Algun@s de lo@ 40 delegad@s del territorio ocupado del Sáhara Occidental
que participaron en el 16º Congreso del Frente Polisario han regresado de
Argelia hoy, 22 de enero. En la escala de un día en el aeropuerto de Casablanca
no encontraron ningún problema. Algun@s viajaron después a Agadir, donde no
ocurrió nada en el aeropuerto. Pero, como era de esperar, l@s que fueron a El
Aaiún fueron tratad@s “como se debe” en una situación colonial.
Las fuerzas de represión marroquíes evacuaron a las personas que se
encontraban en el aeropuerto y después atacaron a l@s delegado@, golpeándoles,
insultándoles y humillándoles. El Waara Sid Brahim Khaya, hermana de Sultana
Khaya, Mariem Dembar, hermana de Said Dembar (asesinado en agosto de 2011 por
un policía fuera de servicio) y Elghlaijiha El Wali, fueron las que sufrieron
los peores abusos. En un vídeo publicado por El Waara, que fue acogida por
activistas, relata: “A mi regreso del 16º Congreso del Frente Polisario fui
blanco especial de las fuerzas de ocupación, que me apartaron e inmediatamente
empezaron a insultarme y a llamarme sucia traidora. No paraban de decirme que
me iban a reeducar por todo lo que hice en Bojador. Hicieron preguntas sobre Sultana
Khaya aunque no estaba con nosotros. Nos torturaron e hicieron lo mismo con
Mariem Dembar y Sidi Mohamed Daddach. Pido a la comunidad internacional que
intervenga rápidamente para protegernos de los actos de las fuerzas de
ocupación”.
Tras llevarse a las mujeres, los torturadores siguieron atacando a los
hombres.
Las delegadas de El Aaiún: Dahaba Sidemou, Mahfouda Lefkir, Fatimatou
Dahwar, Laila Lili Gajmoula Baaya, Mariem Dembar y El Waara Sid Brahim Khaya.
Delegada de Guelmim: Salka Lektif. De Smara Elglaijhaa El Wali.
Delegados masculinos de El Aaiún: Sidi Mohamed Daddach, El Arabi Elbakay,
Abdelaziz Byay, Saleh Maylid, responsable de la radio Maizirat. Delegados de
Bojador : Sheik El Elhella Khayya y Hamdi Habadi.
Mañana 23 de enero, el Parlamento marroquí (Cámara de Representantes y
Cámara de Consejeros) celebrará una sesión plenaria conjunta urgente. Debatirá
la resolución del Parlamento Europeo sobre los derechos humanos en Marruecos,
que pide la liberación de los periodistas encarcelados.
Información complementaria del 23-1-2023
Vari@s delegad]s del territorio ocupado no han regresado aún al Sahara Occidental
Algun@s de ell@s harán escala en Las Palmas.
Otr@s se quedarán unos días en los campamentos con la familia. Son Mina Baali, Salha Boutenguiza, Zahra Sbai, Zainabou Babi, Brahim Sabar, Bachri Bentaleb, Daihani Brahim, Ali Salem Tamek, Ali Saadouni.
Está claro que el Majzén les preparará una sesión parecida a su regreso. Seamos solidarios. Alertemos a los medios y a los responsables políticos.
Une partie de la
quarantaine de délégué·es du territoire occupé du Sahara occidental qui a
participé au 16èmecongrès du
Front Polisario est rentrée d'Algérie aujourd'hui 22 janvier. À l'escale d'une
journée dans l'aéroport de Casablanca ils·elles n'ont pas rencontré de
problème. Certain·es ont ensuite voyagé sur Agadir où il ne s'est rien passé à
l'aéroport. Mais comme il était à craindre, celles et ceux qui allaient à El Ayoun
ont été traité·es “comme il se doit” en situation coloniale.
