En reprenant
la solution à deux États, le Premier ministre israélien a cherché à gagner des
voix de gauche, mais même s'il gagne les élections, il devra former une
coalition avec des députés qui s'opposent à un État palestinien ◾ Netanyahou a créé un Likoud alternatif, un
autre jalon important dans la transformation du parti en un mouvement d’un seul
homme et d’une seule famille
Dessin d'Amos Biderman
Qu'est-ce qu'un chef de parti peut vouloir pour lui-même au
milieu d'une campagne électorale interminable si ce n'est donner du grain à
moudre, décider de l'ordre du jour, susciter un débat idéologique, déclencher
une « tempête » (qui s'éteindra avant même Rosh Hashanah) ? Le Premier ministre
Yair Lapid a réussi à se faire ce cadeau jeudi soir à l'Assemblée générale des
Nations Unies. Quelques phrases génériques sur la nécessité d'une solution à
deux États « à condition que l'État palestinien recherche la paix et ne
devienne pas une nouvelle base de terrorisme » ont provoqué une émeute du feu de
Dieu dans notre petit shtetl
tout droit sorti d’ Un violon sur
le toit.
Il s'avère
que le vrai et éprouvé conditionnement pavlovien n'a pas rouillé après des
années pendant lesquelles sa cause moisissait au grenier. Tout le monde a joué
son rôle dans le show : à gauche, ils ont ont fait un bon accueil (même si c’était
avec des dents serrées pour des raisons expliquées ci-dessous), à droite ils
ont fulminé, au centre ils l'ont ignoré et la claque de l'orateur a fait la fête.
Peu importe
que Lapid ait déjà dit ces choses il y a environ deux mois à côté de Joe Biden
à Jérusalem. Peu importe que Benjamin Netanyahou ait annoncé sur cette même tribune en 2016 qu'il « restait attaché à la solution à deux États », ait
exhorté le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à se rencontrer,
l'ait invité à faire un discours à la Knesset et lui-même au parlement à
Ramallah. Peu importe que quatre ans plus tard, il ait inauguré avec Donald
Trump l '« Accord du siècle », dont le résultat final était le même : deux
États.
Il n'est pas
non plus important que la déclaration de Lapid en soi n'ait aucune
signification pratique et aucune probabilité de mise en œuvre. Il n'y a pas de
partenaire. Abou Mazen est en phase terminale, la Cisjordanie s'effrite entre
ses doigts et même si Lapid parvient à former un gouvernement après les
élections, il devra inclure des éléments qui s'opposent à un État palestinien.
Incidemment, quelle différence cela fait-il que ce soit la position connue de
Lapid, d'autant plus qu'il s'est rendu compte qu'il était inutile pour lui de
se déguiser en homme de droite ? Dans ce pâturage il n'y a pas d'herbe pour son
parti Yesh Atid, il n'y en a jamais eu et il n'y en aura jamais.
Les émotions
qui ont explosé dans le sillage de ce qui a été rapporté la veille du discours,
de sorte qu'il pourrait occuper tout un cycle de nouvelles avant vendredi,
samedi et une longue fête, étaient excessives. Tout comme l'ancien Premier
Ministre Naftali Bennett a exprimé son point de vue contraire à chaque
occasion, que ce soit dans une déclaration proactive ou en ignorant la question
de manière démonstrative, son successeur a le droit d'exprimer un point de vue
opposé. Le ministre de la Justice de Nouvel Espoir, Gideon Sa'ar, et le
ministre du Logement, Zeev Elkin, ainsi que les chefs de l'aile droite du Parti
de l'unité nationale, ont dénoncé les petites phrases de Lapid. Le ministre des
Finances, Avigdor Lieberman, de Yisrael Beiteinu, les a rejoints – lui aussi avec
en tête les élections. Le ministre de la Défense Benny Gantz et l'ancien chef
d'état-major Gadi Eisenkot, dans l'autre partie de l'Unité nationale, n'ont pas moufté.
Le Premier ministre Yair
Lapid s'adressant à l'Assemblée générale des Nations Unies jeudi. Photo : Mike
Segar/Reuters
Eisenkot est
sur la même longueur d’ondes que Lapid. Et Gantz aussi, plus ou moins. Si Lapid
espérait révéler les atomes crochus entre eux, il y est parvenu. Il espère non
seulement les révéler, mais aussi ramasser des votes. En fin de compte,
l'histoire est entièrement politique. Quarante jours avant les élections, le
prisme ne reflète qu'une seule valeur : TOUT est politique. Le bien-être est
politique, le crime est politique, l'économie est politique. Même une mariée ivre
qui embarrasse un crooner célèbre est politique. Lorsque le Premier ministre
par intérim et chef de Yesh Atid déclare son soutien à la solution à deux
États, il dit partition mais il pense occupation. Lapid délimite des
territoires qu'il entend annexer : des territoires du centre-gauche. Pour le
moment, c'est sa devise : le parti d'abord, le bloc plus tard.
Le virage à
gauche s'adresse aux électeurs de Meretz et des travaillistes et à gauche de l'Unité
nationale. Lapid aspire à plus que les 23 ou 24 sièges de la Knesset que les
sondages d'opinion lui prédisent. S'il réussit à piquer au moins un siège aux
trois autres listes (son maximum a été et reste sa percée en 2013, avec 19
sièges), il en sortira heureux. La cheffe de Meretz Zehava Galon, la ministre travailliste
des Transports Merav Michaeli et Gantz le seront moins.
Familiares de los 43 estudiantes desaparecidos de
Ayotzinapa y simpatizantes se manifestaron frente a la Embajada de Israel en la
Ciudad de México para exigir la extradición del ex director de la ACI (Agencia
de Investigación Criminal, el “FBI mexicano”, 2013-2018), Tomás Zerón; el
embajador israelí: “Escribir “muerte a Israel” en los muros de la embajada no
tiene nada que ver con el caso”.
Los familiares de 43 estudiantes mexicanos que fueron
secuestrados y asesinados en 2014 se manifestaron el miércoles frente a la
embajada de Israel en México, exigiendo la extradición de un ex investigador
buscado en relación con este caso. Durante la manifestación, decenas de
manifestantes enmascarados decoraron la embajada de Israel con grafitis que
decían “muerte a Israel”.
