المقالات بلغتها الأصلية Originaux Originals Originales

13/01/2025

JONATHAN POLLAK
“J'ai vu que le sol était plein de sang. J'ai ressenti de la peur comme de l'électricité dans mon corps. Je savais exactement ce qui allait arriver”
Témoignages sur le goulag sioniste

Viol. Faim. Coups mortels. Maltraitance. Quelque chose de fondamental a changé dans les prisons israéliennes. Aucun de mes amis palestiniens qui ont récemment été libérés n’est resté la personne qu’il était auparavant.

Jonathan Pollak, Haaretz , 9/1/2025
Traduit par Shofty Shmaha, Tlaxcala

Jonathan Pollak (1982) est l’un des fondateurs en 2003 du groupe israélien Anarchistes contre le mur. Blessé et incarcéré à plusieurs reprises, il collabore au quotidien Haaretz. Il a notamment refusé de comparaître devant un tribunal civil, exigeant d’être jugé par un tribunal militaire, comme un vulgaire Palestinien, ce qui lui a évidemment été refusé

Jonathan Pollak face à un soldat israélien lors d’une manifestation contre la fermeture de la route principale du village palestinien de Beit Dajan, près de Naplouse, Cisjordanie occupée, vendredi 9 mars 2012. (Anne Paq/Activestills)


Jonathan Pollak au tribunal de première instance de Jérusalem, arrêté dans le cadre d’une campagne juridique sans précédent menée par l’organisation sioniste Ad Kan, le 15 janvier 2020. (Yonatan Sindel/Flash90)


Des militants brandissent des affiches de soutien à Jonathan Pollak lors de la manifestation hebdomadaire dans la ville palestinienne de Beita, en Cisjordanie occupée, le 3 février 2023. (Wahaj Banimoufleh)


Jonathan Pollak aux côtés de son avocate Riham Nasra au tribunal de Petah Tikva lors de son procès pour avoir jeté des pierres lors d’une manifestation contre l’avant-poste de colons juifs d’Eviatar à Beita, en Cisjordanie occupée, le 28 septembre 2023. (Oren Ziv)

Lorsque je suis revenu dans les territoires [occupés depuis 1967] après une longue détention suite à une manifestation dans le village de Beita, la Cisjordanie était très différente de ce que je connaissais. Ici aussi, Israël a perdu son calme. Meurtres de civils, attaques de colons agissant avec l’armée, arrestations massives. Peur et terreur à chaque coin de rue. Et ce silence, un silence écrasant. Déjà avant ma libération, il était clair que quelque chose de fondamental avait changé. Quelques jours après le 7 octobre, Ibrahim Alwadi, un ami du village de Qusra, a été tué avec son fils Ahmad. Ils ont été abattus alors qu’ils accompagnaient quatre Palestiniens abattus la veille — trois par des colons qui ont envahi le village, le quatrième par des soldats qui les accompagnaient.

Après ma libération, j’ai compris que quelque chose de très mauvais se passait dans les prisons. Au cours de l’année écoulée, alors que je retrouvais ma liberté, des milliers de Palestiniens — y compris de nombreux amis et connaissances — ont été arrêtés en masse par Israël. À mesure qu’ils commençaient à être libérés, leurs témoignages ont dressé un tableau systématique de la torture. Les coups mortels sont un motif récurrent dans chaque récit. Cela se produit dans les comptages des détenus, lors des fouilles des cellules, à chaque mouvement d’un endroit à l’autre. La situation est si grave que des détenus demandent à leurs avocats de tenir les audiences sans leur présence, car le chemin de la cellule à la salle où est installée la caméra est un chemin de douleurs et d’humiliations.

 J’ai longtemps hésité sur la façon de partager les témoignages que j’ai entendus de mes amis revenus de la détention. Après tout, je ne révèle pas ici de nouveaux détails. Tout, dans les moindres détails, remplit déjà volumes sur volumes dans les rapports des organisations de droits humains. Mais pour moi, ce ne sont pas les histoires de gens lointains. Ce sont des personnes que j’ai connues et qui ont survécu à l’enfer. Aucun d’eux n’est plus la personne qu’il était auparavant. Je cherche à raconter ce que j’ai entendu de mes amis, expérience partagée par d’innombrables autres, même en changeant leurs noms et en masquant les détails identifiables. Après tout, la peur de représailles revenait dans chaque conversation.

 Les coups et le sang

J’ai rendu visite à Malak quelques jours après sa libération. Une porte jaune et une tour de garde bloquaient le chemin qui menait autrefois au village depuis la route principale. La plupart des autres routes passant par les villages voisins sont toutes bloquées. Seule une route sinueuse, celle qui passe près de l’église byzantine qu’Israël a fait exploser en 2002, est restée ouverte. Pendant des années, ce village avait été pour moi comme une seconde maison, et c’est la première fois que j’y retourne depuis ma libération.

Malak a été détenu pendant 18 jours. Il a été interrogé trois fois, et lors de tous les interrogatoires, il a été questionné sur des banalités. Il était donc convaincu qu’il serait transféré en détention administrative — c’est-à-dire sans procès et sans preuves, sans qu’il soit accusé de quoi que ce soit, sous un vernis de soupçons secrets et sans limite de temps. C’est en effet le sort de la plupart des détenus palestiniens en ce moment.

Après le premier interrogatoire, il a été emmené au jardin des supplices. Pendant la journée, les gardiens retiraient les matelas et les couvertures des cellules, et les restitueraient le soir lorsqu’ils étaient à peine secs, et parfois même encore mouillés. Malak décrit le froid des nuits d’hiver à Jérusalem comme des flèches pénétrant dans la chair jusqu’aux os s. Il raconte comment ils le battaient, comme les autres détenus, à chaque occasion. À chaque comptage, à chaque fouille, à chaque mouvement d’un endroit à l’autre, chaque chose était une occasion de frapper et d’humilier.

« Une fois, lors du comptage du matin », m’a-t-il dit, « nous étions tous à genoux, le visage tourné vers les lits. Un des gardiens m’a attrapé par derrière, m’a menotté les mains et les pieds, et m’a dit en hébreu ‘Viens, bouge’. Il m’a soulevé par les menottes aux mains, dans le dos, et m’a conduit courbé à travers la cour à côté des cellules. Pour sortir, il y a une sorte de petite pièce qu’il faut traverser, entre deux portes avec une petite fenêtre ». Je sais exactement de quelle petite pièce il parle, je l’ai traversée des dizaines de fois. C’est un passage de sécurité où à un moment donné, seule une des portes peut être ouverte. « Alors nous y sommes arrivés », continue Malek, « et ils m’ont plaqué contre la porte, le visage contre la fenêtre. J’ai regardé à l’intérieur et j’ai vu que le sol était couvert de sang coagulé. J’ai ressenti la peur passer comme de l’électricité dans mon corps. Je savais exactement ce qui allait arriver. Ils ont ouvert la porte, un est entré et s’est tenu près de la fenêtre au fond, l’a bloquée, et l’autre m’a jeté à l’intérieur sur le sol. Ils m’ont donné des coups de pied. J’ai essayé de protéger ma tête, mais mes mains étaient menottées, je n’avais pas vraiment de moyen de le faire. C’étaient des coups meurtriers. Je pensais vraiment qu’ils allaient peut-être me tuer. Je ne sais pas combien de temps ça a duré. À un moment donné, je me suis souvenu que la nuit précédente, quelqu’un m’avait dit “Quand ils te frappent, crie de toutes tes forces. Qu’est-ce que ça peut te faire ? Ça ne peut pas être pire, et peut-être que quelqu’un entendra et viendra”. Alors j’ai commencé à crier vraiment fort, et effectivement, quelqu’un est arrivé. Je ne comprends pas l’hébreu, mais il y a eu quelques cris entre lui et eux. Et puis ils sont partis et il m’a emmené d’ici. J’avais du sang qui coulait de ma bouche et de mon nez ».

 Khaled, l’un de mes amis les plus proches, a également souffert de la violence des gardiens. Lorsqu’il est sorti de prison après une détention administrative de huit mois, son fils ne l’a pas reconnu de loin. La distance entre la prison d’Ofer et sa maison de Beitunia, il l’a parcourue en courant. Plus tard, il a dit qu’on ne lui avait pas dit que la détention administrative était terminée, et il avait peur qu’il y ait eu une erreur et qu’ils allaient bientôt l’arrêter à nouveau. Cela s’était déjà produit pour quelqu’un qui était avec lui dans la cellule. Sur la photo que son fils m’a envoyée quelques minutes après leur rencontre, il a l’air d’une ombre humaine. Sur tout son corps — ses épaules, ses bras, son dos, son visage, ses jambes — on voyait des signes de violence. Quand je suis venu lui rendre visite, il s’est levé pour m’embrasser, mais quand je l’ai pris dans mes bras, il a gémi de douleur. Quelques jours plus tard, les examens ont montré un œdème autour de la colonne vertébrale et une côte qui avait guéri.

Prison de Megiddo


Chaque action est une occasion de frapper et d’humilier

Un autre témoignage que j’ai entendu de la bouche de Nizar, qui était déjà en détention administrative avant le 7 octobre, et depuis il a été transféré dans plusieurs prisons, dont Megiddo. Un soir, les gardiens sont entrés dans la cellule voisine et il a pu entendre depuis sa cellule les coups, les cris de douleur. Après un certain temps, les gardiens ont pris un détenu et l’ont jeté seul dans la cellule d’isolement. Pendant la nuit et le jour suivant, il a gémi de douleur et n’a pas cessé de crier “mon ventre” et d’appeler à l’aide. Personne n’est venu. Cela a continué aussi la nuit suivante. Vers le matin, les cris ont cessé. Le lendemain, lorsqu’un infirmier est venu faire un tour dans le quartier, ils ont compris d’après le tumulte et les cris des gardiens que le détenu était mort. Jusqu’à aujourd’hui, Nizar ne sait pas qui c’était. Il était interdit de parler entre les cellules, et il ne sait pas quelle était la date.

