05/12/2022

SHAY HAZKANI
Qui a peur de révéler les “secrets” palestiniens de 1948 ?

Shay Hazkani, Haaretz, 4/12/2022

Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

 

Shay Hazkani est professeur associé d'histoire à l'université du Maryland. Son livre “Dear Palestine: A Social History of the 1948 War a remporté le Korenblat Book Award in Israel Studies pour 2022. Un documentaire basé sur ses recherches, “L'opinion du soldat”, a été présenté en première au Festival du film de Jérusalem en 2022. Le Dr Hazkani a participé à diverses luttes concernant les politiques de déclassification des archives en Israël. En 2019, il a adressé une pétition à la Cour suprême israélienne avec l'Association pour les droits civils, afin de contraindre le service de renseignement intérieur israélien, le Shin Bet, à ouvrir ses archives au public. Avant sa carrière universitaire, Shay a travaillé comme journaliste couvrant la Cisjordanie et l'armée israélienne.

Lorsque les Archives de l'État d'Israël refusent de diffuser des documents pillés aux Palestiniens sous prétexte que cela « porterait atteinte à la sécurité nationale », il est clair qu'il s'agit d'une couverture pour une crainte totalement différente.

Des réfugiés palestiniens quittant leur village, lieu inconnu, 1948. Photo : UNRWA

 

Vous vous êtes sans doute demandé à un moment donné, comme moi, quel genre d'État arabe les Palestiniens envisageaient en 1948 s'ils avaient gagné la guerre. Quels étaient leurs plans ? Où avaient-ils l'intention de construire leur version de l'autoroute Ayalon ? Voulaient-ils aussi assécher le marécage de Hula pour rendre plus disponibles les terres agricoles ?

 

Oh, et que pensaient-ils des 628 000 Juifs qui vivaient dans ce qui est maintenant Israël à la veille de la guerre ? Qu'avaient-ils l'intention de faire d'eux ?

 

Chaque semaine, le chroniqueur Ben-Dror Yemini raconte à ses lecteurs dans le Yedioth Ahronoth que les dirigeants arabes de 1948 ont appelé à jeter les Juifs à la mer. En d'autres termes, ils avaient l'intention de procéder à un massacre systématique.

 

Ainsi, sans accabler les lecteurs de Haaretz avec une recherche académique aride, je pense qu'il est utile de les informer qu'en 15 ans de recherche, au cours desquels j'ai lu des centaines de documents de propagande de 1947 à 1949, je n'ai rencontré qu'un seul cas dans lequel un dirigeant arabe a mentionné “mer” et “Juifs” dans la même phrase. Il s'agissait de l'Égyptien Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans, dans un appel à expulser les Juifs d'Égypte.

 

Les citations plus familières (comme celle attribuée au secrétaire général de la Ligue arabe de l'époque, Azzam Pacha) ne sont pas étayées par des sources arabes fiables, et il n'est pas certain qu'elles aient jamais été prononcées.

 

Quoi qu'il en soit, je n'ai trouvé aucun appel au meurtre de Juifs au seul motif qu'ils étaient Juifs, que ce soit dans la propagande ou dans le matériel éducatif destiné aux Palestiniens et aux combattants arabes en 1948. À en juger par les documents que j'ai rassemblés pour mon dernier livre, les affirmations concernant un plan arabe visant à “jeter les Juifs à la mer” sont en fait ancrées dans la propagande sioniste officielle. Cette propagande a commencé pendant la guerre, peut-être pour encourager les combattants juifs à laisser aussi peu de Palestiniens que possible dans les zones qui allaient faire partie d'Israël. (Soit dit en passant, une comparaison de la propagande arabe et juive en 1948 révèle que la propagande des Forces de défense israéliennes et de leur précurseur, la Haganah, était beaucoup plus violente).

 

J'ai récemment pensé qu'une occasion en or d'en apprendre un peu plus sur les plans des Palestiniens en cas de victoire  en 1948 m'était tombée dessus. Cinq ans après avoir demandé l'autorisation d'examiner plusieurs dossiers qui avaient été pillés dans des institutions palestiniennes pendant la guerre et dont l'existence avait été dissimulée, les Archives de l'État d'Israël m'ont fourni une liste de dossiers provenant d'un département secret du ministère des Affaires étrangères appelé “département politique” (qui est devenu plus tard le Mossad). En 1948 et 1949, il était dirigé par un agent de renseignement nommé Boris Guriel.

 

Deux dossiers de la liste ont immédiatement attiré mon attention. Le premier, le dossier MFA 5/6100, était intitulé « Palestine - un État arabe indépendant ». Il contenait des documents produits par la Ligue arabe, apparemment dans le cadre de sa correspondance avec le gouvernement en exil de “Toute la Palestine” qui s'est installé dans la bande de Gaza pendant la guerre.

 

Selon les archives, ce dossier contenait « de la correspondance et des rapports sur la création d'un État arabe indépendant ». Mais il est tellement secret que ce n'est que 90 ans après sa création - c'est-à-dire en 2040 - que je serai autorisé à le lire.

