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Sergio Rodríguez Gelfenstein
¿Qué hará Marcos Rubio? 

08/05/2022

Boulat Okoudjava
Notre 10ème Bataillon amphibie
Jour de la Victoire

Traduit par Mikaela Honung
 

Boulat Chalvovitch Okoudjava ‘1924-1997) fut un auteur-compositeur-interprète soviétique d’origine géorgienne. Considéré comme l'un des plus importants chanteurs de langue russe, avec Vladimir Vyssotski, son œuvre exprime son horreur de la guerre, l'observation patiente de la société soviétique et les amours douloureuses. Il est LE chanteur du quartier de l'Arbat à Moscou. On le surnomme parfois le « Brassens soviétique ». Il est également l'auteur de plusieurs romans.
« Cette voix qui chantait comme personne avant, sans aucune fausse note de patriotisme, sur Moscou, sur la guerre, traduisait la nostalgie d'une patrie qui n'est plus. Rien de politique dans ses chansons, mais tant de sincérité, tant de douleur que les autorités n'ont pas pu le supporter. Poursuivi par la haine et la sottise, Boulat Okoudjava aura sans doute été le premier poète persécuté sous nos yeux».
Vladimir Boukovski (Mémoires)

Ici les oiseaux ne  chantent pas
Les arbres ne poussent pas
Et nous seuls, épaule contre épaule,
Poussons ici sur la terre.
La planète brûle et tourne
La fumée recouvre notre patrie
Et donc, il nous faut la victoire
Un pour tous. Nous sommes prêts à payer le prix !

(Refrain) Une mort terrible nous attend
Mais rien ne peut nous arrêter.
Plus de doutes !
Il s’enfonce, solitaire
Dans la nuit  
Notre 10ème
bataillon amphibie
Notre 10ème
bataillon amphibie

A peine la bataille finie
Retentit un nouvel ordre de combat
Le facteur va devenir fou
A nous chercher.
Une fusée rouge traverse le ciel
Une mitrailleuse tire.
Et donc, il nous faut la victoire
Un pour tous. Nous sommes prêts à payer le prix !

(Refrain) Une mort terrible nous attend
Mais rien ne peut nous arrêter.
Plus de doutes !
Il s’enfonce, solitaire
Dans la nuit  
Notre 10ème
bataillon amphibie
Notre 10ème
bataillon amphibie

De Koursk et d’Orel
La guerre nous a menés
Aux portes de l’ennemi
C’est comme ça, mon frère
Un jour, nous nous souviendrons de tout cela
Et nous-mêmes n’y croirons pas.
Mais aujourd’hui, il nous faut une victoire
Un pour tous. Nous sommes prêts à payer le prix !

(Refrain) Une mort terrible nous attend
Mais rien ne peut nous arrêter.
Plus de doutes !
Il s’enfonce, solitaire
Dans la nuit  
Notre 10ème
bataillon amphibie
Notre 10ème
bataillon amphibie

Min. 36:00


BULAT OKUDZHAVA
Our Tenth Amphibious Battalion
Victory Day

Translated by  John Catalinotto 

Bulat Shalvovich Okudzhava (1924-1997) was a Soviet singer-songwriter of Georgian origin, one of the founders of the Russian genre called "author's song" (avtorskaya pesnya). He wrote some 200 songs, a mixture of Russian poetry and folk traditions and the French chansonnier style, represented by such Okudzhava contemporaries as Georges Brassens.
Although his songs were never overtly political (in contrast to those of his fellow bards), the freshness and independence of Okudzhava's art represented a subtle challenge to the Soviet cultural authorities, who for many years refused to give official sanction to his songs.

   
 
The birds aren't singing here,
The trees aren't growing
And only we, shoulder to shoulder
Are growing here in the earth.
The earth lit up is spinning,
Smoke covers  our homeland.
And thus, we need a victory,
One for all. We're ready to pay any price!

(Chorus) A fiery death awaits us
Yet that can't stop us.
Cast doubt away
Journey into night
Separately
Our tenth
Amphibious Batallion.
Our tenth
Amphibious battalion.

As soon as the battle ceases
Another order comes
The postman will go crazy
Looking for us.
Let red rockets fly,
Fire off the machine guns.
And thus, we need a victory,
One for all. We're ready to pay any price!

