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21/09/2023

GIDEON LEVY
Shira Eting, une tueuse bien sous tous rapports
La réserviste israélienne “parfaite” de l’émission “60 Minutes” a du sang d’enfants palestiniens sur les mains

Gideon Levy, Haaretz, 20/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

C’est la plus belle Israélienne que l’on puisse imaginer, tout ce que la Terre d’Israël a de bon et de beau en une seule personne. Élevée à Maccabim par un père pilote et une mère psychologue, elle est pilote d’hélicoptère de combat. Elle a étudié à Oxford et est directrice de Vintage Investment Partners [un fonds d’investissement gérant 3,5 milliards de dollars]. Elle a dirigé l’académie prémilitaire de Bnei Zion après la tragédie de 2018 au cours de laquelle neuf étudiants ont trouvé la mort dans une crue soudaine, et elle a été consultante stratégique chez McKinsey.

Shira en action (de protestation). Capture d’écran de 60 Minutes

C’est le non-sionisme le plus sioniste qui soit. Elle a 36 ans, une femme et une fille [et un chien]. Si l’on demandait à l’intelligence artificielle de trouver une femme israélienne belle et “de qualité”, on obtiendrait Shira Eting. Aujourd’hui, elle est aussi le beau visage de la protestation - une pilote et une directrice. Dans la rue Kaplan, elle a enflammé les masses : « Au moment où ils ont essayé de nous voler nos valeurs les plus importantes, nous nous sommes lancés dans la lutte de notre vie. Notre caddie est plein de liberté et d’égalité des droits », a-t-elle lancé sous les applaudissements. Comme ce public aime entendre de si belles choses sur lui-même, sur les combattants de la liberté et de l’égalité, et ce de la bouche d’une séduisante pilote de combat.

La semaine dernière, toute cette beauté a également été exposée au monde. Vêtue du T-shirt kaki de Frères et Sœurs d’armes, une organisation qui lutte pour la démocratie en Israël, la major réserviste Eting a expliqué dans un anglais soigné et avec des mots mesurés à Lesley Stahl, lors de l’émission e CBS 60 Minutes, la raison d’être de la protestation : « Si vous voulez que les pilotes puissent voler et tirer des bombes et des missiles sur des maisons en sachant qu’ils risquent de tuer des enfants, il faut qu’ils aient la plus grande confiance dans les personnes qui prennent ces décisions ».

Allez à 9:19 pour entendre la phrase fatale de la major

Cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu un moment aussi succinct, l’essence de la gauche sioniste distillée en une seule phrase. Nous continuerons à tuer des enfants, mais seulement sous les ordres de gens à nous. Nous continuerons à tuer des enfants, mais seulement si Benny Gantz et Yair Lapid nous l’ordonnent. Ce sont des personnes en qui nous avons confiance, sous leur autorité, il sera moral et conforme aux principes de tuer des enfants. Il est impensable de tuer des enfants sous Benjamin Netanyahou, qui est, après tout, opposé à notre caddie qui regorge de tant de valeurs. Si Gantz-Lapid nous ordonnent de tuer des enfants, comme ils l’ont fait auparavant, alors les pilotes se présenteront au travail et le refus courageux et fondé sur des principes de servir si la norme de raisonnabilité est révoquée sera oublié comme s’il n’avait jamais existé.

Haut du formulaire

Bas du formulaiLa major Eting enfilera sa combinaison de vol, mettra son casque, montera dans son hélicoptère de combat perfectionné, qui peut diriger une bombe sur un lit superposé dans une chambre d’enfant, et bombardera entre la ville de Gaza et Rafah. Ce n’est pas seulement du sionisme, c’est aussi du féminisme israélien, bientôt dans l’unité d’opérations spéciales Sayeret Matkal, sur ordre de la Cour suprême et du chef d’état-major.

La prochaine fois qu’Eting tuera des enfants, elle le fera involontairement, bien sûr. C’est une pilote qui a une conscience. Certains seront tués par erreur et d’autres parce qu’elle n’avait pas d’autre choix. L’unité du porte-parole des forces de défense israéliennes publiera une vidéo montrant qu’Eting s’est abstenue de bombarder une maison en raison de la présence d’enfants.

Lorsque la prochaine guerre sera terminée, la major Eting viendra à nouveau sur la place de la ville et parlera avec passion de valeurs, de liberté et d’égalité. Elle sera alors à nouveau interviewée par Stahl, qui a été émue aux larmes par cette pilote pleine de principes, et lui dira combien il est plus facile de tuer des enfants sous un gouvernement de centre-gauche. Lorsqu’il ordonne aux pilotes de bombarder, ils le font sans sourciller, comme ils l’ont fait lors de l’opération "Plomb durci" (344 enfants tués) et de l’opération "Bordure protectrice" (518 enfants, dont 180 âgés de 5 ans ou moins).