Les forces de répression
marocaines ont fait évacuer les personnes qui se trouvaient dans l'aéroport
pour ensuite s'acharner sur les délégué·es qu'ils ont tabassé·es, insulté·es,
humilié·es. Ce sont El Waara Sid Brahim Khaya, sœur de Sultana Khaya, Mariem
Dembar, sœur de Said Dembar (assassiné en août 2011 par un policier qui n'était
pas en service) et Elghlaijiha El Wali, qui ont subi les pires sévices. Dans
une vidéo postée par El Waara, accueillie chez des militants, elle raconte « À
mon retour du 16ème congrès du Front Polisario j'ai été spécialement
ciblée par les forces d'occupation qui m'ont amenée à part et ont commencé
immédiatement à m'insulter et me traiter de sale traitresse. Ils répétaient
qu'ils vont me rééduquer pour tout ce que j'ai fait à Boujdour. Ils posaient
des questions sur Sultana Khaya bien qu'elle ne fût pas avec nous. Ils nous ont
torturé·es et fait pareil avec Mariem Dembar et Sidi Mohamed Daddach. Je
demande à la communauté internationale d'intervenir promptement pour nous
protéger de actes des forces d'occupation ».
Après avoir fait sortir les
femmes, les tortionnaires ont continué de s'acharner sur les hommes.
Les femmes déléguées d'El Ayoun
: Dahaba Sidemou, Mahfouda Lefkir, Fatimatou Dahwar, Laila Lili Gajmoula Baaya,
Mariem Dembar et El Waara Sid Brahim Khaya. Déléguée de Guelmim : Salka Lektif.
De Smara Elglaijhaa El Wali.
Les hommes délégués d'El Ayoun
: Sidi Mohamed Daddach, El Arabi Elbakay, Abdelaziz Byay, Saleh Maylid,
responsable de la radio Maizirat. Délégués de Boujdour : Cheik El Elhella
Khayya et Hamdi Habadi.
Demain 23 janvier, le
Parlement marocain (chambre des représentants et chambre des conseillers) est
réuni en urgence pour une séance plénière commune extraordinaire. Il doit
débattre de la résolution du Parlement européen relative aux droits humains au
Maroc, qui demande la libération des journalistes emprisonnés.
Complément d'information du 23/1/2023
Plusieurs délégué·Es du territoire occupé ne sont pas encore rentré·es au
Sahara occidental occupé. Certain·es vont faire escale par Las Palmas.
D'autres
sont pour quelques jours en famille dans les campements : Mina Baali,
Salha Boutenguiza, Zahra Sbai, Zainabou Babi, Brahim Sabar, Bachri
Bentaleb, Daihani Brahim, Ali Salem Tamek, Ali Saadouni.
Il
est clair que le Makhzen leur préparera une même séance à leur arrivée,
soyons solidaires, alertons nos médias et responsables politiques.
Une fois de plus, je ne suis pas allé sur la place Habima, ni
dans la rue Kaplan, pour me joindre aux manifestations. Mes jambes ne m'y ont
pas porté et mon cœur m'a empêché de prendre part à une manifestation largement
justifiée, mais qui n'est pas ma manifestation.
Des
manifestants contre le agouvernement d'extrême droite agitent des drapeaux
israéliens au centre Horev de Haïfa, samedi. Photo : Rami Shlu/sh/
Une manifestation couverte d'une mer de drapeaux bleus et
blancs, comme pour se légitimer et protéger ses participants, alors que les
drapeaux de l’autre peuple qui vit sur cette terre sont interdits ou rassemblés
en un ghetto étroit sur un monticule de terre au bord de la place, comme dans
la manifestation précédente, ne peut pas être ma manifestation.
Une manifestation exclusivement juive et mononationale dans
un État clairement binational ne peut être une manifestation pour quiconque
recherche l'égalité ou la justice, qui sont parmi les mots clés de cette
manifestation mais qui restent creux en son sein.
Le discours « gouvernement de liberté, égalité et qualité » des
organisateurs d'une manifestation à Tel Aviv est creux ; le discours de « lutte
pour la démocratie » des organisateurs de l'autre manifestation ne l'est
pas moins. Il n'y a pas et il n'y aura jamais de « gouvernement de liberté, égalité et qualité «
dans un État d'apartheid, pas plus qu'il n'y a de « lutte pour la
démocratie » lorsque l'on ferme les yeux sur l'apartheid.