Cientos de manifestantes se reunieron frente a la
Embajada de Israel en la Ciudad de México, algunos con fotos de los estudiantes
desaparecidos, otros pintando grafitis en los muros de la embajada. Las
familias de los 43 estudiantes, que desaparecieron por la fuerza tras ser
detenidos por la policía municipal hace ocho años, exigen a Israel la
extradición del ex investigador Tomás Zerón, acusado de haber manipulado la
investigación sobre el secuestro de los estudiantes.
Tomás Zerón en 2015. Foto Tomás Bravo—Reuters
Buscado por tortura y falsificación de pruebas, Zerón fue
uno de los autores intelectuales de la versión de los hechos respaldada por el
Estado, presentada en 2015 y rechazada por los familiares de las víctimas y
expertos independientes. Zerón vive en Israel desde hace tres años y solicitó
asilo oficialmente en 2021. A pesar de las múltiples peticiones de México,
Israel sigue negándose a entregarlo a la justicia.
Des parents
des 43 étudiants disparus d’Ayotzinapa et des sympathisants ont manifesté
devant l'ambassade d'Israël à Mexico pour demander l'extradition de l'ancien directeur
de l’ACI (Agence d’enquêtes criminelles, le “FBI mexicain”, 2013-2018), Tomás
Zerón ; l’ambassadeur d'Israël : « Écrire 'mort à Israël' sur les murs de
l'ambassade n'a rien à voir avec l'affaire ».
Les proches
de 43 étudiants mexicains qui ont été enlevés et tués en 2014 ont manifesté
mercredi devant l'ambassade d'Israël au Mexique, demandant l'extradition d'un
ancien enquêteur recherché dans le cadre de cette affaire. Pendant la
manifestation, des dizaines de manifestants masqués ont vandalisé l'ambassade
d'Israël avec des slogans graffités, dont “mort à Israël”.
Des
centaines de manifestants se sont rassemblés devant l'ambassade d'Israël à
Mexico, certains portant des photos des étudiants disparus, d'autres peignant
des graffitis sur les murs de l'ambassade. Les familles des 43 étudiants, qui
ont disparu de force après avoir été arrêtés par la police municipale il y a
huit ans, exigent qu'Israël extrade l'ancien enquêteur Tom160s Zerón, accusé
d'avoir manipulé l'enquête sur l'enlèvement des étudiants.
Tomás Zerón en 2015. Foto Tomas Bravo—Reuters
Recherché
pour torture et falsification de preuves, Zerón était l'un des cerveaux de la
version des événements soutenue par l'État, présentée en 2015 et rejetée par
les proches des victimes et des experts indépendants. Zerón vit en Israël
depuis trois ans et a officiellement demandé l'asile en 2021. Malgré de
multiples demandes du Mexique, Israël refuse toujours de le remettre à la
justice.
M. le Secrétaire général des
Nations Unies, António Guterres, Vos Excellences, Chefs d'État et Chefs de
Mission accrédités à la 77ème session de l'Assemblée générale des Nations
Unies, Mme la Secrétaire générale adjointe des Nations Unies, Amina Mohammed, à
vous toutes et tous.
Je viens de l'un des trois
plus beaux pays du monde.
Il y a là-bas une explosion
de vie. Des milliers d'espèces multicolores dans les mers, dans les cieux, dans
les terres... Je viens du pays des papillons jaunes et de la magie. Là, dans
les montagnes et les vallées de tous les verts, non seulement les eaux
abondantes coulent, mais aussi les torrents de sang. Je viens d'un pays à la
beauté ensanglantée.
Mon pays n'est pas seulement
beau, il est aussi violent.
Comment la beauté peut-elle
se conjuguer avec la mort, comment la biodiversité de la vie peut-elle éclater
avec les danses de la mort et de l'horreur ? Qui est coupable de rompre le
charme avec la terreur ?
Qui ou quoi est responsable
de noyer la vie dans les décisions routinières de la richesse et de l'intérêt ?
Qui nous conduit à la destruction en tant que nation et en tant que peuple ?
Mon pays est beau parce qu'il
a la jungle amazonienne, la jungle du Chocó, les eaux, la cordillère des Andes
et les océans.
Dans ces forêts, de l'oxygène
planétaire est émis et le CO2 atmosphérique est absorbé. L'une de ces plantes
absorbant le CO2, parmi des millions d'espèces, est l'une des plus persécutées
sur terre. On cherche à tout prix à la détruire : c'est une plante amazonienne,
la coca, la plante sacrée des Incas.
Comme à un carrefour
paradoxal, la forêt qu’on tente de sauver est, en même temps, détruite.
Pour détruire la plante de
coca, on jette des poisons et du glyphosate dans l'eau, on arrête les
cultivateurs et les emprisonnent. Pour avoir détruit ou possédé la feuille de
coca, un million de Latino-Américains sont tués et deux millions
d'Afro-Américains sont emprisonnés en Amérique du Nord. Détruisez la plante qui
tue, crient-ils depuis le Nord, mais la plante n'est qu'une plante de plus
parmi les millions qui périssent lorsqu'ils déclenchent le feu contre la
jungle.
Détruire la forêt,
l'Amazonie, est devenu le mot d'ordre suivi par les États et les commerçants.
Peu importe le cri des scientifiques qui désignent la forêt tropicale comme
l'un des grands piliers climatiques. Pour les rapports de force du monde, la
forêt tropicale et ses habitants sont à blâmer pour le fléau qui les frappe.
Les relations de pouvoir sont rongées par l'addiction à l'argent, pour se
perpétuer, au pétrole, à la cocaïne et aux drogues les plus dures afin de
s'anesthésier davantage.
Rien n'est plus hypocrite que
le discours pour sauver la forêt tropicale.
La forêt tropicale brûle,
messieurs, pendant que vous faites la guerre et jouez avec elle. La forêt
tropicale, pilier climatique du monde, disparaît avec toute sa vie. La grande
éponge qui absorbe le CO2 planétaire s'évapore. La forêt salvatrice est
considérée dans mon pays comme l'ennemi à vaincre, comme la mauvaise herbe à éradiquer.