(Chorus) A fiery death awaits us
Yet that can't stop us.
Cast doubt away
Journey into night
Separately
Our tenth
Amphibious Batallion.
Our tenth
Amphibious battalion.

From Kursk and Orel
The war has brought us
Up to the doors of our enemy.
That's how it is, brother…
Someday we'll remember it
And we won't believe it ourselves,
But now we need a victory,
One for all. We're ready to pay any price!

(Chorus) A fiery death awaits us
Yet that can't stop us.
Cast doubt away
Journey into night
Separately
Our tenth
Amphibious Batallion.
Our tenth
Amphibious battalion.

Min. 36:00


Bulát Okudzháva
Nuestro 10º batallón de desembarco
Día de la Victoria

Traducido por   Josafat S. Comín
 

Bulát Shálvovich Okudzháva (1924-1997) fue un cantautor soviético de origen georgiano, uno de los fundadores del género ruso llamado «canción de autor» (avtorskaya pesnya). Escribió unas 200 canciones, mezcla de la poesía y las tradiciones folclóricas rusas y el estilo chansonnier francés, representado por contemporáneos de Okudzhava tales como Georges Brassens.
Aunque sus canciones nunca fueron abiertamente políticas (en contraste con las de sus compañeros bardos), la frescura y la independencia del arte de Okudzhava representaron un desafío sutil a las autoridades culturales soviéticas, que durante muchos años se negaron a dar sanción oficial a sus canciones.

Aquí no cantan los pájaros
ni crecen los árboles.
Y sólo nosotros, hombro con hombro,
nos arraigamos aquí, en la tierra.
El planeta arde y gira,
el humo cubre nuestra patria.
Y eso significa que necesitamos una victoria,
una para todos. ¡No escatimaremos el precio!

Nos espera el fuego mortal
que, pese a todo, nada puede.
Fuera dudas:
se adentra en la noche
en solitario
nuestro 10º batallón de desembarco,
nuestro 10º batallón de desembarco.

Acaba de cesar el combate,
y ya está sonando otra orden
el correo se va a volver loco
buscándonos.
Vuela un cohete rojo,
dispara la ametralladora.
Y eso significa que necesitamos una victoria,
una para todos. ¡No escatimaremos el precio!

Nos espera el fuego mortal
que, pese a todo, nada puede.
Fuera dudas:
se adentra en la noche
en solitario
nuestro 10º batallón de desembarco,
nuestro 10º batallón de desembarco.

Desde Kursk y Oriol
la guerra nos ha llevado
hasta las mismas puertas del enemigo.
Eso es lo que hay, hermano…
Algún día nos acordaremos de todo esto
y ni nosotros mismos nos los creeremos,
pero hoy necesitamos una victoria,
una para todos. ¡No escatimaremos el precio!

Nos espera el fuego mortal
que, pese a todo, nada puede.
Fuera dudas:
se adentra en la noche
en solitario
nuestro 10º batallón de desembarco,
nuestro 10º batallón de desembarco.

Min. 36:00


Булат Окуджава
Десятый наш десантный батальон
День победы

Здесь птицы не поют,
Деревья не растут,
И только мы, к плечу плечо
Врастаем в землю тут.

Горит и кружится планета,
Над нашей Родиною дым,
И значит, нам нужна одна победа,
Одна на всех - мы за ценой не постоим.
Одна на всех - мы за ценой не постоим.

Припев:

Нас ждет огонь смертельный,
И все ж бессилен он.
Сомненья прочь, уходит в ночь отдельный,
Десятый наш десантный батальон.
Десятый наш десантный батальон.

Лишь только бой угас,
Звучит другой приказ,
И почтальон сойдет с ума,
Разыскивая нас.

Взлетает красная ракета,
Бьет пулемет неутомим,
И значит нам нужна одна победа,
Одна на всех - мы за ценой не постоим.
Одна на всех - мы за ценой не постоим.

Припев:

Нас ждет огонь смертельный,
И все ж бессилен он.
Сомненья прочь, уходит в ночь отдельный,
Десятый наш десантный батальон.
Десятый наш десантный батальон.

От Курска и Орла
Война нас довела
До самых вражеских ворот.
Такие, брат, дела.

