المقالات بلغتها الأصلية Originaux Originals Originales

29/07/2023

GIDEON LEVY
Quand Israël fait par inadvertance ce qu’il faut

Gideon Levy, Haaretz, 27/7/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La bonne nouvelle : les responsables militaires craignent que le refus des réservistes de servir (“non-volontariat”) n’affecte l’état de préparation au combat de l’armée israélienne. Encore mieux : Amos Harel a estimé, dans Haaretz mercredi 26 juillet, qu’à la lumière des brutalités policières à l’encontre des manifestants, les plus jeunes d’entre eux « réfléchiront à deux fois avant de s’enrôler pour servir » dans les territoires. Que demander de plus, une patrie ?

Des soldats israéliens pointent leurs armes tandis que d’autres arrêtent un Palestinien lors des affrontements qui ont suivi la démolition d’une maison palestinienne à Hébron, en Cisjordanie, ce mois-ci. Photo: MUSSA ISSA QAWASMA/ REUTERS

Il n’y a pas lieu de prendre à la légère la menace du chef d’état-major concernant les dommages qui résulteraient du refus de servir de milliers de réservistes, en particulier des pilotes. C’est le Premier ministre Benjamin Netanyahou qui a déclaré qu’Israël pourrait survivre avec quelques escadrons en moins. Cette remarque contient une vérité importante, même si nous ne pouvons plus croire un mot qui sort de sa bouche. L’expérience des dernières décennies, depuis la dernière bataille aérienne des pilotes, et la situation sécuritaire soulèvent la question de savoir si les Forces de défense israéliennes en général, et l’Armée de l’air israélienne en particulier, ne sont pas trop grandes, trop puissantes et trop gonflées.

Il ne s’agit pas seulement de la quantité scandaleuse de ressources que l’armée consomme, au détriment des besoins civils. L’excès de puissance des FDI les pousse à une hyperactivité inutile dans certains cas et désastreuse dans d’autres. Une réduction des forces - moins de pilotes et moins de soldats pour maintenir l’occupation et protéger les colons violents - pourrait faire du bien. Peut-être que non seulement les jeunes qui refusent de servir y réfléchiront à deux fois, mais peut-être que les FDI elles-mêmes y réfléchiront à deux fois avant chaque frappe aérienne inutile ou chaque raid d’arrestation encore plus inutile.

L’excès de pouvoir conduit à la surutilisation. Les meilleurs développements en matière de défense nécessitent de l’entraînement, et les soldats en surnombre doivent être occupés afin de les maintenir en alerte et de justifier leur conscription. Si plusieurs escadrons sont cloués au sol en raison du refus de leurs pilotes de servir, peut-être l’armée de l’air réduira-t-elle ses frappes aériennes secrètes et inutiles en Syrie et dans d’autres lieux mystérieux. Personne ne connaît leur but, leur efficacité et le moment où nous en paierons le prix. Personne ne le demande non plus.

À l’exception de ces missions et des préparatifs grandioses pour la mère de toutes les attaques aériennes contre l’Iran, qui ne sera jamais réalisée, il semble que l’armée de l’air n’ait pas grand-chose à faire, si ce n’est bombarder périodiquement la bande de Gaza impuissante ou le camp de réfugiés de Jénine. S’il n’y a pas assez de pilotes pour effectuer ces missions, non seulement la sécurité d’Israël ne sera pas compromise, mais elle pourrait même en bénéficier. Ces bombardements n’ont jamais empêché la résistance violente à l’occupation : ils n’ont fait que l’encourager, tout en commettant des crimes de guerre et en créant des tragédies humaines. Il serait donc préférable que les pilotes se reposent chez eux pendant un certain temps - jusqu’à la prochaine guerre, qui semble pour l’instant lointaine. Lorsqu’elle se rapprochera, on peut compter sur eux et sur les autres réservistes pour être les premiers à s’engager, que ce soit dans une semi-démocratie ou dans une semi-dictature.