Certains des Juifs de ce pays sont maintenant indignés face à
une menace concrète sur leurs droits et leur liberté. Il est bon qu'ils aient
été secoués dans une action civile, mais leurs droits et leur liberté, même
après avoir été restreints, resteront ceux des privilégiés, de la suprématie
juive inhérente. Ceux qui y consentent, en paroles ou en silence, invoquent le
nom de la démocratie en vain. Le silence sur ce sujet est le silence sur
l'apartheid. La participation à ces démonstrations d'hypocrisie et de deux
poids-deux mesures est inacceptable.
La mer de drapeaux israéliens lors de ces manifestations se
veut une excuse face à la remise en cause par la droite de la loyauté et du
patriotisme de ce camp. Nous sommes sionistes, donc nous sommes loyaux, disent
les manifestants. Les Palestiniens et les Arabes israéliens peuvent attendre
que nous finissions les choses entre nous. Il est interdit de mélanger les
problèmes, comme s'il était possible de ne pas les mélanger. Une fois de plus,
le centre et la gauche tombent raides morts devant les accusations de la
droite, marmonnant et s'excusant ; la pureté du drapeau les a ternis bien plus
que les accusations.
Une fois de plus, ce camp montre qu'il exclut les
Palestiniens et leur drapeau tout autant que la droite. Comment peut-on
participer à une telle manifestation ? Il n'y a pas et il ne peut y avoir de
manifestation pour la démocratie et l'égalité, la liberté et même pour un
gouvernement de qualité, dans un format d'apartheid dans un État d'apartheid,
tout en ignorant l'existence de l'apartheid.
Le drapeau a été choisi comme symbole parce que c'est une
manifestation sioniste, mais il ne peut pas y avoir de manifestation sioniste
pour la démocratie et qui soit donc une manifestation juste. Une idéologie qui
grave sur son drapeau la suprématie d'un peuple sur un autre ne peut prêcher la
justice avant de changer les bases de son idéologie. L'Étoile de David est en
train de couler, comme l'a montré de manière déchirante l'illustration de
couverture du magazine en hébreu de Haaretz de vendredi, mais son
naufrage est inévitable tant que le drapeau d'Israël sera le drapeau de l'une
des deux nations qui le revendiquent.
Le sang palestinien a coulé comme de l'eau ces derniers
jours. Il ne se passe pas un jour sans que des innocents soient tués : un
professeur de gymnastique qui a tenté de sauver un blessé dans sa cour ; deux
pères, dans deux endroits différents, qui ont essayé de protéger leurs fils, et
un fils de réfugiés de 14 ans - tout cela en une semaine. Comment une
manifestation peut-elle ignorer cela, comme si cela ne se produisait pas, comme
si le sang était de l'eau et l'eau une pluie bénie, comme si cela n'avait rien
à voir avec le visage du régime ?
Pouvez-vous imaginer si les Juifs étaient attaqués tous les
jours ou tous les deux jours ? La manifestation les aurait-elle ignorés ? L'occupation
est plus que jamais loin de prendre fin : elle est devenue une mouche embêtante
qu'il faut faire taire. Quiconque la mentionne est un fauteur de troubles qui
doit être tenu à l'écart : même la gauche ne veut plus en entendre parler.
« Arrêtons le coup d'État », proclament les appels,
avec un pathos qui semble avoir été emprunté à la Révolution française. Mais il
n'y a pas de révolution dans un État d'apartheid, s'il continue à être un État
d'apartheid. Même si toutes les demandes des manifestants sont satisfaites, si
la Cour suprême est portée aux nues, si le procureur général est exalté et si
le pouvoir exécutif retrouve sa stature légitime, Israël restera un État
d'apartheid. Alors quel est le but de cette manifestation ? De nous permettre
de nous féliciter une fois de plus d'être “la seule démocratie du Moyen-Orient”.