L'espace de la coca et des agriculteurs qui la cultivent, parce qu'ils n'ont
rien d'autre à cultiver, est diabolisé. Vous ne vous intéressez à mon pays que
pour jeter des poisons dans ses jungles, mettre ses hommes en prison et jeter ses
femmes dans l'exclusion. Vous ne vous intéressez pas à l'éducation des enfants,
mais au fait de tuer leurs forêts et d'extraire du charbon et du pétrole de ses
entrailles. L'éponge qui absorbe les poisons est inutile, on préfère jeter
davantage de poisons dans l'atmosphère.
Nous leur servons d’excuse
pour le vide et la solitude de leur propre société qui les conduit à vivre dans
les bulles de la drogue. Nous leur cachons leurs problèmes qu'ils refusent de
réformer. Il est préférable de déclarer la guerre à la forêt, à ses plantes, à
ses habitants.
Pendant qu'ils laissent
brûler les forêts, pendant que les hypocrites chassent les plantes avec des
poisons pour cacher les désastres de leur propre société, ils nous demandent
toujours plus de charbon, toujours plus de pétrole, pour calmer l'autre addiction
: celle de la consommation, du pouvoir, de l'argent.
Qu'est-ce qui est le plus
toxique pour l’humanité : la cocaïne, le charbon ou le pétrole ? Les diktats du
pouvoir ont ordonné que la cocaïne est le poison et qu'il faut la persécuter,
même si elle ne provoque que des morts minimes par overdose, et plus par les
mélanges provoqués par son statut clandestin, mais que le charbon et le pétrole
doivent être protégés, même si leur utilisation peut provoquer l’extinction de
l'humanité entière. Ce sont les choses du pouvoir mondial, les choses de
l'injustice, les choses de l'irrationalité, parce que le pouvoir mondial est
devenu irrationnel.
Ils voient dans l'exubérance
de la jungle, dans sa vitalité la luxure, le péché ; l'origine coupable de la
tristesse de leurs sociétés, imprégnées de la compulsion illimitée de l'avoir
et du consommer. Comment cacher la solitude du cœur, sa sécheresse au milieu de
sociétés sans affection, compétitives au point d'emprisonner l'âme dans la
solitude, sinon en la rendant responsable de la solitude de leurs sociétés, qui
sont imprégnées de la compulsion illimitée d'avoir et de consommer. Comment
cacher la solitude du cœur, sa sécheresse au milieu de sociétés sans affection,
compétitives au point d'emprisonner l'âme dans la solitude, sinon en accusant
la plante, l'homme qui la cultive, les secrets libertaires de la forêt. Selon
le pouvoir irrationnel du monde, ce n'est pas la faute du marché qui réduit
l'existence, c'est la faute de la forêt et de ceux qui l'habitent.
Les comptes bancaires sont devenus
illimités, l'argent épargné des personnes les plus puissantes de la planète ne
peut même pas être dépensé au long de siècles. La tristesse de l'existence
produite par cet appel artificiel à la compétition est remplie de bruit et de
drogues. La dépendance à l'argent et à l'avoir a un autre visage : la
dépendance à la drogue chez les perdants de la compétition, chez les perdants
de la course artificielle en laquelle l'humanité s'est transformée. La maladie
de la solitude ne sera pas guérie par du glyphosate sur les jungles. Ce n'est
pas la jungle qui est à blâmer. Le coupable est leur société éduquée dans la
consommation sans fin, dans la confusion stupide entre consommation et bonheur
qui permet, oui, aux poches du pouvoir de se remplir d'argent.
Ce n'est pas la jungle qui
est à blâmer pour la toxicomanie, c'est l'irrationalité de votre pouvoir
mondial.
Donnez un coup de raison à
votre pouvoir. Rallumez les lumières du siècle.
La guerre contre la drogue
dure depuis 40 ans, si nous ne rectifions pas le tir et qu'elle se poursuit
pendant 40 ans encore, les USA verront 2 800 000 jeunes mourir d'overdoses de
fentanyl, qui n'est pas produit dans notre Amérique latine. Elle verra des
millions d'Afro-Américains emprisonnés dans leurs prisons privées. L’Afro
emprisonné deviendra le fonds de commerce des entreprises pénitentiaires, un
million de Latino-américains de plus seront assassinés, nos eaux et nos champs
verts seront remplis de sang, le rêve de la démocratie mourra dans mon Amérique
comme dans l'Amérique anglo-saxonne. La démocratie mourra là où elle est née,
dans la grande Athènes d'Europe occidentale.
Pour avoir caché la vérité,
vous verrez la jungle et les démocraties mourir.
La guerre contre la drogue a
échoué. La lutte contre la crise climatique a échoué.
La consommation mortelle a
augmenté, des drogues douces aux drogues dures, un génocide a eu lieu sur mon
continent et dans mon pays, des millions de personnes ont été condamnées à la
prison, et pour cacher leur propre culpabilité sociale, ils ont accusé la forêt
tropicale et ses plantes. Ils ont rempli les discours et les politiques
d'absurdités.
J'exige d'ici, depuis mon
Amérique latine meurtrie, la fin de la guerre irrationnelle contre la drogue.
La réduction de la consommation de drogues ne nécessite pas de guerres, elle
nécessite que nous construisions tous une société meilleure : une société plus
solidaire, plus affectueuse, où l'intensité de la vie sauve des dépendances et
des nouvelles formes d'esclavage. Voulez-vous moins de drogues ? Pensez à moins
de profit et à plus d'amour. Pensez à un exercice rationnel du pouvoir.
Ne touchez pas avec vos
poisons la beauté de ma patrie. Aidez-nous sans hypocrisie à sauver la forêt
amazonienne pour sauver la vie de l'humanité sur la planète.
Vous avez réuni les
scientifiques, et ils ont parlé avec raison. Avec les mathématiques et les
modèles climatologiques, ils ont dit que la fin de l'espèce humaine était
proche, que ce n'est plus une question de millénaires, ni même de siècles. La
science a déclenché les sonnettes d'alarme et nous avons cessé de l'écouter. La
guerre a servi d'excuse pour ne pas prendre les mesures nécessaires.
Quand il fallait agir, quand
les discours ne servaient plus à rien, quand il était indispensable de mettre
de l'argent dans des fonds pour sauver l'humanité, quand il fallait sortir au
plus vite du charbon et du pétrole, ils ont inventé guerre après guerre après
guerre. Ils ont envahi l'Ukraine, mais aussi l'Irak, la Libye et la Syrie. Ils
ont envahi au nom du pétrole et du gaz.