Après sa libération, il a compris que pendant la période où il était détenu, ce détenu n’avait pas été le seul à mourir à Megiddo. Taoufik, qui a été libéré en hiver de la prison de Gilboa, m’a raconté que pendant une vérification du quartier par des officiers de la prison, un des détenus s’est plaint de ne pas être autorisé à sortir dans la cour. En réponse, l’un des officiers lui a dit : “Tu veux la cour ? Dis merci de ne pas être dans les tunnels du Hamas à Gaza”. Ensuite, pendant deux semaines, chaque jour pendant le comptage de midi, ils les faisaient sortir dans la cour et leur ordonnaient de s’allonger sur le sol froid pendant deux heures. Même sous la pluie. Pendant qu’ils étaient allongés, les gardiens se promenaient dans la cour avec des chiens. Parfois, les chiens passaient entre eux, et parfois ils marchaient vraiment sur les détenus allongés ; ils leur marchaient dessus.

 Selon Taoufik, chaque rencontre d’un détenu avec un avocat avait un prix. « Je savais à chaque fois que le chemin de retour, entre la salle de visite et le quartier, me rajouterait au moins trois volées de coups. Mais je n’ai jamais refusé d’y aller. Toi, tu étais dans une prison cinq étoiles. Tu ne comprends pas ce que c’est d’être 12 personnes dans une cellule où on était à l’étroit même à six. C’est vivre dans un cercle fermé. Ça ne me dérangeait pas du tout ce qu’ils allaient me faire. Juste voir quelqu’un d’autre qui parle avec toi comme un humain, voir peut-être quelque chose dans le couloir en chemin, ça valait tout pour moi ».

Mondher Amira  — le seul ici à apparaître sous son vrai nom — a été libéré de prison par surprise avant la fin de sa période de détention administrative. Même aujourd’hui, personne ne sait pourquoi. Contrairement à beaucoup d’autres qui ont été avertis et craignent des représailles, Amira a raconté aux caméras la catastrophe dans les prisons, les qualifiant de cimetières pour vivants. À moi, il a raconté qu’une nuit, une unité Kt’ar a fait irruption dans leur cellule à la prison d’Ofer, accompagnée de deux chiens. Ils ont ordonné aux détenus de se déshabiller jusqu’à leurs sous-vêtements et de s’allonger sur le sol, puis ont ordonné aux chiens de renifler leur corps et leur visage. Ensuite, ils ont ordonné aux prisonniers de s’habiller, les ont conduits aux douches et les ont rincés à l’eau froide habillés. Une autre fois, il a essayé d’appeler un infirmier à l’aide après qu’un détenu a tenté de se suicider. La punition pour avoir appelé à l’aide a été une autre descente de l’unité Kt’ar. Cette fois, ils ont ordonné aux détenus de s’allonger les uns sur les autres et les ont frappés avec des matraques. À un moment donné, un des gardiens a écarté leurs jambes et les a frappés aux testicules avec une matraque. 

 La faim et les maladies

Mondher a perdu 33 kilos pendant sa détention. Je ne sais pas combien de kilos Khaled a perdus, lui qui a toujours été un homme mince, mais sur la photo qui m’a été envoyée, j’ai vu un squelette humain. Dans le salon de sa maison, la lumière de la lampe a ensuite révélé deux profondes dépressions à l’endroit où se trouvaient ses joues. Ses yeux étaient entourés d’un contour rouge, celui d’une personne qui n’a pas dormi depuis des semaines. Sur ses bras maigres pendaient une peau lâche qui semblait avoir été fixée artificiellement, comme un emballage en plastique. Les analyses sanguines des deux ont montré des carences graves. Tous ceux avec qui j’ai parlé, quelle que soit la prison où ils sont passés, ont répété presque exactement le même menu, qui est parfois mis à jour, ou plutôt réduit. La dernière version que j’ai entendue, de la prison d’Ofer, était : au petit-déjeuner, une boîte et demi de fromage pour une cellule de 12 personnes, trois tranches de pain par personne, 2 ou 3 légumes, généralement un concombre ou une tomate, pour toute la cellule. Une fois tous les quatre jours, 250 grammes de confiture pour toute la cellule. Au déjeuner, un gobelet en plastique jetable avec du riz par personne, deux cuillères de lentilles, quelques légumes, trois tranches de pain. Au dîner, deux cuillères (à café, pas à soupe) de houmous et de tahini par personne, quelques légumes, trois tranches de pain par personne. Parfois un autre gobelet de riz, parfois une boule de falafel (une seule !) ou un œuf, qui est généralement un peu avarié, parfois avec des points rouges, parfois bleu. Voilà.  Nazar m’a dit à ce sujet : « Ce n’est pas seulement la quantité. Même ce qui a déjà été apporté n’est pas comestible. Le riz est à peine cuit, presque tout est avarié. Et tu sais, il y a même de vrais enfants là-bas, ceux qui n’ont jamais été en prison. Nous avons essayé de prendre soin d’eux, de leur donner de notre nourriture pourrie. Mais si tu donnes un peu de ta nourriture, c’est comme si tu te suicidais. Dans la prison, il y a maintenant une famine (maja’a  مَجَاعَة), et ce n’est pas une catastrophe naturelle, c’est la politique du service pénitentiaire ».

Récemment, la faim a même augmenté. En raison de l’exiguïté, le service pénitentiaire trouve des moyens de rendre les cellules encore plus étroites. Espaces publics, cantine — tout endroit est devenu une cellule supplémentaire. Le nombre de prisonniers dans les cellules, qui étaient déjà surpeuplées auparavant, a encore augmenté. Il y a des sections où 50 prisonniers supplémentaires ont été ajoutés, mais la quantité de nourriture est restée la même. Il n’est donc pas surprenant que les prisonniers perdent un tiers, voire plus, de leur poids en quelques mois.

La nourriture n’est pas la seule chose qui manque en prison, et les détenus ne sont en fait pas autorisés à posséder quoi que ce soit d’autre qu’un seul ensemble de vêtements. Une chemise, une paire de sous-vêtements, une paire de chaussettes, un pantalon, un sweat-shirt. C’est tout. Pour toute la durée de leur détention. Je me souviens qu’une fois, lorsque l’avocate de Mondher, Riham Nasra, lui a rendu visite, il est arrivé dans la salle de visite pieds nus. C’était en hiver et il faisait un froid glacial à Ofer. Quand elle lui a demandé pourquoi, il a simplement dit : « Il n’y en a pas ».  Un quart de tous les prisonniers palestiniens sont atteints de gale, selon une déclaration du service pénitentiaire lui-même au tribunal. Nizar a été libéré lorsque sa peau était en phase de guérison. Les lésions sur sa peau ne saignent plus, mais les croûtes couvrent encore de grandes parties de son corps. « L’odeur dans la cellule était quelque chose qu’on ne peut même pas décrire. Comme la décomposition, nous étions là et nous nous décomposions, notre peau, notre chair. Nous ne sommes pas des êtres humains là-bas, nous sommes de la chair en décomposition », dit-il. « Maintenant, comment ne pas l’être ? La plupart du temps, il n’y a pas d’eau du tout, souvent seulement une heure par jour, et parfois nous n’avions pas d’eau chaude pendant des jours. Il y a eu des semaines entières sans que je prenne de douche. J’ai mis plus d’un mois à recevoir du savon. Et nous restons là, dans les mêmes vêtements, car personne n’a de vêtements de rechange, et ils sont pleins de sang et de pus et il y a une puanteur, pas de saleté, mais de mort. Nos vêtements étaient imbibés de nos corps en décomposition ».

 Taoufik a raconté qu’« il n’y avait de l’eau courante qu’une heure par jour. Pas seulement pour la douche, mais en général, même pour les toilettes. Donc, pendant cette heure-là, 12 personnes dans la cellule devaient faire tout ce qui nécessitait de l’eau, y compris les besoins naturels. Évidemment, c’était insupportable. Et aussi, parce que la plupart de la nourriture était avariée, nous avions tous des troubles digestifs presque tout le temps. Tu ne peux pas imaginer à quel point notre cellule puait ».

Dans ces conditions, l’état de santé des prisonniers se détériore, évidemment. Une perte de poids aussi rapide, par exemple, pousse le corps à consommer ses propres tissus musculaires. Lorsque Mondher a été libéré, il a raconté à Sana, sa femme, qui est infirmière, qu’il était si sale que sa sueur avait teint ses vêtements en orange. Elle l’a regardé et a demandé, « Et l’urine ? » Il a répondu : « Oui, j’ai aussi pissé du sang ». « Espèce d’idiot », lui a-t-elle crié, « ce n’était pas de la saleté, c’était ton corps qui rejetait les muscles qu’il avait mangés ».

