31/12/2024

GIDEON LEVY
Dans le nord de Gaza, il ne reste aucune infrastructure, que ce soit pour le terrorisme ou pour la vie

L’armée israélienne a envahi l’enceinte de l’hôpital Kamal Adwan à Beit Lahia tôt vendredi matin et a ordonné à tous les patients et au personnel médical de l’évacuer.

Gideon Levy, Haaretz, 29/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala


Un patient évacué de l’hôpital Kamal Adwan dans le nord de la bande de Gaza, vendredi. Photo : Dawoud Abu Alkas / Reuters

Des dizaines de personnes effrayées, dont certaines tenaient à peine debout, se sont entassées dans la cour de l’hôpital dans la nuit froide de Gaza ; puis les soldats leur ont ordonné de se déshabiller et de commencer à marcher, nus.

Une vidéo montre une file de personnes, enfoncées dans le sable, au milieu des décombres ; des hommes nus, les bras levés, entourés de chars israéliens, aussi humiliés qu’il est possible de l’être pour des êtres humains.

Ils sont restés nus pendant des heures dans le froid nocturne de Gaza. Derrière eux se trouvaient les mourants et quelques membres du personnel médical qui ne les avaient pas abandonnés, soit environ 25 personnes.

L’armée israélienne a bombardé l’hôpital ; cinq membres du personnel médical ont été tués. Des incendies ont éclaté dans le laboratoire et le service de chirurgie de l’hôpital.

Incendie à l’extérieur de l’hôpital Kamal Adwan à Gaza, cette semaine. Photo Stringer/Reuters

Certains patients ont été envoyés dans ce qui restait de l’hôpital indonésien voisin, que les forces de défense israéliennes avaient investi trois jours plus tôt.

Des dizaines de personnes ont été arrêtées à Kamal Adwan pour être interrogées, y compris le directeur de l’hôpital, le Dr Hossam Abu Safiya, qui aurait été libéré samedi.

Des médecins de Gaza sont morts lors d’interrogatoires ou en prison. Ibrahim, le fils d’un médecin qui n’abandonnait pas ses patients, a été tué il y a quelques mois et est enterré dans l’enceinte de l’hôpital.

J’ai écrit sur l’hôpital Kamal Adwan, mais la dernière fois que je l’ai visité, en 2006, je l’ai décrit comme une « clinique minable ». À l’époque, un vieil homme blessé avait été transporté d’urgence sur une charrette tirée par un âne vers ce qui ressemblait plus à une clinique du tiers monde qu’à un hôpital.

Il est peu probable que le travail de développement et les dépenses civiles à Gaza pendant les années de siège du territoire par Israël aient élevé Kamal Adwan au rang d’hôpital, mais c’était le dernier endroit dans le nord de la bande de Gaza où l’on pouvait encore dispenser des soins médicaux aux Palestiniens qui n’avaient pas encore fui l’épuration ethnique. Combien de patients survivront aux nuits à venir ? Nous ne le saurons jamais.

L’unité du porte-parole de l’IDF s’est empressée de faire son travail et de masquer les crimes. Les forces « ont commencé à opérer dans la zone de l’hôpital Kamal Adwan à la suite de renseignements préalables concernant la présence d’infrastructures et d’agents terroristes ».

Aucune preuve n’a été présentée samedi, et l’incendie qui s’est déclaré dans l’hôpital n’est pas non plus le fait de l’armée. Les FDI brûlent des hôpitaux ? Inconcevable.

Une enquête préliminaire n’a trouvé « aucun lien » entre l’activité militaire et l’incendie », a déclaré l’armée. La foudre a peut-être frappé le service de chirurgie, la cigarette d’un patient a peut-être déclenché l’incendie.

Jeudi, à Gaza, l’armée a tué cinq journalistes qui se trouvaient à l’intérieur d’un véhicule portant clairement la mention « PRESSE » et a affirmé qu’il s’agissait de « terroristes » et d’« agents de propagande de combat ».

Des membres de la défense civile éteignent l’incendie d’une camionnette de radiodiffusion à la suite d’une attaque israélienne qui a fait cinq morts, jeudi. Photo : Khamis Said/Reuters

Leur « propagande de combat » était certainement bien inférieure à la propagande de combat de presque tous les correspondants militaires en Israël, mais si le Hamas avait tué cinq reporters israéliens, le tollé aurait atteint les cieux.

La veille, les FDI ont empêché l’évacuation vers un hôpital de deux femmes blessées lors de l’attaque d’une maison dans le camp de réfugiés de Toulkarem en Cisjordanie ; elles sont décédées. Apparemment, Gaza se trouve aussi à Toulkarem.

Il n’y a plus de guerre à Gaza, seulement la mort et la destruction infligées par un camp, interrompues occasionnellement par les spasmes de la résistance. Mais lorsque l’objectif est un nettoyage ethnique qui tend vers le génocide, le travail ne peut s’arrêter ne serait-ce qu’un instant. La fin justifie tous les moyens.

Après 14 mois de tueries et de destructions insensées, il ne reste plus aucune « infrastructure terroriste » à l’hôpital Kamal Adwan, tout simplement parce qu’il ne reste plus aucune infrastructure du tout, ni pour la terreur ni pour la vie, dans le nord de la bande de Gaza.

Ces récits ont pour but d’effacer le nettoyage ethnique qui nécessite une destruction complète afin que personne ne puisse jamais retourner dans sa maison, tout comme lors de la précédente Nakba.

Et supposons que parmi les lits des patients mourants de l’hôpital se soient cachés cinq ou peut-être même six terroristes : en décembre 2024, Israël se croit encore autorisé à se déchaîner à sa guise, comme en octobre 2023. Même dans les hôpitaux.


30/12/2024

Face au Makhzen, mon amère victoire, par Ignacio Cembrero

Ignacio Cembrero, el confidencial, 29/12/2024
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

Face au harcèlement judiciaire par la monarchie alaouite, les journalistes peuvent se cuirasser psychologiquement. Face au soutien apporté à Rabat par les gouvernements espagnols, notamment celui du PSOE, c’est impossible. Ils torpillent la défense du journaliste. Leurs agissements font mal.

José Manuel Albares, ministre espagnol des Affaires étrangères, Pedro Sánchez, président du gouvernement de Madrid, Aziz Akhannouch, Premier ministre marocain, et Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères, à Rabat en février 2024. Photo Jalal Morchidi Pool/EFE

Il était presque minuit le jeudi 19 décembre. Cela faisait déjà 12 heures que mon avocat, Javier Sánchez Moro, m’avait annoncé la grande nouvelle : le Royaume du Maroc ne ferait pas appel devant le Tribunal suprême de la décision de l’Audience provinciale de Madrid de rejet de sa plainte pour « action de jactance* », pour l’avoir accusé d’être responsable de l’espionnage de téléphones portables au moyen du programme malveillant Pegasus.

Cela faisait déjà 12 heures que j’avais diffusé la nouvelle par le biais de listes de diffusion et de réseaux sociaux , mettant ainsi fin à deux ans et demi de persécution judiciaire , précédés de huit autres années au cours desquelles le gouvernement marocain avait réussi à me faire inculper par l’Audience nationale pendant des mois pour apologie du terrorisme. Sa plainte a finalement été classée sans suite et il n’y a pas eu de procès.

Depuis le jeudi 19 à midi, j ‘ai reçu des centaines de messages de félicitations. Des confrères journalistes, des associations de presse, des hauts fonctionnaires d’institutions publiques, des hommes politiques de tout l’échiquier parlementaire, des amis ou de simples lecteurs que je ne connaissais pas me les ont envoyés en privé, mais aussi par le biais des réseaux sociaux. Parmi ceux qui m’ont écrit, il y avait même des membres du PSOE, le parti dont le secrétaire général, Pedro Sánchez, en mars 2022, s’est aligné sur la solution préconisée par le Maroc pour résoudre le conflit du Sahara occidental.

Jeudi soir, il était presque minuit et je n’en pouvais plus. Pas un seul membre du gouvernement espagnol ne m’avait félicité. Je n’en connais pas beaucoup, mais je connais une poignée de ministres et de secrétaires d’État avec lesquels j’ai partagé une table ou bavardé pendant un certain temps avant qu’ils n’entrent au gouvernement. J’ai même donné une conférence en duo avec l’un d’entre eux, organisée par le Parlement européen.

Ce soir-là, je n’en pouvais plus et j’ai envoyé un petit message privé à tous ceux qui figuraient dans mon agenda. Je leur ai dit qu’un jour comme aujourd’hui, j’aurais été heureux de recevoir les félicitations d’un membre du gouvernement espagnol. Ils ont dû le voir car, au moins sur WhatsApp, les deux petits V confirmant la réception sont apparus . Albares a été l’exception. Je ne lui ai pas écrit parce que c’est un cas désespéré si l’on en juge par les réponses évasives qu’il a toujours données aux questions parlementaires sur les plaintes du makhzen contre moi.

Ils ont dû voir le message, mais tous, sauf un, m’ont opposé le silence. Celle qui m’a répondu m’a immédiatement rappelé qu’elle avait eu une journée chargée, s’est excusée et m’a envoyé de chaleureuses félicitations. Je lui en suis très reconnaissant. Ses paroles m’ont fait plaisir, mais elles n’ont pas compensé mon mécontentement face au silence de ses collègues du gouvernement.

Ce silence rend amère ma victoire, la quatrième en justice en une décennie, contre le Maroc, son gouvernement, ses espions et, depuis peu, la monarchie alaouite sans intermédiaires. Après une décennie de harcèlement judiciaire , je suis devenu presque psychologiquement résistant à leurs attaques. Ce à quoi je ne me suis jamais habitué, c’est que ce sont mes propres compatriotes, et plus encore les sociaux-démocrates, auxquels je m’identifiais, qui ont soutenu les autorités du pays voisin dans leur harcèlement judiciaire.

Les premiers signes du soutien à Rabat contre le journaliste espagnol que je suis sont apparus quand le Parti Populaire gouvernait. Depuis la première investiture de Pedro Sánchez, ils se sont accentués. Je ne citerai que quelques exemples parmi une très longue liste. Les députés socialistes espagnols - mais pas le reste de leur groupe - ont voté au Parlement européen, le 19 janvier 2023 , contre une résolution qui, entre autres, demandait aux autorités marocaines de mettre fin au harcèlement judiciaire dont j’étais victime. Ils n’ont jamais expliqué leur vote, qui concordait avec celui des « lepénistes », l’extrême droite française.**

Un commissaire européen que je connais a laissé entendre l’ année dernière à Nasser Bourita, le ministre marocain des Affaires étrangères, que, pour de nombreuses raisons, il était souhaitable que Rabat retire sa plainte contre moi. Bourita a rejeté cette suggestion et s’est étonné qu’un commissaire européen s’intéresse au journaliste espagnol alors que les ministres espagnols qu’il avait rencontrés ne le faisaient pas.