Ils ont découvert au XXIe
siècle la pire de leurs addictions : l'addiction à l'argent et au pétrole.
Les guerres leur ont servi
d'excuse pour ne pas agir contre la crise climatique. Les guerres leur ont
montré à quel point ils sont dépendants de ce qui va tuer l'espèce humaine.
Si vous voyez des gens
affamés et assoiffés qui migrent par millions vers le nord, là où se trouve
l'eau, alors vous les enfermez, construisez des murs, déployez des
mitrailleuses, tirez sur eux. Vous les expulsez comme s'ils n'étaient pas des
êtres humains, vous reproduisez au quintuple la mentalité de ceux qui ont créé
politiquement les chambres à gaz et les camps de concentration, vous
reproduisez à l'échelle planétaire 1933. Le grand triomphe de l'assaut contre
la raison.
Ne voyez-vous pas que la
solution au grand exode déclenché vers vos pays est de revenir à ce que l'eau remplisse
les rivières et que les champs se remplissent d’aliments ?
La catastrophe climatique
nous remplit de virus qui nous envahissent, mais vous faites des affaires avec
les médicaments et transformez les vaccins en marchandises. Vous proposez que
le marché nous sauve de ce que le marché lui-même a créé. Le Frankenstein de
l'humanité consiste à laisser le marché et la cupidité agir sans planification,
en abandonnant les cerveaux et la raison au marché. En agenouillant la
rationalité humaine devant la cupidité.
A quoi sert la guerre si ce
dont nous avons besoin est de sauver l'espèce humaine ? A quoi servent l'OTAN
et les empires, si ce qui se profile est la fin de l'intelligence ?
La catastrophe climatique va
tuer des centaines de millions de personnes et écoutez bien, elle n'est pas
produite par la planète, elle est produite par le capital. La cause de la
catastrophe climatique est le capital. La logique du rapport à l'autre pour
consommer toujours plus, produire toujours plus, et pour certains gagner
toujours plus, produit la catastrophe climatique. Ils ont articulé à la logique
de l'accumulation étendue, les moteurs énergétiques du charbon et du pétrole et
ont déclenché l'ouragan : le changement chimique profond et mortel de
l'atmosphère. Maintenant, dans un monde parallèle, l'accumulation élargie du
capital est une accumulation élargie de la mort.
Depuis les terres de la
jungle et de la beauté, là où ils ont décidé de faire d'une plante de la forêt
amazonienne un ennemi, d'extrader et d'emprisonner ses cultivateurs, je vous
invite à arrêter la guerre, et à mettre fin à la catastrophe climatique.
Ici, dans cette forêt
amazonienne, il y a un échec de l'humanité. Derrière les feux qui la brûlent,
derrière son empoisonnement, il y a un échec intégral, civilisationnel, de
l'humanité.
Derrière la dépendance à la
cocaïne et aux drogues, derrière la dépendance au pétrole et au charbon, se
cache la véritable dépendance de cette phase de l'histoire humaine : la
dépendance au pouvoir irrationnel, au profit et à l'argent. C'est l'énorme
machine mortelle qui peut éteindre l'humanité.
Je vous propose, en tant que
président de l'un des plus beaux pays du monde, et l'un des plus ensanglantés
et violés, de mettre fin à la guerre contre la drogue et de permettre à notre
peuple de vivre en paix.
Je fais appel à toute
l'Amérique latine à cette fin. J'appelle la voix de l'Amérique latine à s'unir
pour vaincre l'irrationnel qui martyrise nos corps.
Je vous invite à sauver la
forêt amazonienne intégralement avec les ressources qui peuvent être allouées
globalement à la vie. Si vous n'avez pas la capacité de financer le fonds pour
la revitalisation des forêts, si l'argent est plus important pour les armes que
pour la vie, alors réduisez la dette extérieure pour libérer nos propres
espaces budgétaires et avec eux, accomplissez la tâche de sauver l'humanité et
la vie sur la planète. Nous pouvons le faire, nous, si vous, vous ne le voulez
pas. Il suffit d'échanger la dette contre la vie, contre la nature.
Je vous propose, et j'appelle
l'Amérique latine à faire de même, d'engager le dialogue pour mettre fin à la
guerre. Ne nous poussez pas à nous aligner sur les champs de bataille. L'heure
est à la PAIX. Que les peuples slaves se parlent entre eux, que les peuples du
monde se parlent entre eux. La guerre n'est qu'un piège qui nous rapproche de
la fin des temps dans la grande orgie de l'irrationalité.
Depuis l'Amérique latine,
nous appelons l'Ukraine et la Russie à faire la paix.
Ce n'est que dans la paix que
nous pourrons sauver la vie dans ce pays qui est le nôtre. Il n'y a pas de paix
totale sans justice sociale, économique et environnementale.
Nous sommes également en
guerre contre la planète. Sans paix avec la planète, il n'y aura pas de paix
entre les nations.
Sans justice sociale, il n'y
a pas de paix sociale.
Le mot
spécisme* est fondé sur la notion d'espèce, par analogie avec les mots racisme
et sexisme : c'est le système de domination, d'objectivation, d'appropriation
des animaux, fondé sur le critère rigide et arbitraire de l'appartenance des
individus à une espèce.
Un tel
système est soutenu et justifié par le dogme de la Nature et l'idéologie
de la centralité et de la supériorité de l'espèce humaine sur toutes les
autres. La pensée occidentale moderne, bien qu’envisageant des formes de
continuité dans la sphère matérielle - évolutive, biologique, mais aussi
génétique - a surtout séparé culturellement et moralement non seulement le
corps de l'esprit, le soma de la psyché, mais aussi les humains des
non-humains.
Par
conséquent, elle a souvent opéré une nette dissociation entre les sujets
humains et les objets animaux, réifiant ces derniers et niant non
seulement le fait qu'ils ont un “monde”, des cultures, une “histoire”,
mais aussi leur qualité de sujets dotés d'une vie sensible, émotionnelle et
cognitive.
Les
croyances, préjugés et stéréotypes utilisés pour légitimer l'indifférence à
l'égard des souffrances infligées aux animaux ou pour justifier la cruauté coutumière
à leur égard sont étroitement liés aux formes de pensée racistes et sexistes.