Les jugements de Harel sur le refus attendu des soldats de servir dans les territoires sont porteurs d’espoir. L’une des réussites de la protestation est la légitimité qu’elle a conférée au refus de servir, pour la première fois dans l’histoire d’Israël. Il sera désormais plus difficile de qualifier les objecteurs de conscience de traîtres. On ne peut pas non plus ignorer le bénéfice qui pourrait résulter du fait de ne pas appeler les réservistes à servir dans les territoires [occupés depuis 1967]. Les territoires sont déjà saturés de soldats.

Voir des soldats assis jour et nuit à l’entrée des colonies illégales de Homesh et d’Evyatar, comme je l’ai fait cette semaine, suffit à faire exploser de rage. Voir les barrages routiers surgir sans rime ni raison, comme je l’ai vu cette semaine à l’entrée d’Anabta ou d’Emek Dotan, devant lesquels des centaines de voitures palestiniennes sont restées pendant des heures jusqu’à ce qu’ils soient enlevés sans raison, comme ils étaient apparus, c’est comprendre qu’il y a beaucoup trop de soldats qui s’ennuient dans les territoires.

L’excès de puissance a toujours été l’un des problèmes d’Israël. L’excès de puissance l’a conduit à l’arrogance, à la vantardise et à des guerres inutiles et l’a empêché de reconnaître les limites de sa puissance et de rechercher des alternatives. Peut-être que, par inadvertance, Israël fera ce qu’il faut et que nous aurons désormais une armée plus petite et plus intelligente, qui sera peut-être même un peu plus morale.

 

 

 

28/07/2023

AMEER MAKHOUL
Crise judiciaire : Israël va-t-il entrer en guerre pour sauver son armée ?


Ameer Makhoul, Middle East Eye, 26/7/2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Nous pouvons nous attendre à une double forme d’agression israélienne dans les jours à venir, visant à cibler la présence palestinienne et à affirmer la domination régionale.

Un soldat israélien pointe son fusil vers des manifestants palestiniens près de la colonie juive de Beit El en Cisjordanie occupée, le 26 janvier 2023 (AFP)

Si les USA ne semblent pas préoccupés par une guerre généralisée au Moyen-Orient, ils n’en restent pas moins déterminés à y disposer d’une force militaire hautement préparée : l’armée israélienne, qui fait partie intégrante des intérêts géopolitiques majeurs de Washington dans la région.

D’un point de vue pragmatique, le terme “préparé” implique une capacité claire, tangible et authentique à gérer et à contrôler habilement un conflit, et à remporter la victoire avec un minimum de pertes tout en sauvegardant les intérêts usaméricains, y compris la protection des troupes usaméricaines dans la région, le cas échéant.

Mais il y a des raisons majeures de douter de l’existence de cette préparation à l’heure actuelle. Israël est déchiré par des divisions internes, caractérisées par des clivages de plus en plus profonds, qui se traduisent par un refus national de se soumettre au service de réserve, par un affaiblissement de l’armée et de l’ensemble du système de gouvernement, ainsi que par les dangers potentiels d’une domination fasciste.

En Israël, le déclin actuel de l’état de préparation de l’armée signifie une incapacité à s’engager dans des actions militaires et un manque de vision pour planifier des guerres de manière stratégique ou même pour lancer des opérations à échelle limitée.

Bien que cela ne concerne pas directement la capacité de l’armée à faire face à un conflit immédiat, cela pourrait néanmoins avoir un impact crucial, brisant l’esprit de la population et du personnel militaire, ce qui pourrait avoir de graves conséquences. Certains en Israël considèrent même que la crise politique interne en cours en Israël constitue une plus grande menace que l’Iran.Haut du formulair

La période difficile et chaotique que traverse l’armée israélienne va bien au-delà d’un simple dilemme tactique. La crise politique a fait naître un profond sentiment de fragilité sociale et une relation politique fracturée avec l’État.

Cette situation a fait dérailler le système dirigeant, le privant de tout semblant de conscience et suscitant des inquiétudes quant à sa capacité à gouverner efficacement les affaires de l’État - en particulier lorsqu’il agit de manière immorale, sans consensus populaire.