"Une nation qui en occupe une autre ne sera jamais libre": manifestants antisionistes en marge de la manifestation de samedi à Tel Aviv
La circulation est chaotique comme tous les jours. Les
usines, les ateliers d’artisans et les magasins sont ouverts. Comme tous les
matins, les étudiants de l’université Al Najah se rendent au campus à un rythme
rapide et, dans l’après-midi, se pressent dans les cafés autour de l’université,
remplissant l’air de sons, de mots, de rires. Naplouse semble vivre un
quotidien tranquille. Ce n’est qu’une apparence. La deuxième ville
palestinienne de Cisjordanie vit dans un climat de guerre depuis l’été dernier,
une guerre qui se déroule principalement la nuit et qui n’épargne personne. Le
principal champ de bataille est la casbah, la vieille ville. Les hommes des
unités spéciales de l’armée israélienne, les mista'arvim [“arabisés”] en civil qui se font passer pour des Palestiniens,
ouvrent la nuit, par des actions éclair, la voie aux raids des unités de l’armée
à la chasse aux militants de la Tanière des lions, le groupe qui rassemble des
combattants de toutes les orientations politiques et qui est devenu l’icône de
la lutte armée palestinienne. Des raids qui s’accompagnent d’intenses échanges
de tirs et se terminent par des meurtres de Palestiniens, presque toujours
perpétrés par des tireurs d’élite.
« Nous vivons comme si nous étions en guerre,
avec les occupants (israéliens) qui entrent dans la ville presque chaque nuit
pour tuer ou capturer quelqu’un, et les civils en paient souvent le prix »,
nous dit Majdi H., un éducateur qui a accepté de nous accompagner. « La
casbah est la principale cible d’Israël, ajoute-t-il, car elle représente le
refuge de la résistance. Mais les raids ont lieu partout et se transforment en
batailles au Tombeau de Joseph ». Majdi fait référence aux “visites”
nocturnes périodiques de colons israéliens sur le site religieux situé dans la
zone A, sous contrôle palestinien total. Leur arrivée, avec une escorte de
dizaines de soldats et de véhicules militaires, déclenche de violents échanges
de tirs avec la Tanière des lions. « Nous voulons vivre notre vie, sans plus
voir de colons et de soldats, mais on ne nous le permet pas », poursuit
Majdi, qui mène depuis plusieurs années des activités de soutien psychologique
aux mineurs avec d’autres collègues. « Ils sont les plus touchés par
ce climat, explique-t-il, les enfants et les jeunes sont les plus exposés aux
dommages causés par cette guerre de faible intensité mais toujours violente ».
La situation actuelle rappelle à beaucoup l’opération “Mur de défense” lancée
par Israël en 2002, lorsque l’armée a réoccupé des villes autonomes
palestiniennes au plus fort de la deuxième Intifada. On a estimé le nombre de
morts palestiniens à environ 300 à Naplouse, qui a été traversée et dévastée
pendant des mois par les chars et les véhicules blindés. Aujourd’hui comme alors,
le commandement militaire et le gouvernement israéliens justifient leur main de
fer par la “lutte contre le terrorisme” et les organisations armées
palestiniennes responsables d’attaques qui, dans certains cas, ont tué ou
blessé des soldats et des colons.
La beauté de la casbah de Naplouse n’est comparable qu’à
celle de la vieille ville de Jérusalem. Les travaux de rénovation entrepris ces
dernières années par les autorités locales, grâce également à des projets
internationaux, ont redonné une nouvelle splendeur aux bâtiments anciens et aux
coins cachés. Les hammams qui ont contribué à rendre la ville célèbre ont été
rénovés, tout comme les fabriques de carrelages et de savon à l’huile d’olive
et les ateliers familiaux qui produisent les gelées enrobées de sucre glace. « Mais
la reine des sucreries à Naplouse était et reste la kunafa [knafeh] »,
souligne Majdi, en référence à l’un des délices de la cuisine palestinienne. L’atmosphère
est agréable. Après la mosquée al Khader, on rencontre de petits restaurants
avec des pots de fleurs et des lumières colorées se reflétant sur la pierre
blanche des maisons. Les commerçants exposent des marchandises de toutes sortes
et les marchands ambulants vantent les mérites des fruits et légumes qu’ils ont
apportés en ville.
