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12/09/2022

SHIMON STEIN / MOSHE ZIMMERMANN
Le fossé entre Allemands et Israéliens ne cesse de se creuser

Shimon Stein et Moshe Zimmermann, Frankfurter Rundschau, 9/9/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Shimon Stein a été ambassadeur d'Israël en Allemagne (2001-2007) et est actuellement chercheur principal à l'Institut d'études de sécurité nationale (INSS) de l'Université de Tel Aviv.

Moshe Zimmermann est professeur émérite à l'Université hébraïque de Jérusalem.

Une étude sur la position des Allemand·es à l'égard d'Israël et de sa politique donne des résultats qui ont de quoi dégriser

Plus la commémoration du 50e anniversaire de la prise d’otages de Munich se rapprochait, plus les relations germano-israéliennes revenaient en une des médias. C'est pourquoi l'étude de la Fondation Bertelsmann « L'Allemagne et Israël aujourd'hui : entre connexion et distanciation » a pu trouver son chemin dans les médias. Dans la plupart des journaux et des chaînes de télévision, la nouvelle est apparue à peu près sous le titre : « Les Israéliens regardent l'Allemagne de manière plus positive que l'inverse. » Cela n'est pas surprenant, car cette conclusion a déjà été tirée par des sondages antérieurs menés par d'autres instituts de sondage.

Günther Schäfer, La Patrie, East Side Gallery, Berlin

Mais en examinant de plus près les résultats, un message plus important transpire : en ce qui concerne les relations de l'Allemagne avec Israël, le fossé entre la politique et la société menace de créer une situation explosive. Le mot distanciation (Entfremdung] apparaît déjà dans le sous-titre de l'étude, et la postface de Dan Diner souligne à juste titre le « hiatus d’ambiance » entre la société et la politique, comme le confirme également un récent « sondage Israël » d'Elnet (European Leadership Network).

Depuis 2008, les politiciens allemands citent la déclaration d'Angela Merkel : la sécurité d'Israël est la raison d'État allemande. La responsabilité envers Israël et le soutien aux intérêts israéliens – pour cela, il y a une grande majorité parmi les députés du Bundestag, selon le « sondage Israël ». Cependant, pour l'Allemand·e lambda, la mise en œuvre de ce mantra s'avère très problématique. Si Israël répondait aux ambitions nucléaires de l'Iran par une frappe militaire, seuls 13 % des Allemands seraient prêts à soutenir Israël (selon l'étude Bertelsmann). Et si Israël décidait de faire un pas de plus vers l'annexion des territoires palestiniens, les Allemands ne l'avaleraient pas en tant que raison d'État allemande – le nombre de partisan·es de la solution à deux États parmi eux·elles est trois fois et demie plus élevé que celui de leurs adversaires ! La classe politique sera-t-elle en mesure, même dans ces cas, de tenir les promesses de raison d'État de Merkel contre la volonté des citoyen·nes ?

Alors que la politique met en avant le soutien absolu à l'État juif, l'étude Bertelsmann montre que 83 % des Allemand·es ont une attitude qui va de la neutralité à l’indifférence face au conflit israélo-palestinien. En général, seulement un huitième des citoyen·nes allemand·es estiment que le gouvernement fédéral devrait soutenir Israël. Il serait toutefois erroné de rejeter globalement cette attitude des Allemand·es comme l'expression d'un antisémitisme généralisé lié à Israël : 90 % des personnes interrogées considèrent l'antisémitisme comme un problème et estiment en outre que « les Juifs font naturellement partie de l'Allemagne ». Environ un cinquième de la population est sensible aux préjugés antisémites – pas plus que la moyenne européenne et pas plus que les dernières décennies. En outre, beaucoup plus (43%) estiment que les élèves apprennent trop peu sur l'Holocauste que ceux (8%) qui affirment le contraire.

Un exemple de ce que toutes les attitudes critiques vis-à-vis d’Israël ne renvoient pas à un antisémitisme lié à Israël : si environ un tiers des Allemand·es ne ressentent pas de responsabilité particulière envers Israël et le peuple juif, il s'agit d'un manque évident de conscience historique. Mais ce déficit ne concerne pas seulement les Juifs et Israël – un tiers des personnes interrogées ont également répondu négativement à la question sur la « responsabilité vis-à-vis des personnes fuyant la guerre et la persécution dans le monde ».

Il est évident que la sympathie relativement faible pour Israël, telle que nous le révèle l'étude, résulte plutôt de l'attitude d'Israël envers le conflit israélo-palestinien : si 45% des Israéliens rejettent la solution à deux États et seulement 17% des Allemands sont de cet avis, le chemin vers le hiatus est ouvert. L'opinion des Allemand·es, poursuit l'étude, « sur le gouvernement israélien (43% plutôt mauvaise/très mauvaise) » est « encore plus négative que sur le pays dans son ensemble ».

En outre, l'approbation (43%) de l'affirmation « Le gouvernement israélien contribue à … l'antisémitisme », couplé à 0% (!), qui ont une « très bonne opinion du gouvernement israélien actuel », indique que les critiques à l'égard de l'État juif sont principalement dirigées contre la politique gouvernementale israélienne. Même si les préjugés antisémites jouent un rôle, une chose est claire : le fossé entre la République fédérale officielle et la vox populi n'est pas négligeable.