J’étais bien naïf de m’attendre à ce qu’Albares intercède en ma faveur. Le gouvernement espagnol a accepté de se réconcilier avec le Maroc, en mars 2022, sans retirer les poursuites judiciaires inspirées par Rabat contre l’ancienne ministre des Affaires étrangères, Arancha González-Laya, et son chef de cabinet, Camilo Villarino, pour avoir organisé l’accueil en Espagne de Brahim Ghali, le dirigeant du Polisario malade  du Covid. Des rapports du CNI [Centre national du renseignement] publiés par le quotidien El País l’attestent .

Tout ce qui a un lien avec le ministère espagnol des Affaires étrangères est, pour moi, un territoire interdit. Je n’ai jamais été invité aux briefings que les collaborateurs d’Albares ont donné, par exemple, pour expliquer le changement d’attitude sur le Sahara Occidental. La Casa Árabe de Madrid, mais c’était à l’époque où José Manuel García-Margallo était ministre, ne m’a pas permis de présenter mon livre La España en Alá (L’Espagne en Allah) à son siège. Le veto s’est même étendu à mon premier avocat, Javier Sánchez Sánchez, qui a publié un beau roman se déroulant dans les dernières années de la colonisation du Sahara par l’Espagne.

L’Institut royal Elcano a également cessé de m’inviter aux réunions à huis clos qu ‘il organisait avec des personnalités du monde islamique de passage à Madrid. Il s’est justifié auprès des autres participants en prétendant que j’avais divulgué des propos tenus « off the record » [officieusement]. Des années plus tard, l’un des premiers ministres m’a avoué dans un message privé qu’« avec le Maroc impliqué , c’était très compliqué ». Je le remercie pour sa franchise, tout comme j’apprécie la sincérité de ceux qui, à l’École diplomatique, m’ont avoué que je ne donnerais plus jamais de conférences à leurs étudiants car « il y a des instructions venues d’en haut ».

Mais il y a pire que les vétos, ce sont les barrages. En 2015, toujours avec García-Margallo à la barre, le consul d’Espagne à Paris a refusé d’accepter une déclaration d’ un journaliste du Monde que j’allais utiliser pour me défendre dans un procès intenté à Madrid par Ahmed Charai, responsable des relations publiques de la Direction générale des Études et de la Documentation (DGED), le service de renseignement extérieur et de contre-espionnage du Maroc, Le consul, sur ordre de Madrid, a dit au journaliste de s’adresser à un notaire français. Malgré cela, j’ai obtenu gain de cause.

Le département de la sécurité nationale de la Moncloa*** a, quant à lui, fourni des munitions aux avocats du Royaume du Maroc avec son rapport 2023. Il désigne deux puissances - la Russie et la Chine - pour leurs activités hostiles en Espagne, mais omet le Maroc. Les avocats du Royaume du Maroc se sont empressés de soumettre le document à l’Audience Provinciale pour prouver « l’innocence » de leur client accusé d’espionnage avec Pegasus. Le journal marocain Barlamane par exemple, proche de l’appareil sécuritaire, s’est emparé de ce rapport pour affirmer que la sentence qui annule les poursuites contre moi est pratiquement irrelevante face aux conclusions de l’équipe de la Moncloa.

À voix basse, un cadre socialiste, un collaborateur d’Albares, a expliqué que le harcèlement judiciaire dont je fais l’objet est dû au fait que je suis « anti-marocain ». Je tiens à le dire haut et fort : je ne suis pas anti-marocain, tout comme les antifranquistes n’étaient pas antiespagnols, même si la propagande de la dictature s’obstinait à les présenter comme tels.

Je passe beaucoup de temps en ligne avec des Marocains vivant dans leur pays et dans diverses parties de l’Europe. Certains d’entre eux sont des amis de longue date. Je leur dois certaines de mes exclusivités journalistiques. Je connais mon voisin et c’est pourquoi, lorsque les tensions étaient vives entre l’Espagne et le Maroc en 2021, j’ai été invité à plusieurs reprises à des réunions à huis clos pour donner mon avis sur les intentions de la maison royale marocaine, là où se trouve le véritable pouvoir.

C’était une autre époque. Maintenant que les deux voisins sont de grands amis, analyser dans des articles de presse le comportement de Rabat, y compris son utilisation massive de Pegasus pour espionner sans dépenser un dollar, c’est se mettre à dos les deux parties.

NdlT

*Acción de jactancia : action dirigée contre une personne qui se vante publiquement d’avoir un droit contre une autre afin de l’obliger à établir la réalité de ses allégations sous peine d’être vouée à un silence perpétuel.

**Cette résolution a été la première dans les 44 ans de vie du Parlement européen, critiquant le régime marocain pour atteintes à la liberté de l’information.

***Le palais de la Moncloa, à Madrid, est la résidence officielle du président du gouvernement (Premier ministre)



29/12/2024

La chasse aux millions de dollars : la guerre secrète du Mossad contre les finances de la résistance palestinienne et libanaise

Pendant des années, Udi Levy a dirigé une unité du Mossad chargée de surveiller les flux de fonds destinés aux groupes de la résistance, évidemment toujours qualifiés de « terroristes ». Grâce à des méthodes créatives [sic] et à l’absence quasi totale de restrictions, l’unité est parvenue à contrecarrer les transferts de sommes considérables vers le Hamas et le Hezbollah. Puis elle a été fermée.

Yossi Melman, Haaretz , 4/1/2024


Udi Levy, qui dirigeait l’unité Tziltal (Harpon), aujourd’hui disparue, chargée de traquer les fonds destinés aux groupes “terroristes”. Photo : Tomer Appelbaum

En mai 2010, une jeep transportant deux passagers arrive au terminal frontalier de Rafah. Les hommes, qui avaient quitté le Caire en passant par la péninsule du Sinaï, ont subi un contrôle de sécurité superficiel après leur arrivée du côté égyptien du point de passage, et sont entrés dans la bande de Gaza à bord de leur voiture. Après avoir parcouru une courte distance, un missile a explosé devant eux, à l’improviste. Pris de panique, les deux hommes ont sauté du véhicule et se sont réfugiés sur le bord de la route. Quelques secondes plus tard, un autre missile frappe la jeep. Celle-ci a pris feu et des dizaines de milliers de billets de banque brûlés se sont envolés dans les airs.

« On se serait cru dans un film », se souvient Udi Levy, un ancien haut responsable du Mossad.

Les missiles ont été tirés par un drone de l’armée de l’air israélienne, sur la base de renseignements précis. Le conducteur et le passager n’étaient pas visés, c’est pourquoi le premier missile a été tiré en guise d’avertissement, pour leur permettre de s’échapper. La véritable cible étaient les 20 millions de dollars qui se trouvaient dans le véhicule, transférés d’une banque et de bureaux de change en Égypte, et destinés aux Brigades Ezzeddine AL Qassam, l’aile militaire du Hamas.

De hauts responsables du Hamas se sont précipités sur les lieux et ont rapidement commencé à collecter et à emballer les billets noircis. Quelques jours plus tard, les hommes du Hamas sont retournés au Caire, où ils sont entrés dans une succursale de la Banque Misr, la plus grande banque d’Égypte, dans le but d’échanger les billets endommagés contre de nouveaux. Le personnel, surpris, leur a ordonné de quitter les lieux. À ce moment-là, le personnel des bureaux de l’unité Tziltzal (Harpon), au troisième étage du quartier général du Mossad à Glilot, près de Tel-Aviv, a poussé un soupir de soulagement - parmi eux, Levy, le chef de l’unité aujourd’hui disparue.

La destruction de l’argent du Hamas lors de cet incident était une action conjointe réussie entreprise par la direction des opérations des forces de défense israéliennes, dirigée à l’époque par le général de division Tal Russo, et Harpon, l’unité secrète qui avait été créée une dizaine d’années auparavant afin de surveiller, d’avertir le monde et de déjouer les transferts d’argent vers les groupes “terroristes” et l’Iran. Le « copyright » de l’idée dans sa version israélienne appartient à feu Meir Dagan, chef du Mossad, et au Premier ministre Ariel Sharon. C’est Dagan qui a nommé Levy, alors lieutenant-colonel dans l’armée israélienne, commandant de l’unité.

Au cours de ses 15 années d’activité, Harpon a entrepris un grand nombre d’opérations. Des agents du Mossad ont été envoyés pour observer et pénétrer dans les bureaux des changeurs de monnaie ainsi que dans les banques d’Europe, d’Amérique du Sud et du Moyen-Orient, où les “terroristes” et le régime de Téhéran étaient soupçonnés de détenir des comptes.

« Nous surveillions les changeurs de monnaie dans un certain nombre de pays d’Europe », explique dans une interview à Haaretz un agent de l’unité d’opérations ultra-secrètes du Mossad, connue sous le nom de Kidon (Baïonnette), qui a ensuite été promu à la tête d’une division de l’organisation d’espionnage. « Nous surveillions les banques en Europe qui étaient soupçonnées de fermer les yeux sur les comptes d’éléments terroristes », ajoute un autre agent du Mossad. Selon le New York Times, les changeurs de monnaie en Turquie étaient particulièrement surveillés.

Israël a coopéré avec des organisations d’espionnage locales dans le cadre de ces opérations. Les agents du Mossad et de Harpon ont averti leurs homologues de l’existence de comptes suspects et ont transmis les informations aux banques, aux responsables financiers et à d’autres fonctionnaires de ces pays. Dans un cas, cela a permis de faire échouer un projet iranien de transport d’armes hors d’un pays européen.

Lors d’une autre opération, menée vers la fin de la guerre du Liban en 2006, l’armée de l’air a bombardé deux conteneurs, cachés dans le quartier chiite de Dahiya à Beyrouth, qui contenaient des dizaines de millions de dollars.

« Les dirigeants du Hezbollah, avec à leur tête [Hassan] Nasrallah et [Imad] Mughniyeh, ont été sidérés », déclare aujourd’hui Levy. « Ils étaient stupéfaits par le fait que nous sachions où l’argent était caché et que nous ayons réussi à cibler le site avec autant de précision. Ils étaient furieux que tout cet argent, destiné à financer la guerre de l’organisation, ait été détruit. Comment savons-nous leur réaction ? Nous l’avons apprise grâce aux renseignements qui nous sont parvenus après l’opération ».