Les analyses de sang de presque toutes mes connaissances ont montré qu’ils souffraient de malnutrition et de graves carences en fer, en minéraux essentiels et en vitamines. Mais même les soins médicaux sont un luxe. On ne sait pas ce qui se passe dans les infirmeries de la prison, mais pour les prisonniers, elles n’existent pas. Les traitements réguliers ont simplement cessé. De temps en temps, un infirmier fait un tour dans les cellules, mais aucun traitement n’est administré, et « l’examen » se résume à une conversation à travers la porte de la cellule. La réponse médicale, au mieux, est du paracétamol et, le plus souvent, quelque chose du genre « bois de l’eau ». Il va sans dire qu’il n’y a pas assez d’eau dans les cellules, car il n’y a pas d’eau courante la plupart du temps. Parfois, une semaine ou plus passent sans que même l’infirmier ne passe dans le bloc.


Et si l’on parle peu de viol, il n’y a pas besoin de parler des humiliations sexuelles — des vidéos de prisonniers conduits complètement nus par le service pénitentiaire ont été diffusées sur les réseaux sociaux. Ces actes n’auraient pas pu être documentés autrement que par les gardiens eux-mêmes qui cherchaient à se vanter de leurs actes. L’utilisation de la fouille comme une opportunité pour une agression sexuelle, souvent en frappant l’aine avec la main ou le détecteur de métaux, est une expérience presque constante, dont la description revient régulièrement chez les prisonniers qui ont été dans différentes prisons.

Je n’ai pas entendu parler des agressions contre les femmes de première main, évidemment. Ce que j’ai entendu, et pas une seule fois, c’est le manque de matériel hygiénique pendant les règles et son utilisation pour humilier. Après les premiers coups le jour de son arrestation, Mounira a été emmenée à la prison de Sharon. À l’entrée de la prison, tout le monde passe par une fouille corporelle, mais une fouille à nu n’est pas la norme et nécessite un motif raisonnable de soupçonner que la détenue cache un objet interdit. Une fouille à nu nécessite également l’approbation de l’officier responsable. Pendant la fouille, aucun officier n’était là pour Mounira, et certainement pas une procédure organisée pour vérifier un soupçon raisonnable. Mounira a été poussée par deux gardiennes dans une petite pièce de fouille, où elles l’ont forcée à enlever tous ses vêtements, y compris ses sous-vêtements et son soutien-gorge, et à se mettre à genoux. Après quelques minutes où elles l’ont laissée seule, l’une des gardiennes est revenue, l’a frappée et est partie. À la fin, ses vêtements lui ont été rendus et elle a été autorisée à s’habiller. Le lendemain était le premier jour de ses règles. Elle a reçu une serviette hygiénique et devait s’en débrouiller pour toute la période de ses règles. Et c’était pareil pour toutes. Lorsqu’elle a été libérée, elle souffrait d’une infection et d’une grave inflammation des voies urinaires.

Épilogue

Sde Teiman était le lieu de détention le plus terrible, et c’est soi-disant la raison pour laquelle ils l’ont fermé. En effet, il est difficile de penser aux descriptions de l’horreur et de l’atrocité qui sont sorties de ce camp de torture sans penser à l’endroit comme l’un des cercles de l’enfer. Mais ce n’est pas sans raison que l’État a accepté de transférer ceux qui y étaient détenus vers d’autres endroits — principalement Nitzan et Ofer. Sde Teiman ou pas Israël détient des milliers de personnes dans des camps de torture et au moins 68 d’entre elles y ont perdu la vie. Rien que depuis début décembre, la mort de quatre autres détenus a été signalée. L’un d’eux, Mahmad Walid Ali, 45 ans, du camp de Nour Shams près de Toulkarem, est mort une semaine seulement après son arrestation. Les tortures sous toutes leurs formes, la faim, l’humiliation, l’agression sexuelle, la promiscuité, les coups et la mort, ne sont pas le fruit du hasard. Elles constituent ensemble la politique israélienne. Voilà la réalité.


 



12/01/2025

TIGRILLO L. ANUDO
Venezuela: digna resistencia al fascismo


Tigrillo L. Anudo, 12-1-2025


Autor amazonense sin fronteras, bolivarista, martista, mariateguista, gaitanista y un poquito zapatista.

Digan lo que digan, son 25 años resistiendo las ambiciones colonialistas de USA, Europa e Israel. Desde que triunfó la Revolución Bolivariana con la elección del presidente Hugo Chávez Frías en 1999, han querido estrangularla con bloqueos, métodos infames, inhumanos y violentos, con el fin de apoderarse de sus grandes reservas de petróleo, gas, carbón, coltán, oro, uranio, hierro, bauxita, manganeso, aluminio, diamantes, torio, caolín, tierras raras, aguas, níquel, plomo, zinc, asbesto, cobre, titanio, feldespato.


A Chávez lo eligió un pueblo que no aguantó un modelo económico neoliberal, excluyente y corrupto. Igual a lo que sucedió con la elección del presidente Gustavo Petro en Colombia. El saqueo de las rentas petroleras, la desatención y la miseria extendida, provocadas por los partidos Acción Democrática –AD- y Comité de Organización Política Electoral Independiente –Copei- (liberal y conservador), ya habían generado un estallido social conocido como El Caracazo. Es la misma historia de Colombia.

Desde el primer día que Chávez se posesionó dijeron que era un dictador. La oligarquía, la clase política parasitaria y los colonialistas ordenaron escribir en los diarios y en la televisión que Chávez era un dictador y que iba a convertir a Venezuela en otra Venezuela. También dijeron que era populista radical, corrupto, mesiánico, intolerante, que causaría más pobreza, que era aliado de las Farc, que albergaba y protegía terroristas. Es exactamente lo mismo que hoy le dicen al presidente Gustavo Petro.

Nunca dijeron en sus medios de propaganda que el presidente Chávez en escasos 6 años logró reducir la pobreza de un 60% a un 22% lo que constituye un récord mundial. Revirtió el crecimiento económico de un – 7% a un sorprendente 18% en apenas 5 años, la mejor tasa de América Latina en el 2004 (Cepal). Redujo la inflación del 53% a menos del 20%; también la devaluación que estaba en el 759% promedio anual en 1999 al 40.9% en el 2003. El salario mínimo que estaba en 75.000 bolívares / mes en 1998, lo subió a 190.080 / mes en septiembre de 2002. Elevó las reservas internacionales de 14.000 millones de dólares a 20.000 millones en tres años (1999 a 2001). También incrementó sustancialmente el gasto social per cápita, la construcción de viviendas, la atención en salud, el acceso a la educación, disminuyó ostensiblemente la mortalidad infantil.

En Venezuela, como en Colombia, el Estado era paquidérmico, clasista, burocrático, y no permitía avanzar las reformas sociales. Chávez se vio obligado a crear un Estado paralelo al Estado oligárquico; fundó las Misiones Sociales que atendieron a millones de pobres excluidos del desarrollo humano integral. El proceso de democratización del desarrollo allá fue diferente al que arrancó con el gobierno progresista del cambio en Colombia. Chávez, gracias al poderoso apoyo popular, contó con mayor maniobrabilidad y audacia para atender las necesidades de las comunidades. No permitió que el aparato judicial le frenara las reformas, menos incluir “caballos de Troya” en los mandos medios y altos de los cargos públicos.

La Revolución Bolivariana fue arrasadora en conquistas sociales y económicas. Chávez arrollaba en las elecciones presidenciales, de diputados, regionales, para estados y alcaldías; también barrió en el referéndum del año 2004, convocado por la oposición para revocar su mandato, en el que el pueblo decidió por inmensa mayoría su permanencia en el poder. Fue una demostración singular de democracia, sin embargo, la prensa corporativa mundial siguió tildándolo de dictador. Igual sucede en Colombia con el presidente Petro a pesar del respeto que ha mostrado a la división de poderes y a la Constitución Política.



La oposición nunca aceptó el triunfo legitimo del presidente Chávez, no sólo lo linchaba moralmente sino que intentó darle golpe de Estado, asesinarlo, defenestrarlo con invasión de tropas extranjeras. Pero se encontraron con la bravura, tenacidad y dignidad de los revolucionarios chavistas, émulos de Simón Bolívar y José Antonio Páez. Hasta que el destino apagó prematuramente la vida del gran líder latinoamericano en el año 2013. Chávez gobernó durante 14 años soportando las “guarimbas”, el terrorismo, los saboteos de una oposición que no sintonizaba con el cambio de modelo en Venezuela. El odio, la violencia, la intolerancia, la incapacidad de adaptarse a un nuevo modelo de desarrollo que no era siquiera socialista, -sino promotor de las libertades y capacidades de las personas-, estancó los avances que se había fijado la Revolución.

Llegó a la Presidencia el excanciller Nicolás Maduro Moros. La oposición se envalentonó porque consideró que la estatura política de Maduro no tenía comparación con la del comandante Chávez. Entonces arreciaron con mayor ímpetu los ataques desestabilizadores apoyados desde afuera por las sanciones comerciales y económicas que el gobierno de los USA impuso no al gobierno bolivariano sino al pueblo venezolano. El propósito de la oposición consistió en no dejar gobernar, ridiculizar y linchar mediáticamente a Maduro para sacarlo de la Presidencia. Tanta virulencia e infamia llevó a los chavistas a radicalizar sus posturas para evitar la destrucción de la Revolución Bolivariana, el sueño de un conglomerado, el derecho de los eternamente ninguneados.

El asedio, el saboteo, la conspiración y la sedición desde afuera y desde adentro acabaron por generar acciones defensivas rigurosas y extremas de quienes se sentían perseguidos. El gobierno de Maduro se vio obligado a afianzar alianzas con gobiernos que tienen diferencias ideológicas y económicas con la potencia del Norte. Rusia, China, Irán.