Когда-нибудь мы вспомним это,
И не поверится самим.
А нынче нам нужна одна победа,
Одна на всех - мы за ценой не постоим.
Одна на всех - мы за ценой не постоим.

Припев:

Нас ждет огонь смертельный,
И все ж бессилен он.
Сомненья прочь, уходит в ночь отдельный,
Десятый наш десантный батальон.
Десятый наш десантный батальон.

Мин. 36:00


GIDEON LEVY
« Faut-il éliminer Yahya Sinwar ? »: de gauche à droite, les sionistes appellent en chœur au meurtre

Gideon Levy, Haaretz, 7/5/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 

Voilà à quoi ressemble un discours incendiaire : les médias et les réseaux sociaux sont inondés d'appels à assassiner le leader d'un mouvement politique - même s'il s'agit d'un mouvement religieux, extrémiste et violent - dans une quête sanguinaire de vengeance. C'est aussi à cela que ressemble un chœur rauque uniforme : du Meretz de gauche (Uri Zaki) aux kahanistes, des journalistes Amnon Abramovich (TV Channel 12) à Ben Caspit (Maariv), chacun d'entre eux appelle à l'élimination du chef du Hamas Yahya Sinwar. Un État, une voix.

Yahya Sinwar

Ils rivalisent pour trouver l'épithète appropriée et digne de lui, crapule ou ordure. Oh, quels patriotes ! Si seulement c'était possible, le lapider en place publique attirerait des multitudes aux festivités. La nation se contentera au moins de provoquer sa mort par tout autre moyen. C'est la seule réponse que l'État d'Israël, emmené par les médias incendiaires, peut offrir à la suite d'attaques terroristes.

La dernière en date était particulièrement horrible elle ea été perpétré à la hache. Mais le meurtre à la hache est-il vraiment plus cruel que tout autre type de meurtre ? La hache est emblématique de la faiblesse de quelqu'un qui pourrait rêver de tuer en avion au milieu de la nuit. Mais il n'avait pas d'avion, ni même de canon.

Évidemment, le meurtre à la hache est barbare, mais en quoi est-il différent du meurtre d'une jeune fille de 19 ans voyageant innocemment en taxi avant d'être abattue par un soldat ? En quoi, dans l'intention ? Le soldat n'avait-il pas l'intention de tuer en tirant à balles réelles sur un taxi rempli de femmes à Jénine ? Quelle autre intention avait-il ?

De telles questions se posent après chaque attaque terroriste, tout comme la réaction instinctive d'Israël, qui se répète d'une manière qui ne peut que conduire au désespoir. N'oubliant rien et n'apprenant rien, combien de fois l'assassinat sera-t-il proposé comme solution, alors que toutes les fois précédentes, il n'a servi à rien, causant dans la plupart des cas encore plus de dégâts.

Même si l'on met de côté la question de la légalité ou de la moralité d'un État exécutant des personnes sans procès, il reste la question de son efficacité, qui n'a jamais été prouvée.

On peut aussi, d'une certaine manière, ignorer l'image répugnante et pathétique des médias, qui se sont presque unanimement lancés dans une campagne, demandant plus d'assassinats, plus d'invasions, plus de conquêtes.

On ne peut oublier qu'en Israël, les assassinats sont aussi une affaire politique. Ce ne sont pas seulement les cibles qui sont politiques - des personnes qui, dans des États respectueux de la loi, ne sont pas des cibles légitimes - les meurtres proprement dits sont politiques. Ils sont destinés à satisfaire des besoins et des objectifs politiques, en montrant au public que « quelque chose est fait ». Une solution instantanée.

Il est douteux qu'il existe un domaine dans lequel les médias israéliens soient aussi unifiés et influents, exprimant le désir obscène des masses, poussant à mener des attaques violentes de vengeance. « Faut-il éliminer Sinwar ? », demandait une légende sur les fils d'actualité en début de semaine, comme s'il s'agissait d'une émission de télé-réalité. Des meurtres à la demande. Le grand nombre de ces meurtres a masqué l'atmosphère illégitime dans laquelle se déroule la conversation sur la réponse à apporter à ces attaques.

Sinwar n'est pas le pire des ennemis. Son successeur sera pire. Sinwar ne sera pas non plus le premier Yahya du Hamas qu'Israël élimine en vain. L'élimination de Yahya Ayyash, son prédécesseur, n'a rien donné d'autre à Israël qu'une vague d'attentats-suicides au cours desquels 60 Israéliens ont été tués.