 

Bien, ai-je pensé. Peut-être qu'ils ne peuvent pas me dire ce que les Palestiniens prévoyaient pour leur État indépendant, mais chaque enfant en Israël sait que lorsqu'il s'agit du célèbre mufti de Jérusalem, tout est déjà connu et ouvert à l'examen. Après tout, les liens d'Amin al-Husseini avec de hauts responsables du parti nazi et l'horrible propagande qu'il a diffusée à la radio pendant la Seconde Guerre mondiale sont les sujets favoris de la machine de diplomatie publique d'Israël depuis maintenant sept décennies.

 

Mais il s'avère que je me suis encore trompé. Les dossiers du département politique comprenaient également des documents écrits par le mufti entre 1946 et 1948 (dossier MFA 3/6100). Or, les archives m'ont informé que ces documents ne pouvaient être consultés que 90 ans après leur rédaction.

 

Mais ne vous inquiétez pas, ils ont accepté de partager la correspondance du mufti avec de hauts responsables nazis. Seule la question triviale de savoir ce que faisait le leader du mouvement national palestinien pendant la guerre ne peut être révélée.

 

Ces deux dossiers ne sont que la partie émergée de l'iceberg du patrimoine politique et culturel palestinien dissimulé dans les archives d'Israël. Ces documents ont été pris comme butin aux institutions et aux individus palestiniens en 1948, 1956, 1967 et 1982 (et bien sûr aussi dans les décennies suivantes), mais seule une partie d'entre eux peut être consultée.

 

Selon mes estimations, des dizaines de milliers de pages de documents arabes qui n'ont pas encore été mis à la disposition du public se trouvent dans les archives de l'État d'Israël, les archives des Forces de défense israéliennes, les archives du Mossad et les archives du service de sécurité Shin Bet. Ce dernier, selon un témoignage, a brûlé une partie de ces documents dans les années 1960.

 

Le fait que les archives du Shin Bet soient complètement fermées au grand public, avec l'approbation de la Haute Cour de justice, rend impossible de savoir ce qu'elles contiennent ou non. Mais même dans les autres archives, de nombreux dossiers pillés sont gardés cachés ; dans certains cas, même une liste de leur contenu n'est pas disponible.

 

D'ailleurs, il ne s'agit pas seulement de documents de l'élite politique palestinienne. À ma demande, un petit nombre de dossiers palestiniens pillés dans les archives de l'armée israélienne ont récemment été mis à disposition, contenant des milliers de pages de documents sur des personnes ordinaires.

 

L'un de ces dossiers, consacré à un homme nommé Wadia Iskander Azzam, comprend toute sa vie : le document d'enregistrement de sa maison à Safed, son certificat de mariage, les cartes de visite qu'il a collectionnées au cours de sa vie, son journal intime et quelques poèmes qu'il a écrits - tout un monde de documents sur une personne dont le monde a été détruit en 1948.

 

Lorsque les Archives de l'État d'Israël refusent de divulguer les documents pillés aux Palestiniens sous prétexte que cela « porterait atteinte à la sécurité nationale », il est clair que cela cache une toute autre crainte. Il n'y a pas et il ne peut pas y avoir de secrets d'État dans les documents arabes écrits par les Palestiniens, comme leurs plans pour un État palestinien indépendant ou les documents d'un orphelinat de Jaffa.

 

Le plus grand secret est l'existence même de ces documents, qui sont un mémorial à une civilisation palestinienne détruite. Ce « secret », craignent les fonctionnaires responsables de la déclassification des documents, pourrait ébranler le récit sioniste israélien et susciter des doutes chez les personnes désireuses d'examiner l'histoire d'un œil critique.

 

Imaginez qu'un autre pays possède les archives d'une communauté juive d'Europe de l'Est qui a été détruite pendant l'Holocauste, ou d'une communauté juive dans un pays musulman. Bien sûr, il n'y a pas de comparaison possible, mais que dirait Yad Vashem ? Ou les organisations juives des USA ? Le gouvernement usaméricain interviendrait-il pour mettre ces documents en sécurité ?

 

En fait, vous n'avez pas besoin d'imaginer, car il y a eu une pléthore de cas comme celui-ci au cours des 70 dernières années. L'un d'entre eux, toujours en cours, concerne les archives de la communauté juive de Bagdad, que les forces d'occupation usaméricaines ont prises au siège des services de renseignement irakiens en 2003.

 

Les USAméricains ont scanné l'ensemble des archives et les ont mises en ligne, et ils prévoient maintenant de les rendre au gouvernement irakien. Mais les représentants de la communauté juive irakienne exigent que les documents de Bagdad, où il ne reste plus de Juifs, ne soient pas rendus. La bataille fait toujours rage.

 

Israël aussi aura du mal à continuer à conserver l'héritage culturel d'un autre peuple, surtout lorsque la plupart des membres de ce peuple n'ont pas le droit d'accéder aux archives israéliennes pour étudier cet héritage. Tout comme d'autres aspects du conflit israélo-palestinien ont été internationalisés, le vol et la possession illégale par Israël du patrimoine des Palestiniens finiront par être portés devant les tribunaux internationaux. Israël serait bien avisé d'empêcher cela en publiant systématiquement les documents qu'il détient et en les rendant accessibles.