Le mouvement antispéciste (ou mouvement de libération animale) affirme que l’assignation
des individus à des catégories biologiques (d'espèces, mais aussi de “race”, de
sexe, d'âge) n'est pas pertinente pour décider de la considération à accorder à
leurs besoins, à leurs désirs, à leurs droits ; et elle sert simplement de
prétexte idéologique à la discrimination, qui va jusqu'à la réification. Au
sujet de cette dernière, il suffit de mentionner le fait que, jusqu'en 2015,
pour le Code civil français, le statut juridique de l'animal était celui d'un bien
meuble : ce n'est que plus tard qu'il est devenu « un être vivant doué
de sensibilité » [voir ici].
Un des
risques les plus sérieux est, à mon avis, l'infiltration du mouvement
antispéciste ou l'appropriation de la “question animale” par des courants de
droite ou d'extrême droite. Il est donc également nécessaire - et pas seulement
pour des raisons tactiques - d'articuler l'antispécisme avec l'antisexisme et
l'antiracisme. Les stéréotypes utilisés pour légitimer l'indifférence à l'égard
des souffrances infligées aux animaux ou pour justifier la cruauté habituelle à
leur égard sont étroitement liés aux modes de pensée racistes et sexistes.
Une partie
de la gauche politique court également de tels risques, incapable, comme elle
l'est souvent, de comprendre la valeur stratégique de l'antispécisme. Pour une
partie de la pensée de gauche, la “question animale” est un luxe pour les
privilégiés, qui seraient indifférents aux questions de classe, de justice
sociale et d'égalité. Cependant, bien que la tradition de gauche ait souvent
marqué ses distances par rapport à la “question animale”, il existe des
exceptions historiques pertinentes auxquelles on peut se référer : de Rosa
Luxemburg à Horkheimer et Adorno...
Quant au
mouvement féministe, il a certainement développé une réflexion profonde sur ce
qui est proclamé, proposé et imposé comme neutralité universelle. Mais, jusqu'à
présent, du moins dans ses variantes italienne et française, il n'a pas su
réfléchir suffisamment au “cycle maudit de l'exclusion des autres”, inauguré
par le spécisme (l'expression est de Claude Lévi-Strauss).
En effet,
affirmer que les animaux ne sont pas des choses, des biens ou des marchandises,
mais bien des sujets d'une vie sensible, singulière, affective et cognitive (et
agir en conséquence) signifie aller dans le sens d'un projet économique, social
et culturel qui a pour fondement la redistribution des ressources à l'échelle
mondiale, l'égalité économique et sociale, et en fin de compte le dépassement
du système capitaliste. Et ceci dans la mesure où, notamment dans sa phase
néolibérale et mondialisée, le capitalisme est fondé sur l'exploitation
intensive des non-humains comme des humains.
Même les
écologistes ont tardé non seulement à se préoccuper du bien-être animal, mais
aussi à prendre en compte les énormes dégâts environnementaux causés par
l'industrie de la viande. De fait, au moins 142 milliards d'animaux sont
abattus chaque année dans le monde. Avant d'être tués, souvent de manière
douloureuse et horrible, les animaux d'élevage n'ont aucune existence. Les
cochons sont emprisonnés dans des cages qui compriment leur corps et les
empêchent de bouger du tout ; les veaux sont arrachés à leur mère dès leur
naissance ; les poussins mâles sont pulvérisés vivants...
Cette
industrie est la principale responsable de la déforestation, de la consommation
et de la pollution de l'eau, de la production de gaz à effet de serre, de
l'utilisation planétaire des terres, de la consommation de produits agricoles ;
en outre, elle est l'une des premières en termes de consommation d'énergie.
Tout cela au profit presque exclusif des pays occidentaux riches et
industrialisés, qui sont les plus gros consommateurs de viande par habitant. [voir
ici]
En résumé,
nous avons aujourd'hui tous les éléments pour affirmer que l'alimentation
carnée provoque un véritable désastre écologique (il faut dix mille litres
d'eau pour produire un kilo de viande bovine) ainsi qu'une importante
sous-nutrition humaine : quatre milliards d'êtres humains de plus pourraient
être nourris si les productions végétales destinées aux bovins étaient
utilisées directement pour l’ alimentation des humains.
En réalité,
les élevages industriels et les abattoirs, avec leur chaîne de démontage
des corps des animaux, restent les exemples extrêmes d'“usines” typiquement
fordistes. Là, une vache est tuée et dépecée toutes les minutes, un porc toutes
les vingt secondes et un poulet toutes les deux secondes. Mais leurs dégâts
n'affectent pas seulement la vie des animaux, bien sûr, et l'environnement,
mais aussi les travailleurs qui y sont employés. En France, d'ailleurs, il y a
eu des enquêtes de terrain sur les chaînes d'abattage, qui décrivent
l'enfer des conditions des animaux et des travailleurs.
La rationalité
technique de l'élevage et de l'abattage des animaux contient en elle-même une
logique qui évoque celle qui a guidé les techniques de concentration et
d'extermination des humains. Suivant la sémantique de l'euphémisme homicide,
l'extermination planifiée selon la stricte logique industrielle était désignée
par l'expression « donner une mort compatissante » afin d'éviter les « souffrances
inutiles ». Ainsi, la mise à mort en série d'animaux destinés à l'abattage
dans des abattoirs aseptiques et automatisés, prescrite par les lois des pays
occidentaux “plus avancés”, est appelée et justifiée comme un “abattage sans
cruauté”.
L'antispécisme
s'oppose à la vision naturaliste des êtres vivants et s'intéresse non pas à ce
que les individus représentent, mais avant tout à ce qu'ils ressentent et
vivent. Ce qui compte, ce n'est pas le logos, la rationalité ou la capacité
d'abstraction, mais, avant tout, la simple existence de la souffrance de
l'animal, qui est la preuve de sa conscience et de sa subjectivité. On sait
maintenant que la sensibilité et l'acuité affective des porcs sont parmi les
plus développées. Et pourtant, cela n'empêche pas de tuer au moins deux
milliards d'entre eux chaque année, après les avoir soumis à des conditions
d'élevage horribles.
C'est
l'homme occidental-moderne qui a inauguré la rhétorique selon laquelle
l'altérité ne peut être définie que par un critère privatif. L'animal non
humain serait caractérisé par ce qui lui manque : raison, âme, conscience,
langage, culture...