La fragmentation au sein de l’armée israélienne est exacerbée par l’incapacité du ministre de la Défense à sauvegarder les intérêts de l’armée, la laissant exposée à des conflits politiques prolongés. Pire encore, l’armée doit maintenant faire face au choix difficile de donner la priorité à la loyauté aux principes de la loi plutôt qu’à l’allégeance au dirigeant. En fin de compte, une telle situation conduit à un état de désintégration qui ne cesse de s’étendre.

Des défis exponentiels

Compte tenu des réalités israéliennes sur le terrain, ces conflits présentent des défis exponentiels. Même si un véritable accord collectif visant à résoudre le conflit entre les partis d’extrême droite au pouvoir et l’establishment militaire et du renseignement était possible, à ce stade, ni les déclarations politiques ni un consensus interne ne permettraient de résoudre efficacement la crise de grande ampleur.

Au contraire, ce dont le pays a besoin de toute urgence, selon les perceptions internes, c’est d’une opération militaire limitée qui donnerait à l’armée l’occasion de retrouver une légère apparence de force, même si elle est finalement revendiquée comme une victoire par la partie adverse.

Par exemple, l’administration israélienne dirigée par le Premier ministre Ehud Olmert pendant la guerre du Liban de 2006 pensait avoir réussi à restaurer son pouvoir sur la frontière nord d’Israël, tout en ne reconnaissant pas l’établissement ultérieur d’une dissuasion mutuelle avec le Hezbollah.

Le lien entre la réforme judiciaire du gouvernement de coalition - qui vise à empêcher tout examen des accords qui ont conduit à la création de l’administration israélienne la plus à droite de l’histoire - et les ambitions plus larges du gouvernement mérite d’être examiné, en particulier après la redistribution des pouvoirs ministériels.

Parmi ces développements spectaculaires et notables figure la nomination du ministre des Finances Bezalel Smotrich, qui a été chargé de superviser la légitimation, l’établissement et l’expansion des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés, dans le but de remodeler à terme le statu quo juridique de la Cisjordanie occupée.

Parallèlement, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, s’est vu confier des pouvoirs étendus pour réprimer les Palestiniens. Il a mené une campagne incessante d’attaques raciales contre la population palestinienne, tandis que le gouvernement a poursuivi sa politique de judaïsation de certaines parties de la Cisjordanie occupée, du Néguev (Naqab) et de la Galilée. Ce programme est au cœur du pouvoir religieux sioniste en Israël.

Une escalade plus large

Il n’est donc pas surprenant que la période à venir se traduise par une forme d’agression israélienne sur deux fronts. Tout d’abord, cette agression se déploiera contre la population palestinienne, avec notamment de nouveaux plans d’annexion de terres, dans le but ultime de modifier l’identité démographique des territoires occupés.

Deuxièmement, Israël s’efforcera de rétablir sa présence à sa frontière nord, ce qui pourrait conduire à une escalade plus large dans la région.

La coalition au pouvoir cherche à consolider et à maintenir son pouvoir en privant les partis et les communautés arabes de participation à la Knesset, dans le seul but de tirer parti des pouvoirs constitutionnels dévolus au gouvernement, au détriment du contrôle de la Cour suprême.

La société israélienne, dont une grande partie est désespérée, passe à un esprit de colère publique, tandis que certains envisagent d’émigrer et de se dissocier de l’État sioniste.

La question demeure : L’administration usaméricaine de Biden réévaluera-t-elle ses relations avec le gouvernement de Netanyahou et protégera-t-elle les Palestiniens et les Arabes des risques imminents qui émergent de plus en plus du résultat du vote de lundi ? Il s’agit d’une question qui peut sembler interne à Israël en apparence, mais qui vise en fin de compte à exploiter la lutte des Palestiniens pour la liberté.

27/07/2023

SALAH LAMRANI
Islamophobia in France: Stop the Fires of Hatred!

Salah Lamrani, CGT Éduc'action Clermont-Ferrand , 1/7/2023

The summer period is notoriously prone to forest fires, a formidable threat to our natural resources and the surrounding biodiversity. However, there is an even more insidious danger spreading through our societies, undermining our values and cohesion: irresponsible hate speech. A reminder of some recent occurrences is in order.