Dos hechos marcaron un tenso clima:
1. el reconocimiento a Juan Guaidó como autoproclamado presidente de la República Bolivariana de Venezuela. Fue reconocido por el gobierno de USA, de España, inclusive del expresidente colombiano Iván Duque.
2. La solicitud de María Corina Machado, la jefa de la oposición, a los gobiernos de Israel y USA para ejecutar una invasión a Venezuela con el objetivo de derrocar al presidente Maduro.


El reconocimiento a Guaidó tuvo como fines debilitar el gobierno de Maduro y robar los recursos de Venezuela en el exterior, representados en oro guardado en Inglaterra, cuentas bancarias, bienes de transporte (barcos –aviones), otros bienes. Volvió a la escena la filibustería y piratería internacional, propia de los siglos XVII y XVIII cuando Inglaterra y Francia asaltaban los botines de oro y plata que la madre España transportaba desde américa en galeones y carabelas. No menos dañina fue la burda y traidora solicitud de la Machado que llevó al gobierno a decretar una alerta nacional, realizar ejercicios militares, detener cualquier sospechoso de sedición, vigilar milímetro a milímetro el espacio aéreo. Venezuela ha vivido bajo un clima de guerra en los últimos años; los servicios de seguridad y el ejército han neutralizado atentados, intentos de magnicidio, y capturado elementos terroristas entrenados en países latinoamericanos y en USA.

Han sido entonces 25 años de estigmatización, desestabilización, conspiraciones, actos criminales, contra un proyecto político popular, un proceso democratizador amparado por la soberanía y la libre autodeterminación de los pueblos. El gobierno venezolano y el chavismo se han parado firmes en la defensa de dicho proyecto, no ha habido momento de tregua o respiro. Si el presidente Maduro y su equipo de gobierno han cometido errores ha sido por efecto de las presiones, del acorralamiento, el intervencionismo, la instigación permanente del conjunto del fascismo internacional. Desde el 2 de febrero de 1999, día de la posesión del presidente Chávez, Venezuela ha sido atacada desde todos los flancos, con toda la parafernalia y bulla mediática, con grupos de mercenarios colombianos, sanciones imperiales de bloqueo criminal que hicieron escasear medicamentos, alimentos, insumos, maquinarias, divisas.

El éxodo masivo de venezolanos fue consecuencia directa de las sanciones económicas. El desabastecimiento, la parálisis industrial, la crisis económica, la devaluación, la inflación galopante fueron planificadas fría y calculadamente en el país de las hamburguesas para asfixiar el gobierno bolivariano y provocar su caída. Finalmente, lo que lograron fue golpear a la población más vulnerable, expulsarla de su propio territorio. Constituye otro crimen que se suma a las bombas atómicas en Hiroshima y Nagasaki, los bombardeos con napalm y agente naranja en Vietnam, los derrocamientos de gobiernos democráticos (Chile, República Dominicana, Honduras, Paraguay, Bolivia, Brasil, Perú), entre otros.

El libreto seguido desde hace 25 años, el cual es muy predecible y pueril, vuelve y desconoce una victoria legitima del presidente Nicolás Maduro en las elecciones del pasado 28 de julio de 2024. Vuelven a cantar fraude en un sistema electoral electrónico con tres filtros de pruebas, uno de los más seguros y confiables del mundo. Los gobiernos de USA, Italia, Israel, Perú, reconocen como presidente legítimo a Edmundo González. Y como novedad en la artillería golpista, Biden (presidente de USA) le pone precio en dólares a la captura de Maduro. Repiten en todos los medios de comunicación que Maduro es un dictador, y ponen a repetir lo mismo a muchos demócratas y progresistas del mundo. Para el fascismo, todos los presidentes con criterio son dictadores. Según los nuevos moralistas (los que aman la dictadura del capital), Petro es dictador, Pedro Castillo (Perú) es dictador, Luis Arce (Bolivia) es dictador. Para el fascismo, el presidente Nicolás Maduro no tiene derecho a defenderse. Debe dejarse amedrentar, humillar, amenazar, quedarse quieto. Si se atreve a anunciarles que les aplicará la Ley entonces es dictador. Sólo los fascistas pueden mandar paramilitares, crear guarimbas, terrorismo callejero, autoproclamarse presidentes legítimos, amenazar con invasión. El gobierno bolivariano no puede detener a alguien que esté involucrado en acciones de traición a su país, que amenazan la seguridad y la convivencia pacífica, porque entonces es dictadura y viola los derechos humanos. Pretenden que las instituciones se queden maniatadas para que así prospere la conspiración.

Cuba y Venezuela son los procesos revolucionarios de emancipación que se han sostenido en América Latina porque se radicalizaron. Aquellos procesos democráticos progresistas que no se radicalizaron terminaron reventados, casos de Republica Dominicana (1963 - Juan Bosch), Chile (1972 - Salvador Allende), Honduras (2009 – Manuel Zelaya), Paraguay (2012 – Fernando Lugo), Brasil (2016 – Dilma Rousseff),  Bolivia (2019 – Evo Morales), Perú (2022 – Pedro Castillo). 





SERGIO RODRÍGUEZ GELFENSTEIN
Deux ou trois remarques sur la Trumperie qui vient

Deux semaines avant l’intronisation de Donald Trump à la présidence des USA, je me risquerai à faire quelques observations sur les perspectives de la nouvelle administration, tout d’abord sur sa politique étrangère, surtout après ses déclarations arrogantes de confrontation avec le Mexique, le Panama, le Venezuela et le Danemark (pour le Groenland).


Le rêve trumpien d’acheter le Groenland, vu par la dessinatrice Mette Dreyer pour le journal danois Politiken


À cet égard, on peut conclure que l’impertinence est un trait de personnalité du nouveau dirigeant yankee, qu’il associe à une vision agressive de businessman pour atteindre ses objectifs. Avant de prendre ses fonctions pour sa première présidence, après avoir remporté les élections en 2016, et alors qu’il nommait les membres de l’administration, son meilleur ami Steven Witkoff lui avait recommandé de ne pas faire entrer John Bolton dans le cabinet. Il a répondu que c’était une recommandation tardive parce qu’il l’avait déjà fait.

Aujourd’hui, Trump estime qu’en construisant sa première administration, il a dû accepter de nombreuses impositions parce qu’il n’était pas un homme politique, qu’il n’avait pas d’expérience, qu’il ne contrôlait pas le parti républicain, ni ses sénateurs et ses représentants, ni les médias ou les réseaux sociaux.
Cette situation a aujourd’hui changé. Huit ans plus tard, Trump estime que si Bolton a fait beaucoup de mal à sa première administration, il l’a aussi aidé parce qu’étant détesté de tous, il a fait le sale boulot, après quoi il venait dialoguer sur une situation dans laquelle un espace avait été créé pour négocier et même pour céder, si bien qu’ il a souvent pu capitaliser sur le « règlement » des différends. C’était le vieux jeu du « bon flic/méchant flix » appliqué à la politique.

Dominik Joswig

Ce récit reflète parfaitement la manière dont Trump entend agir en matière de politique étrangère. Au fond, son principal objectif est d’arrêter la Chine, et il y consacrera l’essentiel de son énergie. Par exemple, les pressions exercées sur le Panama ne visent pas à s’emparer du canal, mais à faire sortir la Chine de ce pays. Or, il a déjà mis la question sur la table des négociations et lorsqu’il demandera au gouvernement panaméen de prendre des mesures contre la Chine, il donnera l’impression de céder sur son objectif de s’emparer du canal. En d’autres termes, il « cédera » sur cet objectif en échange de l’expulsion par le Panama de la Chine de son territoire. De même pour le Groenland, il finira par contrôler le territoire sans avoir besoin de s’en emparer, ce qui sera également perçu comme une concession de sa part.


 

Compte tenu de toutes les nominations de fidèles de l’establishment par Trump (voir mon article précédent « Que fera Marco Rubio ? »[en espagnol]), je voudrais réitérer que la question la plus importante reste de savoir quel sera le rôle du département d’État dans l’exécution de la politique étrangère des USA.
La réponse est qu’il se concentrera sur l’exercice de pressions visant à retirer de l’espace à la Chine dans le monde, et en particulier en Amérique latine et dans les Caraïbes, où Rubio entretient des relations étroites avec des gouvernements, des partis et des dirigeants de droite et d’extrême droite, dont certains sont également considérés comme des amis de la Chine. Il s’agira donc également d’un scénario contesté, puisque - j’aimerais insister - la Chine sera la cible numéro un de la politique étrangère yankee, et pas précisément pour coopérer, mais plutôt pour entraver les liens bilatéraux et empêcher la Chine de contester l’hégémonie mondiale de Washington, même si celle-ci n’a pas l’intention de le faire.
Si tel est le cas, il convient de se demander pourquoi Trump a nommé Rubio secrétaire d’État, sachant qu’il ne lui fait pas confiance parce que c’est un « faucon » fidèle aux néoconservateurs. La réponse est que, bien que le prochain président - contrairement à sa première administration - contrôle désormais le parti républicain, certains sénateurs conservent leur autonomie et pourraient l’affronter, comme le montre le fait que Trump devra très probablement retirer la nomination de Pete Hegseth au poste de secrétaire à la Défense en raison de la résistance qu’il rencontre parmi les sénateurs de son propre parti. Trump a besoin d’eux, surtout pour garantir la nomination de certaines figures de son cabinet, notamment Tulsi Gabbard du parti démocrate, que ses anciens collègues ne veulent pas voir à ce poste parce qu’elle connaît trop de secrets internes.
D’autre part, il est certain que Trump reprendra la « guerre commerciale » contre la Chine en établissant de nouveaux droits de douane et en en augmentant d’autres afin que Beijing soit contraint de dévaluer sa monnaie, ce qui rendra ses exportations plus chères et affectera son commerce. Les économies latino-américaines qui importent beaucoup de Chine seront affectées par cette mesure.
De même, en tant qu’instrument d’analyse, il ne faut pas oublier que la personnalité de Trump se caractérise par des décisions inopportunes et la création d’incertitudes en tant qu’instruments de coercition. Cela conduit les gouvernements et les ministères des affaires étrangères à être limités dans leur capacité à prévoir les événements. Trump n’agit pas sur la base d’une idéologie définie. Il est uniquement motivé par la recherche du profit pour les USA, en particulier pour les entreprises et les riches.
L’establishment est son ennemi car il a opté pour l’économie spéculative et de services et Trump vise à revenir à une situation où les USA fondent leur économie sur la production. Cela explique certaines des nominations de Trump visant à affronter l’establishment, notamment Tulsi Gabbard au poste de directrice du renseignement national et Hash Patel au poste de directeur du FBI.
Trump entend prolonger son contrôle de l’État à l’avenir par l’intermédiaire du vice-président J.D. Vance, qui est son « dauphin ». Seul Vance a une idéologie bien définie et éloignée des canons traditionnels. L’émergence de Trump en politique et la recherche de l’extension de son influence dans le temps est l’expression des grandes contradictions dont souffre le système politique yankee, qui s’éloigne de la dichotomie traditionnelle démocrate-républicain ou gauche-droite.

