01/09/2025

G. THOMAS COUSER
Comment je suis devenu antisémite


Toute ma vie, j’ai ressenti une forte affinité avec les personnes juives, mais maintenant que mon employeur, l’université Columbia, a adopté la définition de l’antisémitisme de l’IHRA*, je me retrouve soudainement qualifié d’« antisémite » parce que je m’oppose à l’oppression des Palestiniens.

G. Thomas Couser, Mondoweiss, 31/8/2025

Traduit par Tlaxcala

G. Thomas Couser est titulaire d’un doctorat en études américaines de l’université Brown. Il a enseigné au Connecticut College de 1976 à 1982, puis à l’université Hofstra, où il a fondé le programme d’études sur le handicap, jusqu’à sa retraite en 2011. Il a rejoint la faculté du programme de médecine narrative de Columbia en 2021 et a introduit un cours sur les études du handicap dans le programme d’études en 2022. Parmi ses ouvrages universitaires, citons Recovering Bodies: Illness, Disability, and Life Writing (Wisconsin, 1997), Vulnerable Subjects: Ethics and Life Writing (Cornell, 2004), Signifying Bodies: Disability in Contemporary Life Writing (Michigan, 2009) et Memoir: An Introduction (Oxford, 2012). Il a également publié des essais personnels et Letter to My Father: A Memoir (Hamilton, 2017).

Dans Le soleil se lève aussi d’Ernest Hemingway, on demande à Mike Campbell comment il a fait faillite. Il répond : « De deux façons. Progressivement, puis soudainement. » Je pourrais dire la même chose à propos de mon antisémitisme. La façon progressive a impliqué l’évolution de ma pensée sur Israël. La façon soudaine a impliqué l’adoption d’une définition controversée de l’antisémitisme par l’université Columbia, où je suis professeur adjoint.

Toute ma vie, je me suis considéré comme philosémite, si tant est que je sois quelque chose. Ayant grandi à Melrose, une banlieue blanche de classe moyenne de Boston, je n’avais aucun ami ou connaissance juif dans ma jeunesse. (Melrose n’était pas une ville exclusivement WASP (blanche, anglosaxonne et protestante : il y avait beaucoup d’Italiens et d’Irlandais usaméricains, mais dans ma classe de lycée de 400 élèves, il n’y avait qu’un ou deux Juifs.) Cela a changé à l’été 1963, après ma première année de lycée, lorsque j’ai participé à une session d’été à la Mount Hermon Academy. Mon camarade de chambre était juif, tout comme plusieurs élèves de ma classe. Nous nous entendions bien, et je suppose que je trouvais leurs intérêts et leurs valeurs plus intellectuels et plus mûrs que ceux de mes camarades de classe chez moi.

À Dartmouth, cette tendance s’est poursuivie. Mon colocataire était juif ; ma fraternité comptait plusieurs Juifs (dont Robert Reich). J’appréciais leur humour irrévérencieux, leurs expressions yiddish occasionnelles et leur scepticisme laïc. Lorsque mes amis juifs me disaient que je pouvais passer pour un Juif, je le prenais comme un compliment.

Malgré mes amis juifs, Israël était une inconnue pour moi. Je connaissais bien sûr son histoire. Ma génération a grandi en lisant le Journal d’Anne Frank ou en voyant la pièce de théâtre qui en a été tirée, un incontournable du théâtre lycéen (même, ou surtout, dans les banlieues sans Juifs comme la mienne). L’Holocauste était une histoire sacrée. Mais je n’avais aucun intérêt particulier pour l’État d’Israël, ni aucune idée à son sujet. Je n’en avais pas besoin.

Avec la conscription militaire qui nous guettait, beaucoup de gens de ma génération étaient contre la guerre ; mes amis et moi l’étions certainement. J’ai donc été surpris lorsque, pendant la guerre des Six Jours de 1967, certains de mes amis juifs se sont enthousiasmés pour la guerre, se vantant même de servir volontiers dans l’armée israélienne. De toute évidence, ils avaient un intérêt pour le sort d’Israël qui me manquait, ce qui était un peu mystérieux pour moi. Mais je supposais que leur jugement était fondé ; la guerre était justifiée, contrairement à ce que je considère aujourd’hui comme accaparement de terres. De toute façon, cette guerre a rapidement pris fin.

Peu après avoir obtenu mon diplôme, un ami proche de Dartmouth (juif) et sa femme juive, que je connaissais depuis Mount Hermon, m’ont présenté une de ses camarades de classe à Brandeis. Nous sommes sortis ensemble, sommes tombés amoureux et nous sommes mariés. Bien sûr, ça n’a pas été si simple que ça. À l’époque, il n’était pas facile de trouver un rabbin qui accepterait de célébrer le mariage d’un protestant et d’une juive laïque. Après plusieurs entretiens infructueux, nous avons engagé un rabbin qui était aumônier à Columbia. Nous avons divorcé environ cinq ans plus tard, mais l’échec de notre mariage n’avait rien à voir avec des divergences religieuses, et nous sommes toujours amis.

Au cours des décennies suivantes, j’ai obtenu un doctorat en études américaines et j’ai enseigné la littérature américaine au Connecticut College, puis à l’université Hofstra. En tant que professeur, j’avais de nombreux étudiants et collègues juifs (en particulier à Hofstra) et je m’entendais bien avec eux.

Mais Israël était toujours présent en arrière-plan. J’évitais délibérément d’y réfléchir de manière critique. Je me souviens avoir dit à un ami juif (dont la fille vit à Jérusalem) que je ne « m’intéressais pas » à Israël. J’avais le sentiment que c’était trop « compliqué ». Pas seulement ça, mais aussi source de divisions et de controverses, et je ne voulais pas prendre parti. D’autres questions politiques étaient plus importantes à mes yeux.