04/12/2022

FREDERIC WEHREY
La Libye en pleine tempête

Frederic Wehrey, The New York Review of Books, 3/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Le changement climatique a apporté une nouvelle dimension dangereuse à la guerre des bandes politico-militaires

Vue d’une tempête de poussière dans le désert du Sahara, septembre 2014 ; Stocktrek/Getty Images.

Dans un bureau exigu et éclairé par des lampes fluorescentes, un fonctionnaire d’âge moyen et son équipe travaillent à ce qui est peut-être le travail le plus important pour les futures générations de Libyens. C’est une sorte de centre de commandement : des écrans d’ordinateur clignotants sur les bureaux, des câbles partout, et des cartes satellites au mur marquées de grandes spirales et de flèches. La bataille n’est pas contre un adversaire militaire, comme les innombrables groupes armés et leurs soutiens politiques qui se disputent le pouvoir et le butin économique dans cet État riche en pétrole depuis l’éviction de Mouammar Kadhafi lors de la révolution de 2011 soutenue par l’OTAN. Le fléau est bien plus insidieux, et les élites du pays, qui se chamaillent, semblent terriblement mal préparées à le combattre.

C’est le siège temporaire du Centre météorologique national de Libye, un bâtiment en béton coulé indescriptible, niché sur la route Qurji, du nom d’un capitaine de la marine ottomane qui a également fait construire une mosquée ornée dans la vieille ville voisine. Le directeur du centre, Ali Salem Eddenjal, affable et nerveux, m’accueille en s’excusant de l’exiguïté des lieux : il a dû quitter un autre quartier de la capitale en raison de violents affrontements entre milices, une histoire de déplacement forcé que de nombreux Libyens ne connaissent que trop bien. 

Pourtant, M. Eddenjal et son équipe poursuivent leurs efforts, surveillant, analysant, prévoyant et rapportant avec diligence un flux de données alarmantes que la plupart des Libyens connaissent déjà de première main. Le pays se réchauffe, les sécheresses sont plus sévères et plus longues, les précipitations plus rares, les tempêtes de sable et de poussière plus puissantes et plus fréquentes. Ce dernier phénomène s’est manifesté de manière spectaculaire en mars et en avril, lorsqu’un blizzard de particules s’est élevé du Sahara et a recouvert Tripoli et sa région. La brume de couleur saumon, stupéfiante sur Instagram, a entraîné la suspension des vols de l’aéroport de la ville. Elle a également suscité un avertissement de la mission de l’Union européenne en Libye, selon lequel les autorités du pays devaient s’attaquer aux effets actuels et imminents du changement climatique.   

C’est un avertissement qu’Eddenjal, qui a rédigé une thèse sur le changement climatique, n’a pas besoin d’entendre. Depuis des années, il prévoit les effets dévastateurs du réchauffement climatique anthropique sur son pays de près de sept millions d’habitants qui souffre d’un manque d’eau, effets qui seront exacerbés par des années de conflit, de corruption, de délabrement des infrastructures et de détérioration de l’environnement. Le tableau saisissant qu’il brosse augure à bien des égards l’avenir d’une grande partie de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. La température annuelle moyenne de la Libye, ainsi que celle de l’ensemble du sud de la Méditerranée, augmente plus rapidement que celle du reste du monde, et devrait augmenter de deux degrés Celsius d’ici 2050. Les précipitations annuelles diminuent à un rythme tout aussi rapide, tandis que le niveau de la mer le long de la côte libyenne augmente de trois millimètres par an.

Dans un pays désertique où la grande majorité de la population réside dans une étroite bande de territoire près de la mer, ces changements seront catastrophiques. Alors que la chaleur, la sécheresse et l’insécurité alimentaire font des ravages à l’intérieur de la Libye, les infrastructures de services et d’assainissement déjà faibles des villes du nord vont céder sous l’afflux de Libyens de l’arrière-pays, qui rejoignent les milliers de citoyens toujours déplacés par la guerre. L’eau potable, dont 80 % est puisée dans des aquifères fossiles situés en profondeur dans le désert par un système de canalisations appelé “Grande rivière artificielle”, va diminuer en raison de l’évaporation des réservoirs ouverts et de l’extraction non durable. La hausse des températures s’accompagne également d’une augmentation de la demande d’électricité, qui poussera un réseau surchargé jusqu’au point de rupture, avec des conséquences dangereuses pour la santé et la sécurité alimentaire. Pendant ce temps, les tempêtes se déchaîneront sur des systèmes de drainage de mauvaise qualité, et certaines zones côtières, comme la ville portuaire orientale de Benghazi, seront gravement endommagées ou inondées.