Qui a tué les 180 jeunes enfants ? Eting et ses camarades. Ils l’ont fait lors de l’opération Bordure protectrice, sous la direction du Premier ministre Benjamin Netanyahu, du ministre de la Défense Moshe Ya’alon et du chef d’État-major Benny Gantz, et lors de l’opération Plomb durci, sous la direction du Premier ministre Ehud Olmert, du ministre de la Défense Ehud Barak et du chef d’État-major Gabi Ashkenazi. Cinq des six commandants de ces deux infamies, qui comptent parmi les attaques les plus barbares d’Israël, sont aujourd’hui à la tête de la protestation démocratique d’Eting. Sur leurs ordres, uniquement sur les leurs, elle tuera à nouveau des enfants. C’est ce qu’elle a dit aux téléspectateurs de “60 Minutes”, et elle est la plus belle incarnation d’Israël.

 

GIDEON LEVY
Shira Eting, a principled killer
The ‘Perfect’ Israeli Reservist From ‘60 Minutes’ Has Palestinian Children’s Blood on Her Hands

Gideon Levy, Haaretz, 20/9/2023

She is the most beautiful Israeli you can imagine, all of the good and beautiful Land of Israel in one person. Raised in Maccabim by a pilot father and a psychologist mother, she is a combat helicopter pilot. She studied at Oxford and is a principal at Vintage Investment Partners [an investment fund with $3.5 billion under management]. She headed the Bnei Zion premilitary academy after the 2018 tragedy in which nine students died in a flash flood, and she was a strategic consultant at McKinsey.

Shira in (protest) action. Screenshot from 60 Minutes

It’s the most Zionist non-Zionism possible. She is 36, with a wife and a daughter [and a dog]. If you asked artificial intelligence for a beautiful, “quality” Israeli woman, you’d get Shira Eting. Now she is also the beautiful face of the protest – a pilot and a principal. At Kaplan Street she swept up the masses: “The moment they tried to rob us of our most important values, we embarked on the struggle of our lives. Our cart is full of freedom and equal rights,” she said to the sound of cheers. How that audience loves to hear such nice things about themselves, the fighters for freedom and equality, and that from the mouth of an attractive combat pilot.


 Last week all this beauty was also exposed to the world. In the military-like khaki T-shirts of Brothers and Sisters in Arms, an organization that is fighting for democracy in Israel, Maj. (res.) Eting explained in polished English and measured words to Lesley Stahl on the U.S. show “60 Minutes” what the protest is all about: “If you want pilots to be able to fly, and shoot bombs and missiles into houses knowing they might be killing children, they must have the strongest confidence in the people making those decisions.”

Go to 9:19 to hear Maj. (res.) Eting's statement

It’s been a long time since we’ve had such a succinct moment, the essence of the Zionist left distilled into in a single sentence. We will continue to kill children, but only under our own people. We will continue to kill children, only if Benny Gantz and Yair Lapid order us to do so. They are people in whom we have confidence, under them it will be principled and moral to kill children. Killing children under Benjamin Netanyahu is unthinkable; he is, after all, opposed to our cart that is bursting with so many values. If Gantz-Lapid order us to kill children, as they have before, then the pilots will report for duty and the courageous and principled refusal to serve if the reasonableness standard is revoked will be forgotten as though it never existed.

Maj. Eting will put on her flight suit, don her helmet, climb into her advanced combat helicopter, which can direct a bomb at a bunk bed in a children’s bedroom, and bomb between Gaza City and Rafah. This is not only Zionism, it is also Israeli feminism, soon in the Sayyeret Matkal special operations unit, by order of the Supreme Court and the chief of staff.

The next time Eting kills children she will do it unintentionally, of course. She is a pilot with a conscience. Some will be killed by mistake and some because she had no alternative. The Israel Defense Forces Spokesperson’s Unit will post a video showing that Eting refrained from bombing a home due to the presence of children.

When the next war is over Maj. Eting will again come to the city square and speak passionately about values, freedom and equality. Then she will be interviewed again by Stahl, who was moved to tears by the principled pilot, and will tell her how much easier it is to kill children under a center-left government. When it orders pilots to bomb, they will do so without batting an eyelash, as they did in Operation Cast Lead (344 children killed) and in Operation Protective Edge (518 children, 180 of them 5 or younger).

Who killed the 180 young children? Eting and her comrades. They did so in Protective Edge under Prime Minister Benjamin Netanyahu, Defense Minister Moshe Ya’alon and Chief of Staff Benny Gantz and in Cast Lead under Prime Minister Ehud Olmert, Defense Minister Ehud Barak and Chief of Staff Gabi Ashkenazi. Five of the six commanders of those two disgraces, among Israel’s most barbaric attacks, are now leaders of Eting’s democratic protest. On their orders, only theirs, she will again kill children. That is what she told the viewers of “60 Minutes,” and she is the most beautiful embodiment of Israel.