A cela s'ajoute le fait que structurellement, « la distanciation » et « le hiatus » s'expriment non seulement dans la comparaison entre la politique et l'opinion publique en Allemagne, mais aussi dans la perspective d'un ancrage démocratique dans les deux pays. Dans les deux sociétés, seuls 3 % rejettent la démocratie comme « meilleure forme d'État », mais alors qu'en Allemagne, seuls 28 % aspirent à un « homme fort », en Israël, ils sont 77 % ! Pas de surprise pour les observateurs des faiblesses de la « seule démocratie du Moyen-Orient ».

L'étude a également souligné à juste titre les particularités du secteur juif religieux, qui a une opinion très négative sur l'Allemagne (39%, contre 13% chez les Juifs laïcs), et s'oppose fermement à la solution à deux États. Compte tenu de la part croissante de ce groupe, on peut s'attendre à une distanciation progressive entre Allemands et Israéliens. La proposition de l'étude Bertelsmann de « faire des efforts pour inclure les Israéliens qui se définissent comme religieux » est naïve, car une opinion fondée sur la foi ne peut pas être changée de cette façon.

L'AfD incarne un paradoxe des relations germano-israéliennes : la direction du parti est particulièrement pro-israélienne. De ce parti, même les colons juifs reçoivent un soutien. Donc, absurdement, l'AfD pourrait-elle devenir le moyen de surmonter le hiatus israélo-allemand ? Mais l'étude doit être lue comme un avertissement pour les Allemands et les Israéliens en même temps : les aéfdéistes de base sont ceux qui considèrent le moins la démocratie comme la meilleure forme d'État, et souhaitent le plus un « Führer fort ». A la question : « Le souvenir de l'Holocauste devrait-il jouer un ... rôle dans la politique allemande actuelle et future ? », 81% des aéfdéistes répondent « aucun ou un petit rôle ». Ils sont les plus nombreux à rejeter la responsabilité historique (allemande) pourIsraël (68%),un partisan de l'AfD sur deux croit au préjugé antisémite selon lequel « les Juifs ont trop d'influence dans le monde ». Que les Juifs ne font pas partie de l'Allemagne, 31% d'entre eux le pensent. À un moment donné, le masque tombera et posera également la question de la proximité entre ce parti et ses sympathisants en Israël.

Les études nous donnent donc une leçon dégrisante : dans le contexte du conflit israélo-palestinien, l'écart entre la politique et l'opinion publique en Allemagne, ainsi qu'entre le système de valeurs israélien et allemand, ne cesse de se creuser. Les deux champs relationnels semblent courir le risque de transformer l'écart en un fossé profond. Pour arrêter la dégringolade, les discours solennels au Bundestag ne suffisent pas. Ce qu’il faudrait, ce serait plutôt un tournant dans la politique israélienne.

 

 

11/09/2022

GIDEON LEVY
“Personne ne nous dictera notre conduite” (Yair Lapid)

Gideon Levy, Haaretz, 11/9/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Je vais reposer la question : qu'est-ce qui est “israélien” pour moi, comme notre Premier ministre actuel le demandait à chaque invité de son ancien talk-show télévisé ? Et je répondrai encore une fois : Yair Lapid. Et qu'est-ce qui est israélien chez Lapid ? L'incroyable combinaison d'arrogance et d'autovictimisation simultanées.


« Je ne permettrai pas qu’un soldat israélien soit poursuivi juste pour recevoir des applaudissements de l’étranger. Personne ne nous dictera nos règles d’engagement »

Il y a des chefs d'État arrogants et d'autres qui s'autovictimisent, mais il est difficile de trouver un autre exemple de leader qui soit les deux. Il faut une bonne dose de chutzpah israélienne pour être à la fois pitoyable à ses propres yeux et vantard. Un exemple : « Personne ne nous dictera nos règles d'engagement, alors que c'est nous qui nous battons pour nos vies », a déclaré le Premier ministre après que les USA ont demandé à Israël de revoir la politique d'ouverture du feu des Forces de défense israéliennes.

La réponse automatique et générique de Lapid avait tout pour plaire : cela fait longtemps que nous n'avons pas eu un orfèvre des mots capable de distiller tous les maux d'Israël en une seule et courte phrase - seulement 12 mots, en hébreu. Il est également difficile d'imaginer un premier ministre qui s'efforce de changer, qui essaie de se différencier pendant un mandat aussi court, mais qui s'attache automatiquement aux déclarations malveillantes et corruptrices de son prédécesseur. Peu importe qu'il soit élu ou non, aucun changement ne se produira.

10/09/2022

JONATHAN COOK
La reine et ce qu’elle laisse : la Grande-Bretagne du XXIe siècle n'a jamais eu l’air aussi médiévale

Jonathan Cook, Mint Press, 9/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice, Tlaxcala

Costumes noirs, tons étouffés, un air de révérence dissimulent la panique d'un establishment qui vient de perdre le véhicule principal pour justifier son privilège

The Queen, par Jorge Luis Cabrera García, Cuba

Toute personne au Royaume-Uni qui s'imaginait vivre dans une démocratie représentative – une démocratie dans laquelle les dirigeants sont élus et responsables devant le peuple – sera en proie à un réveil brutal au cours des prochains jours et des prochaines semaines.

Les horaires de télévision ont été balayés. Les présentateurs doivent porter du noir et parler avec un ton étouffés Les unes des canards sont uniformément sombres. Les médias britanniques parlent d'une voix unique et respectueuse de la Reine et de son legs irréprochable. 