Réduire le problème posé par les attaques terroristes à un seul dirigeant est une façon lâche d'éviter de s'attaquer aux véritables problèmes. Comme si la terreur ne découlait pas du blocus, de l'occupation, de la brutalité des policiers à la mosquée al-Aqsa, de la violence des colons et du meurtre d'innocents en Cisjordanie. Comme si la terreur était personnifiée par Sinwar, seulement Sinwar. Si la terreur est Sinwar, tuons-le, et le calme reviendra.

Si la terreur est liée à l'échange de prisonniers contre Shalit, dans lequel Sinwar a été libéré après 23 ans de prison, alors il y a une solution facile. Pas de libération de prisonniers, seulement des assassinats, la « dissuasion », et la paix sera rétablie. Israël a essayé cela mille et une fois sans succès. Cela ne marchera pas non plus maintenant.

Évidemment, nous ne pouvons pas rester silencieux face à la terreur. Au contraire, nous devons en parler. Avec le Sinwar vivant. Lui parler, directement ou indirectement, de la levée du blocus. Lui parler des droits dont son peuple a été privé, de sa dignité bafouée. Nous n'avons jamais, mais jamais, essayé de le faire sérieusement.

06/05/2022

JOANNA STRAUGH
USA : c’est la Cour suprême qu’il faut abolir, pas l’arrêt Roe contre Wade !

Joanna Straugh,workers.org, 3/5/2022

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La Cour suprême des USA dispose des voix nécessaires pour annuler Roe v. Wade, l’arrêt historique de 1973 légalisant l'avortement aux USA. C'est ce qu'a révélé un projet d'avis du juge Samuel Alito qui a fuité dans la presse sans l'autorisation de la Cour. Cette fuite, sans précédent dans l'histoire, visait à alerter le public de l'attaque prévue par la Cour Suprême.

L'une des milliers de manifestant·es lors d'une manifestation d'urgence à Foley Square, New York City, le 3 mai. (WW Photo : Toni Arenstein)

 Selon le projet d’avis, l'annulation de Roe v. Wade est justifiée et mettrait fin aux protections fédérales du droit à l'avortement, permettant aux États de dicter les lois sur l'avortement. Alors que l'opinion majoritaire fait référence aux lois des États comme reflétant « la volonté du peuple », un sondage Gallup de mai 2021 montre que le public usaméricain soutient le droit à l'avortement dans tous les cas ou dans la plupart des cas à 80%.

Pourtant, au moins 23 États interdiraient l'avortement immédiatement si la Cour suprême annulait le jugement Roe v. Wade. D'autres restreindraient davantage l'avortement. De plus, des États comme le Texas et l'Oklahoma ont adopté des lois qui récompensent la population contre les demandeuses d'avortement et les cliniciens qui en pratiquent en offrant des primes de 10 000 $ à toute personne qui identifie et dénonce quelqu'un qui, selon elle, aide une personne à obtenir un avortement. Treize États ont des « lois gâchette » qui appliquent automatiquement une interdiction de l'avortement. 

Quelques États ont promis d'être un « refuge » pour les personnes ayant besoin d'un avortement, mais leurs efforts risquent d'être rendus vains puisque d'autres États annoncent des lois interdisant de franchir les frontières de l'État pour obtenir un avortement. Une restriction qui à la fois oblige et interdit de franchir les frontières de l'État pour se faire avorter intensifie les barrières et toutes les répressions associées à la criminalisation. 

Nombreux sont ceux qui craignent qu'un précédent de ce type puisse renverser d'autres décisions progressistes de la Cour suprême, sans que l'on puisse voir la fin de l'abrogation des droits et de la criminalisation de la population.

L'intensité de l'indignation à la perspective de perdre le dernier lambeau de protection des droits reproductifs a enflammé un mouvement de protestation qui s'étend. Des rassemblements ont spontanément éclaté dans les villes des USA le 3 mai, à l'initiative de nombreux groupes. Des majorités de plus en plus larges de jeunes, dont la vie est la plus profondément affectée par ces lois, considèrent cet assaut comme un nouveau point de rupture dans toute une série : démantèlement des syndicats, mise en cage des migrants, attaques contre les jeunes transgenres, brutalités policières racistes, etc.