Jamais par
sa singularité. A cet égard, les découvertes nombreuses et novatrices dans les
domaines de l'éthologie et de la psychologie cognitive nous ont amenés à
abandonner progressivement les anciens critères privatifs. Néanmoins, la pensée
dogmatique de la suprématie absolue des êtres humains invente toujours de
nouvelles différences radicales, infondées ou même ridicules. On disait
autrefois que l'utilisation d'outils était “propre à l'homme”, jusqu'à ce que
l'on découvre que certaines espèces animales les utilisaient. Ensuite, on a prétendu
que seuls les humains étaient capables de les fabriquer, alors qu'en fait les
chimpanzés et d'autres animaux en sont également capables. Plus tard, il a été
affirmé que les animaux n'avaient pas de langage articulé. Or on a pu enseigner à certains primates le
langage gestuel des sourds-muets humains, avec une syntaxe et d'autres règles.
Nous
disposons donc aujourd'hui de tous les éléments scientifiques pour affirmer que
les animaux sont des êtres sensibles, dans de nombreux cas dotés d'une
conscience, au sens le plus fort du terme.
Certains
anthropologues, au premier rang desquels Claude Lévi-Strauss, ont émis
l'hypothèse que l'asservissement, la disqualification et l'exploitation des
animaux étaient le modèle primaire qui permettait la domination, la réification
et la hiérarchisation de certaines catégories d'êtres humains. Pour sa part,
Theodor W. Adorno, dans un aphorisme mémorable de Minima Moralia, écrit
que l'éventualité du pogrom est décidée « au moment où le regard d'un
animal mortellement blessé rencontre un homme. L'obstination avec laquelle il
rejette son regard – “ce n'est qu'un animal” - réapparaît irrésistiblement dans
les cruautés commises sur les humains, dont les auteurs doivent constamment se
convaincre que “ce n'est qu'un animal” ».
NdT
*Spécisme :
traduction de l’anglais speciesism, un terme forgé par le psychologue britannique Richard
Ryder, membre du Groupe d’Oxford, en 1970, et défini comme « un préjugé ou
une attitude de partialité en faveur des intérêts des membres de sa propre
espèce et contre ceux des membres d'autres espèces ».
Le marché de la viande, par Carl Hassmann,magazine Puck, USA, 1906 [date de parution du roman d'Upton Sinclair La Jungle, sur les abattoirs de Chicago et de la promulgation de la première loi fédérale de régulation du marché de la viande] :
Un boucher, "Le trust du bœuf", debout derrière le comptoir d'une boucherie, présentant des produits carnés étiquetés "Poison en pot, bœuf au maïs chimique, poulet de veau, saindoux tuberculeux, rôti de bœuf pourri, jambon désodorisé, saucisses embaumées, porc putréfié". Un verset de la Bible apparaît sous le comptoir : "C'est pourquoi je vous dis : Ne vous souciez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni de ce que vous boirez. Matthieu VI:25".
Israël veut
une autre intifada, cela ne fait aucun doute. Il n'y a pas d'autre explication
au comportement débridé de ces derniers mois, même si l'on ne voit pas bien
quel bénéfice possible pourrait être tiré d'un inutile bain de sang de plus.
Inutile, mais Israël le veut : ce qu'il fait dans les territoires occupés ces
derniers temps conduira inévitablement à une nouvelle intifada. Israël le sait
bien. Il faut donc en conclure que c'est ce qu'il veut.
Des manifestants
palestiniens protestant contre l'arrestation de deux militants palestiniens
affrontent les forces de sécurité palestiniennes, à Naplouse, en Cisjordanie
occupée par Israël, le mardi 20 septembre. Photo MOHAMAD TOROKMAN/ Reuters
Tous les
éléments nécessaires au déclenchement d'une nouvelle intifada ne manquent que
du côté palestinien : les Palestiniens manquent de leadership, ils manquent de
soutien arabe et international, ils manquent d'unité et de combativité, sans
lesquelles l'intifada sera lente à venir, même si elle finira par arriver. Mais
Israël a fait sa part pour alimenter un déchaînement de colère et de violence à
son encontre.
« A
quoi vous attendiez-vous ? », demande Trad Salah, dont le fils Uday, 17
ans, est mort lorsqu'un tireur d'élite des FDI lui a tiré une balle dans la
tête et une balle dans le cœur à une distance de 100 mètres à Kafr Dan. La
question est restée en suspens dans sa maison, qui ne se remettra jamais de son
chagrin. Les deux hommes qui ont tué le major israélien Bar Falah au poste de
contrôle de Jalamah la semaine dernière venaient de ce village militant. En
avril, les soldats ont tué deux hommes non armés dans le village. Maintenant,
ils ont tué Uday. Dans quelques jours, l'armée va faire une descente dans le
village et raser les maisons des tueurs de Falah. L’évidence s’impose, ce n’est
qu’une question de temps. Les fossoyeurs peuvent se mettre au travail dans le
cimetière en face de la maison de Salah, qui peut voir la tombe de son fils depuis
sa fenêtre.
A quoi vous
attendiez-vous ? Demandez aux commandants de Tsahal et du Shin Bet qui laissent
l'armée et les services de sécurité faire ce qu'ils veulent. A quoi vous
attendiez-vous ? Demandez au Premier ministre et au ministre de la Défense du
soi-disant gouvernement de changement et de guérison, qui ont permis et
encouragé tout cela. À quoi vous attendiez-vous ? Il faut demander à chaque
Israélien qui reste silencieux. Aucun peuple qui a souffert comme le peuple
palestinien a souffert ne restera silencieux, et cela inclut le peuple
palestinien entre Rafah, dans la bande de Gaza, et Jénine en Cisjordanie.
Ce qu'Israël
fait depuis quelques mois est un aller simple vers un soulèvement populaire,
même s'il échoue comme ses deux prédécesseurs. Le plus grand nombre de décès de
Palestiniens et de détentions sans procès en sept ans et le plus grand nombre
d'incidents violents commis par des colons - peut-être plus que jamais. À quoi
vous attendiez-vous ? Des châtiments collectifs éhontés, des châtiments
familiaux sans hésitation - à quoi vous attendiez-vous ? Qu'attendez-vous d'une
armée dont le commandant se vante de sa capacité à tuer et dont les soldats
savent que tout est permis ?