Bien sûr, j’étais au courant du mouvement de boycott d’Israël, qui avait rallié de nombreux universitaires, y compris des personnes que j’aimais et admirais. Même si je soutenais le désinvestissement en Afrique du Sud, je me méfiais du boycott d’Israël. Si vous m’aviez posé la question vers 2000, j’aurais répondu : « Pourquoi s’en prendre à Israël ? » Cela sous-entendait que même si le pays pouvait poser problème, il existait d’autres régimes oppressifs dans le monde.



Eh bien, il suffit de dire que ma question a trouvé sa réponse dans la réaction disproportionnée d’Israël à l’attaque du Hamas le 7 octobre. Je n’ai pas besoin de revenir sur les événements des deux dernières années. Les images incessantes de l’assaut génocidaire contre les Gazaouis ont progressivement fait évoluer mon attitude envers Israël, passant de l’indifférence bienveillante de ma jeunesse et de la méfiance prudente de l’âge mûr à une hostilité et une colère croissantes. Cette hostilité s’applique bien sûr non seulement au régime israélien, mais aussi au soutien usaméricain dont il bénéficie. J’ai le sentiment que notre complicité dans cette horreur inflige une blessure morale constante à ceux qui s’y opposent, d’autant plus que nous nous sentons impuissants à y mettre fin.

Je suis hanté par les paroles d’Aaron Bushnell, qui s’est immolé par le feu en signe de protestation : « Beaucoup d’entre nous aiment se demander : « Que ferais-je si j’avais vécu à l’époque de l’esclavage ? Ou du Jim Crow dans le Sud ? Ou de l’apartheid ? Que ferais-je si mon pays commettait un génocide ? » La réponse est : vous le faites. En ce moment même. » Après être resté longtemps inactif, j’ai rejoint Jewish Voice for Peace et je contribue au BDS, des gestes mineurs qui apaisent un peu ma conscience.

Mon attitude envers Israël a donc évolué au fil des décennies, et cette évolution s’est accélérée ces dernières années. Je pense être représentatif d’innombrables autres personnes. En dehors de l’Europe occidentale, Israël est de plus en plus considéré comme une nation paria. Et aux USA, son allié et bailleur de fonds le plus fidèle, les sondages d’opinion montrent un déclin du soutien à Israël.

Dans le même temps, la définition de l’antisémitisme, selon l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, a été élargie de sorte qu’elle s’applique désormais non seulement à la haine du peuple juif, mais aussi aux critiques de la nation israélienne qui me semblent évidentes, justes, légitimes et moralement nécessaires. Après tout, diverses institutions internationales et universitaires habilitées à porter de tels jugements ont conclu qu’Israël est un État d’apartheid qui commet un génocide.

En tant que professeur adjoint en médecine narrative à Columbia, j’ai été consterné par l’acceptation récente par l’université de cette définition élargie de l’antisémitisme, en réponse à la pression exercée par l’administration Trump, qui cherche à punir l’institution pour sa prétendue tolérance à l’égard des manifestations.

Les administrateurs universitaires aiment faire des déclarations telles que « L’antisémitisme n’a pas sa place » dans leurs institutions. Mais ils savent qu’un grand nombre de professeurs et d’étudiants sont antisémites selon la définition qu’ils ont adoptée. Que signifie pour moi, et pour d’autres professeurs comme moi, qui sommes critiques à l’égard d’Israël, d’enseigner dans une institution qui nous qualifie implicitement d’antisémites ? Nous ne serons peut-être pas licenciés, mais nous sommes certainement découragés de nous exprimer.

Cette définition semble regrettable à plusieurs égards. Tout d’abord, elle me semble logiquement erronée, car elle confond les attitudes envers un État ethnique avec les attitudes envers l’ethnie privilégiée par cet État. Cette distinction peut être difficile à faire dans la pratique, mais elle est assez claire sur le plan conceptuel. Comme Caitlin Johnstone aime à le souligner, si les Palestiniens haïssent les Juifs, ce n’est pas à cause de leur religion ou de leur ethnicité, mais parce que l’État juif est leur oppresseur.

Confondre le reproche fait à Israël avec la haine des Juifs peut être un moyen manifestement pratique d’écarter les critiques en diffamant ses adversaires, et cela soutient le discours sur la montée de l’antisémitisme. Mais cela ignore le rôle du génocide commis par Israël dans cette tendance apparente. Outre les actes véritablement antisémites, certaines activités anti-israéliennes ou antisionistes ont été considérées comme antisémites. Si l’antisémitisme a augmenté, ce n’est pas dans un vide historique.

Quoi qu’il en soit, cette définition élargie pourrait finalement s’avérer contre-productive. Effacer la distinction entre l’État d’Israël et les personnes juives risque d’inviter à étendre la haine d’Israël à l’ensemble de la communauté juive. En outre, la définition de l’IHRA risque d’affaiblir ou de supprimer la stigmatisation de l’antisémitisme. Si l’opposition à l’entreprise génocidaire d’Israël fait de moi (et de tant de personnes que j’admire) un antisémite, où est le problème ? Quand j’étais plus jeune, j’aurais été horrifié d’être accusé d’antisémitisme. Aujourd’hui, je peux hausser les épaules.

Enfin, en tant que membre de longue date de l’ACLU, je suis très préoccupé par les implications de cette définition pour la liberté d’expression et la liberté académique. Dans le cours normal des choses, le sujet d’Israël ne serait pas dans mes pensées ni à l’ordre du jour dans ma classe à Columbia. Mais ce sera en quelque sorte l’éléphant dans la pièce, n’est-ce pas ? Je serai hyper conscient de la possibilité que toute allusion à Gaza puisse être signalée comme une menace pour les étudiants juifs. Malheureusement, si moi-même et d’autres critiques d’Israël (dont beaucoup sont eux-mêmes juifs) sommes désormais antisémites, c’est parce qu’Israël et l’IHRA nous ont rendus tels.