La perspective de l'annulation de l'arrêt Roe v. Wade conduit à des appels à en finir avec la Cour suprême elle-même, un organe non élu, nommé à vie, créé pour servir les intérêts de la classe dominante.


Il faut abolir la Cour suprême, pas les droits reproductifs !

01/05/2022

GIDEON LEVY
Hanan Khadour : elle était née en plein couvre-feu de la 2ème Intifada. Elle est morte 19 ans plus tard au milieu des affrontements israélo-palestiniens


Gideon Levy et Alex Levac (photos), Haaretz, 30/4/2022

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala 

Lorsque Hanan Khadour est née, Jénine était sous contrôle de l'armée israélienne en raison de l'opération « Bouclier défensif », et son père a dû la porter à l'hôpital dans ses bras. Il y a trois semaines, elle est montée à bord d'un taxi collectif dans la même ville, qui grouillait de soldats et de tireurs d'élite israéliens. Une seule balle a transpercé son corps

Le père endeuillé Mahmoud Khadour, avec son jeune fils Mohammed

Hanan Khadour était née le 1er  décembre 2002. Sa mère, Abir, était à son huitième mois lorsque les contractions ont commencé. L'hôpital le plus proche se trouvait à Jénine, à 12 kilomètres de chez elle dans le village de Faqua, mais il n'y avait aucun moyen de s'y rendre à cause des barrages routiers. C'était la période qui a suivi l'opération « Bouclier défensif » durant la deuxième Intifada, et le camp de réfugiés de Jénine était toujours bouclé. Abir a accouché à la clinique du médecin du village : Hanan est née prématurée. Elle avait un besoin urgent d'un incubateur, mais aucun n'était disponible localement. Le médecin a dit à la famille que la survie du nouveau-né dépendait de son transport urgent à l'hôpital.

Son père, Mahmoud, a décidé qu'il devait tout faire pour donner à sa fille une chance de vivre, comme il dit maintenant.

Mahmoud a appelé le service d'ambulances d'urgence du Croissant-Rouge juste après sa naissance, mais on lui a répondu qu'ils ne pouvaient pas se rendre à Faqua, l'armée ne les laissant pas passer. Il a alors conduit avec le petit bébé jusqu'à la berme de terre que l'armée avait érigée pour isoler le village de Jénine. Il est sorti de la voiture, sa fille dans les bras. Les soldats de l'autre côté de la barrière ont menacé de lui tirer dessus s'il faisait un pas de plus.

« Vous pouvez me tirer dessus », leur a-t-il dit, « mais j'emmène ma fille à l'hôpital ».

« C’est quoi le problème avec ta fille ? », lui a demandé un soldat.


Une banderole commémorative pour Hanan Khadour près de sa maison, cette semaine. « Nous sommes nés à une époque difficile, dans un endroit qui ne réalise pas un seul de nos rêves », dit son père.

« Elle vient de naître, et elle est sur le point de mourir », a-t-il répondu.

Finalement, Mahmoud a fini par franchir la barrière à pied. Une ambulance du Croissant-Rouge l'attendait et a transporté Hanan à l'hôpital de Jénine, où elle a été placée dans une couveuse, où elle a passé le mois suivant. Mais ce n’était pas la fin de son calvaire. Lorsqu'elle a eu un an et qu'elle a commencé à marcher, une anomalie congénitale a été découverte dans sa hanche et elle a été hospitalisée pendant 21 jours, cette fois à l'hôpital Mukassed de Jérusalem-Est, où l'anomalie a été corrigée. Son père n'a pas été autorisé à être avec elle, l'accès lui étant refusé pour des raisons de sécurité.

C’est ainsi qu’a commencé la courte vie d'Hanan Khadour, qui s'est terminée la semaine dernière.

29/04/2022

GARY SAUL MORSON
Ce que Soljenitsyne a compris

Gary Saul Morson, The New York Review of Books, 12/5/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 

Gary Saul Morson (1948) est un critique littéraire et slaviste usaméricain. Il est particulièrement connu pour ses travaux sur les grands romanciers russes Léon Tolstoï et Fiodor Dostoïevski, ainsi que sur le théoricien de la littérature Mikhail Bakhtine. Il est titulaire de la chaire Lawrence B. Dumas des arts et des lettres et professeur au département des langues et littératures slaves de la Northwestern University (Evanston, Illinois). Son dernier livre est Minds Wide Shut : How the New Fundamentalisms Divide Us, coécrit avec Morton Schapiro.