Colombie : après l’explosion sociale de 2021, construire un autre monde en restant autonomes
Plongée dans l’autre Bogotá avec Raúl Zibechi

 Raúl Zibechi nous emmène dans les banlieues de la capitale colombienne, où, depuis l’explosion sociale de 2021, des centaines d’initiatives collectives fleurissent. Ci-dessous ses 3 articles, publiés par le site ouèbe mexicain desInformémonos et traduits par Fausto Giudice, Tlaxcala

Raúl Zibechi
Bogotá I. El Trébol, un espace de résistance dans la mégapole,
12/9/2023
Bogotá II. Décoloniser l’art,
15/9/2023

 Bogotá III. Ce que l’explosion sociale laisse derrière elle
, 18/9/2023

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20/09/2023

L’histoire de la statue en bronze de Pinochet (coulée à Bagnolet) et des petits soldats de plomb à son effigie

La seule statue existante d’Augusto Pinochet, haute de 3 mètres et coulée chez Blanchet-Landowski à Bagnolet (France), n’a jamais été exposée en public. Elle est cachée dans un dépôt de l’armée chilienne. En revanche, les petits soldats de plomb à l’effigie du “Tata” (le Papy) ont connu un certain succès. La correspondante principale du quotidien espagnol El País à Santiago nous raconte ces deux histoires, emblématiques de la catastrophe anthropologique qui a frappé le pauvre Chili.-FG

 

Augusto Pinochet en bronze : l’histoire occultée de la statue du dictateur

Rocío Montes, El País, 10/9/2023

Avant de quitter La Moneda en mars 1990, le général avait prévu d’ériger un monument à son effigie dans un espace public de Santiago. Œuvre du sculpteur Galvarino Ponce, la sculpture de trois mètres a été coulée à Paris et a voyagé jusqu’au Chili, mais n’a jamais été installée : elle est cachée.

Photographies d’un buste et de la statue d’Augusto Pinochet conçus par le sculpteur Galvarino Ponce.Photo Rocío Montes

Peu avant de quitter La Moneda en mars 1990, après 17 ans de dictature militaire, Augusto Pinochet avait un projet monumental : une grande statue de lui-même qu’il léguerait à la postérité.

L’histoire commence à la fin des années 1980, lorsque l’armée de terre contacte le sculpteur Galvarino Ponce, l’un des grands génies chiliens du portrait sculptural.

Le sculpteur : réaliste, mais pas royaliste

Né en 1921 - il avait six ans de moins que Pinochet - Ponce est un artiste à la biographie curieuse et au talent exceptionnel. En regardant simplement des photographies ou en observant directement un homme ou une femme pendant quelques instants, il pouvait faire en quelques heures ce que d’autres artistes mettaient des jours ou des semaines à faire : réaliser des têtes qui ressemblaient de façon frappante à celles des personnes représentées. On dit qu’il utilisait la technique russe de modelage : avec des boules d’argile. Il travaillait d’abord le profil, le front, puis le volume. Il était talentueux, mais aussi rapide et prolifique. Ses œuvres sont présentes dans tout le Chili, dans les espaces publics et privés, comme celles de peu de ses confrères.

Teté - comme l’appellaient sa famille et ses amis - a commencé à sculpter avant l’âge de 20 ans. Mais avant de se consacrer pleinement à la sculpture, il a porté un uniforme. Avec des oncles et des parents liés à l’armée, il avait environ 14 ou 15 ans lorsqu’il est entré à l’école militaire de Santiago.

Il y est un élève lucide, brillant, remarquable, un artiste : tout à fait particulier. Cadet de l’école, il fonde la revue satirique El tiburón [Le Requin], où il exploite son côté journaliste. Il écrit des chroniques et dessine des caricatures de ses camarades de classe et de ses professeurs. Ponce réussit même à imprimer la publication qui, sur ordre des autorités, est supervisée et dirigée par un lieutenant d’artillerie : Carlos Prats, un militaire intellectuel, un peu plus âgé, qui supervise le travail de l’équipe d’El tiburón. C’est ainsi qu’est née la profonde amitié entre Ponce et Prats, commandant en chef de l’armée de terre sous le gouvernement de Salvador Allende (1970-1973). Lorsque la dictature de Pinochet l’assassine avec son épouse à Buenos Aires en 1974, Ponce est attristé par sa mort. Il le considérait comme un officier brillant, très distingué et un bon ami.