NdT

*Voir La définition opérationnelle de l’antisémitisme par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste


 

AMENA EL ASHKAR
Le problème posé par l’analogie faite par le Hamas entre le génocide de Gaza et l’Holocauste

« Ce qu’il [le très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXème siècle] ne pardonne pas à Hitler, ce n’est pas le crime en soi, le crime contre l’homme, ce n’est pas l’humiliation de l’homme en soi, c’est le crime contre l’homme blanc, c’est l’humiliation de l’homme blanc, et d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les Arabes d’Algérie, les coolies de l’Inde et les nègres d’Afrique ».

Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, 1955

Les efforts déployés par le Hamas pour gagner des sympathies occidentales en comparant le génocide de Gaza à l’Holocauste sont compréhensibles, mais en fin de compte à courte vue. Au contraire, replacer le génocide dans le contexte plus large de la violence coloniale pourrait permettre de construire une véritable solidarité.

Amena El Ashkar (bio), Mondoweiss,  29/8/2025

Traduit par Tlaxcala


Des Palestiniens enterrent les corps de 110 personnes tuées par les attaques israéliennes dans une fosse commune au cimetière de Khan Younès, le 22 novembre 2023. Photo Mohammed Talatene/dpa via ZUMA Press APA Images)

Depuis plus de deux ans, les Palestiniens de Gaza déclarent : « Nous sommes en train d’être exterminés ». Ces déclarations ne proviennent pas uniquement des déclarations officielles israéliennes, mais aussi de l’expérience vécue, où les opérations militaires israéliennes ont transformé les corps palestiniens en lieux de violence coloniale extrême. Pourtant, malgré la visibilité des déplacements massifs, des bombardements et de la famine, une grande partie de la communauté internationale reste réticente à qualifier ces actions de génocide.

Dans la pratique, la réalité palestinienne ne devient « légitime » qu’une fois qu’elle a été soumise aux cadres moraux des institutions internationales, qui minimisent souvent l’ampleur de la violence. La reconnaissance fait généralement suite à un long processus : évaluation, vérification, collecte de données et implication d’une autorité « crédible » et « neutre » chargée d’étudier et de qualifier l’événement. Ce n’est qu’alors que la souffrance palestinienne peut acquérir un certain degré de légitimité. En effet, les Palestiniens peuvent mourir sans restriction, mais ils ne sont pas autorisés à nommer leur propre mort sans approbation extérieure.

Pour lutter contre cela, nous avons vu comment des figures de la résistance palestinienne, y compris le Hamas lui-même, ont tenté de contextualiser le génocide à Gaza en utilisant l’une des analogies historiques les plus puissantes du lexique occidental : l’holocauste nazi.

Dans le contexte de la lutte coloniale, il ne s’agit pas simplement d’une question de terminologie, mais d’un défi stratégique.

À première vue, la stratégie médiatique du Hamas consistant à utiliser l’holocauste nazi pendant la Seconde Guerre mondiale semble logique : les porte-parole cherchent à évoquer la mémoire morale occidentale de l’Holocauste et du nazisme, dans l’espoir de mobiliser l’opinion publique des sociétés occidentales afin de faire pression sur les gouvernements pour qu’ils agissent et mettent fin aux souffrances à Gaza.

Pourtant, après plus de deux ans, cet effet ne s’est pas concrétisé. Pourquoi ?

Dans l’imaginaire politique occidental, la Seconde Guerre mondiale est un point de référence moral central, et l’Holocauste en est le cœur. Dans le cadre de la domination épistémique occidentale, ces États ont pu imposer leurs normes éthiques et définir les comportements inacceptables, façonnant ainsi les fondements mêmes du concept d’« humanité ». L’Holocauste n’était pas une anomalie historique ; l’histoire coloniale de ces mêmes États est truffée de génocides et de famines perpétrés contre les peuples colonisés. Ce qui a fait de l’Holocauste un absolu moral, ce n’est pas l’acte de massacre lui-même, mais l’identité du groupe visé : le corps européen. En ce sens, les cadres moraux mondiaux ont été construits sur une base eurocentrique.

En choisissant de présenter les événements de Gaza à travers le prisme de l’Holocauste, le Hamas révèle deux dynamiques : premièrement, la tragédie palestinienne n’est pas présentée comme une expérience autonome, mais plutôt à travers le prisme d’une autre catastrophe, celle que les puissances occidentales ont désignée comme l’archétype de l’atrocité. Cela renforce l’autorité d’un système moral qui fait preuve d’une surdité sélective à la souffrance palestinienne et accorde inévitablement la primauté au traumatisme occidental. Deuxièmement, l’utilisation de cette analogie envoie un message au public occidental : « Croyez-nous, car ce qui nous arrive ressemble à votre propre histoire ». Cela renforce l’idée que la douleur occidentale est la référence en matière de souffrance et que les autres tragédies doivent être comparées à celle-ci pour être considérées comme crédibles. Cette dynamique risque de minimiser l’expérience historique palestinienne en la situant dans l’ordre moral dont elle cherche à se libérer.

La comparaison elle-même pose également un problème structurel. En invoquant l’Holocauste et le nazisme, la guerre de Gaza est placée dans une position perdante, car la comparaison est jugée à l’aune d’un critère conçu pour maintenir l’Holocauste au sommet de la hiérarchie des atrocités. Cela néglige le fait que l’Holocauste occupe une place protégée dans la mémoire collective occidentale, maintenue grâce à des décennies d’investissement dans les musées, les films, la littérature et l’éducation. L’énormité des crimes nazis est ainsi préservée comme inégalée. Dans ce cadre, si la violence à Gaza est perçue comme inférieure à cette norme — par exemple, en l’absence d’images emblématiques de chambres à gaz —, il devient plus facile pour les sceptiques de rejeter l’étiquette de génocide.

De plus, le terme « zio-nazisme » fréquemment utilisé par le Hamas est imprécis. Bien qu’il existe des similitudes, notamment la promotion d’une idéologie de suprématie raciale, le sionisme est un projet colonialiste, ce qui n’était pas le cas du nazisme. Si les deux ont commis des crimes graves, ces crimes diffèrent par leur substance et leur objectif. Les politiques israéliennes à Gaza s’inscrivent davantage dans la continuité historique de la violence coloniale que dans la répétition directe des méthodes nazies. Techniquement et politiquement, cette analogie risque d’occulter la logique structurelle de la violence israélienne et permet à Israël de rejeter l’accusation en discréditant la comparaison.