Détectant la même incompétence et la même autosatisfaction chez les libéraux du gouvernement provisoire en 1917 et les réformateurs de l'ère post-soviétique dans les années 1990, Alexandre Soljenitsyne craignait une nouvelle descente vers un régime autoritaire.

Livres recensés :       

March 1917: The Red Wheel/Node III (8 March–31 March): Book 3 [Mars 1917 : La Roue Rouge/Nœud III (8 mars-31 mars) : Livre 3 ]
by Aleksandr Solzhenitsyn, translated from the Russian by Marian Schwartz
University of Notre Dame Press, 684 pp., $42.00

Between Two Millstones: Book 2, Exile in America, 1978–1994 [Esquisses d'exil. Le Grain tombé entre les meules, T. 2]
by Aleksandr Solzhenitsyn, translated from the Russian by Clare Kitson and Melanie Moore, and with a foreword by Daniel J. Mahoney
University of Notre Dame Press, 559 pp., $39.00

 


 Alexandre Soljenitsyne,  par Seth, NYRB

Pour Alexandre Soljenitsyne, aucune forme littéraire n'a jamais été suffisamment vaste. Trois œuvres gargantuesques ont dominé sa vie créative. L'Archipel du Goulag : Une expérience d'investigation littéraire, sur lequel repose principalement sa réputation, relate en trois volumes l'histoire des camps de travail forcé soviétiques. Ce livre lui a valu le prix Nobel de littérature en 1970 et un exil forcé de l'Union soviétique en 1974, la première expulsion officielle depuis la déportation de Léon Trotski vers la Turquie en 1929. Soljenitsyne lui-même considérait La Roue rouge, une série de romans sur la révolution russe, comme sa principale contribution à la littérature. Ces romans posaient une question : Pourquoi et comment l'horreur sans précédent décrite dans L'Archipel du Goulag s'est-elle produite ? Les réponses auxquelles Soljenitsyne est parvenu ont façonné son troisième grand projet, quatre volumes de mémoires.

La Roue rouge est divisée en quatre « nœuds », dont certains contiennent plus d'un volume ; chaque nœud se concentre sur une courte période spécifique regroupant les événements importants qui ont conduit à la catastrophe du régime bolchevique. Les deux premiers nœuds, août 1914 et novembre 1916, superbes œuvres qui débordent la forme conventionnelle des romans historiques, sont suivis de quatre longs volumes consacrés au troisième nœud, mars 1917, qui relate les événements du 8 au 31 mars 1917. Le dernier nœud, avril 1917, toujours non traduit en anglais, englobe deux autres volumes. Le troisième volume de mars 1917, désormais disponible dans une interprétation exceptionnellement fine de Marian Schwartz, est particulièrement captivant. Il constitue un compagnon idéal pour le dernier volume des mémoires de Soljenitsyne, la deuxième partie de Le Grain tombé entre les meules, récemment traduite en anglais, qui présente les années Gorbatchev comme une étrange répétition de 1917.

Ensemble, les deux volumes de Le Grain tombé entre les meule décrivent la vie de Soljenitsyne depuis son expulsion de l'URSS jusqu'à son retour en 1994. (Après avoir envisagé plusieurs endroits en Europe et en Amérique du Nord, il s'est finalement installé à Cavendish, dans le Vermont, qui lui rappelait la Russie et lui offrait l'isolement nécessaire pour travailler à La Roue rouge). Le titre Le Grain tombé entre les meules fait essentiellement référence à la surprenante hostilité et à l'absurde déformation de ses opinions auxquelles l'auteur a été confronté en Occident. Les mêmes cercles intellectuels et médiatiques qui avaient célébré son courage lorsqu'il était en URSS se sont souvent transformés en critiques implacables parce que, explique Soljenitsyne, il ne partageait pas les idées conventionnelles de la gauche usaméricaine, mais défendait des positions qui ne correspondaient pas aux catégories occidentales existantes. Il se trouvait donc pris entre les « meules » soviétiques et occidentales, qui le vilipendaient et lui attribuaient des opinions intolérantes qu'il ne partageait pas.