Occitan Hearth

At the end of April, in elementary schools, middle schools, and high schools in the Academies of Toulouse and Montpellier [French southern cities of the Occitania region], a survey on “absenteeism” during the month of Ramadan and the Eid al-Fitr holiday, particularly affecting priority education zones [underprivileged areas with a significant Muslim community], targeted exclusively Muslim pupils. Commissioned by the Interior Ministry, this survey was required from schools by the police and the Ministry of Education. This situation provoked a legitimate outcry.

Following the denunciation of these stigmatizing practices—which turn a basic practice of Islam into a security issue—fraught with illegality, since religious statistics (even non-nominative ones) are strictly regulated in France, the authorities, as usual, talked a lot of hot air: “clumsiness”, “badly formulated message”, “autonomous research by an intelligence officer”, “study of the impact of certain religious holidays on the operation of public services”... As if cops were known for carrying out sociological investigations in schools; as if a religion other than Islam had ever been in the line of fire; as if occasional absences, provided for in the Education Code and legally unassailable (for the time being), could harm the functioning of Europe's most overcrowded classrooms—after Romania.

A wet-finger estimate in [the right-wing newspaper] Le Figaro, announcing a “record absenteeism rate” on the day of Eid al-Fitr 2023 due to an alleged “TikTok trend,” is said to have prompted this investigation, which is perhaps intended to provide more quantified data for future witch-hunts. The data, moreover, is hardly usable, for while some school heads and inspectors have encouraged staff to respond to these tendentious surveys, which we can only deplore and denounce, others have fortunately dissuaded them from doing so—not to mention the fact that it is difficult to presume the reason for an absence on a Friday just before the national school holidays.

The question immediately arose as to the motives behind such a survey. Was it “only” a question of stirring up yet another unfounded controversy at the expense of the Muslim community? Or is the government planning to call into question an acquired right that is in no way contentious, in the name of an ever more narrow and misguided interpretation of secularism (which could tomorrow attack pork-free or meat-free menus in school canteens, ban any refunding of half-boarding fees for Muslim pupils during the month of Ramadan, etc.)? Will staff be the next targets of these investigations? Already, some non-teaching staff have been refused a “religious holiday” leave, which is illegal and unacceptable. Any attempt to generalize these measures on the pretext of “combating separatism” and “ensuring the smooth running of the public education service” must be fiercely opposed.

PACA Hearth and Ministerial Fuel to the Fire

On June 15, the Mayor of Nice and President of the Provence-Alpes-Côte-d'Azur (PACA) Regional Council, Christian Estrosi, issued an alarmist press release denouncing “several extremely serious incidents” which had occurred the previous day in three Nice elementary schools, and which were reported to the School Inspection Office, then to the Prefect of the Alpes-Maritimes Department, and the Prime Minister, Elisabeth Borne. The following day, the French Minister of Education, Pap Ndiaye, went even further, speaking of “intolerable facts,” the “mobilization of the Values of the Republic teams in all the schools concerned to ensure full respect for the principle of secularism on a permanent basis,” and the implementation of “the necessary government measures” to ensure respect for secularismor “laïcité”in schools.

The alleged “facts”? Some children in 4th and 5th grades were said to have “performed the Muslim prayer in their school playground” or organized “a minute's silence in memory of the Prophet Mahomet[1].” These were nothing more than rumors, as the expressions of doubt (“it is reported to me,” “or”) and the conditional tense (“These unacceptable situations would also have taken place in secondary schools”) clearly underlines. Worse still, before even the slightest verification of these absolutely insignificant alleged facts (it's just a handful of 9-10 year-olds having fun in the playground), Christian Estrosi likened these “attempts at religious intrusion into the sanctuaries of the Republic that are our schools” to “religious obscurantism attempting to destabilize us” and to “families who left to wage jihad in Syria,” who are reportedly beginning to return to France and sending their children “to our schools.”