Il est
difficile de savoir par où commencer - par l'apartheid quotidien, par
l'agriculteur palestinien qui a essayé de se protéger et de protéger ses biens
contre les voyous colons et qui a maintenant les mains écrasées, et qui est
détenu depuis deux semaines alors que le colon qui l'a blessé est libre ? Avec
le meurtre de Shireen Abu Akleh, suivi des tentatives mensongères des FDI de
fuir toute responsabilité pour ce crime ignoble et de soutenir les soldats qui
l'ont abattue lorsqu'ils ont vu qu'elle était journaliste ?
Avec
l'incroyable légèreté avec laquelle les soldats tuent des manifestants non
armés, presque tous les jours, et l'incroyable indifférence du public avec
laquelle ces meurtres en série sont accueillis ? Avec la sanctification de
l'armée de l'occupation ? Avec la façon écœurante dont l'armée est adulée dans
les médias, une tendance qui, ces derniers temps, a encore une fois pris des
proportions effrayantes ? Il ne se passe pas un jour sans que l'on parle d'un
soldat ou d'une unité militaire exemplaire.
Qu'attendiez-vous
de l'écrasement du président palestinien Mahmoud Abbas par Israël ? Que le
Premier ministre Yair Lapid rencontre le roi Abdallah à l'ONU et ignore
complètement Abbas, comme si nous étions revenus à l'époque de “l'option
jordanienne” de Shimon Peres ? L'armée et les colons s'enivrent de plus en plus
du pouvoir ? Par où commencer ?
C'est
beaucoup plus facile de dire comment cela va se terminer. Cela se terminera par
du sang. Plus de sang. Avec un soulèvement violent. Il pourrait être très
brutal, et il sera assez facile d’en comprendre, et même de justifier, les
motivations.
Farah Stockman (1974) a
rejoint le comité de rédaction du New York Times en 2020 après avoir
couvert la politique, les mouvements sociaux et les questions “raciales” pour
le desk national. Elle avait auparavant passé 16 ans au Boston Globe,
dont près de la moitié en tant que journaliste de politique étrangère à
Washington. Elle a effectué des reportages en Afghanistan, au Pakistan, en
Iran, au Sud-Soudan, au Rwanda et à Guantánamo Bay. Elle a également été
chroniqueuse et membre du comité de rédaction du Globe, remportant un
prix Pulitzer pour ses commentaires en 2016. Elle est l'auteure de American
Made : What Happens to People When Work Disappears, sur les
ouvriers de l'usine de roulements à billes Rexnord à Indianapolis et les
raisons de leur vote pour Trump, suite aux menaces de fermeture et de délocalisation
à Monterey au Mexique, qui ont été effectivement mises à exécution. @fstockman
Depuis avril, le gouverneur Greg Abbott du Texas a fait transporter en bus
plus de 7 900 migrants de l'État vers Washington, D.C. En août, il a commencé à
envoyer des migrants à New York. Maintenant, le gouverneur de la Floride, Ron
DeSantis, s'y met aussi, en envoyant deux cargaisons de migrants à Martha's
Vineyard*, dans le Massachusetts. À en croire Mister Abbott, il veut ainsi percer à jour le bluff des maires des États
bleus (démocrates) qui prétendent accueillir à bras ouverts les immigrants sans
papiers. Cela fait également partie d'un plan républicain pas si secret que ça,
visant à attiser la colère du populo contre les démocrates avant les élections
de mi-mandat.
Des immigrés se rassemblent le 14 septembre avec leurs
affaires devant l'église épiscopale St Andrews à Edgartown, sur Martha's
Vineyard. Photo Ray Ewing / Vineyard Gazette via AP
Politicaillerie mise à part, une chose est claire : notre système
d'immigration est depuis longtemps surchargé et obsolète, et la procédure
d'asile est une grande partie de ce qui ne fonctionne pas. Le nombre de
nouvelles demandes d'asile déposées devant les tribunaux usaméricains de
l'immigration a explosé, passant de 32 895 pour toute l'année 2010 à 156 374 en
2022 - à quatre mois de la fin de l’année. Cela s'explique en partie par le
fait que les conflits et le Covid ont créé une migration massive à travers le
monde. Les tribunaux de l'immigration n'ont pas été en mesure de faire face à
l'afflux de nouveaux arrivants. En 2010, il y avait un arriéré d'environ 100
000 dossiers d'asile en cours de traitement. Aujourd'hui, ce chiffre est passé
à plus de 660 000. Si l'on inclut d'autres types d'affaires, comme les ordres
d'expulsion, les dossiers en souffrance dans les tribunaux de l'immigration ont
atteint plus de 1,8 million.
Ces chiffres reflètent un récent pic de migration. Au cours des deux
dernières années, environ un million de personnes ont été autorisées à entrer
dans le pays pour attendre une audience devant un tribunal de l'immigration,
selon un rapport récent de ma collègue du Times, Eileen Sullivan. Chaque
personne a eu un an pour déposer une demande d'asile. Ce n'est pas seulement un
phénomène de l'ère Biden : un nombre similaire a été admis par l'administration
Trump pendant une période de 24 mois en 2018 et 2019, lors de la dernière
grande poussée migratoire.
Combinés, ces chiffres ont brisé le système. Bien que les audiences de
demande d'asile soient censées se tenir dans les 45 jours suivant le dépôt
d'une demande, le temps d'attente actuel pour une audience de demande d'asile
est en moyenne de près de quatre ans et demi, selon les données des chercheurs
compilées au centre TRAC de l'université de Syracuse. Plus la résolution d'un
cas est longue, plus il peut être difficile de renvoyer les personnes dont la
demande d'asile a été rejetée, comme cela s'est produit dans plus de la moitié
des cas d'asile l'année dernière. Selon les prévisions, plus de 745 000
procédures d'expulsion seront engagées en 2022, soit plus du double de toutes
les autres années, à l'exception de 2019. Les longs retards dans la résolution
des dossiers d'asile sont devenus une crise grave et auto-entretenue : ces
délais incitent les gens à déposer des demandes d'asile infondées, sachant que
cela leur fera gagner des années, même s'ils sont finalement expulsés.