« Rendons le Groenland vert à nouveau! » [Groenland signifie Terre verte en danois et un green est la partie de pelouse tondue autour de chaque trou au golf, dont Trump est un passionné]
 Morton Morland, Royaume-Uni

Il y a une crise d’identité dans les deux partis. Chez les démocrates, il existe un courant atlantiste néoconservateur qui s’oppose au vieux parti qui a créé l’État-providence, qui ne veut pas la guerre et qui croit en la nécessité d’augmenter les investissements sociaux, ce qui témoigne d’une débat non abouti. Cependant, ils ont écarté Bernie Sanders d’une manière mauvaise et illégale, montrant clairement que c’est l’aile droite de ce parti (qui est considérée comme « de gauche » aux USA) qui est aux commandes.
De son côté, le Parti républicain, vieille organisation conservatrice et réactionnaire, débat également entre le courant traditionaliste et le trumpisme anti-establishment qui propose une nouvelle façon de faire de la politique. Dans un premier temps, Trump envisage d’intervenir dans le Parti républicain pour que la nouvelle génération Vance le contrôle afin de « rendre à l’Amérique sa grandeur ». Si cela n’est pas possible, Trump cherchera probablement à créer sa propre organisation politique en s’inspirant des deux côtés du bipartisme traditionnel du pays.
Vance a une ligne de pensée cohérente sous-tendue par la suprématie blanche et la lutte contre l’establishment, qu’il considère comme rétrograde et immobilisant. Dans cette mesure, il se considère comme le promoteur d’une classe dirigeante liée à ces principes et comme un fervent défenseur de la religion traditionnelle. Il est intéressant de noter qu’il s’identifie fortement à la classe ouvrière usaméricaine, bien entendu pas en termes marxistes, mais dans le cadre de la conception capitaliste à l’ancienne. Il rejette les grandes entreprises et les monopoles, qu’il tient pour responsables de la destruction du capitalisme, car leur pratique conduit à la destruction de la base de l’économie capitaliste, à savoir la concurrence. Tout cela génère un océan de contradictions qui rend difficile la compréhension de ce qui se passe.
La vérité est que cette situation complexe a été évidente dans les résultats des élections, l’extrême droite dans son ensemble a couvert le spectre électoral en étant présente à la fois dans le camp démocrate et dans le camp républicain. Ainsi, même si Trump a représenté le parti républicain, le fait est qu’une troisième force est en train de naître. La nomination de Gabbard, démocrate de formation et de conviction, et de Robert Kennedy Jr, démocrate pur jus, au poste de secrétaire à la santé et aux services sociaux en sont peut-être les expressions les plus claires. Dans cette dimension, il faut aussi comprendre le soutien des Noirs et des Latinos à Trump, qui est ouvertement raciste et suprémaciste. Il est devenu clair que les discours traditionnels appartiennent au passé.
La seule chose qui compte aujourd’hui est l’économie et la résolution des problèmes économiques des majorités. La distinction traditionnelle dans la société usaméricaine entre ceux qui ont une formation universitaire et ceux qui n’en ont pas n’est plus valable. C’est précisément la ségrégation sur la base de tels critères qui a fait tomber dans l’escarcelle de Trump d’importants secteurs exclus de la société.
En résumé, Trump va essentiellement axer son gouvernement sur la résolution des problèmes de politique intérieure. Sur le plan extérieur, l’accent sera mis sur la Chine. Il essaiera de résoudre le problème de l’Ukraine parce qu’il ne veut pas continuer à saigner à blanc l’économie usaméricaine. La confrontation avec la Chine a une composante systémique à long terme et une composante conjoncturelle à court terme. C’est cette dernière qui sous-tend son soutien à Taïwan, mais pour les mêmes raisons que celles évoquées plus haut, il ne s’agit pas d’une ligne rouge pour Trump. Il continuera à la soutenir parce qu’il a besoin des usines de fabrication de puces de l’île. Lorsque les USA seront autosuffisants dans ce domaine [il n’est pas interdit de rêver, NdT], Taïwan cessera d’être un problème pour les USA. Trump n’est pas disposé à continuer à soutenir un dossier à forte intensité de ressources qui trouve son origine dans la guerre froide. Ce n’est pas à travers Taïwan que Trump structurera la confrontation stratégique avec la Chine.
Il convient de le répéter, la méthode de Trump consiste à lancer des questions qui ne sont pas à l’ordre du jour afin d’évaluer les réponses à ses déclarations. Ainsi, lorsque la question devient d’actualité, la mise en œuvre des mesures à prendre est déjà préparée et avancée. Ses principales questions de politique étrangère seront la Chine, les migrations et l’énergie, et ses actions s’articuleront autour d’elles.

Le plan Meta de Trump pour le Groenland
-Fais donc un fact-checking, pour voir si Trump est vraiment notre président
-Pas possible, Zuckerberg l’a supprimé
Dessin de Burkhard Fritsche, taz, Berlin



SABRINA NELSON
La migration illégale comme monnaie d’échange : le jeu diplomatique du Maroc à Ceuta et Melilla

Sabrina Nelson , The McGill International Review, 9/1/2025
Original édité par Rafay Ahmed
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane, Tlaxcala

Sabrina est une étudiante de quatrième année qui poursuit un diplôme en sciences politiques avec une mineure en développement international à l’Université McGill à Montréal (Québec). Elle s’intéresse aux droits humains, à la justice sociale, aux crises humanitaires et à la résolution des conflits. Elle est passionnée par les langues et en parle actuellement six.

Immigrants africains à la barrière frontalière entre l’Espagne et le Maroc par ¡¡¡¡ !!!, sous licence CC BY-NC-SA 2.0

Situées sur le continent africain et bordées par le Maroc, Ceuta et Melilla, les enclaves nord-africaines de l’Espagne, sont depuis longtemps des points chauds dans les relations hispano-marocaines, en raison de différends historiques profondément enracinés sur la souveraineté. Le Maroc considère Ceuta et Melilla comme des reliques coloniales espagnoles, affirmant ses liens historiques avec les enclaves à travers les conquêtes islamiques des VIIe et VIIIe siècles, lorsqu’elles ont été intégrées dans l’héritage culturel et historique de l’Afrique du Nord. Dans une lettre adressée à l’ONU en 2022, le Maroc a décrit les enclaves comme « une prison occupée par l’Espagne » et a nié avoir des frontières terrestres avec l’Espagne. L’Espagne, en revanche, affirme sa souveraineté de longue date, citant le contrôle de Melilla depuis 1497 et de Ceuta depuis l’existence de l’Union ibérique (1580-1640), la cession formelle de Ceuta au Portugal ayant eu lieu dans le cadre du traité de Lisbonne en 1668. L’Espagne règne désormais sur Ceuta et Melilla depuis des siècles et les deux enclaves sont actuellement reconnues internationalement comme des villes autonomes régies par le droit espagnol et le droit communautaire européen.

Au-delà du conflit de souveraineté, Ceuta et Melilla sont devenues des sources de tension récurrentes en raison du défi que représente l’immigration clandestine. La situation unique de Ceuta et Melilla sur le continent africain en fait des points d’entrée privilégiés pour les demandeurs d’asile et les migrants qui tentent d’atteindre l’Europe. Le Maroc a stratégiquement utilisé le défi de l’immigration clandestine comme un outil diplomatique, en contrôlant le flux de migrants pour faire pression sur l’Espagne afin qu’elle fasse des concessions politiques, en particulier en ce qui concerne le Sahara occidental. Ainsi, le Maroc a transformé les enclaves en puissantes monnaies d’échange géopolitiques, obligeant l’Espagne à naviguer dans un jeu d’équilibre complexe et délicat.

Carte de Ceuta et Melilla, par Anarkangel, sous licence CC BY-SA 3.0.