Lorsque le Hamas a choisi d’utiliser les comparaisons avec l’Holocauste et le nazisme, son public cible était clairement la communauté internationale occidentale. Cela révèle deux problèmes connexes. Le premier est une mauvaise interprétation de la nature structurelle du soutien occidental à Israël, qui semble supposer que la position de l’Occident est motivée par l’ignorance ou l’aveuglement moral, plutôt que par des intérêts stratégiques et coloniaux de longue date qui font d’Israël un allié fonctionnel dans la région. Dans cette optique, le traitement occidental des Palestiniens et de la résistance comme enjeu sécuritaire pourrait être inversé si le public était persuadé de voir Israël sous un angle moral différent, tel que celui de l’Holocauste.

Elle surestime également l’impact probable de la pression publique occidentale sur la politique de l’État, évalue mal les alliances viables et limite ses manœuvres diplomatiques à des cadres fixés par d’autres. Dans un tel contexte, l’analogie avec l’Holocauste ne parvient pas seulement à convaincre, elle signale une posture stratégique sous-jacente qui risque d’entraver la capacité du mouvement à convertir ses gains sur le champ de bataille en avantage politique à long terme.

La résistance et la libération ne consistent pas uniquement à récupérer des terres, mais aussi à récupérer l’imagination, la conscience et le langage. À première vue, parler de décoloniser les cadres de connaissance pendant une guerre d’extermination peut sembler secondaire, mais cela reste essentiel. Ce qui se passe aujourd’hui à Gaza n’est pas un événement exceptionnel, ni ne ressemble à l’Holocauste tel que l’Occident l’a construit dans son imagination morale. Il s’agit plutôt de la continuation d’un long héritage colonial qui a façonné non seulement le destin des Palestiniens, mais aussi celui d’autres peuples du Sud.

Il est essentiel de considérer le présent de Gaza comme s’inscrivant dans ce continuum colonial plus large afin de construire de nouvelles alliances dans un ordre géopolitique en mutation. L’histoire coloniale de la région offre de nombreux cadres comparatifs pour dénoncer les atrocités, sans renforcer les régimes moraux qui, après plus de deux ans, n’ont apporté que des résultats diplomatiques et politiques très limités à la lutte palestinienne.

La manière dont nous nommons ce qui se passe n’est pas un acte symbolique ; elle façonne fondamentalement la trajectoire de la réflexion stratégique et est un indicateur de la façon dont nous percevons les choses et dont nous pensons être perçus par les autres. Décoloniser les cadres à travers lesquels nous nous exprimons n’est donc pas seulement un objectif symbolique, mais une voie stratégique vers une pratique politique et diplomatique capable de traduire les gains tactiques sur le terrain en victoires stratégiques à long terme, en utilisant des termes que nous définissons nous-mêmes, plutôt que ceux imposés de l’extérieur.

AMENA EL ASHKAR
El problema con la equiparación por Hamás del genocidio de Gaza con el Holocausto

 “Lo que [el distinguido, humanista y cristiano burgués del siglo XX] no perdona a Hitler no es el crimen en sí mismo, el crimen contra el hombre, no es la humillación del hombre en sí misma, es el crimen contra el hombre blanco, es la humillación del hombre blanco, y haber aplicado a Europa procedimientos colonialistas que hasta entonces solo se aplicaban a los árabes de Argelia, los coolies de la India y los negros de África”.

Aimé Césaire, Discurso sobre el colonialismo, 1955

 El intento de Hamás de ganarse la simpatía occidental comparando el genocidio de Gaza con el Holocausto es comprensible, pero en última instancia es miope. En cambio, situar el genocidio en el contexto más amplio de la violencia colonial podría generar una solidaridad genuina.

Amena El Ashkar (bio), Mondoweiss,, 29-8-2025

Traducido por Tlaxcala

Los palestinos entierran los cuerpos de 110 personas asesinadas por los ataques israelíes en una fosa común en el cementerio de Jan Yunis, el 22 de noviembre de 2023. Foto Mohammed Talatene/dpa vía ZUMA Press APA Images

Durante más de dos años, los palestinos de Gaza han estado declarando: “Nos están exterminando”. Estas declaraciones no surgieron únicamente de las declaraciones oficiales israelíes, sino de la experiencia vivida, en la que las operaciones militares israelíes han convertido los cuerpos palestinos en escenarios de violencia colonial extrema. Sin embargo, a pesar de la visibilidad de los desplazamientos masivos, los bombardeos y la hambruna, gran parte de la comunidad internacional sigue mostrándose reacia a calificar estas acciones como genocidio.

En la práctica, la realidad palestina solo se vuelve “legítima” una vez que pasa por los marcos morales de las instituciones internacionales, marcos que a menudo subestiman la magnitud de la violencia. El reconocimiento suele seguir un largo proceso: evaluación, verificación, recopilación de datos y la participación de una autoridad “creíble” y “neutral” para estudiar y calificar el evento. Solo entonces el sufrimiento palestino puede adquirir un cierto grado de legitimidad. En efecto, los palestinos pueden morir sin restricciones, pero no se les permite nombrar sus propias muertes sin aprobación externa.

En un esfuerzo por combatir esto, hemos visto cómo figuras de la resistencia palestina, incluido el propio Hamás, han intentado contextualizar el genocidio en Gaza utilizando una de las analogías históricas más potentes del léxico occidental: el holocausto nazi.

En el contexto de la lucha colonial, no se trata simplemente de una cuestión de terminología, sino de un reto estratégico.

A primera vista, la estrategia mediática de Hamás de utilizar el holocausto nazi durante la Segunda Guerra Mundial parece lógica: los portavoces pretenden evocar la memoria moral occidental del Holocausto y el nazismo, con la esperanza de movilizar a la opinión pública de las sociedades occidentales de manera que presione a los gobiernos para que actúen y pongan fin al sufrimiento en Gaza.