DeSantis déporte des dizaines d'immigrants "Bienvenue à Marth's Vineyard ! Quoi que vous aimiez faire -pêcher, vous balader, faire du shopping, vous réunir, créer, manger, vous relaxer -, vous pouvez vous y livrer sans contraintes" Dessin de Randall Enos
Le problème vient en partie du fait que l'asile est l'une des rares voies
légales que les personnes économiquement désespérées peuvent utiliser pour
obtenir la permission de vivre et de travailler aux USA. En vertu de la
législation usaméricaine et des conventions des Nations unies établies au
lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les personnes qui expriment une « crainte
fondée d'être persécutées pour des raisons de race, de religion, de
nationalité, d'appartenance à un groupe social particulier ou d'opinions
politiques » sont autorisées à attendre que leur dossier d'asile soit jugé
aux USA, où elles peuvent demander l'autorisation de travailler 150 jours après
avoir déposé leur demande d'asile. Les documents d'autorisation de travail
doivent être renouvelés tous les deux ans, ce qui crée une autre montagne de
paperasse que la bureaucratie doit gérer.
Les demandeurs d'asile dont le dossier est authentique sont parmi les plus
lésés par les fausses demandes, qui augmentent considérablement le temps qu'ils
doivent attendre pour obtenir une protection juridique.
L'administration Trump a essayé un certain nombre de méthodes pour
décourager les gens de déposer de nouvelles demandes d'asile, notamment en
obligeant certaines personnes à rester au Mexique pendant qu'elles demandent
l'asile aux USA. Néanmoins, les demandes d'asile ont en fait fortement augmenté
sous le président Donald Trump, en partie en raison d'une poussée migratoire,
mais aussi comme moyen de défense contre ses efforts accrus pour expulser les
gens.
L'épidémie mondiale de Covid-19 a présenté une nouvelle opportunité de
réduire les demandes d'asile. Le Titre 42 [du Code des USA], la politique de santé publique liée
à la pandémie que l'administration Trump a instituée en mars 2020, a permis aux
responsables usaméricains d'expulser rapidement les migrants à la frontière
sans leur accorder la possibilité de déposer une demande d'asile. Beaucoup sont
repoussés au Mexique, ce qui les expose à davantage de danger. L'administration
Biden a annoncé qu'elle rouvrirait le traitement des demandes d'asile à la
frontière et chercherait à mettre fin à l'utilisation du Titre 42, mais plus de
20 procureurs généraux républicains ont intenté une action en justice pour
maintenir le Titre 42 en place, alors même que certains d'entre eux
s'opposaient à d'autres efforts de prévention du Covid et insistaient sur le
fait que la pandémie était exagérée. Jusqu'à présent, les efforts de
l'administration pour modifier cette politique ont été bloqués par un juge
fédéral.
Le Titre 42 finira par être levé ; à ce moment-là, le pays s'appuiera sur
le Titre 8 [du Code des USA], l'autorité prépandémique en vertu de laquelle les agents usaméricains
peuvent rapidement expulser ou mettre à l'amende les personnes prises en
flagrant délit d'entrée illégale aux USA, à moins qu'elles ne soient jugées
éligibles pour demander l'asile. Cela est juste ; un système bien géré doit
être habilité à rejeter et à expulser rapidement les personnes dont la demande
est infondée, tout en mettant en relation les personnes dont le cas est
authentique avec des réseaux de soutien social. À cet égard, l'administration
Biden n'a pas reçu le crédit qu'elle mérite pour un changement de règle
important, bien que sous-estimé, qui pourrait remanier le système. Cet été, des
agents d'asile formés ont statué sur certaines demandes d'asile dans une
poignée de centres de détention de l'ICE (Police de l’immigration et des
Frontières) au Texas, soulageant ainsi les tribunaux de l'immigration. Les
demandeurs d'asile dont la demande est rejetée peuvent toujours faire appel
auprès d'un juge. L'espoir est que les décisions rapides concernant les
nouveaux cas empêcheront l'arriéré de s'accroître et décourageront les demandes
fausses ou sans fondement.
La nouvelle règle n'est pas le tapis de bienvenue que de nombreux militants
des droits des immigrants attendaient de l'administration Biden après quatre
années de présidence Trump. Elle n'est pas non plus le traitement de tolérance
zéro que de nombreux républicains considèrent comme le seul moyen de dissuader
les migrants de s'amasser à la frontière. Mais il s'agit d'une politique saine
fondée sur des recommandations et des recherches approfondies menées par des
groupes respectés, notamment le Migration Policy Institute, un organisme non
partisan. À une époque où presque tout ce que fait un président en matière
d'immigration lui attire des poursuites judiciaires, elle a été soigneusement
rédigée pour être le plus à l'abri possible des litiges. Combiné aux efforts
bipartites visant à augmenter la capacité de traitement des non-citoyens à la
frontière dans des centres d'accueil regroupant tous les départements et
agences concernés sous un même toit, il pourrait finalement transformer un
système défaillant en un système beaucoup plus efficace, moderne et équitable.
À une époque où les USAméricains sont déjà en désaccord entre eux sur ce
que nous pourrions appeler les valeurs fondamentales - les croyances
culturelles qui soudent notre pays - il est raisonnable de s'inquiéter de
savoir si l'ajout de nouveaux arrivants au mélange compliquera la tâche de
forger un avenir commun. Pourtant, il s'agit également d'une question qui
touche au cœur de notre identité et qui nous permet de savoir si nous
continuerons à être un endroit où les masses fatiguées, pauvres et entassées du
monde peuvent obtenir une seconde chance. Pour être fidèles à notre identité de
pays pluraliste, nous avons besoin d'un système d'asile qui garantisse que les
personnes qui remplissent les conditions requises pour bénéficier d'une protection
puissent l'obtenir - tout en réduisant au minimum les abus du système par ceux
qui essaient simplement de passer la ligne.
NdT
Martha's Vineyard (« Le Vignoble de Martha ») est une île de l'État du
Massachusetts, à 6 km de Cape Cod, au sud de Boston et à l’est de Newport.
L'île est surtout connue comme résidence d'été de la jet set et des présidents usaméricains, une mode lancée par Ulysses Grant en 1874 et suivie entre autres par Kennedy, Clinton et Obama, qui a été critiqué pour cela pendant la récession de 2007 à 2012. En 2019, les Obama y ont acheté un sam'suffit de 640 mètres carrés sur un terrain de 12 ha pour la modique somme de 11,75 millions de $. De quoi loger plusieurs centaines de migrants...
Entrée d'enfants sans papiers non accompagnés : "Venez, mais pas maintenant"