Hassan Nasrallah. Photo : Bilal Hussein/AP

Levy a été le commandant du Harpon pendant la majeure partie de son existence ; il a pris sa retraite en 2016 et le Harpon a été démantelé en 2017. Vers la fin de son mandat, il a été témoin d’un changement d’approche dans les hautes sphères du gouvernement israélien vis-à-vis des efforts visant à torpiller les transferts de fonds vers les organisations “terroristes” palestiniennes.

« J’ai commencé à voir que le sujet des fonds terroristes devenait de moins en moins important pour [le Premier ministre Benjamin] Netanyahou », se souvient Levy. « Depuis sa réélection en 2015, il avait refusé d’autoriser des opérations d’importance stratégique que nous avions proposées, et avait exprimé des appréhensions quant à leurs implications. » Les opérations en question, précise-t-il, visaient principalement le Hamas.

La question du financement du “terrorisme” palestinien revêt une importance particulière à l’heure actuelle, dans le sillage de l’attaque vicieuse [sic] du Hamas le 7 octobre. Pendant des années, Netanyahou a ignoré le flux de milliards de dollars du Qatar vers l’organisation islamiste, et a même encouragé ce processus de financement. Cela faisait partie de ses efforts pour mettre au placard la solution à deux États dans le conflit israélo-palestinien. Mais l’argent, qui était censé acheter la tranquillité, a été utilisé pour renforcer les capacités militaires du Hamas, qui a pris Israël par surprise le 7 octobre.

Netanyahou a commencé à définir sa politique à la fin de l’année 2014. Yossi Cohen, alors directeur du Conseil national de sécurité et plus tard chef du Mossad, l’a soutenue, tout comme Meir Ben Shabbat, qui a succédé à Cohen à la tête du Conseil national de sécurité. Parmi les quelques personnes qui ont remis en question cette politique, on trouve Avigdor Lieberman, le ministre de la Défense de l’époque, Tamir Pardo, qui a dirigé le Mossad de 2011 à 2016, et Levy lui-même. Mais Netanyahou n’a pas tenu compte de leurs avertissements.

« Le transfert des fonds au Hamas a rendu possible l’attaque surprise du 7 octobre », dit Udi Levy. « Je ne me souviens pas que Netanyahou ait eu une seule discussion sérieuse sur les implications possibles de la puissance économique croissante du Hamas, même si on lui a montré les chiffres ». En effet, selon Levy, pendant des années, le premier ministre a rejeté les recommandations de l’establishment de la sécurité de mener une guerre économique sérieuse contre le Hamas.

Pourquoi ?

Levy : « Netanyahou et Cohen pensaient que l’apaisement du Hamas était une solution qui servait leur vision du monde et leur idéologie. Ils n’ont pas compris, ou n’ont pas voulu comprendre, que c’était en fait le problème. C’était une décision politique ».

Et cette décision, selon M. Levy, était contraire aux intérêts nationaux d’Israël.


Yossi Cohen et Benjamin Netanyahou : « Depuis sa réélection en 2015, Netanyahou avait refusé d’autoriser les opérations d’importance stratégique que nous avions proposées », se souvient Levy. Photo : Kobi Gideon/Bureau de presse du gvt. isr.

* * *

Levy, 61 ans, est né dans le quartier Hatikva de Tel Aviv. Sa mère d’origine égyptienne, Miriam, travaillait comme infirmière dans le quartier, où elle a rencontré son père, Haim, propriétaire d’un magasin de fleurs. La famille de Haim était arrivée de Perse en Palestine ottomane au début du XXe siècle. Lorsque Levy a 8 ans, la famille déménage à Holon, au sud de Tel Aviv.

Levy a été enrôlé comme « auditeur » dans l’unité de renseignement d’élite 8200. « Je ne sais pas pourquoi ils m’ont choisi », dit-il. « L’arabe que j’avais appris à la maison était très rudimentaire ». Après un cours de six mois, il est affecté à un poste d’écoute à la frontière libanaise. Lors de la guerre du Liban de 1982, il a été envoyé à un cours de formation des officiers et a ensuite occupé une série de postes clés dans le domaine du renseignement. Il a également obtenu une licence en études du Moyen-Orient à l’université de Tel Aviv. Après avoir été promu au grade de major, il a été nommé commandant d’une base 8200 à Jérusalem. « Je n’aimais pas la division du travail », explique-t-il. « J’étais responsable de la logistique, mais je voulais m’engager dans l’essentiel, avec du matériel de renseignement ».

Par chance, au plus fort de la première Intifada, il rencontre le chef de l’administration civile du gouvernement militaire, le colonel Gadi Zohar. C’est également par Zohar qu’il a entendu parler pour la première fois de la puissance économique croissante du Hamas. « Gadi m’a dit que le Shin Bet [service de sécurité] et les services de renseignements militaires n’avaient pas identifié les principaux problèmes de la population », raconte-t-il. « Ils se concentraient sur les escadrons terroristes, ne voyaient pas le tableau d’ensemble et ne comprenaient pas ce qui se passait sous la surface. L’un des enseignements tirés de cette expérience a été la décision de créer une petite unité de personnel de renseignement, sous les auspices de l’administration civile, afin de surveiller l’humeur de la population. Gadi m’a proposé d’en faire partie, ce que j’ai accepté avec plaisir ».

Quelles impressions avez-vous eues à l’époque ?

« J’ai rencontré des journalistes, des intellectuels et des commerçants [palestiniens] qui m’ont parlé de l’état d’esprit de la société palestinienne. Ils m’ont dit : « Vous [les Israéliens] ne faites pas attention à ce qui se passe à la base. Vous ne voyez pas comment le Hamas, par l’intermédiaire d’organisations à but non lucratif, construit des hôpitaux, des écoles, des jardins d’enfants, des institutions sociales, des mosquées. Vous ne voyez pas combien d’argent est acheminé dans les territoires afin de maintenir le monstre que le Hamas est en train de construire [ce qu’on appelle un État partout ailleurs, est un “monstre” dans le cas de Gaza, NdT] ».

Levy a commencé à recueillir des informations sur les activités financières du Hamas et, dans une moindre mesure, sur celles du Jihad islamique. « Lorsque j’ai écrit à l’époque, au début des années 1990, que les organisations à but non lucratif du Hamas avaient injecté en Cisjordanie et à Gaza environ un demi-milliard de dollars provenant de dons faits à l’étranger, le Shin Bet s’est moqué de moi », se souvient-il. « Ils ont prétendu que les fonds s’élevaient à 10 millions de dollars. Gideon Ezra, qui dirigeait un département du Shin Bet, nous a dit : “Ne dites pas n’importe quoi. Je ne vais pas m’occuper des écoles et des hôpitaux. Ma seule tâche est de contrecarrer le terrorisme” ».

Mais Levy a trouvé des oreilles attentives auprès du général de division Ilan Biran, alors chef du commandement central, et du coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires, le général de division Danny Rothschild. « Notre principal outil était les décisions de justice, qui nous permettaient de fermer des institutions et de confisquer de l’argent. Nous avons poursuivi des changeurs de monnaie en Cisjordanie et à Gaza, ainsi que des chefs de conseil [ ?]. Le nom de code de notre activité était biur hametz [un rituel de la Pâque qui se réfère, métaphoriquement, à l’élimination de substances inacceptables ou nocives] ».

En 1994, le général de brigade Meir Dagan, responsable des opérations spéciales à Gaza et en Cisjordanie, a rendu visite au commandement central. « Je lui ai montré le matériel que j’avais rassemblé », raconte Levy, « et à ma grande surprise, il s’est montré très intéressé par ce matériel ». Dagan et Levy ont ensuite rencontré le chef d’état-major adjoint des FDI, Matan Vilnai. « Vilnai m’a dit : “Je connais le Hamas comme ma poche - je ne pense pas que vous puissiez m’apprendre quoi que ce soit de nouveau”. C’est pourtant ce que j’ai fait. À la fin de la réunion, Vilnai était complètement abasourdi ».

En 1996, lorsque Netanyahou a été élu Premier ministre pour la première fois, il a chargé Dagan de mettre en place une unité indépendante de lutte contre le terrorisme. À son tour, Dagan a nommé Levy, alors lieutenant-colonel, pour diriger la recherche de financements terroristes.

« Nous avons commencé à impliquer la communauté internationale, en particulier les USA et l’Europe, dans une guerre économique contre le Hamas, le Jihad islamique et le Hezbollah », raconte Levy. « Nous nous sommes concentrés sur quelques organisations à but non lucratif du Hamas et du Jihad islamique qui opéraient aux USA, en Grande-Bretagne, en France et en Allemagne ».

Le tournant s’est produit en 2001, en partie à la suite de la catastrophe du 11 septembre, lorsque l’administration américaine a pris conscience de l’importance de la lutte contre le financement du terrorisme et des liens entre des organisations caritatives apparemment innocentes et des groupes terroristes. L’élection d’Ariel Sharon au poste de premier ministre la même année a constitué un deuxième tournant. Sur la recommandation de Dagan, Sharon a accepté de créer un organe secret au sein du Conseil national de sécurité, alors dirigé par Uzi Dayan. Dayan nomme l’unité Harpon, en s’inspirant de « Moby Dick » de Melville. Levy est nommé à sa tête.

« Dans mon adolescence, j’ai lu Moby Dick comme un récit d’aventure sur le monde obscur des chasseurs de baleines », se souvient aujourd’hui Uzi Dayan. « Trente-cinq ans plus tard, j’ai relu le livre. J’ai associé le nom de code Harpon au narrateur de l’histoire, Ismaël, qui décrit comment son ami attend le bon moment pour lancer son harpon mortel ».


L’ancien chef du Mossad, Meir Dagan. Photo : Alon Ron

* * *

Le travail de l’unité Harpon était sous-tendu par le slogan bien connu « Suivez l’argent ».

Levy : « De 1993 à 2016, les méthodes utilisées pour déplacer l’argent ont à peine changé. Au cours de la première décennie, de 1993 à 2003, l’argent destiné aux organisations terroristes provenait principalement d’Arabie saoudite - de son gouvernement et des dons de riches Saoudiens, qui soutenaient également Al-Qaida. Ils transféraient l’argent directement des banques saoudiennes aux banques palestiniennes, ou par l’intermédiaire de Western Union. L’Arabie saoudite a cessé de transférer de l’argent au Hamas en 2003, par crainte de la réaction des USA, après qu’il a été révélé que les Saoudiens avaient soutenu les militants d’Oussama ben Laden ».