Des Libyens pataugent dans des eaux de crue suite à de fortes pluies à Tripoli, Libye, octobre 2022. Mahmud Turkia/AFP/Getty Images

À cette crise s’ajoutent deux précarités flagrantes. La dépendance de la Libye à l’égard des exportations pétrolières pour financer le budget gonflé du secteur public - qui emploie 85 % de la population - l’a dangereusement exposée à la baisse imminente des prix mondiaux du pétrole, connue sous le nom de “pic pétrolier”, résultant de la transition vers les énergies renouvelables et des engagements en faveur de la réduction nette des émissions de carbone. De plus, le minuscule secteur agricole libyen, en déclin rapide, et la dépendance de la Libye à l’égard des importations pour plus des trois quarts de ses denrées alimentaires la rendent tout aussi vulnérable aux chocs alimentaires. Il est facile d’imaginer le cataclysme qui se profile à l’horizon : des pertes humaines et une ruine économique vertigineuses, accompagnées de la dissolution violente du pays en une mosaïque de territoires dirigés par des milices prédatrices utilisant l’eau, l’électricité, le carburant et la nourriture comme sources d’autorité.

Les signes avant-coureurs de cette dystopie sont déjà là. Rappelez-vous, par exemple, le spectacle, il y a quelques années, des habitants de Tripoli creusant pour trouver de l’eau à travers le béton à l’extérieur de leurs maisons, après le sabotage de la Grande Rivière artificielle - une cible privilégiée des criminels et des milices dans le sud. Ou encore la lutte que se livrent les quartiers de la capitale et de ses environs, soutenus par des groupes armés, pour le rationnement de l’électricité pendant les chauds mois d’été. Ou encore les blocages trop fréquents des ports et des champs pétroliers par des groupes armés et des factions politiques, qui contribuent aux longues files d’attente pour le gaz et l’électricité lors des pannes et créent un marché pour les générateurs privés de combustibles fossiles qui crachent des gaz d’échappement à proximité des habitations.  

Mais les signes avant-coureurs les plus tragiques de l’avenir climatique qui s’assombrit sont les milliers de réfugiés et de migrants libyens, dont beaucoup viennent des États subsahariens, qui ont fui les pénuries alimentaires, la violence et la pauvreté écrasante - des difficultés exacerbées par la dégradation de l’environnement et les événements climatiques - pour subir d’horribles abus aux mains des trafiquants et des groupes armés libyens, parfois soutenus par l’État libyen et, indirectement, par une Europe de plus en plus nativiste.

Eddenjal sait tout cela et plus encore. Mais pour l’instant, il veut me parler des tempêtes de sable.

HAARETZ
Les Palestiniens dénoncent l’exécution d’Ammar Mefleh en Cisjordanie

The Associated Press, Jack Khoury, Josh Breiner, Haaretz, 4/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

 Des témoins oculaires rejettent la version de la police israélienne selon laquelle Ammar Mefleh a été abattu en état de légitime défense et affirment que les forces de sécurité israéliennes ont empêché les médecins de tenter de le sauver alors qu'il gisait sur le trottoir.

Des soldats sur les lieux avec le Palestinien Ammar Mefleh étendu au sol, vendredi.

Un mémorial improvisé sur le trottoir avec un drapeau palestinien et un avis de deuil a rendu hommage samedi à un Palestinien de 22 ans dont la mort aux mains d'un officier de la police aux frontières israélienne - quatre coups de pistolet à bout portant - a été capturée sur une vidéo amateur largement partagée.

 

Un jour après la fusillade dans la ville de Hawara, en Cisjordanie occupée, les Palestiniens ont rejeté les affirmations de la police israélienne selon lesquelles Ammar Mefleh a été abattu en état de légitime défense après avoir attaqué des Israéliens, dont un policier aux frontières, et résisté à son arrestation.

Ils affirment que l'officier a tué Mefleh sans justification et que les forces de sécurité israéliennes ont empêché les médecins palestiniens de tenter de sauver l'homme gravement blessé qui gisait sur le trottoir d'une artère très fréquentée.

La vidéo de 38 secondes commence par une bagarre entre l'agent de la police aux frontières et trois Palestiniens, dont Mefleh, sur le trottoir, alors que la circulation est dense. L'officier a retenu Mefleh par un étranglement, et ils ont échangé des coups après que Mefleh se fut libéré. Il a essayé d'attraper le fusil d'assaut de l'officier, qui est tombé par terre derrière l'officier, hors de portée immédiate de Mefleh. Le policier a alors sorti son pistolet et tiré quatre coups de feu alors que Mefleh, désarmé, tombait au sol.

Immédiatement après la fusillade de vendredi, la police a affirmé que Mefleh avait porté un couteau et tenté d'attaquer deux Israéliens dans une voiture, puis avait essayé de pénétrer dans le véhicule verrouillé avec une pierre.

Ils ont déclaré que le conducteur a tiré et blessé Mefleh, qui a ensuite chargé un groupe de policiers aux frontières et en a poignardé un au visage. L'agent de la police aux frontières a tenté d'arrêter Mefleh, qui a résisté et a essayé d'attraper l'arme de l'agent, selon la police. L'officier qui a tiré sur lui n'a pas été blessé.

Samedi, le commissaire de la police aux frontières, le major général Amir Cohen, a déclaré qu'il y avait “97 % de chances” que Mefleh soit celui qui a poignardé l'officier.