Westminster, quant à lui, a été dépouillé de la gauche et de la droite. Les partis conservateur, libéral-démocrate et travailliste ont mis de côté la politique pour faire le deuil d'une seule voix. Même les nationalistes écossais – censés essayer de se débarrasser du joug des siècles d'une domination anglaise présidée par le monarque – semblent être en deuil effusif

Les problèmes urgents du monde – de la guerre en Europe à une catastrophe climatique imminente – ne sont plus d'intérêt ou de pertinence. Ils peuvent attendre que les Britanniques sortent d'un traumatisme national plus urgent.

Sur le plan intérieur, la BBC a dit à ceux qui sont confrontés à un long hiver au cours duquel ils ne pourront pas se permettre de chauffer leur maison que leurs souffrances sont « insignifiantes » par rapport à celles de la famille d'une femme de 96 ans qui est morte paisiblement dans le luxe. Ils peuvent attendre aussi. 

En ce moment, il n'y a pas de place publique pour l'ambivalence ou l'indifférence, pour la réticence, pour la pensée critique – et certainement pas pour le républicanisme, même si près d'un tiers de la population, surtout les jeunes, souhaite l'abolition de la monarchie. L'establishment britannique attend de chaque homme, femme et enfant qu'il fasse son devoir en baissant la tête. 

La Grande-Bretagne du XXIe siècle n’a jamais eu l’air aussi médiéval.

09/09/2022

LUIS CASADO
L'opération a été un succès. Seul détail : le patient est mort...
Sur le résultat du référendum constitutionnel au Chili

 

Luis Casado, 9-9-2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Ils ont eu ce qu'ils voulaient. Les âmes innocentes ne comprennent pas, elles expriment soit leur indignation, leur déception ou leur colère, ou tout cela à la fois. Mais ils ne comprennent pas. Luis Casado offre une poste. Comme il le dit lui-même, une "petite lumière"...

Pour le moment, je voudrais seulement comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois un tyran seul qui n’a de puissance que celle qu’ils lui donnent, qui n’a pouvoir de leur nuire qu’autant qu’ils veulent bien l’endurer, et qui ne pourrait leur faire aucun mal s’ils n’aimaient mieux tout souffrir de lui que de le contredire.

(Étienne de la Boétie. Discours sur la servitude volontaire. 1547)

La majorité confortable obtenue par le “Non” à la nouvelle Constitution a généré une stupéfaction, qui ne cesse d’être stupéfiante. L'incompréhension générale s'est manifestée de diverses manières, dont la colère n'est pas la moindre.

Malheureusement, ni la colère ni l'incompréhension ne peuvent nous aider à répondre à la célèbre question posée par Vladimir Ilitch Oulianov : Que faire ?

Dès lors, proposer une interprétation, jeter une petite lumière qui éclaire l'obscurité du tunnel, allumer la bougie qui empêche les couillons de continuer à fouler la merde dans laquelle ils vivent et marchent, c’est faire œuvre utile.

Tony Blair avait coutume de dire : « la mémoire de l'opinion publique ne dure pas plus de huit jours », ce qui semble malheureusement être une vérité incontestable. Le Chili vit une réalité qui est le produit d'un demi-siècle de crimes et d'infamies. Une longue période qui a eu la vertu de brouiller la question de fond, pourtant vécue au quotidien, remplacée par une décision concernant un texte dont la principale caractéristique est de n'avoir jamais été mis en pratique, et qui ne pouvait donc évoquer que des illusions oniriques ou des peurs insomniaques.

La question à un million est d'une simplicité biblique : quelle est la question qui a été la principale source de tension dans la vie publique au cours des cinquante dernières années ? Les règles de vie en société, codifiées, comme il se doit dans les sociétés modernes, dans une Magna Carta appelée Constitution. Un texte qui, dans ce que nous appelons “démocratie”, est, ou devrait être, rédigé et approuvé par les citoyens, un droit inaliénable que l'histoire a appelé la souveraineté du peuple.

Ce qui empoisonne le corps social est précisément une constitution imposée sous la dictature, rédigée par une poignée de voyous intellectuels au service des puissants qui pillent les richesses du pays, exploitent sa population et détruisent l'écosystème. C'est la question de fond.

Quelle était la question du référendum ? Celle à laquelle chaque électeur devait répondre en son âme et conscience. C’était celle-ci  :

« Approuvez-vous le texte de la nouvelle Constitution proposé par la Convention constitutionnelle ? »

LUIS CASADO
La operación fue un éxito. Único detalle: murió el paciente…
Sobre el resultado del plebiscito constitucional en Chile

Luis Casado, 9-9-2022

Obtuvieron lo que buscaban. Las almas inocentes no comprenden, manifiestan ya sea su indignación, su decepción o su cabreo, o todo ello junto. Pero no entienden. Luis Casado ofrece alguna pista. Como dice él mismo, una “lucecilla”...

Por el momento solo quisiera comprender cómo es posible que tantos hombres, tantas aldeas, tantas ciudades, tantas naciones, soporten a veces un tirano aislado que no tiene sino el poder que ellos le dan, que solo puede dañarles en la medida que quieran soportarlo, y que no podría hacerles ningún mal si no prefiriesen aceptarle todo antes que contradecirlo.
(Étienne de la Boétie. Discurso de la Servidumbre Voluntaria. 1547)

La significativa mayoría alcanzada por el Rechazo a la Nueva Constitución generó estupefacción, lo que no deja de ser estupefaciente. La incomprensión general se manifiesta de diversos modos, entre los cuales el cabreo no es el menos frecuente.