Sin embargo, después de más de dos años, este efecto no se ha materializado. ¿Por qué?

En el imaginario político occidental, la Segunda Guerra Mundial es un punto de referencia moral central, y el Holocausto se encuentra en su núcleo. En el marco del dominio epistémico occidental, estos Estados han podido imponer sus normas éticas y definir comportamientos inaceptables, configurando los fundamentos mismos del concepto de “humanidad”. El Holocausto no fue una anomalía histórica; las historias coloniales de esos mismos Estados están repletas de genocidios y hambrunas perpetrados contra los pueblos colonizados. Lo que convirtió al Holocausto en un absoluto moral no fue el acto de matanza masiva en sí mismo, sino la identidad del grupo objetivo: personas europeas. En este sentido, los marcos morales globales se han construido sobre una base eurocéntrica.

Al optar por enmarcar los acontecimientos de Gaza a través del Holocausto, Hamás revela dos dinámicas: en primer lugar, que la tragedia palestina no se presenta como una experiencia independiente, sino a través del prisma de otra catástrofe, la que las potencias occidentales han designado como el arquetipo de la atrocidad. Esto refuerza la autoridad de un sistema moral que es selectivamente sordo al sufrimiento palestino y otorga inevitablemente primacía al trauma occidental. En segundo lugar, el uso de esta analogía envía un mensaje al público occidental: “Creednos porque lo que nos está sucediendo se asemeja a vuestra propia historia”. Esto refuerza la idea de que el dolor occidental es el punto de referencia para todo sufrimiento, y que otras tragedias deben compararse con él para ser consideradas creíbles. Esta dinámica corre el riesgo de socavar la experiencia histórica palestina al situarla dentro del orden moral del que busca liberarse.

También existe un problema estructural en la comparación en sí misma. Al invocar el Holocausto y el nazismo, la guerra de Gaza se coloca en una posición insuperable, porque la comparación se juzga según un criterio diseñado para mantener el Holocausto en la cima de la jerarquía de las atrocidades. Esto pasa por alto el hecho de que el Holocausto ocupa un espacio protegido en la memoria colectiva occidental, mantenido a través de décadas de inversión en museos, películas, literatura y educación. La enormidad de los crímenes nazis se conserva así como inigualable. En este marco, si la violencia en Gaza se percibe como inferior a ese estándar —por ejemplo, al carecer de las imágenes icónicas de las cámaras de gas—, a los escépticos les resulta más fácil rechazar la etiqueta de genocidio.

Además, el término “sionazismo” que utiliza con frecuencia Hamás es impreciso. Si bien existen similitudes, como el avance de una ideología de supremacía racial, el sionismo es un proyecto colonialista, y el nazismo no lo era. Aunque ambos han cometido graves crímenes, estos difieren en su esencia y propósito. Las políticas israelíes en Gaza se entienden mejor como parte de una larga continuidad histórica de violencia colonialista, y no como una repetición directa de los métodos nazis. Técnica y políticamente, la analogía corre el riesgo de ocultar la lógica estructural de la violencia israelí y permite a Israel desestimar la acusación desacreditando la comparación.

Cuando Hamás decidió emplear las comparaciones con el Holocausto y los nazis, su público objetivo era claramente la comunidad internacional occidental. Esto revela dos problemas relacionados. El primero es una interpretación errónea de la naturaleza estructural del apoyo occidental a Israel, que parece suponer que la posición de Occidente está motivada por la ignorancia o la ceguera moral, en lugar de por intereses estratégicos y coloniales de larga data que posicionan a Israel como un aliado funcional en la región. Desde este punto de vista, el trato occidental hacia los palestinos y la resistencia como cuestión de seguridad podría revertirse si se convenciera al público de que vea a Israel a través de un marco moral diferente, como el del Holocausto.

También sobreestima el posible impacto de la presión pública occidental sobre la política estatal, juzga erróneamente qué alianzas son viables y limita sus maniobras diplomáticas a los marcos establecidos por otros. En tal contexto, la analogía con el Holocausto no solo no logra persuadir, sino que señala una postura estratégica subyacente que corre el riesgo de obstaculizar la capacidad del movimiento para convertir las ganancias en el campo de batalla en una ventaja política a largo plazo.

La resistencia y la liberación no se refieren únicamente a la recuperación de tierras, sino también a la recuperación de la imaginación, la conciencia y el lenguaje. A primera vista, hablar de descolonizar los marcos de conocimiento durante una guerra de exterminio puede parecer secundario, pero sigue siendo esencial. Lo que está sucediendo hoy en Gaza no es un acontecimiento excepcional, ni se asemeja al Holocausto tal y como lo ha construido Occidente en su imaginación moral. Más bien, es la continuación de un largo legado colonial, que ha moldeado no solo el destino de los palestinos, sino también el de otros pueblos del Sur Global.

Ver el presente de Gaza como parte de este continuo colonial más amplio es esencial para construir nuevas alianzas en un orden geopolítico cambiante. La propia historia colonial de la región ofrece amplios marcos comparativos para exponer las atrocidades, sin reforzar los regímenes morales que, después de más de dos años, han dado resultados diplomáticos y políticos muy limitados para la lucha palestina.

La forma en que nombramos lo que está sucediendo no es un acto simbólico; determina fundamentalmente la trayectoria del pensamiento estratégico y es un indicador de cómo percibimos las cosas y cómo creemos que nos perciben los demás. Descolonizar los marcos a través de los cuales nos expresamos no es, por lo tanto, un objetivo meramente simbólico, sino un camino estratégico hacia una práctica política y diplomática capaz de traducir las ganancias tácticas sobre el terreno en victorias estratégicas a largo plazo, utilizando términos que nosotros mismos definimos, en lugar de los impuestos desde fuera.