Il fait partie de la génération d’officiers de 1940 et, après avoir obtenu son diplôme, il commence à travailler à l’école d’infanterie de San Bernardo, dans le sud de Santiago, où il a passé une grande partie de son enfance et de son adolescence. Sans abandonner sa carrière militaire, Ponce commence à travailler comme sculpteur et, grâce au bouche-à-oreille, il reçoit ses premières commandes. Mais ce n’est que dans les années 1950 qu’il décide de se consacrer à l’art et de partir étudier en Italie. Il y parvient grâce à l’armée elle-même, qui l’envoie avec une bourse à l’école d’infanterie de Turin. Lorsqu’il rentre au Chili à l’âge de 32 ans, l’art est entré dans ses veines et il ne se voit pas reprendre les armes. Malgré lopposition de sa femme Chita, il décide de changer de vie et quitte l’armée. Il pensait avoir été bon et distingué en tant qu’officier et voulait devenir un bon civil. « Nous, les militaires, avons une tête très différente de celle des civils, et pour être un bon civil, il faut apprendre. Et pour apprendre à être un bon civil, il faut interagir avec les civils », dira-t-il bien plus tard.

Il tisse des réseaux parmi les radicaux et les francs-maçons. Il devient candidat à la députation pour le parti radical à San Bernardo et participe à la loge d’hommes politiques connus de l’époque. Des entrailles du pouvoir militaire - il a été le compagnon de nombreux commandants de l’armée - Ponce a ensuite circulé parmi le pouvoir politique et, dans les années 1950, il a produit des dizaines de sculptures de tailles et de matériaux différents : des figures universelles comme Homère aux intellectuels chiliens et aux héros de toutes les époques. L’armée, qui reste son univers d’origine, lui commande un grand nombre d’œuvres.

Mais l’une des œuvres les plus importantes, en raison de ses dimensions et de son importance, est probablement le monument de l’Abrazo de Maipú, aujourd’hui installé sur la place du temple votif de cette municipalité, à l’ouest de la capitale chilienne, qu’il a remporté à l’issue d’un concours public (il a envoyé quatre projets sous des pseudonymes différents). Il s’agit d’un monument équestre représentant les généraux San Martín et O’Higgins montés sur des chevaux qui lèvent leurs pattes antérieures comme pour initier un saut dans l’infini. Il en achève le modelage en 1961, ce qui lui permet d’acquérir une certaine notoriété en tant qu’artiste. Grâce aux efforts de ses amis radicaux, le gouvernement de Jorge Alessandri (1958-1964) le nomme attaché culturel du Chili à Rome.

Le sculpteur Galvarino Ponce travaillant sur un buste. Photo Rocío Montes

Pendant 20 ans, Ponce a poursuivi une carrière diplomatique : tout au long des années 1960 et 1970. Il commence par la capitale italienne, où il bénéficie d’un décret du président Alessandri qui lui permet d’entrer au ministère des Affaires étrangères en tant que fonctionnaire. Il travaille ensuite à Rio de Janeiro, Asunción, Neuquén, Amman en Jordanie, Mendoza et Belgrade, la capitale de l’ex-Yougoslavie. Il prend sa retraite de diplomate en 1981 pour se consacrer à nouveau à la sculpture. Ces décennies ont été prolifiques : présidents, généraux, héros nationaux, intellectuels et prêtres ont alimenté les statues de Ponce, un homme qui attirait l’attention par sa sympathie et ses traits d’esprit.

Il a écrit une courte autobiographie à la machine à écrire, dont voici un résumé :

« Il est très fier d’avoir travaillé si dur : ses adversaires pensent qu’il est au mieux de sa forme....

Il a passé sa vie à lire, étudier et travailler, toujours sur des sujets absolument inutiles.

Les artistes pensent qu’il était un bon diplomate ; les diplomates pensent qu’il était un bon artiste....

Ces dernières années, il a essayé de gagner sa vie avec ses mains. Beaucoup considèrent que c’est un paradoxe... parce qu’il s’appelle Galvarino [héros mapuche dont les mains ont été coupées].

Il est tout à fait réaliste, sans être royaliste.

C’est un sybarite, par construction, mais diverses affections, dont l’âge, le limitent de façon alarmante et progressive.

Sa monomanie est de fabriquer des singes [monos en espagnol]. Il pense qu’il peut devenir un vieil homme heureux. Il a un tempérament très joyeux et ne prend rien au sérieux, sauf le whisky... »

Un “secret d’État”

La commande que l’armée de Pinochet lui a confiée à la fin des années 1980 - et que Ponce a acceptée - consistait en une grande statue et des dizaines de bustes du général à installer dans tous les régiments et garnisons militaires du pays.

Ponce a commencé à le modeler. « C’était des photos, rien que des photos. Les militaires ont envoyé des photos des chaussures, des uniformes, des décorations. Vous savez comment sont les militaires », a-t-il expliqué à la soussignée en mars 2012, lors d’un entretien à son domicile de San Bernardo, dans la partie sud de Santiago, qui conserve une certaine culture rurale.

Pour Ponce, Pinochet était une vieille connaissance : c’est le sculpteur qui a présenté Pinochet à son ancienne épouse, Lucía Hiriart.