 Desafortunadamente, ni el cabreo ni la incomprensión pueden sernos de utilidad a la hora de responder a la célebre cuestión planteada por Vladimir Ilich Ulianov: ¿Qué hacer?

De ahí que ofrecer una interpretación, arrojar alguna lucecilla que aclare la oscuridad del túnel, encender la candela que le evite a los pringaos seguir pisando la mierda en la que viven y caminan… sea obra útil.

Tony Blair solía decir: “la memoria de la opinión pública no dura más de ocho días”, lo que desafortunadamente aparece como una verdad incontrovertible. Chile vive una realidad que es el producto de medio siglo de crímenes e infamias. Tiempo prolongado que ha tenido la virtud de desdibujar la cuestión de fondo, –vivida cotidianamente no obstante–, sustituida por una decisión a propósito de un texto cuya principal característica consiste en que nunca fue puesto en práctica, y que por ende solo podía evocar ilusiones oníricas o bien temores de insomnio.

La pregunta del millón es de una sencillez bíblica: ¿Cuál es la cuestión que tensiona la vida pública desde hace pronto cincuenta años? Las reglas de la vida en sociedad, codificadas como conviene en las sociedades modernas en una Carta Magna llamada Constitución. Texto que en lo que conocemos como ‘democracia’ es, o debiese ser, redactado y aprobado por la ciudadanía, derecho inalienable que la Historia se encargó de denominar Soberanía del Pueblo.

Lo que envenena el cuerpo social es precisamente una Constitución impuesta en dictadura, redactada por un puñado de maleantes intelectuales al servicio de los poderosos que saquean las riquezas del país, explotan a su población y destruyen el ecosistema. Esa es la cuestión de fondo.

¿Cuál fue la pregunta del plebiscito? Esa a la cual cada elector debía responder en consciencia. Hela aquí:

"¿Aprueba usted el texto de Nueva Constitución propuesto por la Convención Constitucional?"

La Constitución en vigor, la mal parida, sigue allí, nadie pregunta nada al respecto, nadie debe pronunciarse en cuanto a su derogación simple y pura, a su eliminación como desecho de una mala digestión, así fuese solo por la impudicia de su origen, para no hablar de sus atroces consecuencias para la inmensa mayoría del país. ¿Acaso no fue eso lo que millones de chilenos salieron a rechazar a las calles obligando a la costra política parasitaria a reaccionar?

Pueden decir lo que quieran, la ilegitimidad del sistema institucional en vigor fue y es razón necesaria y suficiente para borrar de una pluma, como ilegal e inaceptable, todo lo obrado en ese ámbito por la dictadura y más tarde por los traidores a la democracia.

Sin embargo, todos, de Aylwin a Boric, acompañados de sus respectivos secuaces, aceptaron que la “evolución institucional” debía tener lugar en el marco y en los límites de lo decidido por la dictadura.

Todo, incluyendo las leyes electorales y sus curiosas modificaciones, se hizo al amparo y bajo la inspiración del genio de Jaime Guzmán, ese que se auto felicitaba de haber excretado un texto que, sea quien sea que esté en el gobierno, “le obligará a hacer lo que nosotros queremos”.

Luego, como en las caricaturas del deporte tarifado, se modifican las reglas, o se mantienen, en función de la conservación estricta de los intereses de quien debe ganar la competición de cualquier modo.

A nadie le pasó por la cabeza, sumidos como estaban en la repartición del pillaje, la idea de “borrón y cuenta nueva”. Plebiscitos van y plebiscitos vienen, la Constitución de la Dictadura sigue incólume, algo defecada por la incontinencia de Ricardo Lagos, pero sigue siendo ella misma en lo esencial.

¿Ocurrió algo parecido en la Alemania de la pos guerra? ¿Siguió en vigor la institucionalidad nazi mientras se reconstruía un modelo democrático?

¿Ocurrió algo parecido en la Francia liberada? ¿Siguieron en vigor las leyes promulgadas por los traidores colaboracionistas de Vichy mientras se reconstruía la República?

Chile es el único país del mundo en el que el agua y el mar fueron privatizados, y la evolución institucional se hace al abrigo, ¡y qué abrigo!, de las reglas de una dictadura.

CAROLINE ELKINS
Les fictions impériales derrière le Jubilé de Platine de la reine Élisabeth II

Caroline Elkins, The New York Times, 4/06/2022
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Caroline Elkins (1969) est professeure d'histoire et d'études africaines et afro-américaines à l'université Harvard, professeur associée en gestion à la Harvard Business School, fondatrice et directrice du Centre d'études africaines de l'université d'Harvard.

Son livre, Imperial Reckoning: The Untold Story of Britain's Gulag in Kenya ( « Reconnu par l'Empire : l'histoire inédite du goulag britannique au Kenya ») (2005), a remporté le prix Pulitzer de l'essai en 2006. C'est grâce au livre que les plaintes déposées par d'anciens détenus Mau Mau contre le gouvernement britannique, pour des crimes commis dans les camps d'internement du Kenya dans les années 1950, ont abouti. Livre le plus recent : Legacy of Violence: A History of the British Empire.

