extremadamente costosos, sin munición suficiente...

Peor aún, la propia marina usamericana reconoce que la producción de misiles interceptores tipo SM-6, capaces de derribar misiles de crucero y balísticos, e incluso misiles hipersónicos, se enfrenta a un déficit de capacidad de producción similar al de la fabricación de proyectiles de 155 mm... Los USA han decidido aumentar la producción de estos misiles a 100 000 al mes, pero siguen produciendo solo 40 000, frente a los 14 000 de hace dos años. El problema se encuentra en las fábricas, pero también en el corazón mismo del misil... Se trata de TNT, que el Pentágono importa del extranjero, principalmente de Canadá. Para producir 100 000 misiles, USA necesita toneladas de este material. De los 40 000 misiles producidos, unos 18 000 están almacenados en depósitos, inutilizables por falta de este material explosivo... El Pentágono ha aprobado un plan para construir nuevas fábricas, pero todo esto es mortalmente lento si la guerra estalla mañana [13].

Mientras tanto, China va en la dirección opuesta: está aumentando su arsenal de armas, buques y portaaviones a un ritmo cinco o seis veces superior al de USA, y los produce cada vez más a nivel local [14].

Sí, USA sigue siendo la primera potencia militar... pero ¿de qué sirve un arma sin munición? Como describió Mackenzie Eaglen: «Es un milagro que el ejército usamericano tenga algo que pueda explotar» [15].

¿Cómo hemos llegado a esta situación?

USA ha construido un poder militar formidable... El imperio ha malgastado miles de millones de dólares en costosos sistemas de armamento: aviones de combate, misiles guiados, portaaviones, mientras se agotaban las reservas de municiones... El colosal presupuesto de defensa usamericano, que ronda los 850 000 millones de dólares al año, solo se destina en un 17 % a armamento, mientras que el 22 % se destina a los salarios de los militares y la mayor parte, el 39 %, a operaciones y mantenimiento [16].

El arsenal usamericano está repleto de armas pesadas de lujo, misiles Tomahawk de 2 millones de dólares cada uno, misiles interceptores de 28 millones de dólares cada uno y aviones de combate F-35 de 100 millones de dólares cada uno.


Quedándose sin municiones, por Taylor Jones

La paradoja se puso de manifiesto en la guerra de Ucrania, que demostró que la cantidad prevalece sobre la calidad en una guerra prolongada. Kiev aún se mantiene relativamente firme gracias a drones baratos, que se lanzan en enjambres repetidos como insectos, sin un costo significativo. Una idea inteligente [17], pero que no se ajusta a la mentalidad del Pentágono, obsesionado con las armas sofisticadas. E incluso si quisieran cambiar hoy, el proceso estaría sujeto a procedimientos burocráticos que llevarían años y a sistemas que requieren quince años de desarrollo [18]... Y en tiempos de guerra, quince años es el fin.

Estimado lector, deja de leer estas líneas por un momento y abre YouTube... Escucha a Jeffrey Sachs criticar la política de USA o a Douglas Macgregor comentar las armas y la capacidad de la institución militar para soportarlas... Luego vuelve y dime: ¿es este un arsenal formidable?

La administración yanqui ha propuesto soluciones, pero en realidad son minas: una de ellas consiste en implantar una tecnología comercial y flexibilizar las especificaciones técnicas para acelerar la producción, una medida que podría acelerar la producción, pero que también podría afectar al rendimiento en combate [19]. Otra solución: construir fábricas en USA y Canadá... Una idea excelente para una guerra que comenzará en 2040 [20]... Una tercera solución consiste en celebrar acuerdos de producción conjunta con aliados y socios fiables, pero es una opción lenta... El tiempo necesario para celebrarlos bastaría para que estallaran y terminaran dos guerras.

¿Cómo puede USA tranquilizar al mundo sobre su poder, cuando ni siquiera es capaz de asegurarse a sí mismo que sus reservas de armas no se agotarán antes de que empiecen los combates?

Trump sabe que cualquier enfrentamiento futuro con Rusia o China solo le dejará el arma nuclear... La cumbre Trump-Putin en Alaska podría ser una trampa disfrazada de invitación. Los rusos avanzan en Ucrania y la OTAN podría amenazar el flanco de Moscú a través de Azerbaiyán y Armenia... Trump podría poner a Putin ante la disyuntiva de ceder territorios, pero ¿cómo puede el vencedor ceder sus territorios? Putin lo entiende y quiere evitar una guerra nuclear. Podría optar por una tercera vía: un soborno geopolítico, como conceder a Trump una licencia para explotar tierras raras... ¿Es posible? En cualquier caso, Putin no cederá a ninguna de las condiciones de Trump, que no tiene nada que ofrecerle...

Europa está marginada, Francia y Alemania han perdido su peso... En cuanto a Zelensky, se le ha impuesto la guerra, se le impondrá la paz... La reunión de hoy entre Trump y Putin se parece más a una sala de subastas, donde USA podría intentar comprar una tregua temporal para reunir lo que queda de sus reservas antes de que China llame a la puerta de Taiwán. ¿Qué pasará hoy en Alaska?

Trump quizá descubra que la forma más fácil de ganar la guerra es dejarla en manos de otros, ponerla en manos de una Europa atónita, que se precipitará a los brazos de la OTAN, mientras Trump se queda con la carta del Atlántico, que podrá jugar en una aventura mayor cuando China decida recuperar Taiwán.

En cuanto a los misiles y la tecnología de que disponen los rusos y los chinos, es un espectro que acecha cada día en los pasillos del Pentágono... Pero me detendré aquí, porque es otra historia, que merecería otro artículo sobre las ilusiones de la disuasión y la pesadilla que se cierne sobre el imperio que se cree invencible.

Notas

[1]  Bryant Harris, US seeks to ramp up munitions production for Ukraine, Israel, Defense News, oct. 31, 2023

[2] Benjamin Parker, US Military Aid to Ukraine, Foreign Policy,  March 13,  2024

[3]  Bryant Harris, Defense News.

[4] Bradley Bowman  & Mark Montgomery, America’s arsenal is in need of life support, Defense News, Oct. 12, 2022.

[5] Business Insider, Houthi attacks exposed US Navy ammo supply shortfalls. Déclarations de l'amiral James Kelby devant la commission des crédits de la Chambre des représentants, le 15 mai 2025.

[6] AP News, US Red Sea operations costs, June 20, 2024.

[7]  Center for a New American Security, Dangerous Straits: Wargaming a Future Conflict over Taiwan, 2023.

[8] Bradley Bowman & Mark Montgomery, Defense News.

[9 The Pentagon’s missing missiles, The Week, July 28, 2025.

[10] The Week.

[11] W. Beaver, America Must Remedy Its Dangerous Lack of Munitions, Heritage Foundation, 2023.

[12] AP News, Dwarfed by China in shipbuilding, 2024.

[13] Sam Skove, US Army plans to ramp up artillery production for Ukraine, Newsweek ,  Feb. 7,  2024.

[14] Bryant Harris & Noah Robertson, Soaring US munitions demand strains support for Israel, Ukraine, Defense News, Taiwan,  Apr. 30,  2024 .

[15] Defense News, Oct. 12, 2022.

[16] The Pentagon’s missing missiles, The Week, July 28, 2025

[17] Benjamin Parker, US Military Aid to Ukraine, Foreign Policy, March 13, 2024.

[18]  Stacie Pettyjohn & Hannah Dennis, The Pentagon Isn’t Buying Enough Ammo, Foreign Policy, May 21 ,  2024

[19] Defense News, Apr.30,  2024 .

[20] The Week, July 28, 2025.