Deux Palestiniens qui ont été témoins de l'incident et qui ont parlé à Haaretz ont donné un récit différent des événements. Daoud Dameidi, qui vit près de la route où l'incident s'est produit, a déclaré que, dans un premier temps, deux véhicules palestiniens ont été impliqués dans un accident. Ensuite, poursuit-il, une dispute a éclaté entre l'un des policiers présents sur les lieux et Mefleh, en raison des embouteillages créés par l'accident. Les deux ont commencé à se battre et Mefleh a couru vers une voiture, a-t-il dit, lorsqu'un Israélien en est sorti et a tiré sur Mefleh.

« Il a dû penser que c'était une attaque terroriste ou quelque chose comme ça... Il a dû frapper le jeune homme, puis le policier a essayé de l'arrêter, et il a résisté », dit Dameidi.

Dameidi a ajouté que deux personnes ont essayé de libérer Mefleh de l'emprise du policier, mais ce dernier a continué à le tenir. « Je n'ai pas vu que Mefleh avait un couteau ou tenait un outil tranchant. Il ne semblait pas que quelqu'un essayait de perpétrer une attaque ». Dameidi a ajouté que « même lorsque l'arme du policier est tombée, on peut voir que personne ne s'est approché de lui. Le policier aurait pu tirer une balle dans la jambe, et cela aurait été la fin. Pourquoi a-t-il dû le transpercer (Mefleh) de la sorte ? C'était une exécution ».

Daoud Odeh, propriétaire d'un magasin de volailles dans la même rue, qui a assisté aux dernières minutes de l'incident, a également déclaré à Haaretz qu'un accident de voiture s'était produit. Après cela, a-t-il dit, un Israélien qui se trouvait sur les lieux a ouvert le feu pendant qu'un policier poursuivait Mefleh. Odeh n'a pas non plus vu que le jeune homme avait un couteau ou tout autre outil tranchant dans sa main.

Amir Cohen, chef de la police aux frontières israélienne, le mois dernier. Photo : Itai Ron

Samedi, le maire de Hawara, Moein Dmeidy, et d'autres personnes ont cité des témoignages de seconde main selon lesquels il y aurait eu une altercation entre Mefleh et un automobiliste israélien après un accident de voiture, mais les journalistes d'Associated Press n'ont pas pu trouver de témoins des événements qui ont conduit à la fusillade.

M. Dmeidy a déclaré que le policier n'avait aucune raison de tuer M. Mefleh alors qu'il l'avait déjà maîtrisé. Mefleh a été « tué de sang-froid », a déclaré le maire, qui est arrivé sur les lieux quelques instants après la fusillade. Dans une deuxième vidéo, on voit Mefleh bouger et se retourner sur le sol après avoir été abattu, et on ne sait pas exactement à quel moment il est mort.

Selon M. Dmeidy, une ambulance palestinienne est arrivée quelques minutes après la fusillade, mais les forces de sécurité ont empêché les médecins de lui porter secours. Dmeidy a déclaré qu'Israël n'a pas remis le corps de Mefleh pour qu'il soit enterré.

Tor Wennesland, l'envoyé spécial des Nations unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, a écrit sur Twitter qu'il était "horrifié" par la fusillade et a adressé "ses sincères condoléances à la famille endeuillée." Il a appelé à une enquête approfondie et a déclaré que les responsables devaient être tenus pour responsables.

 

 Ammar Mefleh, 22 ans, a été tué vendredi par un policier israélien en Cisjordanie

Le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Emmanuel Nahshon, a accusé l'envoyé de déformer la réalité. « Cet incident est une attaque terroriste, dans laquelle un policier israélien a été poignardé au visage et la vie d'un autre policier a été menacée, et par conséquent il a tiré sur son assaillant », a écrit Nahshon sur Twitter.

Samedi, les magasins situés le long de la route principale de Hawara ont été fermés en signe de protestation contre la fusillade. Un mémorial de fortune a été érigé à l'endroit où Mefleh a trouvé la mort. Il se compose d'un drapeau palestinien sur un petit mât et d'une affiche de décès adossée à celui-ci. L'affiche, avec une photo de Mefleh, indiquait que le parti Fatah du président palestinien Mahmoud Abbas pleure son fils « qui a été tué aux mains de l'occupation sioniste ».

 

Cette réaction est une déformation totale de la réalité. Cet incident est une attaque terroriste, au cours de laquelle un policier israélien a été poignardé au visage et la vie d'un autre policier a été menacée, ce qui l'a amené à tirer sur son assaillant. Il ne s'agit PAS d'une "échauffourée", mais d'une attaque terroriste ! https://t.co/1yoK8h7ehM
- Emmanuel Nahshon (@EmmanuelNahshon) le 3 décembre 2022

La vidéo des derniers instants de Mefleh était une documentation rare de l'un des incidents violents de plus en plus courants impliquant les forces de sécurité israéliennes et les Palestiniens, y compris des assaillants.