Au début des années 2000, les Iraniens ont remplacé les Saoudiens en tant qu’élément dominant du financement du terrorisme palestinien, en prenant le contrôle des transferts d’argent vers le Hamas et le Jihad islamique, ainsi que vers l’Autorité palestinienne. La contrebande d’armes entre l’Iran et l’Autorité palestinienne en 2002 sur le cargo Karine A, qui a été saisi par la marine israélienne, en est un bon exemple. La Force Al-Quds de l’Iran a financé l’opération et acheté les armes.

Parallèlement au financement de Téhéran, l’argent a constamment afflué de dizaines d’organisations à but non lucratif - dans les Émirats arabes unis, au Qatar, en Indonésie, en Malaisie et également dans les pays occidentaux : Allemagne, France, Pays-Bas, Danemark, France, Grande-Bretagne. Ces organismes ont mené toutes sortes d’actions de collecte de fonds : de la collecte de monnaie dans les caisses de charité des mosquées à l’obtention de fonds auprès de grandes organisations caritatives occidentales à vocation sociale. « Il s’agit d’un réseau insensé d’organisations caritatives mondiales qui continue de fonctionner à ce jour », explique Levy.

Pour traquer et contrecarrer le transfert des fonds, Harpon a été investi de pouvoirs et d’une autorité inhabituels dès sa création. « Le ministre de la justice, Yaakov Neeman, nous a soutenus », raconte M. Levy, « et toutes les instances se sont jointes à l’effort : la police israélienne, l’autorité israélienne chargée de l’interdiction du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme, la Banque d’Israël, l’autorité fiscale israélienne, les banques et les procureurs de l’État et de l’armée ».

L’adjoint de Levy était P., un agent de terrain qui avait travaillé dans des États ennemis, dont l’Iran. L’avocat Paul Landes, de l’autorité chargée du blanchiment d’argent, a rejoint l’équipe et a ensuite été l’adjoint de Levy.

« Le gouvernement Sharon avait pris une décision secrète de grande portée qui nous autorisait à recevoir des informations de toute source autorisée en Israël et à agir sur la base de ces informations, ainsi qu’à être en contact avec n’importe quel gouvernement dans le monde », note Levy.

Ces pouvoirs sont toutefois à la limite de l’atteinte à la vie privée. L’unité ne pouvait pas accéder aux comptes bancaires israéliens, mais si elle soupçonnait que des organisations arabes à but non lucratif en Israël - notamment la branche nord du Mouvement islamique - servaient d’intermédiaire pour le transfert de fonds vers le Hamas et les territoires, l’information était transmise à la police et une enquête était lancée.


Suha Al Tawil, veuve Arafat, 61 ans, citoyenne française née à Jérusalem, une redoutable business woman, qui trouva même le moyen de voler 1 million de dollars à Leïla Trabelsi, alias Madame "Je prends tout", épouse puis veuve consolable de son cher Zine Abidine Ben Ali, alias ZABA, alors PDG de l'entreprise Tunisia Inc. Après la mort d'Arafat, Suha trouva le moyen de récupérer ses avoirs bancaires (notamment auprès de la Leumi Bak israélienne), au grand dam des responsables de l'(In)Autorité palestinienne, grâce au savoir-faire de son conseiller financier Edouard Rizk, un phalangiste libanais. Entre bons chrétiens, on se serre les coudes. [NdT]

L’une des opérations les plus importantes de Harpon s’est déroulée au plus fort de la deuxième Intifada, au début des années 2000, dans le but de retrouver les actifs du dirigeant palestinien Yasser Arafat, soupçonné de dissimuler des centaines de millions de dollars dans le monde entier.

« Arafat, sa femme Suha et ses assistants étaient totalement corrompus », explique Levy. Le président palestinien possédait de nombreux comptes bancaires - à Malte, en France, en Égypte, en Jordanie, en Tunisie et en Algérie - qui étaient gérés pour lui par son homme d’argent, Mohammed Rashid.

Avec l’aide du Mossad, Harpon a tenté de mettre le grappin sur les comptes bancaires d’Arafat et de son épouse. L’unité avait un double objectif : d’abord, elle espérait dévoiler ces comptes et diffuser largement des informations à leur sujet, dans le cadre d’une guerre psychologique, afin de salir Arafat et de le montrer corrompu. Harpon et le Mossad ont été aidés dans cette entreprise par des journalistes étrangers et israéliens. L’un de ces derniers va même jusqu’à lui proposer de se faire passer pour un correspondant étranger et d’essayer d’entrer en contact avec Suha. L’idée fut rejetée, mais Levy et ses agents réussirent à persuader la Banque Leumi [israélienne] de fermer le compte d’Arafat.

Le deuxième objectif était semblable à celui de Robin des Bois : saisir les comptes bancaires du couple et transférer leur argent vers un pays ami du Moyen-Orient, un allié d’Israël. Mais cette fois, Harpon n’a pas réussi.

L’unité a également utilisé des méthodes similaires contre le Jihad islamique. Son fondateur, le Dr Fathi Shaqaqi, exerçait un contrôle très centralisé sur l’organisation et ses fonds. Dès ses débuts, dans les années 1980, Shaqaqi était un mercenaire au service de l’Iran. Téhéran a financé son groupe, qui a mené certaines des attaques terroristes les plus meurtrières contre Israël, notamment l’attentat au carrefour de Beit Lid en janvier 1995, au cours duquel 22 Israéliens ont été assassinés. Au mois d’octobre suivant, des agents de l’unité Bayonet du Mossad l’ont assassiné en plein jour dans une rue de Malte. Les successeurs de Shaqaqi ont recherché les fonds du Jihad islamique mais n’ont pas pu accéder aux comptes bancaires. Des rumeurs ont circulé selon lesquelles sa femme se serait emparée de l’argent et l’aurait emporté en Iran ou ailleurs.

De son vivant, Shaqaqi n’a pas hésité à accepter d’autres sources de financement. Son homme de confiance aux USA était Sami al-Arian, professeur d’ingénierie informatique à l’université de Floride du Sud. Al-Arian a été arrêté en 2003 et inculpé de 17 chefs d’accusation pour appartenance à une organisation terroriste, financement d’une organisation terroriste, blanchiment d’argent et autres.

À peu près à la même époque, Levy a été envoyé en Floride au nom de l’État d’Israël, où il a été autorisé pendant trois mois à partager des documents et des informations de renseignement avec le FBI et le département du Trésor. Finalement, Arian a été acquitté de la moitié des chefs d’accusation ; il a signé un accord de plaidoyer et a purgé moins de cinq ans de prison. Après sa libération, en 2014, il a été expulsé des USA et a créé un centre de recherche dans une université d’Istanbul, qui, selon les services de renseignement israéliens, est également impliquée dans le transfert de fonds à des groupes terroristes.

La plus grande réussite de Harpon a été la lutte économique contre l’Iran. Grâce à son travail, Israël a pu, au fil des ans, persuader les USA et les pays d’Europe occidentale d’imposer de lourdes sanctions à l’Iran, dont la plupart sont encore en vigueur aujourd’hui. Plus précisément, Harpon, en collaboration avec les divisions de recherche du Mossad et du renseignement militaire, a fourni des informations sur la base desquelles des recommandations ont été formulées quant aux industries et aux entreprises iraniennes à sanctionner.

« Mon mandat de directeur du Mossad a joué un rôle essentiel dans la guerre économique contre l’Iran », explique Tamir Pardo à Haaretz, « ainsi que contre le Hamas et le Hezbollah ».

Harpon n’a pas mené d’actions sur le terrain contre les banques iraniennes, en raison de problèmes opérationnels et de la crainte de mettre son personnel en danger. Il a toutefois réussi à repérer et à marquer les fonds utilisés par des entreprises et des particuliers iraniens qui tentaient de contourner les sanctions afin d’introduire en contrebande des composants pour des projets de missiles et d’armes nucléaires. Les informations ont été transmises aux gouvernements de l’Occident et de l’Extrême-Orient, ce qui a permis d’empêcher la contrebande des équipements, qui ont souvent été confisqués.

L’un des points de référence des activités de Harpon a été de persuader Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne de 2011 à 2019, de prendre des mesures énergiques contre l’Iran. « Draghi nous a beaucoup aidés », note Levy, ajoutant que le développement le plus important a été la décision d’interdire à l’Iran et à ses citoyens l’accès au système international de compensation monétaire SWIFT. Ces actions ont amené Téhéran à la table des négociations et ont conduit à la signature de l’accord nucléaire de 2015.

Les efforts déployés pour découvrir et saborder les sources de financement des organisations terroristes ont également échoué. Levy et un haut responsable du Shin Bet se sont rendus à Dubaï, par exemple, pour convaincre le dirigeant de cette ville de cesser de financer le Hamas. Celui-ci leur a montré la porte.

« Ce sont les plus grands blanchisseurs d’argent du Moyen-Orient », déclare Levy à propos du gouvernement de Dubaï. « Presque toutes les sociétés affiliées aux Gardiens de la révolution iraniens et à leurs services de renseignement ont des représentations et des bureaux à Dubaï, ce qui les aide à blanchir de l’argent et à contourner les sanctions ».

Vous connaissiez bien les dirigeants du Hamas et du Hezbollah. À quelle profondeur estimez-vous que leur corruption s’étend ?

« Imad Mughniyeh était corrompu - il avait des maisons et des comptes bancaires à Damas et en Iran [selon des sources étrangères, il a été assassiné lors d’une opération conjointe du Mossad et de la CIA en 2008]. Nasrallah aussi ; lui et sa famille sont très riches. Nasrallah préfère ne pas garder son argent dans les banques au Liban, à cause des sanctions contre ce pays et contre lui, mais plutôt en Syrie et en Iran ».

Et le Hamas ?

« Au début, les dirigeants du Hamas se comportaient modestement et étaient certainement beaucoup moins corrompus que les dirigeants de l’OLP. Mais au cours des dernières décennies, Khaled Meshal et Ismail Haniyeh sont devenus milliardaires, avec de nombreux biens au Qatar, et des comptes dans la plus grande et la plus importante banque de ce pays, la Banque nationale. »

Et Yahya Sinwar ?