Le défi persistant de l’immigration clandestine

Alors que la migration illégale à Ceuta et Melilla a atteint un sommet en 2018 avec 6 800 entrées enregistrées, le problème reste d’actualité. En 2023, on estime à 1 243 le nombre d’entrées enregistrées, ce qui est considérable compte tenu de la taille des enclaves. Toutefois, ces chiffres ne tiennent compte que des migrants interceptés qui ont réussi à franchir la frontière ; l’ampleur réelle des tentatives de franchissement est bien plus importante. Par exemple, pour le seul mois d’août 2023, les autorités marocaines ont bloqué plus de 3 300 tentatives de passage vers Melilla et 11 300 vers Ceuta. La plupart des personnes qui tentent d’entrer dans les enclaves sont originaires du Maroc, d’Algérie, de Tunisie et d’Afrique subsaharienne. Leurs voyages sont principalement motivés par le désir d’une vie meilleure.

Les migrants interceptés à la frontière sont généralement renvoyés au Maroc ou dans leur pays d’origine, sauf s’ils demandent l’asile ou s’ils sont mineurs. Toutefois, la vérification de ces demandes est difficile en raison du manque de documents, et les autorités espagnoles, auxquelles les lois internationales et nationales interdisent d’expulser les mineurs non accompagnés, sont tenues de les prendre en charge. Les demandeurs d’asile sont temporairement détenus pendant que leurs demandes font l’objet d’une évaluation juridique.

 

Migrants résidant dans le Centre de séjour temporaire de migrants (CETI) entrant dans la mairie de Ceuta, par Fotomovimiento, sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

L’immigration clandestine, un embrouillamini de coopération et de conflit

Depuis les années 1990, alors que l’afflux de migrants augmentait, l’Espagne et le Maroc ont coopéré étroitement en matière de migration illégale et de contrôle des frontières, signant même un accord bilatéral en 1992 pour permettre à l’Espagne de demander la réadmission de migrants provenant du Maroc. Au fil du temps, l’Espagne s’est de plus en plus appuyée sur le Maroc pour gérer des portions importantes de sa frontière, une délégation soutenue par l’UE, qui a renforcé ses relations avec le Maroc en tant qu’allié essentiel dans la gestion de l’immigration clandestine. Cette collaboration comprend un soutien financier et politique, comme le programme d’aide de 148 millions d’euros en 2018 pour améliorer la gestion des frontières du Maroc, ainsi que des projets cofinancés par l’Espagne et l’UE pour renforcer les barrières frontalières autour des enclaves.

Si la dépendance de l’Espagne à l’égard du Maroc pour la gestion de ses frontières favorise la coopération, elle a également créé une dépendance stratégique que le Maroc a de plus en plus exploitée ces dernières années. Le Maroc a utilisé la gestion de l’immigration clandestine comme un outil pour exercer une pression politique et faire avancer ses revendications territoriales, notamment en ce qui concerne le Sahara occidental. Le Sahara occidental est un territoire contesté d’Afrique du Nord-Ouest revendiqué par le Maroc et par le peuple sahraoui, qui cherche à obtenir l’autodétermination par l’intermédiaire du Front Polisario.

L’exploitation par le Maroc de la dépendance stratégique de l’Espagne est devenue évidente en avril 2021 lorsque, en réponse à la décision de l’Espagne de fournir un traitement médical au chef du Front Polisario, Brahim Ghali - un acte que le Maroc considérait comme une atteinte à ses revendications de souveraineté - le Maroc a délibérément relâché ses contrôles frontaliers, permettant à environ 8 000 migrants d’entrer à Ceuta. La crise s’est aggravée, poussant l’Espagne à déployer son armée et déclenchant une impasse diplomatique majeure entre les deux pays. Le Parlement européen est intervenu, reconnaissant que le Maroc manipulait l’immigration clandestine comme un outil de pression géopolitique. L’assouplissement délibéré des contrôles frontaliers par le Maroc met en évidence l’équilibre délicat que doit trouver l’Espagne entre la coopération avec le Maroc en matière d’immigration clandestine et la lutte contre ses manipulations politiques.

La stratégie d’apaisement de l’Espagne

Au lieu d’adopter une position ferme contre l’utilisation par le Maroc de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange géopolitique, l’Espagne a poursuivi une stratégie d’apaisement ces dernières années, en accordant des concessions au Maroc et en évitant les actions susceptibles de le provoquer. Cette approche est devenue particulièrement évidente en 2022, lorsque l’Espagne a approuvé le plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara occidental, soutenant ainsi la souveraineté marocaine sur le territoire et abandonnant des décennies de neutralité.  


Pedro Sanchez rencontre le Premier ministre du Maroc, Saadeddine Othmani, dans le cadre de la Conférence intergouvernementale sur le Pacte mondial sur les migrations qui s’est tenue à Marrakech, en 2018. Photo de La Moncloa - Gobierno de España, sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

La nouvelle stratégie d’apaisement de l’Espagne a été renforcée lors d’un sommet à Rabat en 2023. Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez a exprimé l’intention de l’Espagne de réinitialiser et de réparer les relations avec le Maroc, en s’engageant au « respect mutuel » et à éviter les actions qui pourraient offenser « l’autre partie » ou les « sphères de souveraineté respectives » de l’une ou l’autre nation.

Cette stratégie d’apaisement a influencé le comportement politique au niveau national, le Parti socialiste ouvrier de Sanchez restant silencieux ou votant contre les résolutions critiques à l’égard du Maroc. En février 2023, le parti de Sanchez a notamment voté [aux côtés des députés du Rassemblement National français, NdlT] contre une résolution du Parlement européen exhortant le Maroc à respecter les droits humains. En poursuivant son objectif d’apaisement par-dessus tout, l’Espagne a compromis son engagement en faveur des droits humains, exposant une contradiction entre son image de défenseure ces derniers et ses actions dans ce contexte.

Les remarques de Sanchez soulignent les efforts de l’Espagne pour se positionner comme un partenaire mature et coopératif, prêt à faire des concessions sur les exigences politiques du Maroc en échange de la coopération de ce dernier sur des questions telles que la gestion de l’immigration clandestine, tout en plaidant subtilement pour une responsabilité réciproque de la part du Maroc.

En toute justice pour le Maroc, la stratégie d’apaisement de l’Espagne ne repose pas uniquement sur l’utilisation par le Maroc de la gestion de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange. Elle reflète également l’alignement du Maroc sur les ambitions énergétiques de l’Espagne. Dans le contexte de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les pays européens sont à la recherche de sources d’énergie alternatives, et le potentiel d’énergie renouvelable du Maroc ainsi que sa position stratégique en font un partenaire clé. L’Espagne, qui aspire à devenir une plaque tournante de l’énergie en Europe, a renforcé ses liens énergétiques avec le Maroc, continuant à rechercher l’apaisement non seulement pour faire face à l’immigration clandestine, mais aussi pour soutenir sa stratégie énergétique plus large. [en 2030, 50% de l’énergie éolienne produite par le Maroc devrait provenir du Sahara occidental occupé, NdlT]

L’utilisation par le Maroc de l’immigration clandestine comme monnaie d’échange s’est avérée efficace, en particulier dans le contexte actuel de l’UE, où la montée des mouvements d’extrême droite et le soutien croissant aux partis politiques d’extrême droite ont entraîné une évolution vers des politiques d’immigration clandestine plus dures et plus sécuritaires parmi les États membres. Dans ce contexte, le Maroc peut tirer parti de son contrôle sur les flux migratoires illégaux dans les enclaves espagnoles pour exercer une plus grande influence sur l’Espagne et d’autres États de l’UE - en l’utilisant finalement comme un outil pour faire avancer ses intérêts politiques et territoriaux.



11/01/2025

BENOÎT GODIN
Cuarenta años después de su muerte, la batalla de Éloi Machoro no cesa

Benoît Godin, Billets d’Afrique, enero de 2025
Traducido por Fausto Giudice, Tlaxcala

Benoît Godin es periodista francés y activista de la asociación Survie, que lucha contra la Franciáfrica. Autor del documental radiofónico Le combat ne doit pas cesser : Éloi Machoro, un super-héros pour Kanaky


El 12 de enero de 1985, el GIGN [Grupo de Intervención de la Gendarmería Nacional ] mató a tiros a Éloi Machoro, poniendo fin a dos meses de un levantamiento que sacudió el orden colonial en Nueva Caledonia y reveló al mundo la existencia del pueblo canaco y su lucha contra la dominación francesa. Cuarenta años después, esa lucha sigue siendo dolorosamente actual.
¿Quién tomó la decisión de fusilar a Éloi Machoro y a uno de sus compañeros de armas, Marcel Nonarro, el 12 de enero de 1985? ¿Edgard Pisani, Alto Comisario de la República Francesa, que acababa de llegar a Nueva Caledonia con amplios poderes para hacer frente a una situación casi insurreccional? ¿Alguien superior en París? ¿O los hombres del GIGN enviados al lugar, los mismos que habían sido humillados un mes y medio antes por Machoro y sus camaradas y que supuestamente se habían excedido en sus órdenes? Cuarenta años después, la pregunta sigue en pie.
Pero, ¿es realmente tan importante? El verdadero culpable de este doble asesinato -porque lo fue- es conocido: fue el Estado francés, siempre implacable frente a los pueblos que se rebelan contra el yugo colonial. Esa mañana, Francia eliminó a uno de los hombres más odiados por los blancos de Nueva Caledonia (el anuncio de su muerte fue recibido con aullidos de júbilo en la plaza central de Numea). Era la figura emblemática del primer gran levantamiento canaco de posguerra (e incluso desde las guerras de 1878 y 1917), que marcó el inicio de la fase más dura del periodo conocido como los «acontecimientos».