19/09/2023

JUAN PABLO CÁRDENAS S.
Chili : Kissinger, la droite indécrottable et la gauche boboriche

Juan Pablo Cárdenas S., Política y Utopía, 18/9/2023
Traduit par Fausto Giudice
, Tlaxcala

Cinquante ans après le coup d’État de septembre 1973, au-delà des justes hommages rendus au Chili et dans le monde à Salvador Allende, nous avons tous eu l’occasion d’observer la tension que cet anniversaire national et mondial produit toujours au sein de la droite.

Ricardo, El Mundo, 13/9/2023

Bien que les années passées nous apportent de plus en plus de preuves que le renversement a été conçu et organisé par Henry Kissinger et le gouvernement usaméricain sous Nixon, curieusement, ce fait a été ignoré par les actes officiels, bien que cette fois-ci il y ait eu des reconnaissances fortes de la part de Washington.

En particulier lorsque la Maison Blanche a dévoilé de nouveaux documents secrets concluants qui révélaient un certain nombre d’actions et de contributions en millions de la CIA visant à déstabiliser le gouvernement de l’Unité populaire afin d’installer Pinochet à la tête de notre pays à l’issue d’une opération criminelle et terroriste.

Bien entendu, les dirigeants chiliens actuels ne sont pas disposés à mettre l’accent sur  la responsabilité de l’impérialisme usaméricain dans des dizaines de coups d’État sur notre continent et dans le monde. Et encore moins d’exiger que les cerveaux usaméricains soient envoyés dans notre pays pour y être jugés en tant que séditieux et assassins.

Ce serait certainement trop demander que l’impunité ne prévale pas à cet égard, de sorte que les dirigeants usaméricains actuels et futurs bénéficient de l’immunité pour continuer à mener des opérations criminelles visant à renverser les gouvernements de toute tendance politique qui mettent en péril les intérêts usaméricains.

Avec le coup d’État de 1973, la puissance impériale a clairement indiqué que ses efforts ne se limitaient pas à la lutte contre les gouvernements de gauche, mais aussi contre tout régime qui propose des changements substantiels en faveur de la justice sociale susceptibles d’affecter ses investissements à l’étranger.

Il y a cinquante ans, un gouvernement démocratiquement élu a été renversé pour imposer un régime néolibéral qui a annulé les acquis démocratiques et sociaux, par exemple la nationalisation du cuivre et la réforme agraire.

Nous trouvons inacceptable que cette année, il n’y ait pas eu non plus de condamnation large et sévère des actions des USA. Cela s’explique par la complicité de la droite et des entités politiques qui ont promu le coup d’État.

Et maintenant, ce qui est encore pire, c’est le silence éhonté de la gauche néolibérale, c’est-à-dire de ces socialistes, démocrates-chrétiens et autres pour lesquels c’est un honneur de serrer la main du secrétaire d’État usaméricain lui-même, qui a atteint 100 ans d’existence sans reproche de la part de ceux qui ont observé et même subi dans leur propre chair les violations des droits humains également encouragées par Washington.

EVGENY MOROZOV
La machine à planifier : Le projet Cybersyn et les origines de la nation des Big Data
Naissance et mort du cybersocialisme dans le Chili d’Allende

Evgeny Morozov, The New Yorker, 6/10/2014
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Note du traducteur

Ce texte est le premier consacré par Evgeny Morozov au projet Cybersyn/Synco dans le Chili de l’Unité Populaire, une tentative futuriste de mettre en œuvre une planification socialiste cybernétique, dont bien des aspects ont été repris dans le neurocapitalisme du XXIème siècle, avec évidemment d’autres objectifs (le profit). Entretemps Morozov a creusé ce sujet et a publié en juillet dernier un podcast en 9 épisodes issu de deux ans d’enquête sur ce projet. On peut l’écouter (en anglais) sur https://the-santiago-boys.com/.

En juin 1972, Ángel Parra, le plus grand chanteur populaire du Chili, a écrit une chanson intitulée “Litanie pour un ordinateur et un enfant sur le point de naître”. Les ordinateurs sont comme des enfants, chantait-il, et les bureaucrates chiliens ne doivent pas les abandonner. Cette chanson avait été inspirée par la visite à Santiago d’un consultant britannique qui, avec sa barbe fournie et son physique costaud, rappelait à Parra le Père Noël - un Père Noël porteur d’un “cadeau caché, la cybernétique”.

Le consultant, Stafford Beer, avait été engagé par les principaux planificateurs du Chili pour aider à guider le pays sur ce que Salvador Allende, son dirigeant marxiste démocratiquement élu, appelait “la voie chilienne au socialisme”. Beer était l’un des principaux théoriciens de la cybernétique, une discipline née des efforts déployés au milieu du siècle dernier pour comprendre le rôle de la communication dans le contrôle des systèmes sociaux, biologiques et techniques. Le gouvernement chilien avait beaucoup à contrôler : Allende, entré en fonction en novembre 1970, avait rapidement nationalisé les principales industries du pays et promis la “participation des travailleurs” au processus de planification. La mission de Beer était de fournir un système d’information hypermoderne qui rendrait cela possible et ferait entrer le socialisme dans l’ère de l’informatique. Le système qu’il a conçu portait un nom de science-fiction étincelant : le projet Cybersyn (en espagnol Synco).