« Idem. Jusqu’à la guerre actuelle, il possédait de luxueuses villas à Gaza, mais il a aussi des biens au Qatar et des comptes bancaires dans ce pays. Bref, ils sont pris en charge, ainsi que toutes leurs familles et leurs enfants. »

* * *

En effet, un changement radical s’est produit en 2014 : Le Qatar a commencé à envoyer des fonds à la bande de Gaza. Israël l’a autorisé à faire entrer des valises remplies de millions en liquide, par l’intermédiaire de son ambassadeur à Ramallah. Pour sa part, Levy a pris sa retraite en 2016 et a passé un doctorat à Bar-Ilan, rédigeant une thèse sur l’islam radical, et s’est impliqué dans des entreprises privées. La même année, Yossi Cohen prend la tête du Mossad. Il décide de démanteler Harpon et de répartir ses responsabilités entre deux bureaux. Meir Ben-Shabbat, qui venait de prendre la direction du Conseil national de sécurité, affirme qu’il n’a pas été impliqué dans cette décision, qui a été autorisée par le cabinet de sécurité en mars 2018. À la place de Harpon, le ministère de la Défense a créé le Bureau national de lutte contre le financement du terrorisme, aujourd’hui dirigé par Paul Landes. Les autres rôles de la défunte unité, notamment la collecte et la concentration d’informations de renseignement pertinentes, ont été transférés au département de recherche du renseignement militaire.

Cohen a refusé de répondre à la question de Haaretz sur les raisons qui l’ont poussé à démanteler l’unité. Levy, pour sa part, a du mal à comprendre les raisons de cette décision.

« Peut-être voulait-il laisser une trace en la démantelant et en formant de nouvelles unités », dit-il. « Ce dont je me souviens, c’est que Yossi m’a toujours demandé de dire du bien de lui à Dagan, qui était non seulement mon professeur et mon mentor, mais aussi un ami personnel ».

Le bureau de M. Netanyahou a refusé de commenter cet article. [et on peut toujours rêver à une unité du Mossad chargée de pister son argent, celui de sa femme et de sa bande, NdT]



27/12/2024

REINALDO SPITALETTA
El olivo muerto/L'olivier mort

 

Déjame llorar junto al olivo muerto

Antes de la nueva lluvia de fuego

Antes de que caiga el maná de los bárbaros

Déjame llorar aunque se fatiguen mis lágrimas.

Déjame de hinojos junto a la casa caída

Déjame yacer en esta horadada tierra antigua

Arrasada no por el cambio climático ni la profecía

Destruida por el fuego de las bombas bíblicas.

Cuatro mil años tenía este olivo muerto

Mi gente tenía tal vez un poquito menos

Y está muerta sobre su suelo desolado,

Bajo los tanques invasores y la muerte celeste.

No hay niños, no hay mujeres, nada ni nadie

Solo mi llanto seco junto al olivo inerte

No existe la fe, no existe el milagro

Ninguna ocasión de que el mundo despierte.

(Reinaldo Spitaletta, en Medellín a 27 de diciembre de 2024)

Laisse-moi pleurer près de l’olivier mort

Avant la nouvelle pluie de feu

Avant que ne tombe la manne des barbares

Laisse-moi pleurer, même si mes larmes s’épuisent.

Laisse-moi m’agenouiller près de la maison tombée

Laisse-moi m’allonger sur cette antique terre éventrée

Dévastée non pas par le changement climatique ou la prophétie

Détruite par le feu des bombes bibliques.

Cet olivier mort avait quatre mille ans

Mon peuple en avait peut-être un peu moins

Et il est mort sur son sol saccagé,

Sous les chars d’invasion et la mort tombée du ciel.

Il n’y a pas d’enfants, pas de femmes, rien ni personne.

Seulement mes pleurs secs près de l’olivier inerte.

Il n’y a pas de foi, il n’y a pas de miracle

Aucune chance que le monde se réveille.

ROBERT TAIT
Les détentions de familles vont reprendre dans le cadre de la répression de l’immigration, selon le “tsar des frontières ” de Trump


Tom Homan a également déclaré que les parents sans papiers d’enfants nés aux USA seraient expulsés, avec ou sans leurs enfants.

Robert Tait à Washington, The Guardian, 26/12/2024
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les autorités usaméricaines chargées de l’immigration reprendront la politique controversée consistant à placer les familles avec enfants dans des centres de détention dans le cadre d’une campagne d’expulsion des immigrés sans papiers, a déclaré le « tsar des frontières » de la future administration Trump, Tom Homan.


Tom Homan s’exprime lors de la conférence AmericaFest 2024 à Phoenix, Arizona, le 22 décembre. Photo : Cheney Orr/Reuters : Cheney Orr/Reuters

Homan, considéré comme « l’architecte » de la politique de séparation des familles, largement vilipendée, appliquée aux immigrants sans papiers sous la première administration Trump, a également déclaré que les fonctionnaires n’hésiteraient pas à expulser les parents dont les enfants sont citoyens usaméricains parce qu’ils sont nés aux USA.

Il appartiendra aux parents de décider s’ils veulent quitter le pays en tant que famille ou laisser leurs enfants aux USA, en séparant ainsi leurs familles.

« Voilà le problème », a déclaré Homan lors d’un entretien avec le Washington Post. « Vous saviez que vous étiez dans l’illégalité et vous avez choisi d’avoir un enfant. Vous avez donc mis votre famille dans cette situation ».

Il a précisé que les agents des services de l’immigration et des douanes (ICE) retiendraient les parents avec leurs enfants dans des tentes à parois souples, semblables à celles utilisées pour gérer les flux d’immigration à la frontière méridionale des USA.

« Nous allons devoir construire des installations pour les familles », a déclaré Homan. « Le nombre de lits dont nous aurons besoin dépendra des données disponibles ».

L’administration Biden a mis fin à la détention des familles en 2021, en fermant trois centres d’environ 3 000 lits gérés par l’ICE. Ces fermetures ont fait suite aux critiques de défenseurs de l’immigration et de pédiatres, qui ont mis en garde contre les effets néfastes de ces conditions sur les enfants.

La volonté de Homan de relancer l’ICE est le signal le plus clair qu’il ait donné jusqu’à présent sur la manière dont il compte mettre en œuvre la promesse répétée du président élu Donald Trump d’expulser environ 11 millions d’immigrés sans papiers.

Il a déclaré que la politique de l’administration Trump consisterait à expulser les familles ensemble, tout en reconnaissant que le gouvernement n’avait pas le pouvoir légal d’expulser les enfants nés aux USA, et qu’il incombait donc aux parents immigrés de décider s’il fallait ou non séparer une famille.

Il a ajouté : « Nous devons montrer au peuple américain que nous pouvons le faire sans être inhumains. Nous ne pouvons pas perdre la confiance du peuple américain ».

Lors de la première présidence de Trump, pendant laquelle il était directeur intérimaire de l’ICE, Homan a été crédité d’être la force motrice d’une politique distincte de « tolérance zéro » envers les migrants, qui a vu 4 000 enfants séparés de leurs parents après avoir franchi la frontière sud des USA.

Homan a déclaré au Post qu’il ne souhaitait pas s’engager sur un nombre cible d’expulsions tant qu’il ne connaîtrait pas les ressources disponibles pour augmenter la capacité de l’ICE, ajoutant : « Je vais me mettre dans une situation difficile, car je n’ai pas les moyens de faire face à la situation : « Je m’exposerais à une déception ».

En tant que tsar des frontières de la Maison-Blanche - un poste qui ne nécessite pas la confirmation du Sénat - Homan n’aura pas de contrôle direct sur l’ICE, qui relèvera de Kristi Noem, la candidate de Trump au poste de secrétaire à la Sécurité intérieure, si elle est confirmée dans ses fonctions.

Alors que Trump et ses principaux conseillers ont évoqué la possibilité d’utiliser les troupes de la garde nationale pour procéder aux expulsions, Homan a déclaré que seuls les agents des forces de l’ordre ayant reçu une formation seraient autorisés à procéder à des arrestations liées à l’immigration, le personnel militaire étant limité au transport et à d’autres services d’appui.

« Je ne vois pas l’armée menant des opération de ratissage dans les quartiers », a-t-il déclaré. Au contraire, les arrestations seraient « ciblées » sur les personnes ayant un casier judiciaire.

Il a déjà promis d’emprisonner les maires démocrates  et les fonctionnaires qui cherchent à bloquer les déportations.

Les descentes sur les lieux de travail effectuées par les fonctionnaires de l’ICE, auxquelles l’administration Biden avait mis fin, seraient relancées, a déclaré Homan. « Nous n’avons pas encore élaboré de plan pour l’application de la loi sur les lieux de travail. Nous savons que les employeurs seront mécontents ».

Il a aussi déclaré qu’il exhorterait la nouvelle administration à réintroduire le programme « rester au Mexique » - également abandonné par Biden - qui obligeait les demandeurs d’asile à attendre en dehors des USA pendant que leur demande était examinée.


"On peut expulser en masse sans séparer les familles...
...il suffit d'expulser toute la famille ensemble"

Tom Homan et Greg Abbott, vus par Ed Wexler. Greg Abbbott, gouverneur paraplégique du Texas, est une autre figure obscure du trumpofacisme : il s’est vanté d’avoir expédié des dizaines de milliers de migrants latinos dans les villes et comtés administrés par des démocrates « z’ont qu’à se démerder avec »), il a fait interdire l’avortement même en cas de grossesse due à un viol ou un inceste, libéralisé le port d’arme, supprimé la pause de 10 minutes toutes les 4 heures pour les travailleurs du bâtiment en cas de fortes chaleurs, et a dressé une liste de 850 ivres à faire disparaître des bibliothèques, dont ceux de Martin Luther King Jr.. En février 2021, il a été férocement critiqué pour sa responsabilité dans l’incapacité des services de l’État à fournir de l’électricité à 250 000 habitants, dont plusieurs sont morts, suite à la vague de froid polaire qui s’est abattue sur ce charmant État, dont le chanteur de folk Phil Ochs avait déclaré pendant la guerre du Vietnam : « Si j’étais Dieu, je bombarderais le Texas » |NdT]


25/12/2024

LUIS E. SABINI FERNÁNDEZ
Israel ataca pero declara defender

Luis E. Sabini Fernández, 23-12-2024

El régimen instaurado por el sionismo en la Palestina histórica ha revelado una capacidad de daño, de impunidad, de duplicidad, de violencia,  que no registramos todo a la vez en tantas otras circunstancias atroces de atropello a la vida, a los derechos humanos que coexisten en todo el planeta.