"Churchill était un raciste" : une manifestation sur la place du Parlement de Londres en 2020. Photo Isabel Infantes/Agence France-Presse — Getty Images

« Je déclare devant vous que toute ma vie, qu'elle soit longue ou courte, sera consacrée à votre service et au service de notre grande famille impériale à laquelle nous appartenons tous. » On dit que la princesse Élisabeth a pleuré lors de la première lecture de ce discours. À l'occasion de son 21e anniversaire, et diffusé en 1947 depuis un jardin rempli de bougainvilliers au Cap, il annonçait l'incarnation future de la Grande-Bretagne, de son empire et du Commonwealth par la jeune reine.

À l'époque, les revendications d'indépendance s'enflammaient dans tout l'empire d'après-guerre. L'Inde et le Pakistan étaient sur le point de se libérer de la domination coloniale britannique, mais le gouvernement travailliste de Clément Attlee n'avait pas l'intention de plier ailleurs. La Grande-Bretagne avait entamé une politique de résurgence impériale, visant à reconstruire une nation d'après-guerre dévastée sur le plan budgétaire et revendiquant le statut de membre des Trois Grands [avec les USA et l’URSS, NdT] sur le dos de la population colonisée de l'empire.

Pendant plus d'un siècle, les revendications de la Grande-Bretagne à la grandeur mondiale ont été enracinées dans son empire, considéré comme unique parmi tous les autres. S'étendant sur plus d'un quart de la masse terrestre mondiale, l'Empire britannique était le plus grand de l'histoire. Après avoir dirigé le mouvement d'abolition, la Grande-Bretagne est devenue le fournisseur d'un impérialisme libéral, ou « mission civilisatrice », étendant les politiques de développement, qui se clivent aux hiérarchies raciales, à ses 700 millions de sujets colonisés, prétendant les introduire dans le monde moderne.

Célébrant les 70 ans de la reine Élisabeth II sur le trône, le jubilé de platine est plein de sens sur le passé impérial de la nation et le rôle surdéterminé de la monarchie dans celui-ci. De grands monuments commémoratifs et des statues célébrant les héros de l'empire ont proliféré après l'époque victorienne, et Londres est devenue un terrain de parade impérial et royal commémoratif. Aujourd'hui, c'est la scène centrale de la célébration sans précédent de la reine à une époque où les guerres sur l’histoire impériale qui couvaient depuis longtemps— avec le public, les politiciens, les universitaires et les médias qui contestent vivement les significations, les expériences vécues et les héritages de l'Empire britannique — explosent.

En Grande-Bretagne, les manifestants sont descendus dans la rue, au Parlement et dans les médias, réclamant la justice raciale et un bilan du passé colonial. Vêtus de masques noirs, certains ont défilé jusqu'à la place du Parlement de Londres en juin 2020, scandant « Churchill était un raciste ». Ils se sont arrêtés à la statue du premier ministre, en supprimant son nom avec de la peinture au pistolet et en le remplaçant par les paroles accablantes qui étaient chantées.

Dans peu d'autres pays, le nationalisme impérial subit des conséquences sociales, politiques et économiques aussi explicites. Se frottant contre les mouvements de « décolonisation » de la Grande-Bretagne, le Premier ministre Boris Johnson et la campagne du Brexit de son Parti conservateur ont revendiqué une vision « globale de la Grande-Bretagne », un Empire 2.0. « Je ne peux m'empêcher de me rappeler que ce pays a dirigé au cours des 200 dernières années l'invasion ou la conquête de 178 pays — c'est la plupart des membres de l'ONU », a-t-il déclaré.« Je crois que la Grande-Bretagne mondiale est une superpuissance douce et que nous pouvons être extrêmement fiers de ce que nous accomplissons. »

Les débats sur les significations et les héritages de l'empire britannique ne sont pas nouveaux. Cependant, les crises récentes entrent en collision avec une occasion singulière de splendeur royale, mettant en lumière les écarts entre les faits et la fiction, les réalités vécues et la création de mythes impériaux, et le rôle historiquement ancré du monarque en tant qu'avatar de l'empire britannique.

Depuis des générations, la monarchie tire des doses substantielles de son pouvoir de l'empire, tout comme le nationalisme impérial a tiré sa légitimité de la monarchie. Ce phénomène remonte au roi Henri VIII, qui déclara pour la première fois l'Angleterre empire en 1532, tandis que ses successeurs accordèrent des chartes royales facilitant le commerce transatlantique des esclaves et la conquête, l'occupation et l'exploitation du sous-continent indien et de vastes étendues d'Afrique.

C'est l'ère victorienne, avec la reine comme matriarche ointe de l'empire, qui a jeté les bases de la mission civilisatrice. Après que la Grande-Bretagne eut mené quelque 250 guerres au XIXe siècle pour « pacifier » les sujets coloniaux, une idéologie contestée, quoique cohérente, de l'impérialisme libéral a émergé qui a intégré des revendications impériales souveraines avec une énorme entreprise de réforme des sujets coloniaux, souvent appelés « enfants ». L'œil perspicace de la Grande-Bretagne jugeait quand les « non civilisés » étaient complètement évolués.

Une caricature éditoriale de 1882 dépeint l'Angleterre comme un céphalopode à 13 bras avec haut-de-forme alors qu'elle pose ses tentacules sur un certain nombre de masses terrestres et en prend une étiquetée “Égypte”. Photo d’archives via Getty Images

LUIS E. SABINI FERNÁNDEZ
Apotegma del mundo empresario: Time is money
A propósito de un juicio al consorcio Dupont, y la vida ¿qué es?