En entrant dans le quartier Al Yasmin, Majdi devient
plus sérieux et tendu. Nous sommes dans la zone rouge, c’est le fief de la Tanière
des lions et d’autres groupes armés. « Ici, il y a des fusillades presque
toutes les nuits entre nos jeunes et les soldats israéliens. Tu ne peux pas
prendre de photos et si tu croises des combattants, ne les suis pas des yeux
trop longtemps. La peur des espions et des collabos est forte », nous
dit-il à voix basse. Au-dessus de nos têtes, dans les ruelles, de longs draps
noirs ont été étendus pour cacher les mouvements des tireurs aux drones
israéliens. Les murs sont couverts d’affiches avec les visages des martyrs,
anciens et nouveaux, ceux tués pendant la première Intifada il y a trente ans
et ceux abattus ces dernières semaines. Une sorte de mausolée installé sur une
petite place commémore les plus célèbres d’entre eux, dont Ibrahim Nabulsi, qui
en août dernier, encerclé par les soldats israéliens, a préféré mourir et ne
pas se rendre. Avant d’être abattu, Nabulsi a envoyé un message audio à sa mère
qui est devenu viral pendant des mois. Pour les Palestiniens, c’est un héros.
Pour Israël, en revanche, le premier chef de la Tanière des lions était un “dangereux
terroriste” et faisait partie des responsables de graves attaques armées contre
des soldats et des colons. Les mista'arvim israéliens ont déjà décapité la direction de la Tanière des lions à
plusieurs reprises, mais le groupe voit ses rangs grossir chaque jour. Entre
100 et 150 habitants de Naplouse et des villages voisins en feraient partie.
Quelques-uns d’entre eux nous dépassent, nous ne pouvons pas les photographier
ou les arrêter pour leur poser quelques questions, répète sèchement Majdi, qui
entre-temps a été rejoint par Amer, un de ses amis qui vit dans la casbah, pour
nous garant un "laissez-passer" supplémentaire. L’uniforme des hommes
armés est noir, le visage est recouvert d’une cagoule, un bandeau de couleur
portant le logo du groupe entoure le sommet de la tête. L’arme est presque
toujours un pistolet-mitrailleur M-16.
Un « uniforme»similaire est porté par les membres
du bataillon de Balata, dans le plus grand camp de réfugiés de la ville,
également connu pour être un bastion de la résistance aux forces de sécurité de
l’Autorité nationale palestinienne, que beaucoup à Naplouse, y compris ceux du
parti Fatah du président Abou Mazen, considèrent désormais comme étant « au
service » d’Israël. Les opérations (répressives) de sécurité menées à
Naplouse par les forces spéciales de l’ANP sont à l’origine de violentes
protestations et les rues du centre-ville se transforment en un champ de
bataille entre jeunes et policiers. «Cela fait des décennies que nous demandons
en vain la fin de l’occupation israélienne, le principal problème de Naplouse,
de chaque ville, de chaque Palestinien », déclare Osama Mustafa, directeur
du centre culturel Yafa dans le camp de Balata. « Nous avons essayé avec
les accords d’Oslo, avec les négociations mais cela n’a servi à rien, nous
restons sous occupation, les colonies israéliennes nous encerclent »,
ajoute Mustafa. « Israël prétend que sa pression sur Naplouse est due à la
présence d’hommes armés dans la ville et met en œuvre des mesures punitives qui
touchent l’ensemble de la population ».La frustration est palpable, l’exaspération
face au désintérêt des pays occidentaux détériore la relation avec l’Europe. « Au
centre Yafa, nous menons des activités culturelles et adaptées aux enfants, explique
Mustafa, ce sont des projets civils, presque toujours pour les enfants.