La montée des tensions israélo-palestiniennes a fait de 2022 l'année la plus meurtrière en Cisjordanie et à Jérusalem-Est dans ce conflit de longue date depuis 2006. Une nouvelle escalade est probable, car le gouvernement le plus à droite et le plus religieux de l'histoire d'Israël est sur le point d'être installé dans les prochaines semaines, avec le retour au pouvoir de l'ancien Premier ministre Benjamin Netanyahou.

 

 « Soutiens totalement le commandant de compagnie de la PAF qui a identifié l'incident d'hier, initié et neutralisé le terroriste et ainsi sauvé des vies. Toute tentative de déformer la réalité et de raconter une fausse histoire dans le monde est tout simplement une honte. Je souhaite un prompt rétablissement au combattant qui a été blessé dans l'incident. Nos forces de sécurité continueront d'agir résolument contre le terrorisme où qu'il lève la tête.
Yair Lapid (@yairlapid) le 3 décembre 2022.

Plus de 140 Palestiniens ont été tués dans les combats israélo-palestiniens cette année. L'armée israélienne affirme que la plupart des Palestiniens tués sont des militants. Mais des jeunes lanceurs de pierres protestant contre les incursions de l'armée israélienne et d'autres personnes non impliquées dans les affrontements ont également été tués.

La fusillade meurtrière de vendredi s'est déroulée sur fond de mois de raids d'arrestation israéliens en Cisjordanie, provoqués par une série d'attaques palestiniennes contre des Israéliens au printemps, qui ont fait 19 morts.

L'armée affirme que ces raids sont destinés à démanteler les réseaux de militants et à déjouer les attaques futures, mais les Palestiniens affirment qu'ils renforcent l'occupation israélienne illimitée, qui dure depuis 56 ans. Une récente vague d'attaques palestiniennes contre des cibles israéliennes a tué neuf autres personnes.

 

 

03/12/2022

GIDEON LEVY
Israël l'a empêché de voir sa mère depuis 20 ans. Il est déterminé à changer cela

Gideon Levy, Haaretz, 2/12/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Né à Gaza, il a passé la majeure partie de sa vie en Israël. Il a étudié le cinéma et travaille maintenant comme sous-chef dans un restaurant populaire de Tel Aviv, où il vit. Mais sa mère est à Gaza et, malgré leur proximité, Israël les empêche de se rencontrer depuis 20 ans.

Mohammed Abu Sharb, à Tel Aviv. Juste un Israélien en tongs.  Photo : Alex Levac

Mohammed Abu Sharb n'a qu'un vague souvenir de sa dernière rencontre avec sa mère. Il se souvient qu'il l'a accompagnée en taxi jusqu'au poste de contrôle d'Erez, à la frontière avec la bande de Gaza, et qu'avant de se séparer, elle a insisté pour lui glisser dans la main un billet de 100 shekels (environ 22 dollars à l'époque). Il savait qu'il s'agissait d'une somme importante pour elle, mais a néanmoins pris l'argent. Elle est ensuite sortie de la voiture et a disparu dans les profondeurs du poste de contrôle, et il a pris un taxi pour retourner à Be'er Sheva. Il ne se souvient de rien d'autre.

Ni l'un ni l'autre, mère et fils, n'auraient pu imaginer alors que ce serait leur dernière rencontre avant de nombreuses années. En fait, au cours des 20 années qui se sont écoulées depuis, Abu Sharb, qui a maintenant 39 ans, n'a pas vu sa mère, Ismahan, 58 ans, même une fois.

Ils vivent à une heure et demie l'un de l'autre en voiture, elle à Gaza, lui dans le quartier Florentin au sud de Tel Aviv. Mais en raison des restrictions draconiennes qu'Israël a imposées pour entrer et sortir de la bande assiégée, il ne peut pas rencontrer sa mère. Abu Sharb a décidé de se lancer dans une mission pour voir sa mère en personne, et peut-être aussi de faire un film sur ces événements.

C'est un jeune homme souriant et timide, qui ressemble à la star égyptienne du football Mohamed Salah. L'histoire de sa vie est vraiment digne de Dickens, presque incroyable. Il est né dans la bande de Gaza, dans un quartier adjacent au camp de réfugiés de Jabalya, d'une mère originaire de Gaza et d'un père bédouin du village de Hura, dans le Néguev. Ils se sont mariés lors d'un mariage forcé et ont divorcé environ un mois plus tard, avant de savoir qu'Ismahan était enceinte.

Jusqu'à l'âge de 11 ans, Mohammed a vécu avec sa mère à Gaza, mais ensuite, lors d'un autre mariage arrangé, elle est devenue la seconde épouse d'un habitant de Tel Sheva, une ville bédouine située à l'extérieur de Be'er Sheva, et a déménagé là-bas pour vivre avec lui. Une fois de plus, le mariage n'a pas duré. En un mois, Ismahan a dû partir et retourner dans la bande de Gaza. Mohammed ne voulait pas rentrer avec elle, alors elle l’a laissé à Hura avec ses grands-parents paternels.

Même si Mohammed était sans papiers, son grand-père, qui avait de bonnes relations, a pu l'inscrire à l'école de Hura avant même que son statut officiel en Israël ne soit réglé.