Dans le Chili d’Allende, une salle d’opérations futuriste devait faire entrer le socialisme dans l’ère de l’informatique. Illustration de Mattias Adolfsson

Beer était un sauveur improbable pour le socialisme. Il avait été cadre chez United Steel et avait travaillé comme directeur du développement pour l’International Publishing Corporation (à l’époque l’une des plus grandes sociétés de médias au monde), et il dirigeait un lucratif cabinet de conseil. Il menait une vie fastueuse, avec une Rolls-Royce et une grande maison dans le Surrey, équipée d’une cascade télécommandée dans la salle à manger et d’une mosaïque de verre dont le motif était basé sur la suite de Fibonacci. Pour convaincre les travailleurs que la cybernétique au service de l’économie planifiée pouvait offrir le meilleur du socialisme, il fallait les rassurer. Outre la musique folk, des fresques murales sur le thème de la cybernétique étaient prévues dans les usines, ainsi que des dessins animés et des films didactiques. La méfiance demeurait. Un titre de l’Observer de janvier 1973 annonçait : “Le Chili dirigé par ordinateur”, ce qui donnait une idée de l’accueil réservé au projet de Beer en Grande-Bretagne.

17/09/2023

RAÚL ZIBECHI
Un demi-siècle après le coup d'État : le Chili, un laboratoire pour ceux d’en haut comme pour ceux d’en bas

Raúl Zibechi, La Jornada, 8/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Le coup d'État du 11 septembre 1973 contre le gouvernement de Salvador Allende a marqué un tournant profond dans l'histoire récente. Les États-nations ont été entièrement remodelés par les classes dominantes, le néolibéralisme s'est installé, mettant fin au processus industriel de substitution des importations, et les mouvements d'en bas n’ont plus pu fonctionner de la même manière. Ces changements, il  convient de les évaluer.


Manuel Loayza

Sous le régime militaire d'Augusto Pinochet, les forces armées ont écrasé l'organisation ouvrière, imposant un terrorisme d'État contre tout dissident et, en particulier, contre les travailleurs. Elles ont réussi à refonder le capitalisme chilien, en éliminant l'ancienne industrie et en approfondissant l'accumulation par spoliation. Les relations de travail ont été complètement remodelées en faveur des patrons, puisqu'il n'y avait pas d'opposition ouvrière organisée.

Le néolibéralisme s'est nourri de la violence contre les secteurs populaires qui, avec l'aide de technocrates et d'économistes connus sous le nom de Chicago Boys, ont transformé le Chili en un grand laboratoire où les privatisations (à l'exception de l'entreprise de cuivre, dont les bénéfices sont allés aux forces armées), un nouveau système de retraite privé et des initiatives qui ont condamné la classe ouvrière au chômage et à la faim ont été pratiqués à la main.

Les salaires ont baissé de manière retentissante dans le monde entier.

Deux chercheurs du Program on Race, Ethnicity and the Economy de l'US Economic Policy Institute ont étudié 85 ans d'histoire du salaire minimum. Leur conclusion est lapidaire : « Sans mécanisme en place pour l'ajuster automatiquement à la hausse des prix, la valeur réelle du salaire minimum fédéral a progressivement diminué, atteignant en 2023 son niveau le plus bas depuis 66 ans » (source).

Cette année, le salaire minimum vaut 42 % de moins qu'à son apogée en 1968, et 30 % de moins que lors de sa dernière augmentation, il y a 14 ans, en 2009. « Cette perte significative de pouvoir d'achat signifie que le salaire minimum fédéral actuel est loin d'être un salaire décent », concluent les chercheurs.

La troisième question est celle des transformations de l'action collective. Le centre du mouvement social chilien s'est déplacé des usines vers les poblaciones [quartiers populaires périphériques, souvent des bidonvilles autocontstruits sur des terrains occupés, NdT] qui, depuis 1983, ont été au centre de la résistance à la dictature lors de mémorables journées de protestation. Des pratiques collectives de survie, les ollas comunes [pots communs, soupes populaires autogérées] que l'on théorisera plus tard sous le nom d'“économie solidaire”, s'y sont développées. Le mouvement des pobladores passe de la résistance à l'insurrection.