Pourtant, pour nous accorder un financement, l’UE nous demande de signer des
déclarations condamnant la résistance à l’occupation. Elle le fait parce que c’est
Israël qui l’impose. Mais aucun Palestinien ne peut faire ça ».
Se rendant
en voiture au travail avec son fils, Ahmed Kahla a été arrêté à un poste de
contrôle de l'armée israélienne, où il a été abattu. L'armée a prétendu qu'il
avait essayé de saisir l'arme d'un soldat. Son fils insiste sur le fait qu'il a
été tué sans raison.
Zeid et Hani Kahla, frères
d'Ahmed en deuil, recevant des condoléances cette semaine. Photo : Alex Levac
Le compte-rendu
suivant est paru lundi dernier dans le Yedioth Ahronoth : « Les
combattants de Tsahal ont abattu hier matin un Palestinien armé d'un couteau
qui a tenté d'arracher une arme à l'un des membres de la force... Le
terroriste, qui a été abattu... , [était] un habitant du village de Rammun ».
Encore une
attaque terroriste neutralisée par les intrépides « combattants des postes
de contrôle ».
Les FDI, qui
ont d'abord rapporté que l'homme avait jeté des pierres sur les soldats et
s'était approché d'eux avec un couteau, se sont empressées de réviser leur
propre récit sans fondement, abandonnant les allégations de jet de pierres et
de possession d'un couteau sur les lieux, et ont présenté une nouvelle version
: celle d'une tentative de s'emparer d'une arme. Pour cela, aucune preuve n'est
nécessaire, ni un couteau, ni une pierre, et cela justifie certainement de
tirer pour tuer.
Le fait que
l'homme, un ouvrier du bâtiment originaire d'un village tranquille et aisé de
Cisjordanie, que les soldats de Tsahal ont tué de deux balles dans le cou, se
rendait au travail, comme chaque matin, avec son fils aîné ; et que, selon des
témoins oculaires, il se trouvait à l'avant de la file de voitures à un poste
de contrôle lorsque les troupes déployées à cet endroit ont complètement
paralysé la circulation, à un moment de la matinée où tout le monde est pressé
de se rendre au travail - rien de tout cela n'a empêché la tentative immédiate
de justifier un meurtre inutile et ostensiblement criminel, à quelques mètres
du fils de cet homme.
Une affiche de deuil
montrant la photo d'Ahmed Kahla, à son domicile. Photo : Alex Levac
La
photographie du corps sur la route, les vêtements pleins de sang qui s'écoule
également le long de la pente, un tube en plastique enfoncé dans la bouche et
le cou, qui a été bandé dans une tentative désespérée et sans espoir d'arrêter
l'hémorragie, est choquante. Tout aussi choquant est le témoignage de la
famille, notamment celui du fils adolescent qui a accompagné son père sur le
chemin de la mort et qui insiste sur le fait qu'il n'a rien fait de mal. En
effet, son récit semble bien plus crédible que celui de l'armée et de son
porte-parole.
Nous nous
sommes rendus à Rammun lundi, le lendemain du jour où Ahmed Kahla a été tué,
puis enterré dans la terre du village. Rammun est une communauté relativement
petite et aisée du gouvernorat de Ramallah - voisine du village chrétien encore
plus aisé de Taibeh - avec une population de 3 500 habitants et des dizaines de
demeures vides. Quelque 10 000 natifs de Rammun vivent aux USA, dont environ 4
000 en Californie, 3 000 dans le Michigan et le reste dispersé dans tout le
pays [et 8 000 autres dans le reste du monde, NdT].
Rammun (1 145 habitants, 18 000 émigrés)
Rimonim, colonie établie en 1977 (715 habitants)
La colonie
de Rimonim se trouve de l'autre côté de la route Allon. On nous dit que ces derniers
jours, Nahi, l'un des colons que les villageois connaissent bien, a empêché
leurs troupeaux de moutons de paître sur leurs terres à cet endroit. Il prétend
que la terre lui appartient et les chasse. Le patriarche de la grande famille
Kahla, Abu Hani, décédé à un âge avancé il y a trois ans, a été l'homme
d'entretien de Rimonim pendant une vingtaine d'années. Il était également le
dernier habitant de Rammun à travailler dans la colonie.