Luis E. Sabini Fernández, 9-9-2022


Dark Waters

Una película norteamericana reciente, ganadora de premios y reconocimientos, Dark Waters, de 2019, producida y actuada por Mark Ruffalo –basada en una historia contada por Mario Correa y Matthew M. Carnahan  de un abogado en la vida real, Robert Bilott–, expone claramente el trasfondo de la ideología dominante en EE.UU.  Algo que se desenvuelve más allá del contenido expreso de la película y por el cual ha sido muy estimada.

Bilott, abogado de un estudio de los llamados corporativos, dedicados a defender el mundo de los negocios, él mismo proveniente de Virginia Occidental, se entera que un vecino de su abuela, está enfrentando unas muertes inaceptables de vacas que cría. Lleva 190 vacas muertas, que él inicialmente enterraba “como de la familia”, le cuenta  a Bilott, pero a medida que el daño desconocido se expande, el granjero ve cada vez más claro que hay un envenenamiento de las aguas de las cañadas locales, y se ve obligado a quemar grupalmente a los cadáveres.

 Linda con terrenos de un laboratorio, Dupont, y dado que ya nos hallamos en la segunda mitad del s XX, inevitablemente el granjero se pregunta qué veneno proviene de ese terreno.

El papel del protagonista de la película es inicialmente ambiguo: honestamente, quiere ayudar al vecino de su abuela (que es además el anfitrión de un hogar que él conoció bien de niño), un ganadero mediano, Wilbur Tennant, pero sus colegas del buffet le advierten de lo insensato que sería “pelear” contra Dupont. Así que Bilott procura hacer una demanda limitada, como para corregir desprolijidades que, por otra parte, él mismo no entiende.

El abogado que representa a Dupont, viejos compinches del mundillo de las ordenanzas y reglamentos, no acepta ningún abordaje, ni siquiera  el que tímidamente Bilott pensaba hacer. 

El abogado defensor y la empresa

Y la incursión de Bilott en la maraña de disposiciones empresariales y  legales lo va  introduciendo en el universo de tóxicos y venenos usados con impunidad. Va advirtiendo que los estudios y análisis que se hacen, tanto los propios de la empresa como los ajenos encargados revelan daños, que Dupont sin embargo pasa por alto. Amparada por dictámenes “científicos” (en rigor, firmados por científicos) que atestiguan inocuidad o daño ligero de los productos  químicos investigados. 

Bilott se va dando cuenta que la calidad de “cómodo para evitar adherencias”, de un plástico diseñado inicialmente para uso militar y que se ha introducido al mercado hogareño para facilitar y modernizar la vida cotidiana, es un arma mortal; que toda la maravilla deslumbrante del teflón –porque de ese “adelanto tecnológico” se trata– en rigor va siendo más y más asociado a enfermedades como cáncer y malformaciones congénitas.

No es novedad.  El teflón repite el tendal sanitario que han dejado muchos otros polímeros de alto rendimiento comercial, económico y financiero.

Esta maravilla tecnológica fue descubierta “por casualidad” en 1938 por  Roy J. Plunkett (como la inmensa mayoría de los derivados plásticos del petróleo, acaecidos en la primera mitad del siglo XX)

Y en 1945 se lo patentó y salió como mercancía:

Desde que se registró entonces, la marca Teflon™ se ha tornado inmensamente popular y reconocida en todo el mundo por sus propiedades antiadherentes.[1] Se emplea en: “Recubrimientos para utensilios de cocina; telas y productos textiles antimanchas y que repelen la suciedad; recubrimientos para entornos productivos e industriales difíciles.”

Tal vez en recubrimientos industriales habría sido usado sin el potencial patógeno que reveló al aplicarlo a ollas y sartenes, en contacto directo con nuestros alimentos.

”Plunkett recibió el reconocimiento de la comunidad científica, académica y civil de todo el mundo por su contribución. Ingresó al Salón de la Fama de los Plásticos en 1973 y al Salón de la Fama de Inventores de la Nación en 1985.”

Por lo transcripto vemos que el teflón formó parte del tecnooptimismo  empresario que no estaba dispuesto a perder el negoción por algunos afectados.

Rob Bilott en las tierras de los Tennant cerca de Parkersburg, Viginia Occidental. Foto Bryan Schutmaat para The New York Times

SERGIO RODRIGUEZ GELFENSTEIN
Ukraine : une guerre en minijupes ?

 Sergio Rodríguez Gelfenstein, 8/9/2022
Traduit par
Fausto Giudice,
Tlaxcala

Ce n’est pas suffisamment connu, mais il y a peut-être peu de scientifiques du social qui aient théorisé autant et aussi bien sur la guerre que Vladimir I. Lénine. Étudiant la Première Guerre mondiale, il a écrit : « Le prolétariat lutte et luttera toujours sans relâche contre la guerre, mais sans oublier un seul instant que les guerres ne pourront disparaître que lorsque la division de la société en classes aura complètement disparu ». Le leader soviétique a également enseigné que : « Dans la guerre, c'est celui qui a le plus de réserves, le plus de sources de force, le plus de soutien parmi le peuple qui gagne ».