Un hombre sobre el terreno

¿Quién era Éloi Machoro? Antes de aquellas terribles semanas que sacudieron el orden colonial, ya era una destacada figura local, elegido miembro de la Asamblea Territorial. Junto con Yeiwéné Yeiwéné y, sobre todo, Jean-Marie Tjibaou, era uno de los representantes más destacados de la joven generación canaca que, en 1977, tomó las riendas del partido político más antiguo del archipiélago, la Unión Caledonia (UC), transformándolo en un movimiento independentista. En 1981, Éloi Machoro se convirtió incluso en Secretario General del partido tras el asesinato de su predecesor, Pierre Declercq. Como tal, se encargó de organizar la vida del partido. Este hombre de fácil acceso y carisma evidente se desplazaba constantemente por los cuatro puntos cardinales del país, en contacto con militantes de todas las edades e incluso de todos los orígenes. Era un hombre de terreno. Y es allí, sobre el terreno, donde se le encuentra, lógicamente, a finales de 1984, al frente de una parte de las fuerzas canacas.

La urna rota

Hay muchas similitudes entre los levantamientos canacos de entonces y esta primavera de 2024, y una de las más evidentes es la forma en que se desencadenaron. Entonces, la restricción del electorado ya estaba en el centro de las reivindicaciones independentistas. Se trataba de contrarrestar los efectos de casi siglo y medio de colonización, que había acabado con los indígenas en minoría en su propia tierra. Los socialistas en el poder en París se negaron a tenerlo en cuenta: impusieron un nuevo estatuto, conocido como Estatuto Lemoine (nombre del Secretario de Estado encargado de los departamentos y territorios franceses de ultramar), y el 18 de noviembre de 1984 organizaron elecciones territoriales abiertas a todos. Esto fue demasiado para la mayoría de las organizaciones independentistas, lideradas por la UC, que formaron el Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) y llamaron a un «boicot activo» de las elecciones. El día D, el territorio ardía en manifestaciones, carreteras bloqueadas, ayuntamientos ocupados e incluso incendiados.

 

 El hacha de Eloi, por Miriam Shwamm

Esa mañana, Éloi Machoro y un grupo de activistas invadieron el ayuntamiento de Canala, su ciudad natal, en la costa este de Grande Terre. Armado con un tamioc, un hacha tradicional, destrozó la urna. Fue un gesto impactante, inmortalizado por el corresponsal del diario local. La foto dio la vuelta al mundo. La lucha del pueblo canaco salió de repente a la luz, y tenía un rostro: el rostro severo de Éloi Machoro, con gorra, gafas de sol y un espeso bigote.
Fue el punto de partida de una historia épica tan deslumbrante como influyente para los canacos de Nueva Caledonia. Dos días después, Éloi Machoro y otros activistas de Canala se unieron a los canacos en Thio, unos cuarenta kilómetros más al sur, para ocupar la gendarmería. Desalojaron las instalaciones al cabo de un día, pero inmediatamente iniciaron un «asedio» del municipio: durante casi un mes, los independentistas retuvieron Thio, estableciendo barricadas y controlando todas las vías de acceso.
Aunque Canala era ahora abrumadoramente canaca, Thio seguía teniendo una gran población de caldoches (como se conocía a los caledonios de origen europeo) y seguía siendo un bastión de la derecha colonial. Su alcalde, Roger Galliot, acaba de crear la sección local del Frente Nacional. Pero más allá del simbolismo político, Thio representaba también un reto económico de primer orden: alberga una de las mayores minas de níquel del mundo. El níquel es la principal fuente de riqueza de Nueva Caledonia, una ganancia inesperada para el Estado francés, pero de la que el pueblo canaco nunca se ha beneficiado, a excepción de unos pocos empleados.

Ministro de Seguridad de Kanaky

Machoro, que se convirtió en ministro de Seguridad del gobierno provisional de Kanaky proclamado por el FLNKS, dirigió la ocupación. Él y sus hombres recorrieron las casas de los colonos para confiscar sus armas. Pero al mismo tiempo exigió a sus militantes una disciplina a toda prueba. El alcohol, los saqueos e incluso los simples daños estaban prohibidos. A los que no cumplían se les reprendía severamente (por no decir otra cosa) y se les enviaba directamente a casa. La mina estaba cerrada, pero todo el equipo estaba cuidadosamente protegido. No se trataba sólo de preservar las herramientas económicas indispensables para el futuro país independiente, sino también de mostrar una cara ejemplar a los periodistas que se apresuraron a acudir a Thio. Machoro los recibió con gusto y concedió numerosas entrevistas, consciente de que la causa canaca necesitaba apoyo exterior, tanto dentro de la potencia administradora como a escala internacional.
El 1 de diciembre, el GIGN intentó invadir la comuna para poner fin a la ocupación. Pero no fue así: decenas de canacos, armados con fusiles confiscados a los caldoches, les rodearon nada más bajar de los helicópteros Puma, les desarmaron y les obligaron a marcharse. Fue una bofetada en la cara de los gendarmes, los mismos que se encontrarían unas semanas más tarde cerca de La Foa. El episodio dejó huella en la mente de la gente, reforzando el aura de Machoro en el mundo canaco... y creando psicosis entre los europeos, para quienes Machoro se convirtió en el enemigo público número uno. Sin embargo, Machoro era cualquier cosa menos un fanático brutal. Tras la masacre de diez canacos (entre ellos dos hermanos de Jean-Marie Tjibaou) perpetrada el 5 de diciembre en el valle del Hienghène por pequeños colonos, se opuso a algunos de sus hombres, que querían vengarse de los blancos aislados en sus casas de Thio. Su acción probablemente evitó un baño de sangre.
Por otra parte, Machoro no tenía intención de retroceder ante el Estado y sus aliados «leales». Si acabó respetando a regañadientes (y haciendo respetar) la orden del FLNKS de levantar los cortes de carretera emitida a mediados de diciembre, fue para preparar inmediatamente, con un grupo de militantes decididos, un nuevo golpe: el asedio de La Foa, al otro lado de Grande Terre. Casi una declaración de guerra a los ojos del Estado: equivalía a atacar una comuna «caldoche» y, sobre todo, a cortar la Ruta Territorial 1, muy estratégica, que une Numea, la capital, con el norte de la isla. El 11 de enero de 1985, en vísperas de entrar en acción, Machoro y una treintena de compañeros se apostaron a unos kilómetros, en una granja de la meseta de Dogny. Localizados, fueron rodeados por los gendarmes. A primera hora de la mañana siguiente, los francotiradores hicieron su trabajo sucio.

Ataï (izquierda) y Machoro, pintados por Élia Aramoto en una marquesina de autobús en Poindimié. Foto Hamid Mokaddem, 1990

La respuesta a la brutalidad colonial

Cuarenta años después, Éloi Machoro sigue siendo un icono en el mundo canaco, sobre todo entre los jóvenes, al mismo nivel que el gran jefe Ataï, que dirigió la guerra de 1878 contra los ocupantes franceses y con quien se le compara a menudo. Su retrato está en todas partes: camisetas, pancartas, muros tribales, barrios populares de Numea, redes sociales... Desaparecido antes de la época de los acuerdos, Machoro encarna una lucha sin cuartel contra esta colonización que nunca termina. El 4 de abril de este año, al margen de una conferencia de prensa organizada en las oficinas de la UC en Numea, los periodistas fueron recibidos por un hacha clavada en una urna... Cuando se trata de actuar sobre el terreno, se invoca el espíritu del viejo Éloi.
Sin embargo, sigue habiendo cierta incomprensión en torno a este hombre relativamente desconocido, casi tanto por parte de sus partidarios como de sus adversarios. Unos y otros mantienen una leyenda que, dorada u oscura, pinta más o menos el mismo cuadro, el de un Che Guevara oceánico de línea dura. Que tiene poco que ver con la realidad... Porque, aunque murió con un fusil en la mano, Machoro nunca disparó un solo tiro -ni siquiera antes de ser abatido, contrariamente a la primera versión de las «fuerzas del orden» que pretendían justificar su crimen.
En realidad, era un hombre muy abierto al diálogo, como otros dirigentes de la UC de la época. En 1983, junto a Yeiwéné y Tjibaou, participó en la mesa redonda de Nainville-les-Roches, durante la cual el movimiento independentista tendió la mano a las demás comunidades del archipiélago, reconocidas como «víctimas de la historia». Si Éloi Machoro se planteó la cuestión de recurrir a formas de acción más radicales, sólo fue en respuesta al desprecio y la brutalidad del sistema colonial. En esto, su camino sigue el de su pueblo, que siempre ha estado abierto al intercambio, pero que siempre ha chocado con un Estado francés encerrado en su lógica imperialista criminal. Nunca se insistirá lo suficiente en que el estallido de cólera popular de la noche del 13 de mayo de 2024, después de que la Asamblea Nacional votara el proyecto de ley constitucional de descongelación del censo electoral, se produjo tras meses de movilización masiva y pacifista de las fuerzas independentistas, en primer lugar canacas...
En una carta escrita el 17 de noviembre de 1984, la víspera del boicot activo, y durante mucho tiempo presentada erróneamente como su última, Éloi Machoro escribió estas palabras que aún se recuerdan: « La lucha no debe detenerse, ni por falta de líderes ni por falta de combatientes ». Si el pueblo canaco ha dado desde entonces la impresión de ser menos combativo, fue únicamente porque daba una oportunidad al proceso de descolonización apuntalado por los Acuerdos de Matignon y luego de Numea. Siguiendo el lema de Machoro, nunca abandonó la lucha por su emancipación y por la independencia de Kanaky-Nueva Caledonia. El año pasado lo demostró una vez más.