Les femmes
de Rammun ont afflué dans la maison de la famille en deuil ; la voiture que le
défunt conduisait est maintenant garée devant. De leur côté, les hommes du
village se sont rassemblés dans un diwan, près de la mosquée locale. Tout le
monde est en deuil dans cette pièce spéciale, lorsque nous arrivons. Ceux qui
présentent leurs condoléances se voient offrir les habituelles dattes et le
café amer. Sur les murs du diwan sont collées des listes de noms de villageois
qui ont été tués depuis le début de l'occupation et la date à laquelle ils sont
tombés. Jusqu'à la semaine dernière, elles comptaient huit résidents, le
premier d'entre eux en 1967 et le dernier en 2014. Le nom de Kahla n'a pas
encore été ajouté ; pour l'instant, sa photo est accrochée au mur.
Kahla, qui
avait 45 ans, était marié à Zahaya, 43 ans. Ils ont quatre enfants : deux fils
- Qusay, 18 ans, et Hassan, 7 ans - et deux filles, Doha, 17 ans, et Jena, 13
ans. Le frère cadet de Kahla, Zeid, chauffeur de taxi sur la ligne
Ramallah-Silwad, semble stupéfait. Presque à voix basse, lui et les autres
personnes présentes racontent ce que la famille sait de l'incident grâce à des
témoins oculaires et surtout grâce à Qusay, qui était avec son père lorsqu'il a
été tué et qui s'est terré chez lui en état de choc, refusant de parler à qui
que ce soit.
Ahmed et
Qusay ont quitté la maison vers 7h30 le dimanche 15 janvier, pour se rendre à
leur lieu de travail dans le village de Deir Sudan, non loin de la nouvelle
ville palestinienne de Rawabi. Qusay a obtenu son diplôme d'études secondaires
l'année dernière et envisage d'obtenir un diplôme en informatique. Jusqu'au
début de la prochaine année scolaire, il aidait son père au travail. Ahmed
conduisait son 4X4 Hyundai, son fils était assis à ses côtés.
Les funérailles d'Ahmed Kahla.
Photo : AHMAD GHARABLI - AFP
Sous le pont
entre Silwad et Yabrud, au nord de Rammun, ils ont repéré un poste de contrôle
surprise des FDI. Qusay a raconté plus tard à la famille que son père avait été
obligé de s'arrêter et qu'une longue file de véhicules avait commencé à se
former derrière eux : les soldats avaient bloqué toute la circulation sur
la route, dans les deux sens. Cela semblait être une démonstration de contrôle,
un abus matinal du type de ceux que les soldats commettent parfois. Il y a eu
des incidents où des conducteurs palestiniens ont vu les soldats s'amuser avec
leurs téléphones portables tandis que les gens qui attendaient dans des files
interminables de voitures étaient en colère. Ce matin-là aussi, les conducteurs
étaient en colère et certains d'entre eux ont commencé à klaxonner, la seule
expression de protestation tolérée par ici. Personne n'osait sortir de sa
voiture. Qusay se souvient qu'ils ne pouvaient pas voir la fin de la ligne dans
les deux directions.
Soudain, un
soldat a jeté une grenade paralysante sur leur voiture. Qusay a dit que son
père a commencé à crier sur les soldats. En réponse, trois d'entre eux se sont
approchés de la voiture, deux du côté de Qusay, l'autre du côté du conducteur.
L'un d'eux a aspergé Qusay de gaz poivré, le rendant temporairement aveugle.
Les soldats l'ont sorti brutalement du 4x4, les yeux fermés et brûlants, l'ont
traîné sur quelques mètres et l'ont jeté sur le bord de la route.