Pap Ndiaye(replaced in the recent cabinet reshuffle by Gabriel Attal) and Christian Estrosi

And without even waiting for the results of “the General Inspectorate's investigation to establish the facts precisely and draw the appropriate conclusions” (no kidding), the full force of the law was brought to bear against this allegedly dangerous “slide” (which at this stage has not even gone beyond the stage of gossip): “meeting with all the departments concerned to set up an action plan,” “reinforcement of State action to ensure that these attacks on secularism are firmly combated,” “campaign to prevent and combat radicalization,” “firm, collective, and resolute response,” setting up “secularism and values of the Republic training courses” which “will be the subject of a common module bringing together all personnel...” The joint press release from Christian Estrosi and Pap Ndiaye concluded with a fanfare worthy of this outpouring of catastrophist press releases, disproportionate means, and withering epithets: “the principle of secularism is non-negotiable in our Republic.” Such a display of paranoia and hysteria is not surprising from the reactionary clown Estrosi, whose secular fervor is otherwise well known, but considering what Pap Ndiaye was before he plunged body and soul into the political cesspool [Pap Ndiaye was a Professor at the School for Advanced Studies in the Social Sciences, focusing his research on the compared history of racially discriminatory practices in France and in America, and the Director of the French national museum of immigration], one can only feel a bitter mixture of disgust and pity[2].

Christian Estrosi’s uncompromising crusade for secularism: “Defending our Christian traditions also means defending the heritage of our elders, who also built our Nice countryside”.

 

An Eternal Flame

The deep-seated motivations behind such Islamophobic outbursts are well known and have unfortunately become a constant in the discourse of Emmanuel Macron and his minions. Having faced massive popular opposition with the pension reform, they now resort to a despicable strategy of scapegoating, reminiscent of the darkest hours of France’s history. In a notorious debate with Marine Le Pen, President of the Far-Right Party “Rassemblement National” (National Rally), Macron’s Interior Minister Gérald Darmanin accused her of being “too soft” on Islam and refusing to “name the enemy”: “You say that Islam isn't even a problem... You need to take vitamins, you're not harsh enough!”

During a special evening dedicated to Samuel Paty [French teacher who was beheaded by a radicalized Islamist for showing his pupils derogatory Charlie Hebdo cartoons depicting the Prophet of Islam], Darmanin also denounced “communitarianism” and the “baser instincts” of “separatism” related to clothing or food (again, no kidding). He criticized clothing stores offering “community outfits” and the “halal sections” of supermarkets, portraying these as shocking practices. His aim was to link these cultural practices, which are perfectly harmless and consensual, to terrorism—a despicable process of amalgamation, stigmatization, and the appropriation of far-right discourse that is increasingly overt in the discourse and practices of Macron and his ministers.

Far from deterring the Rassemblement National’s electorate, this trivialization has only served to consolidate and grow it, providing a vigorous “vitamin” treatment regularly administered to hate speech by those in power and their media echo chambers.

The infamous Charlie Hebdo contributed on this ominous issue with a cartoon (“School reinvents itself” – “We bring our homework to school”) and a comment: “The question is how to deal with these cases, which involve particularly young children. The ten-year-old boy who incited his classmates to observe a minute's silence for the Prophet was the subject of 'worrying information' sent to the Alpes-Maritimes departmental council, as the Nice education authority told Charlie Hebdo. An alert was also issued to the prefecture for 'suspicion of radicalization'. 'The child doesn't become flagged as a serious threat to national security,' we're told. The idea is for the intelligence services to rule out any threat and check that the parents are not dangerous.' In the meantime, the schoolboy has been excluded from the school canteen and has taken an early vacation. 'We can't afford another Samuel Paty,' says a member of the Rector's entourage.”

In any case, it wouldn't be the first time that alleged TikTok “cyber-attacks on secularism” or other unverified gossip causes an uproar in the services of the Ministry of the Interior and the Ministry of National Education. Let us mention the controversies surrounding the wearing of the abaya and the deployment of the Orwellian concept of “improvised religious clothing,” promoted during the dubious “laïcité” training courses imposed on all teaching staff throughout France. These courses provide instructions and even rhetorical and legal tools to track down alleged intentions behind the “suspicious” dresses of presumably Muslim girls. A dress bought at H&M could thus fall under the “law banning ostentatious religious signs” (which really only targeted the Islamic veil) and earn the targeted schoolgirls summons, reprimands, or even threats and exclusion if they refuse to dress in a “republican” manner: a “morality police” doubled with a “thought police” in short. And it seems that the French authorities have just introduced a “children's games police.” Are we soon to see SWAT teams in primary school playgrounds? The degree of insanity is such that a sneeze from a swarthy pupil that sounds vaguely like “Allahu Akbar” would be enough to trigger such an intervention.