1983 : "Pinocchio escucha, ándate a la chucha"= " Pinocho [jeu de mots entre Pinochet et Pinocchio] écoute, va t'faire foute" [pour que ça rime aussi en français]

La première manifestation a eu lieu le 11 mai 1983, à l'appel des travailleurs du cuivre et dans des quartiers comme La Victoria, où des barricades ont été érigées, des affrontements avec les carabiniers et les militaires ont eu lieu et plusieurs personnes ont été tuées. En représailles, 5 000 maisons ont été perquisitionnées et toutes les personnes âgées de plus de 14 ans ont été arrêtées.

16/09/2023

AMIRA HASS
Pour Israël, les accords d'Oslo ont été un succès retentissant

Amira Hass,  Haaretz, 12/9/2023
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

La création d’enclaves palestiniennes est un compromis interne à Israël : faire disparaître les Palestiniens sans les expulser. Pendant ce temps, Israël engrange d’importants bénéfices, notamment en transformant la Cisjordanie et la bande de Gaza en laboratoire humain


Steve Bell, The Guardian

Dans les accords d’Oslo signés il y a 30 ans, Israël a accepté de réduire progressivement l’occupation, tandis que les Palestiniens ont été contraints de cesser instantanément toute résistance. Chaque partie a interprété cette réduction comme elle l’entendait.

Les représentants palestiniens ont compris ou espéré qu’en échange de la cession de 78 % de la Palestine historique avant la fin de 1999 (sans renoncer aux liens personnels, familiaux, culturels, émotionnels ou historiques de leur peuple), le contrôle militaire israélien sur les territoires occupés en 1967 prendrait fin et les Palestiniens y établiraient un État.

Les Israéliens ont conclu qu’ils avaient obtenu un sous-traitant pour procéder à des arrestations et traquer les opposants (sans que la Cour suprême d’Israël et le groupe de défense des droits B’Tselem s’en mêlent, comme l’a dit le Premier ministre de l’époque, Yitzhak Rabin). Les négociateurs israéliens ont veillé à ce que l’accord écrit détaille les étapes du processus sans mentionner d’objectifs concrets (un État, un territoire et des frontières fixes).

Israël étant la partie la plus forte, c’est son interprétation qui l’a emporté et qui a déterminé la nature et la morphologie éternelles du  “rétrécissement” : L’israélisation d’autant de territoires que possible et, à l’intérieur de ceux-ci, des poches d’autonomie palestinienne - qui sont séparées, affaiblies et contrôlées à distance, Israël étant en mesure de les couper les unes des autres. Les origines des accords d’Abraham de 2020 remontent à 1993.

Grâce à Oslo, Israël s’est déchargé de la responsabilité de l’occupant à l’égard de la population et de son bien-être. Et il a gardé la crème : le contrôle de la terre, de l’eau, des longueurs d’onde des téléphones portables, de l’espace maritime et aérien, de la liberté de mouvement, de l’économie et des frontières (à la fois extérieures et de chaque poche de territoire).

Israël tire d’énormes profits de ces leviers de contrôle, car il est à la tête d’un grand laboratoire humain où il développe et teste ses exportations les plus rentables : armes, munitions et technologies de contrôle et de surveillance. Les Palestiniens de ce laboratoire, privés d’autorité et dont les ressources s’amenuisent, se voient confier la responsabilité de gérer leurs problèmes et leurs affaires civiles.

Les Palestiniens restent une réserve de main-d’œuvre bon marché pour les Israéliens. Une grande partie des coûts de l’occupation est répercutée sur les Palestiniens sous la forme de biens et de services qu’ils sont obligés d’acheter mais qu’ils ne peuvent pas développer parce qu’Israël contrôle la majeure partie du territoire, des frontières et de l’économie en général.

 Saïd An-Nahry

Viennent ensuite les frais élevés sur les transactions financières (comme le transfert de l’argent des douanes au trésor palestinien), les prélèvements et les amendes dont les recettes vont à la police, aux ports, à l’administration civile et à l’armée israélienne, les frais au passage de la frontière avec la Jordanie, les frais de transaction et d’enregistrement immobilier dans la zone C de la Cisjordanie, le marché noir des permis de travail, la rétention de l’argent des douanes sous divers prétextes, l’emploi de vétérans du service de sécurité du Shin Bet et de l’armée comme consultants qui ouvrent des portes dans la bureaucratie de l’occupation, et les intérêts qui s’accumulent sur tous les retards de paiement. Ce n’est peut-être pas grand-chose par rapport au produit intérieur brut d’Israël, mais c’est une fortune pour les Palestiniens, surtout si l’on tient compte de leur PIB et de leurs salaires.

Les pays occidentaux ont déchargé Israël de ses obligations financières en tant que puissance occupante et ont financé une grande partie des dépenses de gestion, d’entretien et de développement limité des enclaves palestiniennes. L’explication est que cela est nécessaire à l’établissement d’un État palestinien. Mais depuis des années, les pays occidentaux en ont assez de subventionner l’occupation et ses problèmes. Ils punissent donc les Palestiniens en faisant preuve d’avarice et les mettent en garde contre des catastrophes humanitaires, alors qu’ils signent de généreux accords économiques, scientifiques et militaires avec Israël.