Son père,
désemparé, est sorti du véhicule, en criant. Les soldats ont fait coucher
Qusay, qui ne voyait toujours rien, sur le ventre ; ils lui ont ordonné de
croiser les mains derrière le dos mais ne l'ont pas menotté. Soudain, il a entendu
des coups de feu. Quelques instants plus tard, il a entendu le hurlement d'une
sirène - une ambulance - et des cris, apparemment d'autres conducteurs dans la
file.
Le pont sous lequel Ahmed
Kahla a été exécuté. Photo : MOHAMAD TOROKMAN/Reuters
D'après ce
que des témoins oculaires ont raconté à la famille, Ahmed a sauté hors de la
voiture, craignant pour la sécurité de son fils après l'avoir vu se faire
asperger de gaz poivré et emmener. À ce moment-là, un soldat s'est approché du
père et lui a tiré deux balles dans le cou. Il s'est effondré sur le sol,
saignant abondamment. Les soldats sont rapidement montés dans leur jeep et ont
filé rapidement. Une ambulance palestinienne qui avait été appelée par des automobilistes
est arrivée et s’est occupée d’Ahmed. Les tentatives de réanimation ont été
inutiles ; il était probablement mort sur le coup.
L'unité du
porte-parole des FDI a déclaré cette semaine en réponse à une question de Haaretz
: « Une force de Tsahal a repéré un véhicule suspect près du village de
Silwad, sur le territoire de la brigade Binyamin. Les suspects ont refusé de
s'arrêter pour un contrôle de sécurité comme prévu, la force a répondu avec des
moyens de dispersion de la manifestation, et une confrontation violente a
éclaté sur le site. Pendant la confrontation, le suspect a essayé de saisir
l'arme d'un des combattants. La force a répondu par des tirs visant le suspect
et a constaté qu’ils avaient fait mouche. L'incident fait l'objet d'une enquête ».
Ahmed a été
emmené à l'hôpital gouvernemental de Ramallah, où sa mort a été prononcée.
Qusay a été conduit dans une voiture privée à la clinique de Silwad, non loin
de là, où l'on s'est efforcé de le calmer. Il ne savait pas encore ce qui était
arrivé à son père, mais il a insisté pour aller le voir à l'hôpital de Ramallah,
où il a été conduit.
Des personnes pleurant
Ahmed Kahla à la mosquée locale. Photo : Alex Levac
Zeid, le
frère d'Ahmed, qui se trouvait à Ramallah à ce moment-là, a vu un message dans son
groupe WhatsApp de chauffeurs de taxi peu de temps après la fusillade,
indiquant que des soldats avaient tiré sur quelqu'un sous le pont près de
Silwad. Immédiatement après, l'image horrible d'Ahmed est apparue dans les
médias sociaux. Zeid s'est précipité à l'hôpital, tout comme la femme d'Ahmed
et leurs enfants, même le petit Hassan.
Qusay, lui,
s'est réfugié dans sa maison. « Qu'est-ce que tu attendes ? », ont
demandé ses proches dans le diwan. Pour sa part, Zeid a noté que le rêve
d'Ahmed était de voir ses enfants aller à l'université, et qu'il travaillait du
matin au soir pour que cela soit possible. « Je ne veux pas qu'ils
rentrent à la maison comme moi le soir, avec des vêtements sales du travail »,
disait souvent Ahmed.
Trois des
frères et un neveu du défunt sont venus des USA en début de semaine pour prendre
part aux rituels de deuil. Le frère aîné d'Ahmed, Hani, qui vit à Rammun, s'est
joint à la conversation dans le diwan. Il a 65 ans et est sourd. Portant un
keffieh et une cape, il a exprimé ses sentiments au moyen d'une langue des
signes agitée. Son frère traduit : « Pourquoi l'ont-ils tué ? Ils sont
fous ? Il voulait leur parler, pas les attaquer. Pourquoi l'ont-ils tué ? »
Hani
raconte qu'à chaque fois qu'il voit des soldats, il lève les mains en l'air,
par sécurité.