Soljenitsyne a identifié dans les cercles intellectuels occidentaux la même étroitesse d'esprit suffisante qu'il avait découverte chez les intellectuels russes libéraux avant la révolution. Le moment central de ces volumes se produit lorsque, comme l'écrit Soljenitsyne,

un grand commentateur de la télévision [canadienne] m'a sermonné en disant que j'avais la prétention de juger l'expérience du monde du point de vue de ma propre expérience limitée de l'Union soviétique et des camps de prisonniers. En effet, comme c'est vrai ! La vie et la mort, l'emprisonnement et la faim, la culture de l'âme malgré la captivité du corps : comme c'est limité par rapport au monde brillant des partis politiques, aux chiffres d'hier à la bourse, aux amusements sans fin et aux voyages exotiques à l'étranger !

Soljenitsyne avait lui-même jadis célébré les libéraux et les socialistes russes qui dirigeaient le gouvernement provisoire renversé par les bolcheviks, mais les archives occidentales - et peut- être ses rencontres avec des Occidentaux - l'ont amené à adopter un point de vue entièrement différent. Les membres du gouvernement provisoire et leurs partisans étaient tellement incompétents, satisfaits d'eux-mêmes et prêts à supprimer toute opinion insuffisamment progressiste que la tyrannie ne pouvait que triompher. Soljenitsyne a décelé le même état d'esprit chez les réformateurs russes libéraux dans les années 1990 et a craint une nouvelle descente vers un régime autoritaire.

Il y a eu deux révolutions russes en 1917. En février (mars selon les calculs actuels), le tsar Nicolas II, l'une des personnes les plus stupides à avoir jamais occupé un trône, abdique. La violence populaire, accueillie par les personnes instruites avec l'extase naïve de la « fièvre de février », a déclenché le chaos qui a permis aux bolcheviks de prendre le pouvoir en octobre (aujourd'hui novembre). Contrairement au tsar ou au gouvernement provisoire qui lui a succédé, le parti de Lénine n'a pas hésité à recourir à une violence extrême. La tristement célèbre Tchéka (police secrète, ancêtre du NKVD, de l'OGPU et du KGB) est en activité avant la fin de 1917. Les mauviettes de la Douma se sont révélées aussi ineptes sur le plan stratégique que Lénine était brillant.           :


SEVIM DAĞDELEN
Germany enters war


Two articles by Sevim Dağdelen (Duisburg, 1975), a member of the German Bundestag (Federal lower house) since 2005. She is chairperson of the parliamentary group of Die Linke (The Left Party) in the Foreign Affairs Committee and its spokesperson for international politics and disarmament.

Negotiations for peace, not tanks for war!

 Germany follows Washington’s Ramstein war program

Sevim Dağdelen, junge Welt, 27.4.2022
Translated by John Catalinotto

It is no time to be duped by war propaganda. The new militarism challenges our resistance. 

The war in Ukraine is now all about weapons, weapons, weapons. More weapons and heavier weapons. Every taboo of the post-war period is falling. Diplomacy has been written off. 

A new German militarism in the wake of U.S. militarism is the benchmark of this German government. While UN Secretary General António Guterres is in Moscow promoting a quick ceasefire and an end to the war, NATO members are pushing for the military pact to wage war against Russia. 

The Ukrainian soldiers are only a means to an end. Meanwhile, the goal has become taking the war to Russia.

Ramstein is the big U.S. Air Force Base in southwestern Germany

Ramstein means war

NATO is concerned with victory and nothing else. To this end, Washington has convened a special meeting of weapons representatives at the U.S. airbase in Ramstein in Rhineland-Palatinate. 

Instead of supporting Guterres and regarding the U.S. war council on German soil as a calculated political affront to [Germany’s] democratic sovereignty, the SPD/Green government has sent Defense Minister Christine Lambrecht to participate and has announced that it is going full-steam ahead: The government of the SPD, the Greens and the FDP is now delivering German tanks to the East, as demanded. Until victory. There must be no negotiated peace. 