AMENA EL ASHKAR
Das Problem mit der Gleichsetzung durch die Hamas des Völkermords in Gaza mit dem Holocaust

 „Was [der sehr vornehme, sehr humanistische, sehr christliche Bourgeois des 20. Jahrhunderts] Hitler nicht verzeiht, ist nicht das Verbrechen an sich, das Verbrechen gegen den Menschen, es ist nicht die Erniedrigung des Menschen an sich, es ist das Verbrechen gegen den weißen Menschen, es ist die Erniedrigung des weißen Menschen und die Anwendung kolonialistischer Methoden in Europa, die bisher nur für die Araber in Algerien, die Kulis in Indien und die Neger in Afrika galten.“

Aimé Césaire, Über den Kolonialismus, 1955


Das Bestreben der Hamas, durch den Vergleich des Völkermords in Gaza mit dem Holocaust westliche Sympathie zu gewinnen, ist verständlich, aber letztlich kurzsichtig. Stattdessen könnte die Einordnung des Völkermords in den größeren Kontext kolonialer Gewalt echte Solidarität schaffen.

Amena El Ashkar (Bio), Mondoweiss, 29.8.2025
Übersetzt von
Tlaxcala

 Palästinenser begraben die Leichen von 110 Menschen, die bei israelischen Angriffen getötet wurden, in einem Massengrab auf dem Friedhof von Khan Yunis, 22. November 2023. Foto Mohammed Talatene/dpa via ZUMA Press APA Images

Seit über zwei Jahren erklären die Palästinenser im Gazastreifen: „Wir werden ausgerottet.“ Diese Erklärungen stammen nicht nur aus offiziellen israelischen Verlautbarungen, sondern aus gelebter Erfahrung, wo israelische Militäroperationen palästinensische Körper zu Schauplätzen extremer kolonialer Gewalt gemacht haben. Doch trotz der Sichtbarkeit von Massenvertreibungen, Bombardierungen und Hunger zögert ein Großteil der internationalen Gemeinschaft, diese Handlungen als Völkermord einzustufen.

In der Praxis wird die palästinensische Realität erst dann als „legitim“ anerkannt, wenn sie die moralischen Rahmenbedingungen internationaler Institutionen durchlaufen hat – Rahmenbedingungen, die das Ausmaß der Gewalt oft unterschätzen. Die Anerkennung erfolgt in der Regel nach einem langwierigen Prozess: Bewertung, Überprüfung, Datenerhebung und Einbeziehung einer „glaubwürdigen“, „neutralen“ Behörde, die das Ereignis untersucht und bewertet. Erst dann kann das Leiden der Palästinenser ein gewisses Maß an Legitimität erlangen. Tatsächlich dürfen Palästinenser ohne Einschränkung sterben, aber sie dürfen ihren eigenen Tod nicht ohne externe Zustimmung benennen.

Um dem entgegenzuwirken, haben palästinensische Widerstandskämpfer, darunter auch die Hamas selbst, versucht, den Völkermord in Gaza in einen Kontext zu stellen, indem sie eine der wirkungsvollsten historischen Analogien im westlichen Sprachgebrauch heranzogen: den Holocaust der Nazis.

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Im Kontext des Kolonialkampfes ist dies nicht nur eine Frage der Terminologie, sondern eine strategische Herausforderung.

Auf den ersten Blick erscheint die Medienstrategie der Hamas, den Holocaust der Nazis während des Zweiten Weltkriegs zu nutzen, logisch: die Sprecher wollen die moralische Erinnerung des Westens an den Holocaust und den Nationalsozialismus wachrufen, in der Hoffnung, die öffentliche Meinung in den westlichen Gesellschaften so zu mobilisieren, dass die Regierungen unter Druck gesetzt werden, zu handeln und das Leiden in Gaza zu beenden.

Doch nach mehr als zwei Jahren ist dieser Effekt nicht eingetreten. Warum?

In der politischen Vorstellung des Westens ist der Zweite Weltkrieg ein zentraler moralischer Bezugspunkt, und der Holocaust steht im Mittelpunkt. Im Rahmen der epistemischen Dominanz des Westens konnten diese Staaten ihre ethischen Standards durchsetzen und inakzeptables Verhalten definieren, wodurch sie die Grundlagen des Konzepts der „Menschlichkeit“ geprägt haben. Der Holocaust war keine historische Anomalie; die Kolonialgeschichte derselben Staaten ist voller Völkermorde und Hungersnöte, die an den kolonialisierten Völkern verübt wurden. Was den Holocaust zu einem moralischen Absolutum machte, war nicht die Tat des Massenmords an sich, sondern die Identität der Zielgruppe – die europäische Bevölkerung. In diesem Sinne wurden globale moralische Rahmenwerke auf einer eurozentrischen Grundlage errichtet.

Indem die Hamas die Ereignisse in Gaza durch den Holocaust einrahmt, offenbart sie zwei Dynamiken: Erstens, dass die palästinensische Tragödie nicht als eigenständige Erfahrung dargestellt wird, sondern durch die Linse einer anderen Katastrophe – einer, die die westlichen Mächte als den Inbegriff von Grausamkeit bezeichnet haben. Dies stärkt die Autorität eines Moralsystems, das selektiv taub für das Leiden der Palästinenser ist und unvermeidlich dem westlichen Trauma Vorrang einräumt. Zweitens sendet die Verwendung dieser Analogie eine Botschaft an das westliche Publikum: „Glaubt uns, denn was uns widerfährt, ähnelt eurer eigenen Geschichte.“ Dies verstärkt die Vorstellung, dass westliches Leid der Maßstab für alles Leiden ist und dass andere Tragödien einen Vergleich damit erfordern, um als glaubwürdig zu gelten. Diese Dynamik birgt die Gefahr, die historische Erfahrung der Palästinenser zu untergraben, indem sie in die moralische Ordnung eingeordnet wird, aus der sie sich zu befreien versuchen.