Manifeste socialiste de Zimmerwald contre la guerre, septembre 1915 : « la guerre qui a provoqué tout ce chaos est le produit de l'impérialisme, des efforts des classes capitalistes de chaque nation pour satisfaire leur appétit d'exploitation du travail humain et des trésors naturels de la planète... ils enterrent, sous des montagnes de décombres, les libertés de leurs propres peuples, en même temps que l'indépendance des autres nations. »

De même, l'un des plus brillants stratèges militaires contemporains, le général vietnamien Vo Nguyen Giap, a souligné le fait que les victoires au combat étaient étroitement liées aux « activités de production, de communication, de transport, de culture, de santé et autres ». Ainsi, le général Giap a considéré que « la victoire multilatérale [...] est le résultat de la lutte héroïque de tous les compatriotes de toutes les branches, services et régions qui ont consacré leurs efforts prodigieux, défié les bombes et les balles et surmonté d'innombrables difficultés ».

Il est donc nécessaire de comprendre que le phénomène de la guerre est très complexe, notamment parce que le facteur subjectif joue un rôle décisif pour forger des victoires en cas d'absence ou d'insuffisance des éléments matériels qui en constituent l'aspect objectif.

À l'époque moderne, bien que les instruments technologiques jouent un rôle de plus en plus important, l'outil principal et concluant reste la composante humaine qui participe au conflit. Quels que soient les développements technologiques, l'objectif de la guerre reste l'occupation d'un territoire, ce qui n'est possible que lorsque les soldats d'une armée et les officiers qui les commandent prennent le contrôle effectif de l'espace géographique.

Seuls ceux qui ont participé à une guerre connaissent la barbarie qu'elle implique. Dans la guerre, le meilleur et le pire de l'être humain se déchaînent, le meilleur parce que la décision de donner sa vie pour une chose à laquelle on croit dépasse toute analyse de la subjectivité qui pourrait motiver une telle action. Cela ne s'applique certainement pas aux mercenaires et aux tueurs à gages qui ne se battent que pour l'argent et les émoluments qu'ils peuvent obtenir. Mais la guerre libère aussi le pire de la condition humaine, à savoir le besoin de tuer pour survivre.

Il est bien connu que ce qui sépare un politicien ordinaire d'un homme d'État, c'est essentiellement sa capacité à gérer avec succès les éléments de défense et de sécurité, en premier lieu, à être capable de diriger les forces armées ; il est également fondamental de posséder le génie et la compétence pour mener la politique étrangère et les relations internationales. Tout le monde peut faire le reste, surtout s'il est bien conseillé. J'ai eu la chance de rencontrer le commandant en chef Fidel Castro, le plus grand génie militaire du XXe siècle en Amérique latine, et je sais de quoi je parle.

Je veux ici parler de la conduite de la guerre en Ukraine et sur l'élément décisif de la direction et du commandement stratégiques dans le conflit, qui ne se joue pas seulement sur le terrain de la guerre. D'une part, le président russe Vladimir Poutine a montré des signes clairs de sa capacité à gérer la guerre « comme une continuation de la politique par d'autres moyens ».


On ne peut pas en dire autant de ceux qui gèrent la guerre depuis l'autre côté. Lorsque le chef de la “diplomatie” européenne, Joseph Borrell, affirme que la fin du conflit interviendra sur le plan militaire, puis, plus récemment, assure que « la Russie a déjà perdu la guerre et est sur la défensive contre Kiev" » alors que la Russie a déjà conquis 27,2 % du territoire ukrainien - où, soit dit en passant, dans une bonne partie de celui-ci, la vie évolue vers la normalité sous le contrôle de la Russie - nous nous rendons compte que nous sommes confrontés à des niveaux très dangereux d'ignorance et de stupidité. Surtout, parce que cette vision des faits conduit à des décisions profondément erronées qui aboutissent au sacrifice inutile de milliers de soldats pour des intérêts politiques qui ne sont même pas liés à la rhétorique et à l'attirail traditionnels de l'Occident.

Lorsque l'on regarde la carte des opérations militaires, la récente “contre-offensive” ukrainienne tant vantée dans le sud, il est difficile de croire qu'une telle action a été planifiée par des militaires professionnels : une pénétration dans un secteur de défense russe, laissant les flancs ouverts et avançant en profondeur jusqu'à ce qu'il devienne impossible pour la logistique de remplir sa mission d'assurer les fournitures de combat nécessaires au succès, présageait un désastre... et ce fut le cas : 152 chars, 151 véhicules de combat d'infanterie, 110 véhicules blindés de combat, 56 camions blindés, 17 véhicules spéciaux, 11 avions de chasse de divers types et 3 hélicoptères détruits, et pire encore, 3100 soldats anéantis entre le 29 août et le 6 septembre, voilà le bilan de cette folie, motivée uniquement par la nécessité de montrer des résultats pour justifier l'arrivée et l'augmentation de l'aide occidentale, même s'il est évident que c'est une cause perdue. Il convient de noter que les médias occidentaux se sont massivement précipités pour intituler ce désastre «  Victoire épique des forces armées ukrainiennes », trompant leurs lecteurs en toute impunité.