 

BENOÎT GODIN
Forty years after his death, Éloi Machoro's battle continues unabated

Benoît Godin, Billets d’Afrique, January 2025
Translated by Fausto Giudice, Tlaxcala

Benoît Godin is a French journalist and activist with the Survie association, which fights against Françafrique. Author of the radio documentary Le combat ne doit pas cesser : Éloi Machoro, un super-héros pour Kanaky 


On 12 January 1985, the GIGN [National Gendarmerie Intervention Group] shot dead Éloi Machoro, bringing to a halt two months of an uprising that shook the colonial order in New Caledonia and revealed to the world the existence of the Kanak people and their fight against French domination. Forty years on, that struggle is still painfully relevant today.

Who took the decision to shoot Éloi Machoro and one of his comrades in arms, Marcel Nonarro, on 12 January 1985? Edgard Pisani, the French Republic's High Commissioner, who had just arrived in New Caledonia with extensive powers to deal with a quasi-insurrectionary situation? Someone higher up in Paris? Or the GIGN men sent to the scene, the same ones who had been humiliated a month and a half earlier by Machoro and his comrades and who had allegedly gone beyond their orders? Forty years on, the question remains.

 But is it really that important? The real culprit in this double murder - for it was one - is known: it was the French state, always implacable when confronted with peoples rebelling against the colonial yoke. That morning, France eliminated one of the men most hated by the whites of New Caledonia (the announcement of his death was greeted by howls of joy in the central square of Nouméa). He was the emblematic figure of the first major post-war Kanak uprising (and even since the wars of 1878 and 1917), which marked the beginning of the hardest phase of the period known as the ‘events’.

 A man on the ground

Who was Éloi Machoro? Before those terrible weeks that shook the colonial order, he was already a leading local figure, elected to the Territorial Assembly. Along with Yeiwéné Yeiwéné and above all Jean-Marie Tjibaou, he was one of the most prominent representatives of the young Kanak generation who, in 1977, took over the reins of the archipelago's oldest political party, the Union calédonienne (UC), transforming it into a pro-independence movement. In 1981, Éloi Machoro even became the party's Secretary General after the assassination of his predecessor, Pierre Declercq. In this role, he was responsible for organising the life of the party. This man of easy approachability and obvious charisma was constantly on the move in the four corners of the country, in contact with activists of all ages and even of all origins. He was a man on the ground. And so it was there, on the ground, that he was to be found, quite logically, at the end of 1984, leading part of the Kanak forces.

 The broken ballot box

 There are many similarities between the Kanak uprisings of that time and this Spring of 2024, and one of the most obvious is the way they were triggered. Back then, restricting the electorate was already at the heart of the pro-independence demands. The aim was to counter the effects of almost a century and a half of colonisation, which had ended up with the indigenous people in a minority on their own land. The Socialists in power in Paris refused to take this into account: they imposed a new statute, known as the Lemoine Statute (named after the Secretary of State in charge of the French overseas departments and territories), and organised open territorial elections on 18 November 1984. This was too much for most pro-independence organisations, led by the UC, who formed the Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) and called for an ‘active boycott’ of the elections. On D-Day, the territory was ablaze with demonstrations, blocked roads, occupied town halls and even arson attacks.

 Eloi's axe, by Miriam Shwamm

That morning, Éloi Machoro and a group of activists invaded the town hall in Canala, his home town on the east coast of Grande Terre. Armed with a tamioc, a traditional axe, he smashed the ballot box. It was a powerful gesture, immortalised by the local daily's correspondent. The photo went around the world. The struggle of the Kanak people suddenly came into the open, and it had a face: the severe face of Éloi Machoro, wearing a cap, sunglasses and a thick moustache.

It was the starting point of an epic story that was as dazzling as it was influential for Kanaky-New Caledonia. Two days later, Éloi Machoro and other activists from Canala joined the Kanaks in Thio, some forty kilometres further south, to occupy the gendarmerie. They vacated the premises after a day, but immediately began a ‘siege’ of the commune: for almost a month, the pro-independence fighters held Thio, setting up roadblocks and controlling all access routes.

While Canala was now overwhelmingly Kanak, Thio still had a large population of Caldoches (as Caledonians of European origin were known) and remained a stronghold of the colonial right. Its mayor, Roger Galliot, has just set up the local branch of the Front National. But beyond the political symbolism, Thio also represented a major economic challenge: it is home to one of the largest nickel mines in the world. Nickel is New Caledonia's main source of wealth, a windfall for the French state, but one from which the Kanak people have never benefited, with the exception of a few employees

Kanaky's Minister for Security

 Machoro, who became Minister for Security in the provisional government of Kanaky proclaimed by the FLNKS, led the occupation. He and his men went round the homes of the settlers to confiscate their weapons. But at the same time, he demanded unfailing discipline from his militants. Alcohol, looting and even simple damage were forbidden. Those who failed to comply were severely reprimanded (to say the least) and sent straight home. The mine was shut down, but all the equipment was carefully protected. The aim was not only to preserve the economic tools that were essential to the future independent country, but also to show an exemplary face to the journalists who rushed to Thio. Machoro was happy to receive them and gave many interviews, well aware that the Kanak cause needed outside support, both within the administering power and internationally.

On 1 December, the GIGN tried to invade the commune to put an end to the occupation. But it was not to be: dozens of Kanak, armed with rifles seized from the Caldoches, surrounded them as soon as they got off the Puma helicopters, disarmed them and forced them to leave. It was a slap in the face for the gendarmes - the same ones who were to be found a few weeks later near La Foa. The episode left its mark on people's minds, reinforcing Machoro's aura in the Kanak world... and creating psychosis among Europeans, for whom Machoro became public enemy number one. Yet Machoro was anything but a brutal fanatic. After the massacre on 5 December in the Hienghène valley of ten Kanak (including two of Jean-Marie Tjibaou's brothers) by small settlers, he opposed some of his men, who wanted to take revenge on the isolated whites holed up in their homes in Thio. His action probably prevented a bloodbath.

On the other hand, Machoro had no intention of backing down in the face of the State and its ‘loyalist’ allies. If he ended up reluctantly respecting (and ensuring respect for) the FLNKS order to lift the roadblocks issued in mid-December, it was to immediately prepare, with a group of determined militants, for a new coup: the siege of La Foa, on the other side of Grande Terre. Almost a declaration of war in the eyes of the State: it was tantamount to attacking a ‘Caldoche’ commune and above all to cutting off the highly strategic Territorial Route 1 linking Nouméa, the capital, to the north of the island. On 11 January 1985, on the eve of taking action, Machoro and around thirty companions took up position a few kilometres away in a farm on the Dogny plateau. Spotted, they were surrounded by gendarmes. Early the next morning, the snipers did their dirty work.


Ataï (left) and Machoro, painted by Élia Aramoto on a bus shelter in Poindimié. Photo Hamid Mokaddem, 1990

 Responding to colonial brutality

 Forty years on, Éloi Machoro remains an icon in the Kanak world, particularly among young people, on a par with the great chief Ataï who led the war of 1878 against the French occupiers and to whom he is often compared. His portrait is everywhere: T-shirts, banners, tribal walls, Nouméa's working-class neighbourhoods, social networks... Having disappeared before the time of the agreements, Machoro embodies an uncompromising struggle against this colonisation that never ends. On 4 April this year, on the sidelines of a press conference organised at the UC offices in Nouméa, journalists were greeted by an axe stuck in a ballot box... When it comes to action on the ground, the spirit of old Éloi is invoked.

 However, there is still a certain misunderstanding surrounding this relatively unknown man, almost as much on the part of his supporters as his opponents. Both sides maintain a legend which, whether golden or obscure, paints more or less the same picture, that of a hard-line Oceanian Che Guevara. Which has little to do with reality... Because although he died with a rifle in his hand, Machoro never fired a single shot - not even before being shot, contrary to the first version of the ‘law enforcers’ seeking to justify their crime.

He was in fact a man who was very open to dialogue - like other UC leaders at the time. In 1983, alongside Yeiwéné and Tjibaou, he took part in the Nainville-les-Roches round table, during which the pro-independence movement reached out to the other communities in the archipelago, who were recognised as ‘victims of history’. While Éloi Machoro raised the question of resorting to more radical forms of action, it was only in response to the contempt and brutality of the colonial system. In this, his path follows that of his people, who have always been open to exchange, but who have always come up against a French state locked in its criminal imperialist logic. It cannot be stressed enough that the outburst of popular anger on the evening of 13 May 2024, after the National Assembly voted on the constitutional bill to unfreeze the electoral roll, followed months of massive, pacifist mobilisation by the pro-independence forces, first and foremost the Kanak...

In a letter written on 17 November 1984, the eve of the active boycott, and for a long time wrongly presented as his last, Éloi Machoro wrote these words that are still remembered: ‘ The fight must not stop, for lack of leaders or for lack of fighters ’. If the Kanak people have since given the impression that they were less combative, it was only because they were giving the decolonisation process underpinned by the Matignon and then Nouméa Accords a chance. Following Machoro's motto, it never gave up the fight for his emancipation and for the independence of Kanaky-New Caledonia. The past year has proved this once again.