02/12/2022

ANTONIO MAZZEO
Les USA et Israël s’exercent à une guerre aérienne contre l’Iran

Antonio Mazzeo , Pagine Esteri, 30/11/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Essais de guerre nucléaire anti-Iran. L'un des plus grands exercices aériens jamais réalisés conjointement par les forces armées des États-Unis d'Amérique et d'Israël a débuté dans le ciel de la Méditerranée orientale, mardi 29 novembre. Jusqu'au jeudi 1er décembre, des chasseurs-bombardiers usaméricains et israéliens vont simuler une attaque contre des centrales iraniennes.

"Des chasseurs et des avions ravitailleurs en vol de l'armée de l'air israélienne (IAF) et de l'armée de l'air américaine participeront à l'exercice et simuleront différents scénarios pour faire face aux menaces régionales", explique le service de presse de l'armée de l'air de Tel Aviv dans une note.

 C'est le Jerusalem Post qui révèle le véritable objectif de ces wargames. "Avec la montée des tensions autour du programme nucléaire iranien et les hostilités dans la région, Israël et la République islamique se menacent mutuellement, et les hauts responsables des deux pays affirment que leurs forces armées respectives sont capables de riposter à leurs adversaires", écrit le journal. Face à une attaque de plus en plus prévisible contre les infrastructures nucléaires iraniennes, les autorités israéliennes ont lancé un programme ambitieux et coûteux de renforcement de leurs forces aériennes et maritimes : 58 milliards de shekels (environ 16,29 milliards d'euros) ont été alloués pour le budget de la défense 2023, dont 3,2 milliards sont spécifiquement destinés à la lutte contre Téhéran.

 Selon les médias usaméricains, la décision d'organiser cet exercice aérien a été prise le 23 novembre à l'occasion de la visite aux USA du chef des forces armées israéliennes, le général Aviv Kochavi. "Le chef militaire israélien ainsi que le chef d'état-major américain, le général Mark Milley, et le commandant du CENTCOM (Central Command), le général Michael Kurilla, envisagent de mener un exercice d'entraînement conjoint dans les semaines à venir afin de former les militaires en prévision d'un éventuel conflit avec l'Iran et ses alliés au Moyen-Orient", a annoncé Fox News Digital à l'issue du sommet.

 Pendant sa mission sur le sol usaméricain, le général Aviv Kochavi a également été l'invité du conseiller à la sécurité nationale du président Biden, Jake Sullivan, et du directeur de la Central Intelligence Agency (CIA), William J. Burns. Au Naval Forces Command de Norfolk (Virginie), le chef des forces armées israéliennes a été accompagné de hauts responsables de l'US Navy à bord d'un sous-marin nucléaire et d'un porte-avions pour "en apprendre davantage sur leurs capacités opérationnelles", comme l'a indiqué l'US Navy. Kochavi a conclu sa tournée en participant à un exercice de "préparation" à la crise au quartier général du CENTCOM à Tampa, en Floride, où il a reçu la médaille du service militaire méritoire "pour avoir contribué à approfondir le partenariat stratégique entre les États-Unis d'Amérique et Israël".

 "Afin d'améliorer nos capacités à relever les défis dans la région, l'activité conjointe avec le CENTCOM va se développer de manière significative à l'avenir", a déclaré le général Kohavi avant de rentrer en Israël. "Dans le même temps, les forces armées israéliennes continueront à agir à un rythme accéléré contre l'enracinement du régime iranien dans la région."

 "L'Iran subit de nombreuses pressions économiques, militaires et internes et, d'autre part, continue à promouvoir son programme nucléaire", a ajouté Kohavi. "Avec le général Mark Milley, nous sommes d'accord : nous sommes à un moment critique et le temps exige d'accélérer les plans opérationnels et de coopération contre l'Iran et ses alliés terroristes régionaux."

 L'escalade dangereuse de l'affrontement entre Washington et Tel Aviv et Téhéran trouve une confirmation dans d'autres déclarations officielles récentes. Une semaine avant le voyage du général Kohavi, c'est le général Michael Kurilla, commandant du CENTCOM, qui s'était rendu dans le nord d'Israël pour assister à la livraison de trois nouveaux chasseurs-bombardiers "furtifs" F-35 par la holding militaro-industrielle Lochkeed Martin, après avoir escorté deux bombardiers stratégiques B-52 de l'US Air Force dans l'océan Atlantique et en Méditerranée. "Nous opérons ensemble sur tous les fronts pour recueillir des données de renseignement, neutraliser les menaces et nous préparer à divers scénarios dans une ou plusieurs arènes, en développant des capacités militaires contre l'Iran et d'autres menaces au Moyen-Orient", ont déclaré les généraux Kohavi et Kurilla.