Auch der Vergleich selbst weist ein strukturelles Problem auf. Durch die Beschwörung des Holocaust und des Nationalsozialismus wird der Krieg in Gaza in eine ausweglose Position gebracht, da der Vergleich anhand eines Maßstabs beurteilt wird, der darauf ausgelegt ist, den Holocaust an der Spitze der Hierarchie der Gräueltaten zu halten. Dabei wird übersehen, dass der Holocaust einen geschützten Platz im kollektiven Gedächtnis des Westens einnimmt, der durch jahrzehntelange Investitionen in Museen, Filme, Literatur und Bildung aufrechterhalten wird. Die Ungeheuerlichkeit der Nazi-Verbrechen wird so als unübertroffen bewahrt. In diesem Rahmen wird es für Skeptiker leichter, die Bezeichnung „Völkermord” abzulehnen, wenn die Gewalt in Gaza als unter diesem Standard liegend wahrgenommen wird – zum Beispiel weil es keine ikonischen Bilder von Gaskammern gibt.

Darüber hinaus ist der von der Hamas häufig verwendete Begriff „Zionazismus” ungenau. Zwar gibt es Ähnlichkeiten, darunter die Förderung einer Ideologie der rassischen Überlegenheit, doch ist der Zionismus ein Siedlerkolonialprojekt, während der Nationalsozialismus dies nicht war. Beide haben zwar schwere Verbrechen begangen, doch unterscheiden sich diese Verbrechen in ihrem Wesen und ihrem Zweck. Die israelische Politik in Gaza lässt sich am besten als Teil einer längeren historischen Kontinuität kolonialistischer Gewalt verstehen und nicht als direkte Wiederholung nationalsozialistischer Methoden. Technisch und politisch gesehen birgt diese Analogie die Gefahr, die strukturelle Logik der israelischen Gewalt zu verschleiern, und ermöglicht es Israel, die Anschuldigung durch Diskreditierung des Vergleichs abzuweisen.

Als die Hamas sich dafür entschied, Vergleiche mit dem Holocaust und den Nazis anzustellen, war ihr Zielpublikum eindeutig die westliche internationale Gemeinschaft. Dies offenbart zwei miteinander verbundene Probleme. Das erste ist eine Fehlinterpretation der strukturellen Natur der westlichen Unterstützung für Israel – offenbar wird davon ausgegangen, dass die Position des Westens eher auf Unwissenheit oder moralischer Blindheit beruht als auf langjährigen strategischen und kolonialen Interessen, die Israel als funktionalen Verbündeten in der Region positionieren. Nach dieser Ansicht könnte die westliche Behandlung der Palästinenser und des Widerstands als Sicherheitsproblem umgekehrt werden, wenn die Öffentlichkeit davon überzeugt würde, Israel durch einen anderen moralischen Rahmen zu betrachten, beispielsweise den des Holocaust.

Außerdem wird die wahrscheinliche Wirkung des öffentlichen Drucks des Westens auf die staatliche Politik überschätzt, es wird falsch eingeschätzt, welche Allianzen realisierbar sind, und das diplomatische Manövrieren wird auf von anderen festgelegte Rahmenbedingungen beschränkt. In einem solchen Kontext ist die Holocaust-Analogie nicht nur nicht überzeugend, sondern signalisiert auch eine zugrunde liegende strategische Haltung, die die Fähigkeit der Bewegung gefährdet, Erfolge auf dem Schlachtfeld in langfristige politische Vorteile umzuwandeln.

Bei Widerstand und Befreiung geht es nicht nur um die Rückeroberung von Land, sondern ebenso um die Rückeroberung von Vorstellungskraft, Bewusstsein und Sprache. Auf den ersten Blick mag es zweitrangig erscheinen, während eines Vernichtungskrieges von der Dekolonisierung von Wissensrahmen zu sprechen – dennoch ist dies von entscheidender Bedeutung. Was heute in Gaza geschieht, ist kein Ausnahmeereignis und ähnelt auch nicht dem Holocaust, wie ihn der Westen in seiner moralischen Vorstellung konstruiert hat. Vielmehr ist es die Fortsetzung eines langen kolonialen Erbes – eines Erbes, das nicht nur das Schicksal der Palästinenser, sondern auch das anderer Völker im globalen Süden geprägt hat.

Die Gegenwart Gazas als Teil dieses umfassenderen kolonialen Kontinuums zu betrachten, ist für den Aufbau neuer Allianzen in einer sich wandelnden geopolitischen Ordnung von entscheidender Bedeutung. Die koloniale Geschichte der Region selbst bietet reichlich Vergleichsmöglichkeiten, um Gräueltaten aufzudecken, ohne moralische Regime zu verstärken, die – nach mehr als zwei Jahren – nur sehr begrenzte diplomatische und politische Erfolge für den palästinensischen Kampf gebracht haben.

Die Art und Weise, wie wir das Geschehen benennen, ist kein symbolischer Akt; sie prägt grundlegend die Richtung des strategischen Denkens und ist ein Indikator dafür, wie wir die Dinge wahrnehmen und wie wir glauben, von anderen wahrgenommen zu werden. Die Dekolonisierung der Rahmenbedingungen, durch die wir sprechen, ist daher nicht nur ein symbolisches Ziel, sondern ein strategischer Weg zu einer politischen und diplomatischen Praxis, die in der Lage ist, taktische Gewinne vor Ort in langfristige strategische Siege umzusetzen – unter Verwendung von Begriffen, die wir selbst definieren, anstatt solcher, die uns von außen aufgezwungen werden.

AMENA EL ASHKAR
The problem with Hamas equating the Gaza genocide to the Holocaust

“What [the highly distinguished, highly humanistic, highly Christian bourgeois of the 20th century] cannot forgive Hitler for is not the crime itself, the crime against man, it is not the humiliation of man per se, it is the crime against white man, it is the humiliation of white man, and of having applied to Europe colonialist methods that until then had only been used on the Arabs of Algeria, the coolies of India and the negroes of Africa.”

Aimé Césaire, Discourse on Colonialism, 1955

Hamas’s effort to gain Western sympathy by comparing the Gaza genocide to the Holocaust is understandable but ultimately shortsighted. Instead, putting the genocide in the larger context of colonial violence could build genuine solidarity.