Extinguishing the fires or fanning them?

At a time when violence, including far-right terrorism targeting our fellow Muslim citizens, is reaching worrying proportions, the government persists in fanning the flames of hatred with its pyromaniac actions, exacerbating the real dangers threatening civil peace. The government's approach involves all-out repression, police and security abuses with total impunity [the French police are lately becoming seditious and openly rebellious, literally demanding a license to beat up and even kill without being bothered by any kind of justice procedure], and over-instrumentalizing trivial facts to raise the specter of fantasized threats. These tactics only serve to pit citizens against each other and divide the French society.

The republican school urgently needs resources, not diversionary strategies, artificial tensions, or a perpetual call into question of the status and fundamental rights of users and staff. The “non-negotiable” secularism promoted and ardently defended by the CGT Educ’action aims to ensure the serenity and cohesion of the educational community, not to transform staff into zealous police auxiliaries or confine an entire population to the status of suspect or “enemy within,” to be constantly monitored and held at bay.

The Republic guarantees freedom of worship and equal treatment for all its citizens. Anyone committed to republican ideals must protest against this frenzied desire to ignite bonfires from the most microscopic twigs, and against stigmatizing and discriminatory practices that tarnish France's image abroad and regularly elicit condemnations from human rights associations like Amnesty International and Human Rights Watch. National Education staff, in particular, must oppose these practices and report them to local union sections, which must vigorously defend all members of the educational community (staff, pupils, parents…) who fall victim to them.

Endnotes

[1] The minute's silence isn’t precisely a well-known practice in Muslim liturgy. As for the spelling “Mahomet,” we can only deplore the fact that despite the presence of the first name Mohammed in the top 10 of most given names in the current French population, and its position in the top 50 of names on French war memorials from the First World War, this backward-looking and contemptuous name dating from an era of antagonism between Christianity and Islam, and felt as an insult by millions of Muslims, remains in use.

[2] Like a downsized version of Voltaire fighting fanaticism in the days of the Inquisition, Pap Ndiaye has also taken to TV to denounce these “manifestations of religious proselytism in schools,” gargling in big words, notably BFM WC (“These facts are not acceptable in the School of the Republic... It is only natural that the Nice Academy, the Nice Rector, and the Nice Mayor should react firmly to ensure respect for the principles of secularism, which is why I have signed this joint declaration with the Nice Mayor... The parents have been summoned... The pupils have been reminded of their obligations with regard to religious neutrality, and they have been given training, because we're talking about children after all... In secondary schools, [for similar acts] there can be sanctions [or even] temporary or permanent exclusions...”). Pap Ndiaye did not hesitate to spread false Islamophobic information, namely that these children all belonged to the Muslim faith, which was denied by Eliane's testimony to BFM Côte d'Azur, whose non-Muslim grandson took part in these children's games: “He should check his sources because my grandson was part of the group playing and imitating prayer. There was no intention, no religion in the middle, it was really just a game... The stigmatization of children is really lamentable... That's why we no longer have confidence in politicians, because everything is blown out of proportion to unbelievable proportions, and this harms solidarity and life together.

[3] Let us remind that to be valid, Muslim prayer (especially in congregations) requires the age of puberty, a precise timetable, ablutions, specific clothing, orientation towards Mecca, etc.; so many conditions that it is simply impossible to meet in an elementary school playground during the lunch break.

 

 

 

20/07/2023

GIANFRANCO LACCONE
Nous qui continuons à avoir un rêve, sachons le partager

Gianfranco Laccone, Climateaid.it, 20/7/2023

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala


En cette semaine où tous les records de température maximale sont battus en Italie (comme si on était dans une compétition d’athlétisme), à Rome, les discussions s’entremêlent dans un style qu’Ennio Flaiano a très bien décrit, lorsqu’il a dit que même un Martien s’adapterait ensuite aux règles et au scepticisme de ses habitants [Un marziano a Roma, 1954]. Les prédictions populaires sur l’avenir immédiat annoncent des températures de plus en plus extrêmes, pour conclure que nous finirons par les surmonter aussi, en appliquant la règle du scepticisme romain qui rend les discussions dans cette ville irritantes et irrésistibles.