 Le 22 novembre, les forces navales usaméricaines et le commandement de la Ve flotte stationnés à Manama, au Bahreïn, ont publié un communiqué de presse accusant l'Iran d'une attaque aérienne par drone contre un pétrolier battant pavillon libérien, le 15 novembre, dans les eaux du nord de la mer d'Oman. "Un laboratoire de la marine américaine à Bahreïn a confirmé le lien avec l'Iran : deux techniciens en bombes et explosifs sont montés à bord du navire à moteur Pacific Zircon le lendemain de l'attaque pour évaluer les dégâts et recueillir des fragments de l'aéronef sans pilote en vue d'une analyse médico-légale", écrit le commandement usaméricain. "Le laboratoire a déterminé que le drone qui a frappé le pétrolier était un Shahed-136, correspondant à un modèle historique d'utilisation croissante d'une capacité létale directement par l'Iran ou ses alliés au Moyen-Orient. L'Iran a fourni des drones aériens aux Houthis au Yémen et ceux-ci ont été utilisés contre l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ces dernières années. En outre, la plate-forme Shahed-136 est la même que les drones que l'Iran a fournis à la Russie pour les utiliser contre l'Ukraine".

 Les propos du vice-amiral Brad Cooper, commandant des forces navales usaméricaines du Central Command et de la Ve flotte, sont encore plus tranchants : "L'attaque iranienne contre un navire commercial transitant dans les eaux internationales était délibérée, flagrante et dangereuse, et a mis la vie de l'équipage en grave danger, déstabilisant ainsi la sécurité maritime au Moyen-Orient".

 Par coïncidence, deux jours avant la publication du communiqué de presse sur la prétendue frappe "iranienne" contre le Pacific Zircon, une délégation des forces armées israéliennes, dirigée par le conseiller à la sécurité nationale Eyal Hulata, a été reçue par le commandement des forces navales usaméricaines à Bahreïn. Le vice-amiral Brad Cooper et le coordinateur du Conseil national de sécurité des USA pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, Brett McGurk, ont accueilli les Israéliens. "La délégation a visité le quartier général de la Cinquième Flotte pour discuter des futures possibilités de coopération dans la région et s'informer des efforts en cours pour renforcer les partenariats maritimes régionaux et intégrer les nouvelles technologies", rapporte le Commandement de Manama. "L'automne dernier, le Pentagone a repositionné Israël de la zone relevant du commandement américain en Europe et du commandement central opérant dans la région pour renforcer la coopération militaire navale principalement en mer Rouge."

 À Bahreïn, la délégation israélienne a également rencontré des membres de la Task Force 59, l'unité d'élite de la marine usaméricaine créée en 2021 pour contribuer au développement de nouveaux systèmes de drones navals et sous-marins et de technologies d'IA (intelligence artificielle) pour la Ve  flotte. "La task force a présenté aux invités les résultats des collaborations initiées avec l'industrie privée, les universités et les partenaires régionaux pour améliorer la visibilité au-dessus, en dessous et sur la mer", explique l'US Navy. Maintenant, avec le maxi exercice aérien israélo-usaméricain, les menaces nucléaires dans le ciel de la Méditerranée et du golfe Arabo-Persique deviennent visibles.      

 

 

SHANY LITTMAN
Les musées israéliens ont peur de parler de la Nakba : la famille d’artistes Abu Shakra entre dans l’histoire

Pour la première fois, un musée israélien consacre la quasi-totalité de son espace d’exposition à une exposition d’art palestinien. Les artistes, tous membres de la famille Abu Shakra, veulent parler d’un sujet tabou...

Shany Littman, Haaretz, 2/12/2022 
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

La date est le 31 octobre, la veille des élections israéliennes. Au rond-point situé à l’entrée d’Oum el Fahm , deux femmes tiennent des pancartes invitant les habitants à se rendre aux urnes le lendemain pour voter. Quatre énormes panneaux d’affichage surplombent l’intersection, chacun portant le portrait d’un candidat différent de la liste du parti Balad, et un cinquième panneau d’affichage prédit les quatre sièges de la Knesset que le parti va remporter, assurant ainsi sa place dans la prochaine Knesset. Mais nous savons maintenant comment cela a tourné. (Balad n’a pas dépassé le seuil de voix nécessaire (3,25%) pour entrer au parlement).

Karim Abu Shakra admet qu’il n’a pas l’intention de voter. En fait, depuis 40 ans, il n’a jamais mis les pieds dans un isoloir. La grande et belle galerie où il présente ses peintures aux collectionneurs et aux conservateurs intéressés par son travail est située dans le quartier en haut de la colline, à côté de son studio et de la maison qu’il partage avec sa femme et leurs quatre enfants. De grandes peintures à l’huile sont accrochées aux murs. Certaines sont des autoportraits très expressifs, d’autres des peintures de fleurs et de plantes - des cyclamens dans un pot de fleurs, un oiseau perché sur un chardon, et de nombreux cactus aux formes et aux couleurs variées. Accrochée près de la porte, une photographie encadrée en noir et blanc de son oncle, l’artiste Asim Abu Shakra, décédé d’un cancer en 1990, à l’âge de 28 ans. Karim n’avait que 8 ans à l’époque, mais peu de temps après, il est devenu évident qu’il était destiné à poursuivre le chemin de son oncle talentueux. « C’est mon professeur. Il m’a pris la main et m’a dit : "Continue" », dit Karim.