Amena El Ashkar (bio), Mondoweiss, 29/8/2025

 

Palestinians bury the bodies of 110 people killed by Israeli attacks in a mass grave in the Khan Younis cemetery, November 22, 2023. (Photo: © Mohammed Talatene/dpa via ZUMA Press APA Images)

For over two years, Palestinians in Gaza have been declaring: “We are being exterminated.” These declarations did not emerge from official Israeli statements alone, but from lived experience, where Israeli military operations have turned Palestinian bodies into sites of extreme colonial violence. Yet, despite the visibility of mass displacement, bombardment, and starvation, much of the international community remains reluctant to categorize these actions as genocide.

In practice, Palestinian reality becomes “legitimate” only once it passes through the moral frameworks of international institutions—frameworks that often understate the scale of the violence. Recognition usually follows a lengthy process: assessment, verification, data collection, and the involvement of a “credible,” “neutral” authority to study and label the event. Only then can Palestinian suffering acquire a certain degree of legitimacy. In effect, Palestinians may die without restriction, but they are not permitted to name their own deaths without external approval.

In an effort to combat this, we have seen how Palestinian resistance figures, including Hamas itself, have attempted to contextualize the genocide in Gaza by using one of the most potent historical analogies in the Western lexicon: the Nazi holocaust.

In the context of colonial struggle, this is not simply a matter of terminology—it is a strategic challenge.

At first glance, Hamas’s media strategy to use the Nazi holocaust during World War II appears logical: spokespersons aim to evoke the Western moral memory of the Holocaust and Nazism, hoping to mobilize public opinion in Western societies in a way that would pressure governments to act and end the suffering in Gaza.

Yet, after more than two years, this effect has not materialized. Why?

In the Western political imagination, the Second World War is a central moral reference point, and the Holocaust lies at its core. Within the framework of Western epistemic dominance, these states have been able to impose their ethical standards and define unacceptable behavours, shaping the very foundations of the concept of “humanity.” The Holocaust was not a historical anomaly; the same states’ colonial histories are replete with genocides and famines perpetrated against colonized peoples. What rendered the Holocaust a moral absolute was not the act of mass killing itself, but the identity of the targeted body — the European body. In this sense, global moral frameworks have been built on a Eurocentric foundation.

By choosing to frame the events in Gaza through the Holocaust, Hamas reveals two dynamics: first, that the Palestinian tragedy is not being presented as a self-standing experience but rather through the lens of another catastrophe — one that Western powers have designated as the archetype of atrocity. This reinforces the authority of a moral system that is selectively deaf to Palestinian suffering and inevitably grants primacy to Western trauma. Second, the use of this analogy sends a message to Western audiences: “Believe us because what is happening to us resembles your own history.” This reinforces the idea that Western pain is the benchmark for all suffering, and that other tragedies require comparison to it to be deemed credible. This dynamic risks undermining the Palestinian historical experience by situating it within the moral order from which it seeks to break free.

There is also a structural problem in the comparison itself. By invoking the Holocaust and Nazism, the Gaza war is placed in an unwinnable position, because the comparison is judged against a metric designed to keep the Holocaust at the top of the hierarchy of atrocities. This overlooks the fact that the Holocaust occupies a protected space in Western collective memory, one maintained through decades of investment in museums, films, literature, and education. The enormity of Nazi crimes is thus preserved as unmatched. In this framework, if the violence in Gaza is perceived as falling short of that standard — for example, lacking the iconic imagery of gas chambers — it becomes easier for skeptics to reject the label of genocide.

Furthermore, the term “Zio-Nazism” frequently used by Hamas is imprecise. While similarities exist, including advancing an ideology of racial supremacy, Zionism is a settler colonial project, and Nazism was not. While both have committed grave crimes, these crimes differ in substance and purpose. Israeli policies in Gaza are best understood as part of the longer historical continuum of settler-colonial violence, not as a direct iteration of Nazi methods. Technically and politically, the analogy risks obscuring the structural logics of Israeli violence and allows Israel to dismiss the charge by discrediting the comparison.

When Hamas chose to employ the Holocaust and Nazi comparisons, its intended audience was clearly the Western international community. This reveals two related problems. The first is a misreading of the structural nature of Western support for Israel — seemingly assuming that the West’s position is driven by ignorance or moral blindness, rather than by long-standing strategic and colonial interests that position Israel as a functional ally in the region. In this view, Western securitization of Palestinians and of the resistance could be reversed if the public were persuaded to see Israel through a different moral frame, such as that of the Holocaust.

It also overestimates the likely impact of Western public pressure on state policy, misjudges which alliances are viable, and constrains its diplomatic maneuvering to frameworks set by others. In such a context, the Holocaust analogy does not merely fail to persuade — it signals an underlying strategic posture that risks hindering the movement’s ability to convert battlefield gains into long-term political advantage.

Resistance and liberation are not solely about reclaiming land; they are equally about reclaiming imagination, consciousness, and language. At first glance, speaking of decolonizing knowledge frameworks during a war of extermination may seem secondary — yet it remains essential. What is happening in Gaza today is not an exceptional event, nor does it resemble the Holocaust as the West has constructed it in its moral imagination. Rather, it is the continuation of a long colonial legacy — one that has shaped not only the fate of Palestinians but that of other peoples across the Global South.

Seeing Gaza’s present as part of this broader colonial continuum is essential for building new alliances in a shifting geopolitical order. The region’s own colonial history offers ample comparative frames to expose atrocity, without reinforcing moral regimes that — after more than two years — have yielded very limited diplomatic and political returns for the Palestinian struggle.

The way we name what is happening is not a symbolic act; it fundamentally shapes the trajectory of strategic thinking and is an indicator of how we perceive things and how we think we are perceived by others. Decolonizing the frameworks through which we speak is therefore not merely a symbolic goal, but a strategic pathway toward a political and diplomatic practice capable of translating tactical gains on the ground into long-term strategic victories — using terms we define ourselves, rather than those imposed from outside.