Cliquer pour agrandir

Au-delà des exagérations des propos de comptoir, ceux qui suivent depuis de nombreuses années le débat sur la pollution de la planète et ses conséquences sont frappés par la régression qu’a connue la prise de conscience de nos comportements et, par conséquent, le débat sur le sujet. Ce que j’exprime peut apparaître à certains comme une sorte de nostalgie d’une époque révolue, où l’on parlait du changement climatique en plein boom de la consommation, mais il ne me semble pas que ce soit le cas. Pour en témoigner, je me réfère à la lecture d’essais écrits il y a trente ans, et peut-être même de nombreux essais antérieurs, comme le merveilleux The Sea Around Us [La Mer autour de nous], écrit par Rachel Carson au début des années 1950, qui raconte l’histoire de la mer pour comprendre comment elle a changé et comment elle changera. Nous pourrions être surpris de constater qu’il y a trente ans, des chercheurs de différentes disciplines (écologistes, biologistes, chimistes, physiciens, éthologues, agronomes, économistes, philosophes, anthropologues) ont convergé vers certaines prédictions, en partant de points différents et en suivant des chemins différents. Ils ont surtout convergé sur la causalité de la relation “développement industriel/changement climatique/modification du comportement des êtres vivants”.

 

À l’époque, on discutait beaucoup et on réfutait les idées des autres avec des arguments et non avec des moqueries ou des invectives. Tout cela sans adhérer nécessairement à la théorie de James Lovelock, connue sous le nom d’“hypothèse Gaia”, sans devoir partager les positions de l’écopacifisme, dont Barry Commoner était l’un des plus grands représentants, sans être, enfin, des théoriciens de l’écomarxisme comme James O’Connor ou des théoriciens de la décroissance comme Serge Latouche.

 

Nous discutions en étant conscients que nous devions trouver des solutions, car face à des cas comme Seveso et la dioxine, Otrante et le plomb tétraéthyle dans la mer, Tchernobyl et la contamination radioactive, nous essayions de comprendre les causes profondes, les liens qui ont rendu ces événements possibles et, pour nous à l’ACU [Association Consommateurs Usagers, les raisons qui ont rendu possibles les morts au Viêt Nam avec les produits mortels répandus sur les forêts, les champs et les villages, et ceux dus au méthanol pour nos consommateurs habituels de vin bon marché. Nous essayions de relier les aspects économiques et sociaux aux aspects scientifiques, et de construire un discours utile pour développer des alternatives et des comportements appropriés aux dangers auxquels nous étions confrontés.

 

Aujourd’hui, après tant d’années, certaines vérités sont incontestables : la relation entre nous, l’environnement et les changements structurels du climat sont indéniables. On peut même discuter du moment et des possibilités de réagir aux catastrophes climatiques, que beaucoup considèrent encore comme lointaines et donc gérables. Ils disent : « après tout, il fait toujours chaud en été, les torrents ont toujours débordé, il a suffi d’une année de pandémie et d’abandon des activités polluantes pour que les valeurs remontent ».

 

OMER BENJAKOB
Les USA mettent à l’index des entreprises israéliennes spécialisées dans les cyberarmes

Omer Benjakob et Reuters, Haaretz, 18/7/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Intellexa, une alliance d’entreprises de renseignement numérique dirigée par un ancien officier de renseignement israélien, et Cytrox, qui produit leur logiciel espion Predator, sont ajoutées à la “liste noire d’entités” des USA, qui comprend déjà les entreprises israéliennes NSO et Candiru.

Un groupe de sociétés de surveillance numérique appartenant à Israël et opérant depuis l’Europe a été ajouté mardi à une liste noire usaméricaine de sociétés agissant contre les intérêts usaméricains, dans le cadre de la dernière tentative de la Maison Blanche de freiner la prolifération internationale de logiciels espions de qualité militaire.