"Es un libelo de sangre pinchar en «play» a nuestros tiktoks genocidas"
Viñeta de Eli Valley

Es fácil advertir estas manifestaciones a partir del 7 de octubre de 2023, con el inusitado ataque armado de Hamás y otras agrupaciones palestinas que al parecer aprovecharon “la oportunidad” para salir de debajo de la bota que desde hacía ya décadas el sionismo había puesto sobre toda la franja gazatí.
Pero las atrocidades sionistas no comenzaron el 7-8 de octubre de 2023, por cierto.
Tampoco en 1967, cuando  EE.UU. comienza a respetar el papel israelí como “jugador de primera”, es decir con poder militar propio. Ni siquiera en 1948, cuando violando hasta las demarcaciones onusianas, las tropas sionistas se adueñan del 78% de territorio palestino, sobrepasando el 55% que le había acordado graciosamente la ONU.
En 1936-1939, el sionismo perfectamente ensamblado con el colonialismo británico −que todavía tenía pretensiones universales− logran ahogar en sangre la huelga general palestina; una mezcla de levantamiento sin poder militar (apenas con algunos fusiles de caza) y boicot palestino contra la implantación progresiva, artera, implacable, racionalmente dirigida, del sionismo en el territorio palestino, cada vez más sajado, desmenuzado, expropiado, por el judaísmo sionista y sus finanzas en permanente expansión[1].  
Poco antes, en la primera mitad de la década del ’30, cuando empezaban a regir las leyes de Nurenberg de la Alemania nazi, de separación entre germanos y judíos, los sionistas; a la sazón la única fuerza política legal en la Alemania nazi (amén de la nazi) habían acordado con el gobierno un plan de transferencia de capitales, mediante la cual los nazis se adueñaban de los capitales judíos en Alemania, a cambio de productos alemanes de exportación que los sionistas se comprometieron ubicar en el Cercano Oriente. Ha’avara. Dicha negociación no contaba con el apoyo de la corona británica, celosa. Pero entusiasmaba al gobierno nazi  expandiendo su producción, y a los judíos sionistas emigrados de Alemania que recuperaban así sus capitales en Palestina.
La huelga general palestina y la represión subsiguiente implicó la matanza de miles de palestinos, sobre todo varones (jamás se pudo precisar, pero miles, muchos miles en una población de alrededor de un millón de habitantes…).
La administración británica de Palestina favorecida por los resultados de la IGM ligó los intereses sionistas cada vez más con los  británicos, como acabamos de ver ante la huelga/boicot de 1936-1939.

En la primera mitad del Siglo XX se perfilaron dentro del sionismo dos geopolíticas opuestas entre sí: ligarse a los intereses británicos, continuando los vínculos del mismo Herzl con el British Empire (Declaración Balfour, 1917) o acercarse a los nacionalismos enfrentados al británco; el nazismo y el fascismo. Buena parte de los premiers que ha tenido Israel, pasada la primavera “socialdemócrata” de la posguera, fueron, son, de esta última procedencia (Menájem Begin, Yitzhak Shamir, Ariel Sharon, Ehud Olmert, Naftalí Bennett, Beniamin Netanyahu, actual y el que ha ejercido por más tiempo esa primera magistratura). Su mera enumeración nos muestra el peso del supremacismo fascista enntre los “primeros ministros” del engendro sionista.
Y algo más. Israel es el único estado del mundo entero en que fascistas declarados y “a mucha honra” han gobernado y representado a ese estado reiteradamente desde la derrota de los nazifascismos en 1945.
El resultado de la IIGM en 1945, con el consiguiente escrache periodístico y hollywoodense de Hitler y lo alemán (ya no sólo lo nazi) ha exonerado, ¡oh paradoja! al sionismo filofascista de rendir cuentas, pese a su identificación ideológica con el fascismo. [2]
Más aún: que saliera incólume, política y penalmente hablando.  En 1948, al mejor estilo mafioso, los grupos de tareas sionistas liquidan, al primer mediador designado por la recién fundada ONU; el conde Folke Bernadotte.
Su único pecado es haber declarado en las “conversaciones” sobre el diferendo palestino-israelí que los sionistas exigían todo y que así nada le quedaba a los palestinos… el sicario es premiado con su designación como guardaespaldadas del Ben Gurión el líder del flamante Estado de Esrael (luego de un pasaje “teatral” de apenas unas semanas por una cárcel).[3] 

Pero si vemos cómo ya en 1948, la impunidad judeosionista perfila comportamientos abusivos, violatorios de los derechos humanos más elementales –abonada por la prescindencia de países democráticos y la aceptación del papel de chirolitas de muchas otras representaciones nacionales en la ONU−, desde el 7 octubre de 2023, esa impunidad adquiere botas de 7 leguas, y alcanza niveles que cuesta rastrear en la historia humana.
Como “armados” de una “santa indignación”, como si se tratara de víctimas, los sionistas israelíes han desatado su furia y abuso bombardeando barrios con población humana en general, arrasando con mayor facilidad todavía, campamentos más o menos improvisados de los sobrevivientes de los barrios anteriormente pulverizados en Gaza, Rafah , Jan Yunis…
Por las calles, hoy, jóvenes pesadamente armados, casi imberbes, se burlan y atropellan a población civil desarmada, bajo ocupación. Y lo hacen con desprecio, desdén y si son muy teledirigidos, con furia. “Cargados” con un adoctrinamiento que a lo largo de décadas ha insuflado en sus mentes −cuanto más jóvenes, más honda la marca− las ideas, muy talmúdicas, que los goyim son “excremento”, “basura”, “animales”, “inferiores” y sobre todo, “mala gente”.
El sionismo ha hecho abandonar en sus seguidores toda noción de prójimo que vaya más allá de su estrechísimo entorno. La altanería que jóvenes israelíes, recién “cocidos” en los cuarteles, exhiben, no sólo en Palestina sino en todas partes, en todo momento, trasluce esa regimentación mental, indoctrinada. [4]


HACIÉNDOSE LA VÍCTIMA-Helguera, La Jornada, México

Una de las especialidades del sionismo aspirante a controlar la vida (en eso se ejercitaron durante casi dos décadas en la Franja de Gaza) son las “labores de inteligencia”. Que han ido hilvanando con los servicios secretos de EE.UU. y del Reino Unido. Por eso, algunos atentados pueden tener autores  “colectivos” o resulta difícil ubicarles autoría.

Así han matado a Qasem Soleimani. Así han matado a Ismail Haniyeh. Así han matado a Hasan Nasrallah (con la odiosa modalidad, deliberada, de matar al “blanco” con todos los prójimos imaginables: hijos, nietos, esposas, amigos, colegas).
Así han acabado con la vida de decenas o centenares de libaneses mediante telecomunicadores portátiles que portaban explosivos en su interior y que, ahora se sabe, estuvieron “cargados” durante años, hasta que quienes idearon la máquina de matar juzgaron oportuno ponerla en marcha. Tales dispositivos habían sido adquiridos en el Líbano de supuestas firmas productoras y exportadoras de ese know how, y se fueron extendiendo en diversos usos (probablemente la carga explosiva fue colocada inicialmente para atentar y matar a miembros de Hezbollah, pero ni les importó quienes fueron los destinatarios).
Así también se han llevado a cabo muchísimos atentados de falsa bandera.
Keith Woods ha escrito un artículo formidable: “Israel´s Love Affair with Syrian Jihadis” (“El romance de Israel con los yihadistas sirios”),  en el que se apoya en documentos de la DIA, algunos puestos a la luz pública gracias al extraordinario aporte de Julian Assange (wikileaks). Por ejemplo, la info del agente secreto Jake Sullivan a Hillary Clinton de que: “Al Qaeda está de nuestro lado (Siria, 2012).”
El aporte del genocida Naftali Bennett es todavía más prístino: en la conferencia anual de Herzliya, durante su estadía como premier (2021-2022), Israel ha “perfeccionado” el arte de la mentira hasta niveles que no resultan habituales. Entiende este asesino múltiple de palestinos que la aparición de ISIS le facilita a Israel legitimar la anexión de los Altos de Golán; que el caos generado en Siria convierte los reclamos de Israel en “más aceptables” para “la comunidad internacional”: Bennet ilustra así lo que rinde un pragmatismo absoluto.
Al Qaeda, que todo habitante no dedicado al rastreo de verdad, tomará como musulmán (y fanático), es un producto acabado “made in Israel”. La DIA nos dice: “Al Qaeda condujo una cantidad de operaciones en varias ciudades sirias bajo el nombre de Frente al Nusra para llevar adelante la guerra contra el régimen sirio, considerando que Siria tiene un régimen infiel.”[ibid.] 
Esta última calificación es ciertamente, sugestiva. Efectivamente, en varios países árabes el Islam perdió pie. Como ha pasado con el catolicismo en varios países del sur europeo.
Argelia en su momento, Irak, Siria, Palestina, han ido constituyendo gobiernos, regímenes laicos, que el Occidente con religiosidad en baja, iba a tener dificultades para criticar.
Un mundo árabe fanáticamente musulmán era presa (ideológica) más fácil de un Occidente cada vez más laico.
La peripecia palestina nos da algunos elementos de ese cuadro de situación. La resistencia palestina ante la penetración sionista, sobre todo después de 1948, se fue identificando cada vez más con el anticolonialismo, el antiimperialismo y el socialismo, que hará haciendo culturalmente inviable las modalidades tradicionales. Pero ese cambio ideológico, progresista, no da fruto; como que “el enemigo es más fuerte”.
Por un lado, EE.UU. se presenta como lo moderno ante el viejo mundo del capital burgués, y por otro, el colapso soviético deja sin carta de presentación, o con cartas muy ajadas, a una alternativa “de izquierda”.
La resistencia laica no triunfa fácilmente en el mundo colonial. Porque lo que la resistencia enfrenta en la colonia no es a la colonia sino a la metrópolis.
En Palestina, por ejemplo, surgirá entonces, una resistencia basada en valores tradicionales bien diferenciados de los del colonialismo (occidental). Y mientras el movimiento palestino de mayor enjundia en el siglo pasado −Al Fatah y la OLP− terminarán “recuperados” a través de los “Acuerdos de Oslo” y otras maniobras de RR.PP., será Hamás el que encarne el mayor obstáculo al asentamiento sionista.
Patética paradoja: la gente de Arafat aceptando convertirse en policía de los territorios palestinos –al servicio inevitablemente de Israel− e islámicos más bien ortodoxos, defendiendo la sociedad que el sionismo procura pulverizar.
Simplificadamente, diríamos, en este caso, que el Corán sirve más a la causa de pueblos colonizados que El capital de Marx… La cuestión, entonces, dista de simplificarse. Porque los libros sagrados, sean cuales fueren, no ayudan a ver y a vernos, sino más bien nos llevan los ojos a ver a dios, a Dios. Y con los ojos de él. De Él. Y no se trata de eso ni de entonar cantos de sí mismo o a sí mismo. Se trata apenas de que aprendamos a ver el mundo tal cual es.