GREGORIO CARBONI MAESTRI
Lettre ouverte à l’ANPI sur une exposition à la gloire du bataillon Azov

Gregorio Carboni Maestri, septembre 2023
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Chers associés, camarades et amis de l’Association Nationale des Partisans Italiens, ANPI,

En ces jours d’anniversaires importants - le 80e anniversaire du 8 septembre 1943, qui a marqué le début symbolique de la révolution des partisans en Italie et la libération du Donbass de l’occupation nazi-fasciste – c’est avec une profonde consternation que j’ai appris le soutien tacite de l’ANPI de la province de Milan à une exposition intitulée « Eyes of Mariupol - Un regard dans les yeux des défenseurs de Mariupol»[1]. Cette exposition, installée dans la Via Dante et au Musée du Risorgimento, est parrainée par la Ville de Milan et la Zone 1 et concerne le bataillon Azov, connu pour ses positions nazies-fascistes, antisémites et ultranationalistes.[2] Elle a été organisée et promue avec l’aide des associations Azov One et Kvyatkovskyy Family Foundation, toutes deux affiliées au bataillon susmentionné, dans le cadre de leur campagne visant à “nettoyer” la réputation de cette unité controversée.


Dans l’exposition en question, une tentative délibérée a été faite pour dissimuler le logo du bataillon, qui était en revanche visible dans l’édition de l’exposition présentée à Lviv. Cet acte délibéré de la part des organisateurs met encore plus en évidence la nature problématique de l’exposition. Comme l’a clairement exprimé l’ANPI de Porta Genova (Milan), les images exposées mettent les forces militaires au premier plan au lieu de documenter les souffrances des populations touchées par la guerre. En outre, ces images font appel à un symbolisme qui évoque des régimes et des périodes sombres de l’histoire.

Il est essentiel de souligner que le bataillon Azov tire ses origines des milices néo-fascistes affiliées au Pravy Sektor [Secteur droit], qui ont ensuite été légalement incorporées dans les forces armées ukrainiennes.[3] Le symbole qui identifie ce bataillon est le crochet de loup ou crampon [Wolfsangel], un emblème qui était initialement associé au parti nazi avant qque celui-ci n’adopte la croix gammée. Ce symbole a ensuite été intégré à l’ensemble des symboles runiques utilisés par les S.S. et a également été adopté par huit divisions de la Wehrmacht, dont la 2e Division blindée S.S. “Das Reich"” Il convient de noter que le parti social-nationaliste ukrainien - Svoboda - a également utilisé ce symbole distinctif.[4]

L’image emblématique de l’exposition, une photographie en noir et blanc, est un portrait de Denys Prokopenko, un commandant du bataillon Azov connu pour son idéologie suprémaciste blanche.[5] Prokopenko a entamé sa carrière militaire d’abord au sein du “Club des Garçons Blancs”, un groupe d’ultras néo-nazis, avant de rejoindre la division Borodach. Cette dernière se distingue par l’utilisation du symbole nazi de la tête de mort et des tibias croisés. Prokopenko n’est qu’un des nombreux membres controversés de cette unité paramilitaire, dont les adeptes arborent des tatouages faisant référence à des symboles racistes, suprématistes, homophobes, antisémites et nazis-fascistes.[6]

Le bataillon Azov a été impliqué dans des actes effroyables de cruauté et de non-droit, y compris des exterminations, des déportations et la suppression totale de la liberté et de la dignité humaines. Il a même procédé à des crucifixions et à des mises à mort sur des bûchers.[7] Contrairement au récit véhiculé par l’exposition en question, les membres du bataillon Azov ne sont donc pas des héros, mais plutôt des meurtriers cruels et lâches. Leur prison secrète, connue sous le nom de “La Bibliothèque” était située dans l’aéroport de Mariupol sous la direction du SBU [service secret], un lieu de torture et de meurtre pour les miliciens des républiques populaires du Donbas, les communistes, les antifascistes et les anti-maïdanistes.[8] Un lieu qui évoque de tristes similitudes avec le Stade national de Santiago du Chili.[9] Dans un tel contexte, aurait-il été acceptable d’accueillir une exposition sur Pinochet et ses exécuteurs à Via Dante ou au Museo del Risorgimento en 1973 ? Pour illustrer le malaise généralisé et les contradictions que cette exposition a suscités, il convient de noter que le quotidien turinois La Stampa a modifié de manière significative le titre d’un de ses articles relatifs à cette exposition. Le titre original, « [...] l’exposition au centre sur les néo-nazis du Bataillon Azov », a ensuite été remplacé par « [...] l’exposition sur la résistance ukrainienne à Mariupol », atténuant ainsi le caractère controversé de l’événement.[10]