Le ministère usaméricain du commerce a ajouté Intellexa et Cytrox, toutes deux détenues par différents ressortissants israéliens, dont l’ancien officier du renseignement militaire Tal Dilian, à sa “liste d’entités” pour le commerce économique.


Tal Dilian dans sa maison de Chypre
 

Cytrox, une société de surveillance basée en Hongrie et présente en Macédoine du Nord, produit un logiciel espion appelé Predator. L’entreprise a également bénéficié d’investissements précoces de la part de l’entreprise publique Israel Aerospace Industries.

Le ministère du commerce a déclaré que les entreprises étaient ajoutées « pour trafic de codes d’exploitation utilisés pour accéder à des systèmes d’information, menaçant ainsi la vie privée et la sécurité d’individus et d’organisations dans le monde entier ».

Intellexa, qui est enregistrée en Grèce et possède des entités apparentées en Irlande et en Macédoine du Nord, sert de guichet unique pour les besoins de surveillance de l’État. Les deux entreprises ont été au centre d’une énorme tempête politique en Grèce.

Le procureur grec a ouvert une enquête l’année dernière à la suite d’une allégation d’un journaliste selon laquelle son smartphone avait été infecté par un logiciel de surveillance dans le cadre d’une opération des services de renseignement du pays. Le journaliste a déclaré que son téléphone avait été infecté par le logiciel espion Predator développé par Cytrox et vendu en Grèce au gouvernement par Intellexa.

L’allégation du journaliste est intervenue alors que l’Union européenne (UE) commençait à emboîter le pas aux USA en se montrant plus sévère à l’égard des marchands de logiciels espions et de l’utilisation de puissants logiciels de surveillance.

Les tentatives de Haaretz pour joindre des représentants de Cytrox et d’Intellexa n’ont pas abouti.

GIDEON LEVY
Les carottes, ça suffit : il est temps que les USA utilisent le bâton pour changer la politique israélienne

Gideon Levy, Haaretz, 20/7/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Il est difficile de savoir s’il faut pleurer ou rire en lisant les grandes lignes de la conversation d’une heure que Joe Biden a eue avec Thomas Friedman, du New York Times après avoir rencontré le président Isaac Herzog, résumées le mardi 18 juillet.


United States of Israel, par Emanuele Del Rosso

On peut pleurer sur l’impuissance et l’inutilité de la plus grande superpuissance du monde face à son protégé, Israël. On peut aussi rire des rôles inversés de la fourmi et de l’éléphant.

On peut crier que l’USAmérique n’a rien appris et n’a rien oublié de la seule façon de traiter Israël, si l’on veut vraiment l’influencer, et on peut se laisser aller à rire de la façon dont Israël continue à se moquer des USA.

Le résultat est le même : Israël peut continuer à faire tout ce qu’il veut, promulguer des lois antidémocratiques, mener des pogroms contre les Palestiniens et poursuivre l’apartheid - les USA ne bougeront pas le petit doigt.

Même lorsque Washington grogne, s’emporte, fulmine, condamne et retarde même l’invitation du premier ministre - la plus terrible des armes apocalyptiques - Israël n’a pas à le prendre au sérieux. L’USAmérique parle mais ne tire jamais. Si elle veut un jour influencer Israël, ce qui n’est pas encore le cas, elle devra commencer à tirer, comme le dit l’adage usaméricain.

Le terrible Biden, qui n’invite pas notre Netanyahou, malgré toutes les souffrances du peuple juif, “plaide” auprès d’Israël. Plaide. Friedman a pu écrire que Biden a transmis un message clair selon lequel la législation [sur la réforme judiciaire] doit cesser, mais ce message est creux, comme la plupart de ceux qui l’ont précédé.

Au fil des ans, Israël a appris à ignorer ces messages. Rien de grave ne lui est arrivé. Cela ne peut que signifier que le plaideur lui-même ne souhaite pas vraiment voir la partie qu’il implore changer de comportement. Biden ne fait que des beaux discours sur la démocratie israélienne et ne dit pas un mot sur ce que son pays fera si Israël ne tient pas compte de son appel.