Notas

1 - Vemos entonces algunas acciones de brutalidad inusitada. El sionismo había preparado mistarviim, sionistas que vestían y hablaban como palestinos, que introducían o preparaban trampas mortales en el tejido social palestino, como por ejemplo, dejar para reparación un vehículo en un taller mecánico, todo en confianza, y que al cabo de veinte minutos volara por los aires el vehículo, el taller, todos sus ocupantes y buena parte de las edificaciones circundantes. Con estos explosivos devastadores, hicieron añicos varios mercados en los momentos de mayor afluencia de gente. Esa atroz coyuntura de la historia palestina se generalizará pesadillescamente en la Franja de Gaza en 2006 y desplegará un nuevo círculo del infierno en 2023/2024.
2 - Eso, porque la realpolitik se mueve con otros intereses; como ilustra el caso de Francisco Franco.
3 - Y la ONU ni siquiera rinde honores a su mediador oficial, proveniente de un país con acrisolada democracia; Suecia. La tutela judeosionista en la ONU ya se sentía.
4-     Como la actitud con que los guardiacárceles recién estrenados en regímenes de dictadura llegan al patio de las cárceles para lidiar con huelguistas y manifestantes. Lidiar, con animales.



24/12/2024

LUCA CELADA
El plan de Silicon Valley para apoderarse del Estado
El irresistible (¿o resistible?) ascenso de los broligarcas

USA: Una plutocracia “armada” y extremista está a punto de apoderarse de la mayor superpotencia mundial

Luca Celada, il manifesto, 17/12/2024

Traducido por María Piedad Ossaba, Tlaxcala 

Luca Celada es corresponsal en Los Ángeles del diario italiano il manifesto

Esta semana, Jeff Bezos, de Amazon, Sam Altman, de Open AI, y Mark Zuckerberg anunciaron donaciones de un millón de dólares cada uno como contribución a la ceremonia de investidura de Donald Trump el 20 de enero. Los magnates digitales han sido atacados a menudo por Trump, quien todavía hace unas semanas afirmó que Zuckerberg, en particular, debería «ir a la cárcel» por censurar opiniones de derechas en sus plataformas. Tras su victoria, hubo prácticamente una procesión desde Silicon Valley para hacer un acto de sumisión. La semana pasada, el jefe de Meta había volado a Mar a Lago para reunirse con Trump, Bezos tiene una cita en los próximos días.

Muchos otros plutócratas son una presencia fija en la corte giratoria que gira en torno al presidente que regresa desde las elecciones de noviembre. Muchos de los numerosos magnates que han contribuido generosamente a su reelección han sido puntualmente recompensados con nombramientos en ministerios. Entre ellos se encuentra su pariente político Charles Kushner, padre de su yerno Jared, que primero fue indultado en 2020 [ había sido condenado por malversaciones fiscales], y luego honrado con el cargo de embajador en Francia.

(Otro nombramiento «dinástico» es el de la (posiblemente ex) prometida del primogénito Donald Jr, Kimberley Guilfoyle, como nueva embajadora en Grecia, mientras que se espera que su nuera, Lara Trump, debería pasar del comité central del Partido Republicano al Senado).

Entre los ministros con carteras opulentas (cada uno con una riqueza estimada en más de 1.000 millones de dólares) están Linda McMahon en Educación Pública, Scott Bessent, en Hacienda, Doug Burgum en Interior, Howard Lutnick en Comercio, Jared Isaacman, director de la NASA, y Steve Witkoff -socio de Trump en una nueva empresa de criptomonedas, World Liberty Financial- como enviado especial a Oriente Medio.

Además de crear otro flagrante conflicto de intereses para el nuevo presidente, la entrada de la familia en la producción de “Trump coin” es el último indicio de una creciente asociación entre Trump y el nuevo capitalismo incubado en Silicon Valley. Los magnates de Silicon son fantásticamente ricos, y para Trump la riqueza siempre ha sido un ostentoso símbolo de éxito. Según un reciente artículo del New York Times, le gusta exhibir a sus nuevos socios políticos como trofeos en su palacio kitsch. «He traído a dos de los hombres más ricos del mundo», habría dicho recientemente, según el Times, presentándose en una reunión de periodistas en compañía de Elon Musk y el consejero delegado de Oracle, Larry Ellison. «¿A quién habéis traído?».

Encarna la influencia de los aceleracionistas de Silicon Valley en la restauración de Trump el propio Musk, a quien, como es bien sabido, se le ha otorgado, junto a otro multimillonario, Vivek Ramaswami, un puesto central como administrador del «departamento de efficiencia gubernamental» (DOGE). Musk tendría, sin embargo, mayor libertad de acción, incluso sobre la composición del propio cuadro gubernamental, en el que trabajarían, en Florida, numerosos colaboradores 'prestados' por sus empresas.

Entre las figuras clave estaría Jared Birchall, director de Neuralink, la empresa encargada de los implantes neurológicos, pero también administrador de las finanzas personales del magnate y, en general, su mano derecha, a cargo de las negocios  familiares,  de la fundación, así como de los bienes inmuebles, los viajes y la seguridad de Musk. A estas tareas se han añadido ahora las conversaciones con posibles funcionarios del Departamento de Estado. El hecho de que Birchall no tenga experiencia en negocios internacionales no se considera, evidentemente, un problema en una selección que, al igual que para los demás departamentos, parece centrarse principalmente en las afinidades ideológicas y la lealtad de los candidatos al presidente.

Otro asesor, esta vez para seleccionar al personal de inteligencia, es Shaun Maguire, una figura de Caltech que se hizo multimillonario como socio de Sequoia, uno de los principales fondos de inversión de Silicon Valley y (no hace falta decirlo) amigo de Elon Musk, con quien comparte el culto, tan de moda en el Valley, del genio díscolo e inadaptado, quizá incluso un poco misántropo, pero aun así brillante.

En otras palabras, muchas de las decisiones destinadas a dar forma al gobierno Trump bis están en manos de una facción ideológica de «meritócratas» extremistas, por no decir teóricos «darwinistas» del triunfo de los mejores sobre los mediocres. Otro “asesor” fijo en Palm Beach, por ejemplo, es Marc Andreesen, el multimillonario fundador de Netscape y uno de los principales ideólogos de la oligarquía neorreaccionaria, es un ferviente defensor del liberalismo radical y de la mínima interferencia del Estado en los asuntos empresariales.

Gracias a su alianza estratégica con Trump, una asociación que solo maduró realmente en las fases finales de la campaña electoral, este pequeño grupo de empresarios radicalizados por el éxito de los oligopolios de Silicon Valley, tiene ahora la oportunidad de trasladar las filosofias de la gestión (y la eugenesia) al aparato estatal. Musk, por ejemplo, ha expresado en repetidas ocasiones la idea de que la inmigración debería gestionarse como una campaña de selección de «un club deportivo», obligado a seleccionar a los mejores jugadores y descartar a los perdedores, los «losers» que que él y Trump tanto detestan.

Pero la principal obsesión de Musk es el recorte del gasto público, contra el que despotrica incesantemente en X post como fuente de inflación y de déficits  presupuestarios insostenibles. Estos son los temas clásicos de la filosofia económica conservadora que la derecha del silicio ha imbuido, sin embargo, de un celo casi religioso. Y llama la atención cómo una facción que hasta hace poco habría sido considerada fanáticamente extremista, ha ascendido a una posición de tanto poder casi extemporáneamente. La propia creación del superministerio de Musk se produjo «en directo» durante la retransmisión grabada por los dos hombres de X, tras el fallido intento de asesinato  de Trump en julio.

«Para reducir la inflación, tenemos que reducir el gasto público en todos los ámbitos», señaló en aquella conversación el propietario de Space X (que recauda miles de millones en contratos espaciales públicos). «¿Qué te parece, Donald, una comisión especial sobre efficiencia gubernamental? Yo estaría dispuesto a presidirla». «¡Genial, me vendría muy bien alguien como tú, que no se acobarda, como aquella vez que hicieron huelga en esa empresa tuya y los despediste a todos en el acto!». (Risas).

Musk y Ramaswamy no pierden la oportunidad de señalar que las principales fuentes de gastos superfluos son programas como la asistencia alimentaria a familias necesitadas, las pensiones y la sanidad.  «Al principio, puede causar algunas molestias», admite Musk sobre el temido remedio (el recorte de 2 billones de dólares del gasto público, lo que equivale a más de un tercio del presupuesto del Estado), “pero a la larga, será mejor para todos”.

«Veremos qué pasa», afirmó Trump a este respecto. «Van a ser unos meses interesantes. Pero el país está atascado de reglamentaciones y de personas innecesarias que podrían ser más productivas en el sector privado.» Ahora, con una influencia sin precedentes, los «broligarcas» de Silicon Valley están a punto de meter mano en el aparato de protección social como se haría con una filial recién adquirida, con la intención de aplicar una colosal reforma «empresarial».

Las fortunas acumuladas por la plutocracia actual invitan a comparaciones con la ‘Edad Dorada” de principios del siglo XX, cuando la riqueza estratosférica de los Rockefeller, los Vanderbilt y las grandes familias industriales y bancarias subrayaba la abismal desigualdad con las clases económicas subalternas. Pero la influencia política, por notable que fuera, de aquellos «barones ladrones» palidece ante la situación actual.

Aquella época fue el preludio de una temporada de enorme conflicto social en el país, y de la creación, bajo Franklin Roosevelt, de la red social (sanidad y pensiones) que aún existe actualmente. Hoy, sin embargo, las tensiones producidas por la globalización y la desigualdad social rampante han producido, al parecer, un gobierno controlado directamente por los monopolios más gigantescos generados por el capitalismo neoliberal, que, en alianza con un demagogo populista, y las partes más reaccionarias de la derecha ideológica, se disponen a desmantelar ese pacto social.

Todo ello desafiando un flagrante conflicto de intereses por parte de las corporaciones que, de hecho, se encargan de desmantelar las agencias federales encargadas de regularlas. Las primeras cabezas que la industria tecnológica querría ver rodar son las de Lina Kahn, arquitecta  en la Comisión Federal de Comercio (FTC) de la campaña antimonopolio que recientemente llevó a Google y Amazon a los tribunales, y Elizabeth Warren, la senadora de Massachusetts que como presidenta de la autoridad de protección del consumidor es una de las voces más invariablemente de izquierdas contra las extralimitaciones corporativas (Andreesen ha pedido específicamente que la «supriman»).

Sin embargo, no se trata solo de asegurarse los servicios de una administración amiga (aunque con un negociante como Trump, estos estarán prácticamente asegurados). La diezmación del «Estado profundo» prometida por Trump como dispositivo de agregación populista antisistema es, para la plutocracia militante de Silicon Valley, un objetivo ideológico que Musk persigue con especial fervor.