Pendant ce temps, l'armée russe continue de concentrer ses efforts sur la reprise du contrôle de l'ensemble du territoire de Donetsk, en conservant les régions libérées des provinces de Kherson, Kharkov, Zaporojié et Nikolaïev. Au même moment, le président Poutine, le ministre de la Défense, le général Shoigu, et le chef d'état- major général des forces armées russes, le général Gerassimov, se sont rendus dans l'Extrême-Orient du pays pour inspecter sur place les manœuvres militaires Vostok 2022 qui se déroulent sur sept champs de tir et dans les mers du Japon et d'Okhotsk, et auxquelles participent quelque 50 000 soldats, plus de 5 000 unités d’armement lourd, 140 avions et 60 navires de Russie ainsi que d'Algérie, d'Arménie, d'Azerbaïdjan, de Biélorussie, de Birmanie, de Chine, d'Inde, du Kazakhstan, du Kirghizstan, du Laos, de Mongolie, du Nicaragua, de Syrie et du Tadjikistan.

Dans le cas de l'“offensive” ukrainienne dans le sud du pays, les dirigeants politiques (Zelensky, Biden, Johnson, Scholz, Macron, Borrell, Stoltenberg & Co), qui ne connaissent rien à la guerre, ont imposé aux forces armées le caractère obligatoire d'une opération militaire qui, dès le départ, n'avait aucune chance d'aboutir et qui a coûté la vie à 3100 jeunes Ukrainiens qui ont cru qu'ils étaient en train de se sacrifier pour la Patrie, alors qu'en réalité ils l'ont fait pour les intérêts commerciaux des grandes transnationales usaméricaines de l'énergie et de l'armement qui tirent d'énormes profits de cette guerre.

La vérité est donnée par des avis d'experts, dont aucun n'est l'ami de Poutine ou de la Russie. Lisons ce que certains d'entre eux disent. Au tout début de la guerre, dans une longue interview, Jacques Baud, colonel de l'armée suisse, expert en renseignement militaire et en service à l'OTAN et à l'ONU, à qui l'on demandait comment il évaluait l'offensive russe, répondait : « Attaquer un autre État est contraire aux principes du droit international. Mais il faut aussi tenir compte du contexte dans lequel s'inscrit une telle décision. Tout d'abord, il convient de préciser que Poutine n'est ni fou ni déconnecté de la réalité. C'est une personne méthodique et systématique, c'est-à-dire très russe. Je crois qu'il était conscient des conséquences de son opération en Ukraine. Il a estimé, manifestement à juste titre, que, qu'il s'agisse d'une "petite" opération pour protéger la population du Donbass ou d'une opération "massive" en faveur de la population du Donbass et des intérêts nationaux de la Russie, les conséquences seraient les mêmes. Il a donc opté pour la solution maximale ».

Dans un article paru mardi dans le Wall Street Journal, le général de brigade Mark Kimmitt, de l'armée usaméricaine, a affirmé : « Entamer un règlement diplomatique serait désagréable et pourrait sembler défaitiste, mais il y a peu de chances de sortir de l'impasse actuelle, il est donc peut-être préférable d'entamer les négociations maintenant plutôt que plus tard ». Kimmitt a rappelé que l'OTAN ne peut plus faire face à la nécessité de maintenir le rythme des livraisons d'armes à l'Ukraine car les forces ukrainiennes les perdent trop souvent sur le champ de bataille. Le général usaméricain a écrit qu'il pensait que la réduction des fournitures occidentales à Kiev aurait un effet "désastreux" sur l'armée ukrainienne.

Enfin, le général à la retraite et ancien secrétaire adjoint du Conseil de sécurité nationale et de défense de l'Ukraine, Serhiy Krivonos, a exprimé sa consternation face aux pertes “monstrueuses” de l'armée ukrainienne, qui, selon lui, se chiffrent par « dizaines de milliers, et pourraient même atteindre des centaines de milliers ». S'interrogeant sur les causes de cette situation et sur le refus des autorités et des médias occidentaux d'en parler, Krivonos écrit : « Les histoires selon lesquelles ce n'est pas le moment d'en parler ne sont rien d'autre qu'une tentative de brouiller la mémoire, d'effacer l'histoire. Mais comment pouvez-vous effacer le sang des morts, qui se comptent déjà par centaines de milliers ? Qui répondra de cela ? »

Pendant ce temps, le Washington Post, dans un article publié mardi 6 septembre, a été contraint d'affirmer que les militaires ukrainiens qui ont pris part à la tentative de contre-offensive dans la région de Kherson, dans le sud du pays, « se plaignent de lourdes pertes, du manque de munitions et du retard technologique par rapport à l'armée russe ». Le quotidien de la capitale impériale cite un soldat qui a déclaré que presque tous ses camarades, au nombre de 120, « ont été blessés, dont beaucoup grièvement ». Il a imputé cette situation à la nécessité d'économiser les munitions, mais a également écrit que lorsqu'ils ont tiré, « il était difficile d'atteindre les cibles en raison des problèmes liés aux systèmes de guidage des vieilles armes ». Le Post conclut que « de nombreux combattants des forces armées ukrainiennes doutent que la tentative en vaille la peine [face à] de telles pertes ».


Quelques jours avant que cela ne se produise sur le champ de bataille, Zelensky et sa femme ont posé pour le magazine Vogue, dont le dernier titre était : « Toutes les tendances minijupe pour l'automne et l'hiver 2022 ». Traiter la guerre comme s'il s'agissait d'un événement banal, de type showbiz, et supposer que la mort de tant de jeunes gens restera impunie en raison de l'irresponsabilité politique des dirigeants européens, cela fera partie des prochaines chroniques à écrire lorsque cette histoire sera terminée. Mais je ne pense pas que ce seront des minijupes que les soldats ukrainiens porteront au combat à l'approche du redoutable hiver boréal.