The Ukrainian ambassador and neo-Nazi activist Andrij Melnyk has finally asserted himself at Chancellor Olaf Scholz’s cabinet table. There is no doubt that German weapons end up going to right-wing extremist battalions integrated into the National Guard and Ukrainian army, and no one in the German government shows any concern.

“Cheetah,” “Marten,” “Puma,” “Fox,” “Boxer,” “Leopard” - what reads like the harmless listing in “Grzimek’s Animal Life” encyclopedia threatens to become the program for expanding the Ukraine conflict into a third world war against the nuclear power Russia. By supplying heavy weapons, Germany and NATO are making themselves a direct party to the war.

Militarism challenges our resistance

The situation is red-hot. And the U.S. administration is throwing gasoline on the fire, by which the German government then warms itself. Pentagon chief Lloyd Austin announced in Ramstein that Washington will move “heaven and earth” to arm Ukraine for further war. And British Parliamentary Under-Secretary of State for the Armed Forces James Heappey tells Kiev that it is legitimate to attack Russia with British weapons and carry out strikes on its territory. 

Lambrecht contributes the German tanks that will be used to win the war of attrition. Ramstein is the symbol of a NATO war program. The winners have already been determined: the arms manufacturers. It is carried out on the backs of the populations in Europe. It is no time to be duped by war propaganda. The new militarism challenges our resistance.

 Arms delivery to Ukraine means Germany’s de facto entry into the war

Sevim Dağdelen, junge Welt, 29.4.2022
Translated by John Catalinotto

On April 28, 2022, the Bundestag [German parliament] decided that Germany would de facto enter into war with Russia. With a motion, the Christian Democratic Union (CDU), Social Democrats (SDP), Free Democrats (FDP) and Greens constituted themselves as a war coalition. 

The objections that Chancellor Olaf Scholz had raised only 72 hours earlier in opposition to the delivery of heavy weapons, that they increased the danger of a third world war, were blown away. In the motion of the war coalition, the delivery of heavy weapons to Ukraine is virtually invoked as a cure-all. 

In addition to the commitment to the rearmament fund of 100 billion euros, the additional commitment to a further annual increase in the military budget to more than 70 billion euros was fixed.

In speeches, numerous members of this Alliance for the Ukraine War, led by the chairman of the CDU/CSU parliamentary group, Friedrich Merz, promoted the goal of a military victory for Ukraine, which they said Germany must support unconditionally. 

This break with all the military taboos that grew out of the defeat of German fascism in 1945, and its dangerous consequences, were somewhat alarming to the deputies. In a kind of defensive magic spell, the proposal states right at the beginning that “neither Germany nor NATO will become a party to the war.” 

But the delivery of ever more and ever heavier weapons and the call for a victorious peace against Russia make these incantations seem extremely questionable. These people remind us of someone who draws a square, but writes in the accompanying text to the drawing that the viewer should see a circle here. Surreal and dangerous.

In addition to the de facto entry into the war via the delivery of heavy weapons and training of Ukrainian soldiers to use them, they have put in the foreground the unconditional will of a total economic war against Russia. In the process, the battle zone is being increasingly expanded. China is openly threatened with being caught in the West’s crosshairs if Beijing tries to undermine Western sanctions against Russia. 

Language can be treacherous in this regard. In neo-colonial fashion, the motion says the German government must “emphatically communicate to the People’s Republic of China the expectations of Germany and the European Union.”

Respect for the UN Charter - all gone. The war coalition is openly threatening. Its language is one of violence and threats. Russia is to be pushed to the wall, even if this means a world economic war even against China. 

The problem of this new German militarism remains the recalcitrance of the German population, the majority of which rejects the delivery of heavy weapons and, according to a survey in The Spiegel, the majority of which has no desire to starve and freeze for war. This attitude must be expanded to fight the war coalition’s entry into the war.

Cartoon: Schwere Waffen für die Ukraine (medium) by Kostas Koufogiorgos tagged karikatur,koufogiorgos,lastenfahrrad,lastenrad,panzer,waffenlieferung,rüstungsgüter,ukraine,karikatur,koufogiorgos,lastenfahrrad,lastenrad,panzer,waffenlieferung,rüstungsgüter,ukraine

Heavy weapons for Ukraine, by Kostas Koufogiorgos
Ampel= Traffic light coalition (Social-democrats, liberals and Greens); 100% climate-neutral delivery