En su reciente libro, «Character Limit», Kate Conger y Ryan Mac retrasan lo que sucedió en los días posteriores a la compra de Twitter por Musk. Una sucesión de despidos, destituciones comunicadas por correo electrónico, jefes de departamento convocados por sorpresa a los que se les pidió que justificaran la utilidad de su empleo en 60 segundos, indemnizaciones retenidas. Una «reestructuración» económica convertida en un teatro de la crueldad, basado en la humillación ritual y punitiva. Un terreno de fuerte afinidad entre Musk y Trump, dueño ya de un programa de tele-realidad cuyo eslogan era «You're Fired!» (¡Estás despedido!). 

La liquidación del 80% de los empleados “sin consecuencias” para la empresa (a no ser que se quiera contar la destrucción de una plataforma reducida a megáfono de desinformación y propaganda), ha convertido a Musk en una especie de héroe anarcocapitalista para un nutrido grupo de seguidores. Y es esta misma receta la que muchos esperan de él para diezmar de una vez por todas al “Estado profundo”. En las últimas semanas, Musk ha sido visto a menudo en compañía de otro socio, Steve Davis, uno de los directivos de la Boring Company (la empresa de excavaciones del grupo Musk). Según el Times, Davis, especializado en reducción de costes, también ha entablado conversaciones con otros expertos para «optimizar el presupuesto federal». Es probable que él también desempeñe un papel destacado en el nuevo ministerio de DOGE. 

Puede que no sea posible reproducir los recortes del 80% de Twitter, pero incluso la paradójica reducción de casi el 50% del gasto público que está ventilando Musk representaría una apoteosis catastrófica de la guerra de los ricos contra los pobres. Para preparar el terreno, la campaña, amplificada por Musk, para vilipendiar a los «gorrones» de las subvenciones públicas, y por la «liberación» de las empresas de las «burocracias sofocantes» ya ha comenzado en 'X'.

El otro impulso es la privatización, con otro responsable del Team Musk: Shervin Pishevar, director y cofundador de Hyperloop (la empresa de cápsulas supersónicas con varios proyectos en fase experimental). Pishevar escribió sobre la «oportunidad de reimaginar las funciones gubernamentales a la luz de una evolución económica y tecnológica sin precedentes». Una frase que resume los intereses económicos y el mesianismo tecnológico imperantes en Silicon Valley. Según Pishevar, servicios como Correos, la NASA o el sistema penitenciario «se beneficiarán enormemente del ingenio del sector privado». Todo en aras de crear un «futuro alineado con la propiedad y la prosperidad». Una característica de los ultra capitalistas es cómo hacen alarde público despreocupadamente de lo que hasta hace poco, y todavía durante el primer mandato de Trump, los partidos propietarios habrían callado y negado públicamente.

Captain X, por Vasco Gargalo

La privatización gradual de los servicios es parte integrante de los programas de muchos gobiernos liberalistas occidentales. Pero los giga-capitalistas ven ahora la oportunidad de completar el trabajo muy rápidamente, adoptando el lema «muévete rápido y rompe cosas». El lema de Mark Zuckerberg, favorecido por los taumaturgos de la tecnología, se aplicaría así al aparato del Estado que hay que «reinventar». Después de todo, incluso el infame Proyecto 2025 se basa en una «guerra relámpago» diseñada para aplastar la resistencia de las instituciones (o terraplenes constitucionales) y blindar el aparato sin dejar tiempo a que la resistencia se organice.

El proyecto de “blitzkrieg” promete invertir en todos los campos, empezando por la investigación, la salud y la educación pública, y en algunos casos ya está muy avanzado. La red de centros de internamiento para inmigrantes en vías de deportación, por ejemplo (más de 200 en el país, y que las deportaciones masivas prometen aumentar considerablemente), ya está subcontratada por el gobierno a empresas del “complejo industrial penitenciario”, empresas como Corrections Corporation of America y Geo Group, pagadas por el preso, y cuya cotización en bolsa se disparó el día de la elección de Trump.

Pero la venerada “disruption” [perturbación] debe, en el proyecto de los “broligarcas”, extenderse a toda la sociedad. Lo que Pishevar define eufemísticamente como la «reestructuración revolucionaria de las instituciones públicas», seguirá el guión familiar de su sabotaje y desfinanciamiento con vistas a su sustitución por empresas de «gestión» y, por tanto, una gigantesca transferencia masiva de fondos públicos a las arcas privadas. Gran parte se aplicará probablemente por decreto, pero en esta ocasión Trump y sus patrocinadores cuentan con las dos cámaras del Parlamento y una supermayoría reaccionaria en el Tribunal Supremo: una convergencia sin precedentes de propósitos y poder.

También en el contexto de la «innovación», una nominación significativa ha pasado en parte desapercibida, la de David Sachs para el puesto inventado de “zar de la criptodivisa y la inteligencia artificial”. Sachs, inversor de capital riesgo y viejo conocido de Musk desde sus tiempos de PayPal, es uno de los sudafricanos que desempeñan un papel más destacado en el ala reaccionaria de Silicon Valley. Roelof Botha (nieto del último ministro de Asuntos Exteriores del régimen del apartheid, Pik Botha) es inversor de Sequoia (el mismo que Shaun Maguire), Patrick Soon-Shiong es el propietario de Los Angeles Times que prohibió el editorial pro-Kamala Harris en su consejo editorial y recientemente anunció un algoritmo de IA para «corregir» el sesgo progresista de sus editores.

De todos los magnates digitales vinculados al hemisferio sur, es sin duda Peter Thiel quien tiene el mayor perfil. Vinculado al think-tank anarcocapitalista Property & Freedom Conference y al Grupo Bilderberg, el magnate, criado en Namibia en el seno de una familia alemana, no sólo es partidario de Trump, sino que ha sido el financista y mentor de la carrera de JD Vance, cuyo nombramiento como vicepresidente patrocinó y garantizó directamente.

También miembro original de la mafia PayPal, Thiel estudió en Stanford, donde fundó el Young Conservative Journal. Famoso por haber teorizado que «la democracia ya no es compatible con la libertad», ahora es la eminencia gris del culto neorreaccionario de Silicon Valley.

El mes pasado, en una entrevista con Bari Weiss, comparó a los ultracapitalistas tecnológicos que llevaron a Trump a la victoria con los combatientes de la resistencia que derribaron al Imperio en “La guerra de las galaxias” (una analogía en la que presumiblemente Biden interpretaría a Darth Vador).

Además de liderar la santa alianza contra “el establishment”, Thiel es el propietario de Palantir, una empresa de análisis de datos e inteligencia artificial con múltiples aplicaciones militares (la compañía debe su nombre a las piedras adivinatorias del mago Sauron en los libros de JRR Tolkien). El control de la inteligencia artificial, como es bien sabido, será crucial para la próxima fase capitalista y geopolítica, por lo que la unión Trump-oligarcas se ha consumado también en la perspectiva de una nueva carrera armamentística de la IA, especialmente con el archirrival chino.

Fundada en 2003, Palantir proporcionó inicialmente redes neuronales y algoritmos para el análisis de datos a agencias de inteligencia y luego a departamentos especiales del ejército. Hoy es líder en aplicaciones militares de IA, que también suministra a numerosos clientes mundiales. Siempre, se dice, los del lado “correcto”. El director general de la empresa, Alex Karp, es un ferviente partidario de Israel y un defensor del nuevo maniqueísmo mundial liderado por los USAmericanos. «Debemos explicar a los usamericanos que el mundo está dividido en dos partes y que una de ellas está dominada por terroristas que tienen la vista puesta en dominar Occidente», afirmó en una reciente conferencia del Instituto Reagan.

En el pensamiento de Karp, la supremacía tecnológica está perfectamente unida a la superioridad moral del Occidente usamericano. Y el supremacismo es inseparable de la lógica de la guerra permanente (que al fin y al cabo se corresponde con el modelo de negocio corporativo). Karp afirma que “los usamericanos son las personas más temerosas, imparciales, menos racistas y bien dispuestas del mundo. Al mismo tiempo, quieren que sepamos que si te levantas por la mañana pensando que vas a hacernos daño, capturarnos como rehenes o enviarnos fentanilo para matarnos en nuestras casas, algo muy malo te va a pasar a ti o a tu primo, a tu amante o a tu familia”.

Los desvaríos del Dr. Insólito de los algoritmos Karp son habituales. «Disponemos de la mejor tecnología y así tiene que seguir siendo», declara en otro vídeo. «No podemos permitirnos equivalencias con nadie porque nuestros adversarios no tienen nuestros escrúpulos morales. Sionista convencido y partidario de Netanyahu, Karp ha puesto la «superioridad moral» de su compañía al servicio de las FDI en la campaña contra Gaza, y puso a prueba su propia inteligencia artificial en el teatro de operaciones ucraniano. En la nueva «pax digital americana» de Karp, el doctor Insólito se encuentra con Terminator en un escenario en el que los cielos «enemigos» están permanentemente pavimentados con satélites Starlink (la filial de Musk ya tiene 6.500 en órbita) y otros muchos armados con misiles. 

Hace quince días, 166 miembros de la ONU votaron a favor de una resolución que pide un tratado sobre armas «inteligentes», los llamados robots asesinos, dotados de «autonomía de decisión». El tratado  es solo una “esperanza piadosa” porque USA se opone a cualquier limitación obligatoria. De hecho, la proliferación de armas inteligentes ya está en marcha y seguirá siendo una de las principales prioridades para la próxima Casa Blanca.

En la sede del nuevo complejo militar-industrial digital de Silicon Valley se trabaja ya a buen ritmo para asegurar la supremacía usamericana también en el espacio y los océanos, por donde ya cruzan “enjambres” de robots-submarinos autónomos, fabricados por otra empresa puntera del sector, Anduril (nombre también tomado de “”El Señor de los Anillos, esta vez la espada de Aragorn). Escenarios cada vez más frecuentes en los que el transhumanismo de los giga-capitalistas vira hacia lo poshumano.

El modelo puede ahora ser definitivamente consolidado por una Casa Blanca en la que la ideología reaccionaria y los intereses industriales se superpondrán infinitamente sin distinción, un gobierno compuesto a partes iguales por ideólogos apocalípticos y fabricantes de armas que tendrán en el Despacho Oval un socio comercial al 100%.

El estado de excepción, las redadas y modificaciones constitucionales por decreto (el fín del derecho de suelo, para empezar, seguido de restricciones radicales a la disidencia) se vislumbran en el horizonte a partir del próximo enero. Detrás de este proyecto hay una facción que, además de la certeza de tener razón, tendrá ahora el poder de aplicarlas  con el pleno apoyo de una presidencia imperial.